Mme Françoise Gatel. Non !
M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est peut-être pas le cas dans votre département, ma chère collègue, mais c’est tout de même ce qui est ressorti de nos discussions.
Quant à savoir si deux communes de 300 habitants seront plus riches une fois réunies, c’est un autre problème ! Là n’est peut-être pas la solution. On me dit qu’une commune de 50 habitants ne peut rien faire, mais si elle disparaît, qui fera son travail ? L’État ?
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. À mon tour, je tiens à souligner l’intérêt et la grande qualité de cette proposition de loi. Françoise Gatel a vraiment accompli un excellent travail. En cela, on voit l’importance d’avoir des élus de terrain qui font remonter ce qu’ils entendent quand ils se trouvent dans leur département. Je salue également le travail de la commission des lois et de sa rapporteur. Enfin, je remercie le ministre d’avoir apporté son soutien à cette proposition de loi et annoncé qu’il ferait en sorte qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Comme l’a indiqué le président de la commission des lois, nous n’avons malheureusement pas été habitués à une telle attitude depuis dix-huit mois. J’ai pour ma part en mémoire cinq ou six propositions de loi qui n’ont même pas été inscrites à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale après avoir été adoptées par le Sénat…
Concernant l’article 1er, il est effectivement des cas que l’assouplissement introduit ne permettra pas de régler. Il en est ainsi, dans mon département de l’Eure, de celui de la commune nouvelle de Vexin-sur-Epte, qui a, dès le départ, fait le choix de ne pas se doter du nombre maximum de conseillers municipaux, à savoir 160. En divisant ce nombre par trois, on aboutirait à un effectif supérieur à celui de 33 conseillers municipaux prévu par le droit commun pour la strate démographique à laquelle appartient cette commune, mais cette dernière a fixé à 50 seulement le nombre de ses conseillers municipaux lors de sa création…
J’aurais pu être tenté de voter cet amendement, mais je suivrai l’avis de la commission et du ministre, au regard de l’engagement pris de régler ces cas particuliers au cours de la navette. Il n’est pas facile de faire en sorte qu’il n’y ait pas de perdants, mais il faut essayer !
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Comme Philippe Bas, je suis élu du département de la Manche, qui est pionnier en matière de création de communes nouvelles.
Jacques Pélissard a joué un rôle déterminant dans la création de communes nouvelles en prévoyant l’existence des communes déléguées. Il est utile de conserver tout ce qu’il n’est pas nécessaire de détruire, disait Portalis.
Les communes nouvelles sont certes des communes à part entière, mais elles sont aussi, dans cette période transitoire, des communes entièrement à part. Il subsiste, dans les communes déléguées, des identités culturelles forgées par l’histoire, un tissu associatif dynamique, des élus de proximité qui font vivre la démocratie au quotidien. Il serait dommage de tirer un trait sur tout cela.
C’est pourquoi il serait peut-être nécessaire de compléter cette proposition de loi au cours de la navette, afin de reconnaître par exemple que les communes déléguées peuvent être considérées comme des quartiers au sens de la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité et que, à ce titre, elles doivent être obligatoirement dotées de conseils de quartier. Cela permettrait de ménager une transition avec le conseil municipal.
Je conclurai mon intervention en évoquant le cas particulier de Cherbourg-en-Cotentin, ville nouvelle de 80 000 habitants qui a regroupé Cherbourg-Octeville, dont j’étais alors le maire, et les cinq autres communes de l’ancienne communauté urbaine. Elle compte aujourd’hui 163 conseillers municipaux, mais elle n’en comptera plus que 55 lors de la prochaine mandature. Or, en vertu d’un accord local, nous devrions avoir en principe 59 représentants au sein du conseil de la nouvelle communauté d’agglomération Le Cotentin, l’une des plus grandes de France avec ses 132 communes. Je ne suis pas jaloux du fait que la commune voisine de La Hague, avec seulement 11 800 habitants, se voie attribuer 78 élus, mais il faudra aussi résoudre ce problème particulier.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Je crains que nous n’ayons pas de bonne solution.
Tout le monde s’accorde à dire que la commune nouvelle est une commune comme les autres, mais que, en même temps, il faut lui conserver temporairement une certaine spécificité en matière de représentation. Jusqu’à quand et pourquoi ? Prenons les choses à l’envers : pourquoi une telle représentation différenciée n’existerait-elle pas pour des communes qui ont été fusionnées dans le passé ? Pourquoi cette différence entre la commune « normale » et la commune nouvelle, et pour combien de temps ? Pourquoi seulement jusqu’au second renouvellement ?
