M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 545 est présenté par M. Iacovelli, Mme Guillemot, MM. Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot, Temal et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 957 rectifié est présenté par MM. Labbé et Dantec, Mme N. Delattre, M. Guérini et Mme Laborde.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 4
Supprimer les mots :
après le mot : « stationnement », sont insérés les mots : « et, dès lors que la commune ne fait pas l’objet d’un arrêté au titre de l’article L. 302-9-1 du code de la construction et de l’habitation, aux règles adoptées en application de l’article L. 151-15 du présent code, » et,
La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 545.
M. Xavier Iacovelli. Le projet de loi veut encourager la transformation des bureaux vacants en logements. Nous sommes favorables au « bonus de constructibilité » de 30 %, c’est-à-dire à des droits à construire supplémentaires.
En revanche, l’article 9 bis permettra également de passer outre les obligations de mixité sociale prévues par les plans locaux d’urbanisme, sauf dans les communes carencées en logements sociaux. Les servitudes de mixité sociale intégrées dans les PLU traduisent une volonté politique des élus de favoriser la production de logements sociaux sur leur territoire.
Permettre cette dérogation n’a donc aucun sens. Par ailleurs, c’est considérer que la réalisation de logements sociaux est un frein à la production de logements. Ce type de raisonnement n’est plus acceptable dans un pays qui manque de logements à des prix abordables pour la plupart des Français.
Les mesures incitatrices pour transformer les locaux de bureaux en logements ne doivent pas se faire au détriment du logement social et de la mixité. Il s’agit donc de supprimer cette dérogation.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 957 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Le projet de loi prévoit de faciliter la transformation de bureaux en logements, objectif essentiel que je ne peux que partager.
Rappelons que le stock de bureaux non utilisés était évalué à près de 3,5 millions de mètres carrés en Île-de-France, en 2017.
Toutefois, pour atteindre cet objectif, est accordée la possibilité de déroger aux servitudes de mixité sociale prévues par les PLU, sauf dans le cas des communes faisant l’objet d’un arrêté préfectoral de carence. Cette disposition nous semble contraire aux objectifs de mixité sociale et à l’esprit de la loi SRU.
En effet, les communes carencées ne représentent qu’une partie des communes qui sont en dessous des 25 % de logements sociaux. Elles invoquent souvent, comme justification de cette situation, le manque de foncier pour construire des logements sociaux. Or la transformation de bureaux permettrait bien de dégager des espaces pour construire des logements sociaux dans ces zones tendues.
Cet amendement vise donc à réintroduire la servitude de mixité sociale dans le cadre des opérations de conversion de bureaux en logements.
M. le président. L’amendement n° 137, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement va dans le même sens que ceux qui viennent d’être présentés. La transformation de bureaux en logements est un objectif que nous partageons, tant nous ne pouvons que déplorer le nombre de bureaux vacants dans notre pays. Ces locaux sont bien plus utiles en étant transformés en logements, plutôt qu’en restant à l’abandon.
Pour autant, nous contestons le fait que, pour faciliter cette conversion, il soit permis de déroger aux règles de mixité sociale définies dans le cadre du plan local d’urbanisme. L’objectif de mixité sociale constitue une valeur primordiale de cohabitation sociale dans nos sociétés démocratiques, induisant un impératif de « vivre ensemble ». S’il semble raisonnable de déroger à des règles de hauteur ou de gabarit tenant à la structure même du local, renoncer aux ambitions en matière de mixité sociale ne semble pas acceptable.
Cet amendement vise donc à réintroduire l’obligation du respect de l’exigence de mixité sociale pour les dérogations au PLU, permise par le présent article, pour les communes ayant un fort enjeu de densification, et de réponse aux besoins de logement.
Dès lors, l’adoption de cet amendement permettrait de faire de cet « objectif de mixité sociale » une condition non négociable, en la prévoyant pour l’ensemble des cas de figure indiqués à l’article L. 152-6 du code de l’urbanisme, qui énonce les possibilités de dérogations au PLU.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je rappelle que la dérogation accordée dans le projet de loi ne remet absolument pas en cause la volonté des élus de promouvoir la mixité sociale dans leurs plans locaux d’urbanisme.
De plus, la dérogation vise non les constructions nouvelles, mais la transformation de bureaux en logements. Les prescriptions du PLU continuent à s’imposer aux autres projets, y compris à l’échelle des programmes, et la décision d’accorder ou non cette dérogation est bien prise par le maire.
