Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Je tiens à vous remercier, monsieur le rapporteur, madame la ministre, pour vos interventions qui me font vraiment chaud au cœur.
Le 23 février 2017, Colette Mélot et moi-même avions présenté un avis politique sur l’Erasmus des apprentis ; vous nous avez entendues. Cela me réjouit d’autant plus que cela fait des mois que nous nous battons pour que l’apprentissage à l’étranger soit non pas juste un voyage sympathique, mais bien une possibilité, pour ces jeunes, de connaître une expérience.
L’objectif que nous nous étions fixé était de 50 000 apprentis en 2020 ; je pense que nous n’y parviendrons pas, mais l’élan est donné, et c’est une bonne chose.
Je tiens surtout à rappeler que les jeunes qui passent par un apprentissage par le biais du programme Erasmus seront protégés du chômage du fait de leur réel acquis. Non seulement les échanges forment la jeunesse, mais ils offrent aussi une ouverture d’esprit et permettent de voir les choses de façon différente, ce qui est important.
Dans mon département, le Haut-Rhin, les échanges sont nombreux. Notre plus grand lycée, qui accueille plus de 2 500 élèves, a déjà conclu des partenariats avec l’Allemagne et la Suisse. Je vous engage donc, madame la ministre, à faire un déplacement chez nous, à Saint-Louis, dans notre département frontalier.
Les membres de mon groupe voteront naturellement cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Alors que l’on nous a reproché d’ouvrir des débats sur les licenciements boursiers ou les temps partiels, j’ai bien l’impression qu’on ouvre à présent un autre débat : celui sur l’apprentissage. Alors, soyons clairs : nous ne sommes pas contre la mobilité internationale des jeunes et, en particulier, des apprentis.
En revanche, il s’agit tout de même d’un amendement ambitieux, puisqu’il vise à instaurer de nouvelles normes en matière de droit du travail, ce qui crée son lien avec le texte en discussion. J’estime pour ma part qu’il est quelque peu compliqué d’en débattre en quelques minutes. C’est pourquoi, dans l’attente de l’inscription à l’ordre du jour de la réforme de la formation professionnelle et, en particulier, de l’apprentissage qui a été annoncée par le Gouvernement, nous ne participerons pas au vote.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Monsieur Watrin, vous avez complètement raison : le sujet de l’apprentissage sera traité dans le cadre des projets de loi qui seront présentés prochainement par le Gouvernement.
Si je défends cet amendement aujourd’hui, à la suite du rapport de M. Arthuis et en accord avec lui, c’est simplement parce que les fonds Erasmus ne peuvent être mobilisés que jusqu’au 31 janvier de cette année. Dès lors, si l’on n’inscrit pas dans la loi dès à présent des dispositions permettant ces échanges d’apprentis, ceux-ci ne pourront pas avoir accès à ce programme cette année. C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement sur ce texte. Je salue évidemment le travail important de M. Arthuis sur ce sujet, mais cette raison de calendrier est essentielle.
Un autre point est important : l’adoption de cet amendement au sein de ce texte enverra un signal positif à l’Union européenne et à ses États membres. C’est tout pour aujourd’hui ; le reste viendra par la suite.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 190, présenté par M. Milon, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6525-5 du code des transports est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, la référence : « L. 3123-2 et » est remplacée par la référence : « L. 3123-1 à » ;
2° Le second alinéa est supprimé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Non seulement la sixième ordonnance, publiée le 20 décembre 2017, comporte de nombreuses coordinations rendues nécessaires par les modifications apportées au code du travail par les cinq ordonnances du 22 septembre 2017, mais elle modifie aussi le fond du droit sur plusieurs points, souvent en l’assumant, parfois de manière subreptice.
C’est le cas avec l’introduction, pour la première fois dans la loi, d’une définition du travail à temps partiel des personnels navigants du transport aérien comme toute durée de travail annuelle inférieure à 235 jours d’activité, sauf si un accord collectif en dispose autrement.
Il apparaît que cette disposition n’a fait l’objet d’aucune concertation avec les organisations syndicales intéressées ou les organisations professionnelles du secteur. En outre, eu égard au seuil légal retenu, un grand nombre de salariés du secteur deviendrait des salariés à temps partiel. De ce fait, serait ouverte une brèche dans le modèle de protection sociale et d’affiliation obligatoire de l’ensemble des navigants à la caisse de retraite des personnels navigants, ou CRPN, puisque les périodes d’inactivité sans solde liées au travail à temps alterné ne donnent pas lieu au versement de cotisations. Par ce biais, la concurrence sociale déloyale qu’entraînerait l’arrivée de nouveaux entrants pourrait fragiliser le secteur et affaiblir les droits des salariés en place.