In fine, il y a un lien fondamental entre le nombre de conseillers municipaux et le chiffre de la population de la commune. Or nous dérogeons ici à cette règle pour certaines communes qui se sont choisi un nouveau destin et sont en cours de transformation, sans pouvoir s’aligner immédiatement sur le régime de droit commun.
En l’espèce, je ne suis pas sûr que les solutions trouvées soient satisfaisantes. C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur l’article 1er comme sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.
M. Emmanuel Capus. Nous ne sommes pas là pour évoquer les cas particuliers, mais je note que les quatre sénateurs de Maine-et-Loire sont présents ce soir. Ils représentent un département pionnier en matière de création de villes nouvelles, et leur expérience mérite d’être prise en compte. Parfaitement conscients du fait que le nombre de conseillers municipaux diminuerait fortement à la suite de la fusion de plusieurs communes en une seule, mais sachant aussi que, en pratique, gérer la ville nouvelle avec un conseil municipal pléthorique serait difficile, ils ont estimé souhaitable de ménager une courte période d’adaptation. Je soutiens sans réserve cet amendement, fondé sur l’expérience de nos collègues Stéphane Piednoir et Catherine Deroche. (Mme Catherine Deroche applaudit.)
M. Stéphane Piednoir. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Soyons clairs, cette proposition de loi, amendée heureusement par la commission, n’a nullement pour objet de permettre de se dérober à un projet de commune nouvelle. Nous sommes ici un certain nombre à avoir conduit des créations de communes nouvelles. On peut toujours se livrer à des exercices théoriques, raisonner dans l’abstrait selon une vision un peu dogmatique, mais nous savons par expérience que la commune nouvelle est avant tout une aventure humaine pour un projet d’avenir, à l’exemple de la recomposition d’une famille : pour acquérir une culture commune, il faut du travail et du temps !
Il s’agit donc de faire en sorte que l’objectif de construire une nouvelle identité et un projet d’avenir pour consolider la commune soit soutenable.
M. Emmanuel Capus. C’est vrai !
Mme Françoise Gatel. Vouloir avancer à marche forcée en disant aux élus qu’ils savaient dès le départ à quoi les engageait la création d’une commune nouvelle me semblerait étonnant de la part de la chambre représentant les territoires. Or c’est un peu cela que j’entends en écoutant certains propos.
La rapporteur a recherché avec le ministère des solutions pour prendre en compte la diversité des territoires. La commune nouvelle est par nature protéiforme, puisqu’elle est issue de la volonté des élus et de la diversité des territoires. Par conséquent, aucune solution ne s’appliquera de manière uniforme ; il faut ménager des adaptations qui, nous l’avons tous dit, n’ont pas vocation à perdurer. Il s’agit seulement de permettre que ce qui est souhaitable soit faisable. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.
M. Stéphane Piednoir. Monsieur Maurey, Oscar Wilde disait que la meilleure façon de résister à la tentation, c’est d’y céder. Je vous invite donc à voter cet amendement !
Je ne partage évidemment pas la conception de M. Collombat, qui voudrait que pas une oreille ne dépasse et qu’un même modèle s’applique partout en France exactement de la même façon. Eh bien non, les territoires sont vivants et font preuve d’initiative. Ce que nous proposons, c’est de ménager de la souplesse.
M. Pierre-Yves Collombat. Il faut des intercommunalités à taille humaine !
M. Stéphane Piednoir. Nous nous félicitons que le Gouvernement nous prête aujourd’hui une oreille un peu plus attentive.
Eu égard au débat que suscite cet amendement, il va de soi que je le maintiens.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Morisset, Mouiller, Rapin, Brisson et Chaize, Mme Gruny, M. Meurant, Mmes Duranton et Berthet, MM. de Legge, Paccaud, Vogel, Lefèvre, Milon, D. Laurent, Dallier et Revet et Mmes Deromedi, Noël et Chauvin, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l’article L. 2113-8-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2113-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2113-8-…- Dans les communes nouvelles regroupant toutes les communes membres d’un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, le conseil municipal peut décider d’instituer, entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement du conseil municipal, une commission permanente à laquelle il peut confier une partie de ses attributions à l’exception :
« 1° Du vote du budget, de l’institution et de la fixation des taux ou tarifs des taxes ou redevances ;
« 2° De l’approbation du compte administratif ;
« 3° Des dispositions à caractère budgétaire à la suite d’une mise en demeure intervenue en application de l’article L. 1612-15 ;
« 4° Des décisions relatives aux modifications des conditions initiales de fonctionnement de la commune nouvelle ;
« 5° De l’adhésion de la commune nouvelle à un établissement public ;
« 6° De la délégation de la gestion d’un service public.