Par conséquent, les servitudes de mixité sont toujours applicables à l’échelle de la commune. Cette dérogation encadrée reste un outil à la disposition des maires dans les zones tendues, pour encourager la construction en logements, ce qui me semble indispensable.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Les servitudes à l’échelon de la commune ne sont aucunement remises en cause !
Monsieur Iacovelli, vous affirmez que, avec ce projet de loi, lorsque l’on construira, l’on n’aura plus besoin d’avoir, au titre de l’opération, de la servitude. Ce n’est pas du tout ce que prévoit le texte.
C’est uniquement en cas de transformation de bureaux vacants en logements, dans le cadre de cette opération, qu’il sera possible de déroger aux servitudes. Pourquoi ? Il faut appeler un chat un chat : aujourd’hui, nous constatons tous que des dizaines de milliers de mètres carrés de bureaux vacants ne sont jamais transformés en logements. Il y en a bien un tout petit peu, mais guère plus que l’épaisseur du trait. Il faut donc partir de l’existant pour comprendre ce que nous essayons de faire.
Nous avons beaucoup travaillé pour savoir comment faire pour rendre enfin des opérations possibles. Il est en effet bien plus compliqué de transformer des bureaux en logements que de lancer une opération de logements neufs.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Bien sûr !
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Je prendrai un exemple très concret. Un bâtiment de bureaux est beaucoup plus large qu’un bâtiment destiné au logement. Aussi tout le centre de ce bâtiment se trouve-t-il inoccupé.
Voilà quelques semaines à peine, j’étais avec des promoteurs qui avaient réalisé des opérations de ce type : ils avaient transformé cet espace central en caves ; une solution a donc été trouvée par cette idée innovante. D’autres créent des puits de lumière. Reste que tout cela représente un coût supplémentaire au mètre carré.
Pour permettre ces transformations, nous avons essayé, de manière pragmatique, de donner les moyens nécessaires. En aucun cas, comme l’a très justement précisé Mme la rapporteur, cela ne remet en cause les servitudes à l’échelon de la commune. D’ailleurs, nous avons suffisamment exprimé notre attachement à la loi SRU pour que vous croyiez à la sincérité de mes propos.
M. François Patriat. Excellent !
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 545 et 957 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 9.
(L’article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 9
M. le président. L’amendement n° 138, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase du IV de l’article 232 du code général des impôts, les taux : « 12,5 % » et « 25 % » sont respectivement remplacés par les taux : « 50 % » et « 100 % ».
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Pour prolonger nos débats sur la question des bureaux vacants, nous voulons aborder la question des logements vacants, par le renforcement de la taxe qui affecte ses logements en zones tendues, marquées par un fort déséquilibre entre l’offre et la demande. Nous reprenons en réalité une proposition formulée par la Ville de Paris, le 17 juin 2017, dans un vœu du conseil municipal.
Il y a environ 100 000 logements vacants dans la capitale, 3 millions à l’échelle du pays, et ce alors que la demande est forte et la pénurie de logements évidente. Je rappelle que 2 millions de personnes sont dans l’attente d’un logement social.
Le 15 décembre 2016, une taxe sur les logements vacants, la TLV, a été créée. Je rappelle qu’elle ne concerne que les villes de plus de 50 000 habitants où existent des difficultés d’accès au logement. Le montant actuel de cette taxe à Paris, par exemple, est en moyenne de 1 000 euros la première année et de 2 000 euros la deuxième année, ce qui représente 12,5 % de la valeur locative du bien la première année et 25 % la deuxième année.
Quadrupler le montant de cette taxe serait un moyen de remettre un certain nombre de ces logements vacants sur le marché locatif afin de répondre à la demande sociale.
Nous rappelons évidemment que de nombreuses dérogations sont possibles, notamment si la vacance ne résulte pas de la volonté délibérée du propriétaire ou si les travaux devant être réalisés pour rendre le logement décent sont trop importants. Il s’agit donc bien de lutter uniquement – uniquement ! – contre la vacance spéculative.
Il n’est pas concevable qu’il soit aujourd’hui plus rentable pour certains propriétaires de conserver des logements vacants plutôt que de les mettre sur le marché. Il est donc nécessaire, comme nous le proposons, d’augmenter la taxe sur ces logements vacants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Là encore, je ne porterai pas de jugement sur le fond,…
M. Philippe Dallier. Encore que… Vous le pourriez ! (Sourires.)
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. … puisque cet amendement concerne la fiscalité sur les logements vacants. Je vous inviterai simplement, cette disposition étant d’ordre fiscal, à en discuter lors de l’examen du projet de loi de finances.