Il convient donc de supprimer cette disposition et de renvoyer la définition du travail à temps partiel des navigants à une concertation avec leurs représentants, sous l’égide du ministère des transports.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il est favorable ; évidemment, le ministère des transports et le ministère du travail ont la même position sur le sujet.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 157, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Par dérogation aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 1242-5 du code du travail, l’interdiction de recourir à des contrats à durée déterminée ne s’applique pas aux collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy pendant les six mois suivant un licenciement pour motif économique notifié à la suite des circonstances exceptionnelles climatiques survenues le 6 septembre 2017.
II. – Dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, l’employeur invite, par tout moyen conférant date certaine, le salarié à reprendre son poste de travail dans un délai qu’il fixe et ne pouvant être inférieur à quinze jours. En cas de refus du salarié ou d’absence de réponse ainsi qu’en cas d’impossibilité pour ce dernier de revenir à son poste de travail, l’employeur peut engager une procédure de licenciement. L’impossibilité de reprendre le poste de travail constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement. Celui-ci est prononcé dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail relatives à la rupture du contrat de travail pour motif personnel, à l’exception des dispositions prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-4 et L. 1234-1 à L. 1234-5 du même code.
Le salarié bénéficie de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 dudit code et de l’indemnité de congés payés prévue à l’article L. 3141-28 du même code.
L’employeur doit remettre aux salariés les documents mentionnés aux articles L. 1234-19 et L. 1234-20 du même code.
Le présent II est applicable aux employeurs de droit privé établis dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, à compter de la promulgation de la présente loi et ce jusqu’au 31 décembre 2018.
III. – Dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, par dérogation aux articles L. 1232-2 et L. 1233-11 du même code, l’employeur qui envisage de licencier un ou plusieurs salariés à la suite de circonstances exceptionnelles climatiques survenues le 6 septembre 2017, n’est pas tenu de les convoquer à un entretien préalable lorsqu’il se trouve dans l’impossibilité matérielle de procéder à cet entretien.
Le présent III est applicable à compter de la promulgation de la présente loi et ce jusqu’au 31 décembre 2018.
IV. – Dans les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, le salarié qui n’obtient pas de réponse de son employeur dans un délai de quinze jours, après l’avoir contacté par tout moyen conférant date certaine, demande à la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Guadeloupe de constater la carence de l’employeur. Après avoir mené les investigations nécessaires, la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Guadeloupe atteste, dans un délai de quinze jours, cette carence. Cette attestation entraîne la rupture du contrat de travail à la date de notification aux parties en cause. Cette rupture produit les effets d’un licenciement. L’absence de réponse de l’employeur constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement. Les dispositions du code du travail relatives à la procédure de licenciement ne sont pas applicables.
Le salarié bénéficie de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 du même code et de l’indemnité de congés payés prévue à l’article L. 3141-28 du même code. À défaut de versement par l’employeur, ces indemnités sont couvertes par l’assurance prévue à l’article L. 3253-6 du même code.
Le présent IV est applicable aux employeurs de droit privé établis dans les collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, à compter de la promulgation de la présente loi et ce jusqu’au 31 décembre 2018.
V. – Les employeurs exerçant leur activité dans les collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy sont dispensés de la contribution prévue à l’article L. 1233-69 du même code pour les salariés ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle entre le 6 septembre 2017 et le 5 septembre 2018.
Un avenant à la convention pluriannuelle mentionnée à l’article L. 1233-70 du même code entre l’État et l’organisme chargé de la gestion du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 du même code traite les conséquences de cette dispense sur le financement du parcours de retour à l’emploi mentionné à l’article L. 1233-65 du même code et des mesures qu’il comprend.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Ce dernier amendement concerne Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
J’étais au mois de décembre aux Antilles, et j’ai passé à cette occasion un peu de temps sur l’île de Saint-Martin. J’ai pu y constater l’extraordinaire mobilisation de nos concitoyens pour nettoyer et tout remettre en ordre de marche après l’ouragan. J’ai aussi vu à quel point la reprise était difficile. En effet, la saison touristique y commence au mois de novembre ; elle a par conséquent été, cette année, quasi impossible à réaliser. En outre, les reconstructions sont lentes et difficiles, pour différentes raisons techniques et d’assurance que je ne détaillerai pas aujourd’hui. La situation à laquelle nous faisons face à Saint-Martin est donc grave.