« Le conseil municipal en fixe la composition dans la limite de 30 % de l’effectif du conseil municipal, arrondi à l’entier supérieur, et désigne les conseillers municipaux membres au scrutin proportionnel. Le maire de la commune nouvelle la préside de droit. Les membres de la commission permanente sont nommés pour la même durée que le maire. »
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. Il s’agit de rétablir le dispositif prévoyant que, dans les communes nouvelles qui regroupent toutes les communes membres d’un ou de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, le conseil municipal pourra décider d’instituer, pour la période comprise entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement du conseil municipal, une commission permanente à laquelle il pourra confier un certain nombre de ses attributions, à l’exclusion de celles qui sont expressément mentionnées.
M. le président. L’amendement n° 17 rectifié, présenté par M. L. Hervé et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l’article L. 2113-8-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2113-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2113-8-… – Jusqu’au prochain renouvellement suivant la création de la commune nouvelle, le conseil municipal peut déléguer au collège formé par le maire et les adjoints tout ou partie des attributions mentionnées aux 1° à 28° de l’article L. 2122-22 qui n’ont pas été déléguées au maire en application du même article L. 2122-22.
« Les délégations consenties en application du premier alinéa du présent article sont révocables à tout moment.
« La délégation des attributions mentionnées au 3° de l’article L. 2122-22, consentie en application du premier alinéa du présent article, prend fin dès l’ouverture de la campagne électorale pour le renouvellement du conseil municipal. »
La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. Cet amendement vise à rétablir l’article 2, qui a été supprimé par la commission des lois, dans une nouvelle rédaction prévoyant la possibilité de créer non plus une commission permanente, mais un collège formé du maire et de ses adjoints, auquel le conseil municipal pourra déléguer tout ou partie des attributions mentionnées à l’article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales n’ayant pas été déléguées au maire. Cette proposition plus souple nous paraît mieux correspondre aux réalités de terrain.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’amendement n° 15 rectifié vise à rétablir le dispositif de la commission permanente que la commission des lois a souhaité supprimer, considérant qu’il s’agit d’une instance extrêmement rigide, dont la mise en œuvre entraîne de grandes difficultés d’ordres juridique et pratique et tend à éloigner les conseillers municipaux de la prise des décisions.
Par conséquent, la commission demande le retrait de l’amendement n° 15 rectifié ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
La commission préfère le dispositif de l’amendement n° 17 rectifié. Eu égard aux difficultés que peuvent rencontrer des conseils municipaux pléthoriques, notamment dans cette première période, il convient en effet de mettre en place une instance collégiale à laquelle le conseil municipal pourra déléguer tout ou partie des vingt-huit compétences classiquement déléguées au maire. Cette instance permettra plus de souplesse et d’agilité pendant cette première période suivant la création de la commune nouvelle. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. Loïc Hervé. Merci !
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur le sénateur Piednoir, je suis plus que réservé à l’égard de la dénomination de commission permanente. Elle correspond déjà à une réalité juridique dans les conseils régionaux et les conseils départementaux, et qui dit commission permanente dit représentation de l’opposition, donc élection à la proportionnelle… Le Conseil d’État l’a rappelé dans un arrêt relatif à la Ville de Paris.
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Tout à fait !
M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est la raison pour laquelle, lors des travaux préparatoires, nous avons écarté cette dénomination, en accord avec la commission des lois. Nous comprenons bien votre intention, monsieur Piednoir, mais comment expliquer à des élus d’une commune nouvelle située en milieu rural où les désignations se font toujours de manière consensuelle qu’il faudra désormais constituer des listes en vue d’une élection à la proportionnelle ? Je doute que cela permette d’entrer dans le mouvement de simplification que vous appelez de vos vœux !
Le Gouvernement demande donc le retrait de l’amendement n° 15 rectifié au bénéfice de l’amendement n° 17 rectifié du groupe Union Centriste, dont le dispositif introduit de la souplesse, tout en précisant que ne pourra être délégué à ce collège d’élus que ce qui est délégable : il n’est porté atteinte ni aux pouvoirs propres du maire ni aux prérogatives qui appartiennent traditionnellement à l’assemblée délibérante. Par exemple, à l’échelon de la région où du département, la matière budgétaire ne peut pas être déléguée à la commission permanente : elle relève systématiquement de l’assemblée plénière. C’est la même logique qui prévaut ici.