La commission demande aux auteurs de cet amendement de le retirer ; à défaut, elle émettra un avis défavorable. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. J’émettrai également un avis défavorable, car je pense foncièrement que cet amendement n’est pas opérationnel.
Il existe aujourd’hui deux types de taxes.
La première, la taxe que vous évoquez, s’applique aux logements vacants. Il faut la maintenir. Malheureusement, elle ne fonctionne pas très bien, voire pas du tout. En tout cas, si elle fonctionnait bien, cela se saurait ! Aussi, je comprends votre souhait de l’augmenter.
La seconde taxe est la taxe d’habitation, applicable aux logements habités. Or il est très facile de déclarer un logement vacant en logement habité. Il suffit pour cela de déclarer que son conjoint y vit.
Si le montant de la taxe sur les logements vacants venait à dépasser celui de la taxe d’habitation, ce qui serait le cas si on quadruplait le montant de la taxe sur les logements vacants, celle-ci deviendrait totalement inopérante. Aujourd’hui, le montant de cette taxe est quasiment aligné sur celui de la taxe d’habitation. (M. Michel Savin s’exclame.)
Je le répète, si on augmente la taxe sur les logements vacants, le risque est que les propriétaires déclarent que leur bien est occupé par leur épouse ou leur enfant, car il sera plus intéressant pour eux d’être assujetti à la taxe d’habitation.
Nous avons réfléchi à votre amendement, dont nous comprenons l’esprit, mais il est inapplicable.
M. Michel Savin. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 679 rectifié ter est présenté par MM. Dallier et Bascher, Mmes Chain-Larché, Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi, Dumas et Eustache-Brinio, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Lamure, MM. Lefèvre, H. Leroy et Mandelli, Mme Micouleau, MM. Milon, Rapin, Savin et Sido et Mme Thomas.
L’amendement n° 901 rectifié bis est présenté par M. D. Dubois et Mme Létard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’article L. 151-15 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « urbaniser, » sont insérés les mots : « sauf dans les communes comptant déjà plus de 35 % de logements locatifs sociaux, au sens de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le maître d’ouvrage d’un programme de logements peut proposer à l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme des solutions alternatives permettant de respecter le pourcentage défini en application du premier alinéa par d’autres moyens que la cession de logements du programme concerné à des organismes d’habitation à loyer modéré dans les conditions prévues à L. 433-2 du code de la construction et de l’habitation. » ;
2° La seconde phrase du 2° de l’article L. 151-28 est complété par les mots : « ; cette majoration est de droit dans les secteurs visés par l’article L. 151-15 du présent code ».
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l’amendement n° 679 rectifié ter.
M. Philippe Dallier. Cet amendement traite des servitudes de mixité sociale, les SMS, qu’il ne s’agit pas de remettre en cause, car elles sont un outil intéressant, utilisé dans les plans locaux d’urbanisme et dans les plans locaux d’urbanisme intercommunaux, pour imposer dans certains secteurs la construction d’un nombre minimal de logements sociaux, exprimé soit en mètres carrés, soit en nombre de logements.
Cela étant dit, il va falloir se demander si, dans certains secteurs, ces servitudes ne vont pas poser des problèmes à la suite de la réforme du logement social, ou plutôt de la raréfaction des moyens de celui-ci. Il est à craindre que les bailleurs sociaux ne finissent par arbitrer entre plusieurs opérations, qu’ils choisissent de faire les unes et non les autres. Certaines opérations pourraient ne pas se faire, faute de bailleur, tout simplement. Je pense que cette question va se poser.
Monsieur le secrétaire d’État, j’entends déjà votre argumentaire : Tout ira bien, grâce aux mesures prises en contrepartie, on construira plus, etc. Honnêtement, moi, je n’y crois pas. Je pense que nous connaîtrons des difficultés dans certains secteurs.
Maintenir les servitudes de mixité sociale reviendrait à geler certaines opérations. Aussi, je propose, mais peut-être pourrons-nous en discuter au cours de la navette, de supprimer ces servitudes dans les villes comptant déjà plus de 35 % de logements sociaux, ce qui est un taux relativement élevé, vous en conviendrez.