C’est pourquoi, dès l’ouragan passé, j’avais demandé à la direction des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi de Saint-Martin, la DIECCTE, de mettre en œuvre les possibilités légales d’activité partielle, c’est-à-dire, en langage courant, de chômage technique. Ces dispositions sont néanmoins prévues pour des durées plus courtes qu’une année entière. Dès lors, ayant pris la mesure de la situation, je me suis engagée vis-à-vis des autorités locales, des employeurs et des salariés pour qu’on puisse prolonger ces dispositifs et faire ainsi le pont jusqu’au redémarrage de la saison touristique en novembre prochain.
Tout l’enjeu pour Saint-Martin est de reconstruire suffisamment pour qu’en novembre ou décembre prochain la saison touristique puisse redémarrer. Cela seul pourra sauvegarder l’emploi ; sinon, l’emploi à Saint-Martin sera très endommagé durablement.
Le deuxième sujet qui m’a paru d’une importance évidente est celui du contrat de sécurisation professionnelle pour les entreprises. Nous avons souhaité que, dans ce contexte d’exception, les entreprises qui doivent licencier des salariés pour motif économique soient exonérées du financement de ce contrat. Cela a sauvé plusieurs entreprises et plusieurs centaines d’emplois sur l’île. Il faut voir la situation que vivent à la fois les entreprises et les salariés ; je pense donc que ce sera une bonne chose.
Troisièmement, il fallait une adaptation temporaire du droit du travail. Saint-Martin vit actuellement et, là encore, de façon temporaire, des situations insolubles en droit. En effet, certains salariés ont complètement perdu leur entreprise. Ils n’ont plus d’employeur et ne peuvent donc pas être licenciés et bénéficier de l’assurance chômage. C’est kafkaïen ! Le problème inverse existe aussi. C’est pourquoi, dans les deux cas, nous entendons adapter provisoirement le droit du travail pour prendre en considération toutes les situations et, surtout, pour sauvegarder le plus possible d’emplois par le recours le plus fréquent possible à l’activité partielle. Nous éviterons ainsi la mise au chômage de milliers de nos concitoyens et nous faciliterons également la vie des entreprises et des salariés.
Je vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter, par le biais de cet amendement, une adaptation temporaire du droit du travail visant à aider Saint-Martin à repartir de l’avant.
J’ai également pu, à cette occasion, proposer la création d’un centre de formation d’apprentis à Saint-Martin, qui n’en dispose pas actuellement. J’anticipe quelque peu sur ce point. Il y a beaucoup à faire dans le tourisme comme dans la construction, du fait de la reconstruction nécessaire. Nous avons aussi renforcé les moyens du service public. Ces deux dernières mesures ne sont pas comprises dans l’amendement en discussion, mais je voulais insister sur ce point, car je crois que nous avons un devoir de solidarité envers Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Favorable, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.
M. Guillaume Arnell. Ce n’est pas à proprement parler une explication de vote : en tant qu’élu du territoire de Saint-Martin, je souhaite tout d’abord vous remercier, madame la ministre, de m’avoir associé en amont à la préparation de votre visite sur l’île, ce qui nous a permis de vous éclairer sur certaines difficultés et sur la nécessité d’apporter de vraies réponses aux acteurs économiques, qui n’en attendaient pas moins.
J’avais évoqué ici même combien il était nécessaire que le Gouvernement offre des réponses et un accompagnement à la hauteur des dégâts occasionnés par l’ouragan Irma. Or il m’apparaît que vous faites réellement preuve d’une attention toute particulière. C’est pourquoi je souhaite vous remercier en mon nom, mais également au nom de l’ensemble des acteurs économiques du territoire de Saint-Martin et, par extension, de Saint-Barthélemy. Je m’interdis parfois de m’exprimer au nom de mon collègue de Saint-Barthélemy, mais je crois que le Gouvernement a fait preuve d’initiative et je saurais relayer cette façon de voir les choses.
Je veux aussi remercier l’ensemble des membres de la commission des affaires sociales, qui a émis ce matin, à l’unanimité, un avis favorable sur cet amendement.
Enfin, merci encore, madame la ministre, pour votre bienveillance à l’égard des sinistrés de Saint-Martin !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Catherine Fournier, pour explication de vote.
Mme Catherine Fournier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat va très vraisemblablement ratifier ces ordonnances ; c’est en tout cas le vœu de mon groupe. Nous terminerons ainsi, madame la ministre, l’examen de la première partie de votre réforme de notre modèle social.
La discussion de ces 200 amendements a confirmé que, en matière de droit du travail, il y a réellement deux visions qui s’opposent.
Certains voient l’entreprise comme un lieu de conflit entre salariés et employeurs, dont les relations ne seraient basées que sur un rapport de suspicion et de force. Le dialogue social ne se justifierait que pour protéger les salariés d’une menace, les employeurs ne se soucieraient que de leur profit, avec la complicité du pouvoir.