Créer un tel collège par une simple délibération sera une simple faculté pour la commune nouvelle : elle n’y sera nullement obligée et pourra parfaitement s’en dispenser si cela n’est pas utile. L’adoption de cet amendement introduira de la souplesse, de la visibilité, de la simplification.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Très bien !
M. le président. Monsieur Piednoir, l’amendement n° 15 rectifié est-il maintenu ?
M. Stéphane Piednoir. Chacun a bien compris l’objet de la commission permanente, dont la mise en place avait d’ailleurs été initialement envisagée par l’auteur de la proposition de loi. Le dispositif proposé par le groupe Union Centriste répond tout à fait à nos attentes, tout en étant moins ardu à mettre en œuvre. Compte tenu des arguments avancés par Mme la rapporteur et M. le ministre, je retire l’amendement n° 15 rectifié au profit de l’amendement n° 17 rectifié.
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié est retiré.
La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote sur l’amendement n° 17 rectifié.
M. Didier Marie. Nous étions opposés à l’amendement n° 15 rectifié, qui vient donc d’être retiré. Nous l’avions indiqué en commission et avions salué la sagesse de la rapporteur, qui avait proposé la suppression de l’article 2, pour les raisons qui ont été très bien développées tant par elle que par M. le ministre. La commission permanente est une instance bien définie et codifiée, qui nécessite une représentation proportionnelle. Je ne vois pas comment on pourrait l’envisager dans des communes nouvelles rurales.
Pour autant, nous ne sommes pas plus convaincus par l’amendement n° 17 rectifié.
M. Loïc Hervé. C’est dommage ! (Sourires.)
M. Didier Marie. Notre collègue Loïc Hervé a recherché un moyen terme, mais en établissant une fois de plus une dérogation pour les communes nouvelles. Nous n’y sommes pas favorables pour plusieurs raisons.
On peut comprendre l’objectif, à savoir gagner en souplesse, notamment si le conseil municipal est pléthorique, et éviter des problèmes de quorum. Cependant, dans une commune nouvelle, comme dans toutes les autres communes, c’est le conseil municipal qui règle les affaires de la commune. Cela garantit l’information de l’ensemble des conseillers municipaux. Dans le cadre d’un projet de commune nouvelle, il nous semble absolument indispensable que tous les conseillers municipaux puissent être associés au déploiement de ce projet. Créer une instance qui aurait le pouvoir de décider sans en référer au conseil municipal nous paraît problématique.
Le code général des collectivités territoriales dispose déjà que le conseil municipal peut déléguer au maire un certain nombre de prérogatives. Par ailleurs, nous savons toutes et tous que, dans bon nombre de communes, nouvelles ou non, il existe une instance collégiale, appelée communément bureau municipal, qui n’a pas de pouvoir de décision mais qui peut aborder toute une série de sujets ensuite soumis au conseil municipal. Nous pensons que ces dispositions sont tout à fait suffisantes et permettent un bon fonctionnement des communes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur le sénateur Marie, il me semble que, dans les EPCI, les bureaux communautaires ne fonctionnent pas trop mal.
Mme Françoise Gatel. Absolument !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Il existe ainsi, au côté du conseil communautaire et du président de l’EPCI, un organe délibérant intermédiaire, souple.
M. Pierre-Yves Collombat. Dans un EPCI, précisément !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Chacun a son expérience de l’intercommunalité, je ne l’ignore pas, mais certaines dispositions existent déjà. Je ne peux pas laisser dire que rien n’existe.
M. Pierre-Yves Collombat. On ne peut pas comparer un EPCI avec une commune !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Oui, monsieur le sénateur, le ministre chargé des collectivités territoriales sait qu’un EPCI n’est pas une commune… Je rappelle seulement ce qui existe déjà dans la pratique. Je vous trouve en tout cas beaucoup plus raides, dans vos prises de position, que le Gouvernement. Tous les gouvernements successifs, d’ailleurs, cherchent à mettre un peu d’huile dans les rouages pour que les choses se passent au mieux dans les territoires. Je vous sens plutôt enclins à la rigidité.
Mme Françoise Gatel. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Se faire accuser de raideur par le Gouvernement, s’agissant des collectivités territoriales, après les dix-huit mois que nous avons vécus, ça ne manque vraiment pas de piquant, monsieur le ministre !