Mon amendement vise ensuite, dans sa deuxième partie, à prévoir un dispositif pour les petites opérations, comme je l’ai fait dans ma commune, où j’ai fixé dans le plan local d’urbanisme un taux minimal de 30 % de logements sociaux dès lors que l’opération compte au moins 20 logements. Il va peut-être finir par être difficile de trouver un bailleur pour six ou sept logements.
Mme Michèle Vullien. On trouve !
M. Philippe Dallier. On trouve, mais pas forcément partout, ma chère collègue, et peut-être pas dans les conditions que nous allons peut-être connaître.
La troisième partie de l’amendement vise, en cas d’application de la servitude de mixité sociale, à rendre automatique le bonus de constructibilité, car il semble que ce ne soit pas toujours le cas dans la pratique.
M. Philippe Mouiller. Bravo !
M. le président. L’amendement n° 901 rectifié bis n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 679 rectifié ter ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. M. Dallier l’a rappelé, les SMS sont un outil important mis à la disposition des maires pour mener à bien leur politique de l’habitat. Cela étant dit, ils ne servent pas uniquement à leur permettre d’atteindre les objectifs fixés dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
M. Philippe Dallier. Je n’ai pas dit cela !
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Dès lors, je ne vois pas pourquoi on priverait les communes méritantes, vertueuses, celles qui comptent déjà plus de 35 % de logements sociaux, de l’outil que sont les SMS.
En plus, monsieur Dallier, vous ne dites pas quelles alternatives à la vente en l’état futur d’achèvement pourraient être trouvées.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement. (Mme Cécile Cukierman s’exclame.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je ne parle pas des communes carencées.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je n’ai pas parlé des communes carencées !
M. Philippe Dallier. Ce n’était pas si clair.
Je suis un peu étonné, madame la rapporteur, que nous ne soyons pas tout à fait d’accord sur ce sujet. Si on pense la mixité sociale de manière globale et dans les deux sens, il faut reconnaître qu’un taux de 35 % de logements sociaux est élevé. Car il y a le logement social officiel, mais aussi le logement social de fait, dont on pourra reparler.
Je n’ai pas détaillé la deuxième partie de mon amendement, et je vous prie de m’en excuser. Elle vise à traiter le cas des petites opérations, dans lesquelles il faut trouver un bailleur pour six ou sept logements. Il s’agit de leur permettre d’arriver au même nombre de logements sociaux sur deux ou trois opérations en traitant à part l’une d’entre elles. Je ne sais pas si je suis très clair…
Je le répète, les servitudes de mixité sociale sont un outil intéressant et fort utilisé, mais je crains que les nouvelles conditions imposées aux bailleurs sociaux ne posent des difficultés à l’avenir.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 679 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 9 bis A (nouveau) et article additionnel après l’article 9 bis A (réservés)
M. le président. Je rappelle que l’article 9 bis A et l’amendement portant article additionnel après l’article 9 bis A ont été réservés jusqu’avant l’article 46 bis.
Article 9 bis
Il est institué, sur l’ensemble du territoire et à titre expérimental, un dispositif visant à assurer la protection et la préservation de locaux vacants par l’occupation de résidents temporaires, notamment à des fins de logement, d’hébergement, d’insertion et d’accompagnement social.
Sont agréés par l’État, au vu de leurs compétences à mener des travaux d’aménagement et à organiser l’occupation de bâtiments par des résidents temporaires, les organismes publics, les organismes privés ou les associations qui mettent en place un dispositif d’occupation temporaire de locaux en vue d’en assurer la protection et la préservation.
Les opérations d’occupation temporaire de locaux en vue d’en assurer la protection et la préservation font l’objet d’une convention entre le propriétaire et un organisme public, un organisme privé ou une association qui s’engage à protéger et à préserver les locaux qui sont mis à sa disposition et à les rendre au propriétaire libres de toute occupation à l’échéance de la convention ou lors de la survenance d’un événement défini par celle-ci.
La convention est d’une durée maximale de trois ans et peut être prorogée par période d’un an, dès lors que le propriétaire justifie que, à l’issue de l’occupation du bâtiment par des résidents temporaires, le changement de destination initialement envisagé pour les locaux ne peut avoir lieu.
L’organisme ou l’association mentionné au troisième alinéa peut loger des résidents temporaires dans les locaux mis à sa disposition. Les engagements réciproques de l’organisme ou de l’association et de chaque occupant ainsi que la finalité de l’occupation figurent dans un contrat de résidence temporaire, dont la forme et les stipulations sont définies et encadrées par décret en Conseil d’État.