D’autres, dont je fais partie, avec les membres de mon groupe et, plus largement, de la majorité sénatoriale, croient au contraire qu’il faut pouvoir avoir confiance dans l’intelligence collective de ces communautés que sont les entreprises, confiance dans la capacité qu’ont les femmes et les hommes qui y travaillent, salariés comme employeurs, à comprendre qu’ils ont des intérêts communs et qu’ils doivent agir en conséquence.
Faire confiance ne signifie pas pour autant être naïf. Oui, la violence existe dans les entreprises, violence physique, violence morale, violence économique. Oui, les abus existent, chez les employeurs, chez les salariés, parfois même chez les syndicats. La violence et les abus existent dans les entreprises comme partout ailleurs. Il faut donc prévoir des garde-fous pour que les communautés dont je parlais résistent aux comportements néfastes et aux attitudes individualistes.
Comme en toute chose, il y a un équilibre à trouver : c’est une centriste qui vous le dit. Je trouve pour ma part ces ordonnances équilibrées. Elles confèrent aux entreprises la souplesse nécessaire pour s’adapter, elles encouragent le dialogue entre salariés et employeurs sans pour autant renier les missions des représentants syndicaux, et elles protègent plus efficacement. Ce n’est peut-être pas suffisant, mais c’est à mes yeux un signal fort.
Continuez dans cette voie, madame la ministre ! Nous vous donnons rendez-vous dans quelques mois pour aborder le second volet de votre réforme, sans doute le plus important : celui de la protection et de l’accompagnement des salariés.
Je tiens également à vous remercier, ainsi que M. le président-rapporteur de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, l’emploi industriel en France représente 14 %, contre 26 % en Allemagne, et près de 80 % de CDD. Ce projet de loi apporte de la flexibilité aux entreprises et de la sécurité aux salariés et il permettra aux entreprises d’embaucher désormais des salariés en CDI. Il revêt donc une réelle importance pour les PME de moins de 50 employés. Il crée une possibilité de négociation par un accord collectif sans délégué syndical ; s’il y en a un, celui-ci conserve ses prérogatives.
Le comité social et économique, qui est une fusion des délégués du personnel, du comité d’entreprise et du CHSCT, conserve toutes les prérogatives de ces structures, contrairement à ce qui a été affirmé lors de la discussion des articles. C’est principalement vrai pour le CHSCT. Par ailleurs, cela laisse une grande liberté aux partenaires sociaux et donne la possibilité de transformer le CSE en conseil d’entreprise.
Qui plus est, ce projet de loi permet une augmentation des indemnités de licenciement, si, malheureusement, cette situation survient, et encadre, en cas de conflit, les indemnités prud’homales. Cela se traduira par moins de litiges et par plus d’équité sur le territoire, par plus de justice pour les salariés et plus de sécurité pour les employeurs.
Dans le C3P, plusieurs facteurs étaient ingérables, notamment pour les PME. Ils ont été retirés et le C2P, le compte professionnel de prévention, conserve les mêmes prérogatives que le C3P pour ce qui concerne la formation, le départ anticipé à la retraite, le travail à mi-temps. À cette fin, six critères identifiés ont été conservés.
Le CDI de chantier intéressera les PME. La rupture conventionnelle collective accompagne les départs volontaires ; il ne s’agit pas d’un licenciement déguisé, puisqu’il faut un accord des syndicats représentant plus de 50 % des salariés et l’assentiment des salariés concernés.
Ce projet de loi adapte bien le droit du travail à la diversité des entreprises, notamment des PME et TPE. Il faut donc que les acteurs économiques s’approprient cette réforme, qui est utile pour les salariés et qui apporte de la stabilité aux entreprises par le dialogue et le travail ensemble.
Notre économie et les entreprises doivent devenir compétitives. Pour cela, il faut aussi privilégier la formation professionnelle, notamment grâce à l’apprentissage, car de nombreux emplois restent vacants.
L’adoption de ce projet de loi renforçant le dialogue social constitue un élément important pour aller vers le plein-emploi. C’est pourquoi le groupe Les Indépendants – République et Territoires le votera et remercie Mme la ministre et M. le président de la commission des affaires sociales de leur implication.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Les Républicains votera ce projet de loi modifié par le Sénat.
Je tiens à remercier le président-rapporteur de la commission des affaires sociales de la qualité de son travail. Je veux également saluer votre écoute, madame la ministre, notamment lors de vos échanges avec la commission des affaires sociales.