Le contrat de résidence temporaire est conclu ou renouvelé pour une durée minimale fixée par décret en Conseil d’État. Il peut prévoir le versement par le résident à l’organisme ou à l’association mentionné au troisième alinéa d’une redevance dont le montant maximal est fixé par décret en Conseil d’État.
La rupture anticipée du contrat par l’organisme ou l’association précité est soumise à des règles de préavis, de notification et de motivation définies par décret en Conseil d’État. Cette rupture ne peut être opérée que pour un motif légitime et sérieux, notamment l’inexécution par le résident de l’une des obligations lui incombant ou l’arrivée à terme de la convention mentionnée au troisième alinéa survenue dans les conditions fixées au même troisième alinéa.
L’arrivée à terme du contrat de résidence temporaire ou sa rupture dans les conditions prévues aux sixième et septième alinéas déchoit le résident de tout titre d’occupation, nonobstant toutes dispositions en vigueur, notamment celles du chapitre III du titre Ier du livre VI du code de la construction et de l’habitation et de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.
L’agrément de l’État peut être subordonné à des engagements de l’organisme ou de l’association qui a reçu la disposition des locaux quant aux caractéristiques des résidents temporaires, et notamment en faveur des personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles. Ces engagements ne peuvent être définis qu’au regard du nombre total de places de logement ou d’hébergement mises à disposition par l’organisme ou l’association agréé.
Un décret en Conseil d’État fixe les conditions et modalités d’application du présent article.
Les conventions et contrats de résidence temporaire passés en application du présent article ne peuvent porter effet au-delà du 31 décembre 2023. Le présent dispositif expérimental est suivi et évalué par les services de l’État chargés d’agréer les opérations. Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, un rapport d’évaluation du dispositif.
M. le président. L’amendement n° 141, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer les mots :
de logement,
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à revenir sur une disposition adoptée en commission sur proposition de Mme la rapporteur.
L’article 9 bis prévoit ainsi une réorientation de l’article 101 de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, dite loi « MOLLE », à laquelle nous avons toujours été farouchement opposés, car elle a créé un statut d’occupant sans titre et temporaire. Il s’agissait de créer des places de logement temporaire dans des locaux vacants, mis à disposition par leurs propriétaires, qui s’assuraient ainsi de leur préservation.
Le présent article, inséré à l’Assemblée nationale, revoit totalement cette possibilité en l’orientant exclusivement vers l’hébergement.
Le Sénat, en commission, a fait le choix de réaffirmer la destination de ce dispositif vers du logement, disposition à laquelle nous sommes totalement opposés, car nous considérons que, à l’instar du bail mobilité dont nous discuterons plus tard, ce statut de résident précaire constitue une très grave détérioration des droits des locataires, créant un bail dégradé et absolument pas protecteur.
Nous proposons donc, puisque l’expérimentation n’a pas été concluante pour le logement, de maintenir l’orientation de ce dispositif exclusivement vers l’hébergement, seule manière de le rendre acceptable.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
Votre amendement vise à supprimer le logement du dispositif envisagé, ce qui me semble mettre en péril l’activité existante de mise à disposition de places de logement temporaire. Par ailleurs, pourquoi vouloir supprimer un dispositif qui fonctionne ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. La situation est-elle satisfaisante, madame la sénatrice ? Évidemment non !
En l’occurrence, on parle d’hébergement d’urgence et de logements temporaires. Il faut le savoir, chaque nuit, le ministère que Jacques Mézard et moi-même représentons finance 135 000 places d’hébergement d’urgence dans le cadre du dispositif actuel. Je ne parle pas du dispositif hivernal. Au-delà de cet hébergement d’urgence, il y a aussi, dans certains territoires, des places de logement temporaire, au nombre de quelques centaines. Encore une fois, est-ce satisfaisant ? Évidemment non !
Cela étant dit, il y a une grande différence entre l’hébergement et le logement, même si le logement est temporaire. C’est pourquoi j’émettrai un avis défavorable sur votre amendement. Quand vous occupez un logement, vous avez une adresse, et cela change tout. Il devient dès lors plus facile de se réinsérer, d’effectuer des démarches administratives et de trouver un emploi. C’est là certes un aveu collectif d’insatisfaction.
Même si personne ne souhaite évidemment que le dispositif perdure trop longtemps, car cela signifierait qu’il y a encore autant de gens dans la difficulté dans notre pays, je préfère que les personnes qui sont dans la difficulté aient une adresse plutôt qu’elles n’en aient pas.