Comme cela a été évoqué lors de la discussion générale, nous accompagnerons cette réforme, que nous saluons, mais nous aurions voulu aller plus loin dans la refonte du code du travail, notamment son volet social. Je pense en particulier à l’évolution des seuils sociaux, sujet qui a été abordé au cours de ce débat et qui constitue l’une des orientations des évolutions à venir.
J’ai bien entendu que nous aurions l’occasion de revenir sur ces points, dans les prochains mois, à travers différents textes. Sachez toutefois, madame la ministre, que cela fait partie de nos préoccupations, dans l’intérêt de l’économie française comme dans celui de l’emploi.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen de ce projet de loi. Nous regrettons le peu d’écho qu’ont eu nos débats, alors que nous nous apprêtons à voter un texte qui va profondément bouleverser le droit du travail. Comme nous avons eu l’occasion de le souligner, l’application depuis le 1er janvier de certaines dispositions des ordonnances explique certainement ce manque d’intérêt.
Ces cinq ordonnances généralisent pourtant l’inversion de la hiérarchie des normes entre l’accord d’entreprise et l’accord de branche, suppriment le principe de faveur dans bien des domaines et flexibilisent le travail. Les conséquences concrètes de ces décisions dans la vie des travailleurs se font d’ailleurs déjà sentir dans les entreprises.
La mise en place des barèmes des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif, la restriction du périmètre d’appréciation de la cause économique des licenciements au territoire national, la création des ruptures conventionnelles collectives, la fusion des instances représentatives du personnel sont autant de mesures régressives qui réduisent les protections des salariés et sécurisent, parfois abusivement, les employeurs.
Même si l’on peut saluer son climat serein, le débat que nous avons eu durant deux jours a confirmé le clivage que j’avais dénoncé lors de la discussion générale. Loin d’être un texte équilibré, ce projet de loi, qui s’inscrit dans le sillon tracé par la loi El Khomri, n’a aucunement été modifié, même à la marge, malgré les cinquante amendements que nous avons déposés et ceux qui ont été défendus par d’autres groupes : tous ont été systématiquement rejetés. Ce texte se trouve donc confirmé dans sa brutalité à l’égard des droits des salariés.
Les amendements qui visaient à proposer des solutions de remplacement ont tous été repoussés par la majorité du Sénat. Ils avaient pourtant pour objet la modernisation des normes permettant de s’attaquer aux nouveaux enjeux liés à la précarité à outrance du salariat, au développement des sciences et techniques et à leur impact sur l’organisation du travail, à la santé au travail, aux nouveaux pouvoirs des salariés dans l’entreprise pour briser la logique financière destructrice d’emplois.
Nous n’en sommes pas surpris, mais nous le regrettons vivement. Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera résolument contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, je joins mes remerciements à ceux qui vous ont été adressés. Nous avons fait la preuve que les convictions pouvaient s’exprimer avec force, que le débat pouvait avoir lieu et que l’humour y trouvait même de temps en temps sa place, ce qui ne gâte rien. À mon sens, la démocratie en sort grandie.
Il n’en reste pas moins que mes convictions demeurent, identiques. Madame la ministre, l’édifice que vous nous avez présenté a au moins le mérite de la cohérence. L’ennui, c’est qu’il repose sur des fondations de sable. Je le répète, vous partez de l’axiome selon lequel la négociation permettra de générer de la confiance, car elle sera établie sur des rapports équilibrés entre les salariés et l’employeur. Or vous avez enlevé les moyens de cet équilibre et supprimé l’obligation que l’entreprise compte un représentant syndical ou un salarié mandaté. Les relations de subordination sont telles qu’il y a de grands risques que des pressions fortes soient exercées et que l’employeur parvienne à ses fins sans trop de difficultés.
La loi El Khomri aurait mérité d’être évaluée. Elle a en effet permis en 2016 et en 2017 la création d’un nombre important d’emplois dans toutes les régions de ce pays. C’est dire si elle n’avait pas tous les défauts que vous avez bien voulu lui prêter.
Le projet de loi que nous venons d’examiner est une régression en matière de sécurité des salariés. En effet, ceux-ci ne seront pas assurés de conserver leurs salaires, leurs conditions de travail, leurs primes, ni même leurs horaires. Ils ne sont d’ailleurs même pas sûrs de conserver leur emploi !
Ce texte est également un recul en termes de vigilance apportée aux conditions de travail, à la santé, à la sécurité. C’est aussi une régression quant au droit à une indemnisation juste pour préjudice subi. C’est encore une régression eu égard aux contrats de travail.
Globalement, c’est une régression par rapport à la situation antérieure, ce qui est tout à fait regrettable. Par conséquent, nous voterons contre ce projet de loi.