Pour une fois que vous êtes du côté des collectivités territoriales…
M. Éric Kerrouche. Je l’entends ! Disons alors que vous vous rachetez une conduite ce soir…
M. Éric Kerrouche. Ce changement d’attitude remonte à quelques jours, nous verrons ce qu’il en sera à l’avenir…
Monsieur le ministre, vous connaissez les collectivités territoriales ; certains d’entre nous aussi. Je vous rappelle que, dans les EPCI, le bureau communautaire est, la plupart du temps, remplacé par le conseil des maires, parce que cette instance fonctionne mieux.
En l’espèce, nous disons simplement que si l’on va vers plus de proximité et si l’on veut que le projet de territoire qui sous-tend la commune nouvelle soit respecté, il importe que l’ensemble des conseillers municipaux soient associés à la démarche et qu’il n’y ait pas d’instance intermédiaire. Il nous semble préférable de recourir à des formules plus souples, de nature à favoriser les consultations.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. Cette proposition de loi a pour objet de faciliter la construction des projets de commune nouvelle. Toutes les décisions ne sont pas forcément d’une importance majeure pour la coconstruction d’un projet entre les élus d’un territoire. Celles qui sont prises par délégation sont de toute façon ensuite soumises à l’ensemble des élus. Nous avons tous connu ces délibérations votées à la chaîne qui débouchent sur l’embolie de l’ordre du jour sans apporter grand-chose au projet. Mieux vaut, me semble-t-il, que le conseil municipal se concentre sur les points majeurs. C’est un moyen de rationaliser l’emploi du temps des élus, qui ont autre chose à faire que traiter des sujets ne relevant pas de l’intérêt général et de la réussite du projet de commune nouvelle. La parole doit être la plus utile possible, car le temps des élus est mesuré. De telles instances existent déjà au sein des EPCI, et je ne vois pas en quoi la coconstruction en a souffert à ce jour.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Je soutiens le propos très juste de M. le ministre.
Chers collègues du groupe socialiste et républicain, j’ai bien compris que vous comptiez vous en tenir à une abstention bienveillante. Toutefois, il me semble que cette position recouvre une tentation de corseter le dispositif. Encore une fois, je rappelle que la création de ce collège sera facultative. Il ne pourra être mis en place que par délibération du conseil municipal et contribuera très fortement à renforcer la cohésion de l’équipe municipale : les compétences seront déléguées non pas au seul maire, mais à une instance plus conviviale, comprenant d’autres élus. Nous devons essayer d’imaginer les moyens de favoriser la réussite des projets.
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.
M. Emmanuel Capus. Là encore, il faut être pragmatique, et non pas dogmatique.
Aujourd’hui, un conseil municipal peut compter entre 100 et 180 personnes, à tel point que, l’hôtel de ville ne pouvant plus l’accueillir, il lui faut se réunir à la salle des fêtes. À 180, on ne peut pas décider. Comme cela vient d’être dit, on enchaîne les délibérations sans avoir eu le temps d’approfondir et d’échanger. Une fois sur deux, le quorum n’est pas atteint, les élus étant démotivés. Dans un souci de rapidité et d’efficacité, il faut donc confier à un organe, commission permanente ou collège constitué du maire et des adjoints, le soin de prendre les décisions dans un certain nombre de domaines. Sinon, la multiplication des réunions exaspère les élus, qui ne veulent plus siéger, d’autant que certains d’entre eux sont aussi membres de l’exécutif d’un EPCI. Ouvrir la possibilité de créer une telle instance me paraît relever du bon sens.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Il ressort assez clairement de notre discussion que le fond du problème, c’est que l’on a obligé les élus à constituer des intercommunalités trop grandes, d’une taille inadaptée aux circonstances locales. (Mme Françoise Gatel s’exclame.) Mais oui, il fallait faire grand ! Le seuil de population des EPCI est passé de 5 000 à 15 000 habitants. En milieu rural, ce n’est pas rien ! Ensuite, on a raréfié les ressources pour inciter encore davantage au regroupement.
Ainsi, de nombreuses intercommunalités et communes nouvelles ont été conçues dans un esprit défensif, et on ne peut pas en vouloir aux élus. Aujourd’hui, on constate que cela ne fonctionne pas, et vous proposez, en guise de solution, de créer une instance un peu intermédiaire entre la commune et l’intercommunalité. Ne pensez-vous pas qu’il serait plus simple de revenir sur la loi NOTRe et sur les découpages qu’elle a induits ?
Mme Françoise Gatel. Pas ce soir !
M. Emmanuel Capus. C’est clair : la réponse est non !
M. Pierre-Yves Collombat. Alors, ne vous plaignez pas !
Je n’ai rien contre le principe de procéder à des adaptations si on ne peut pas faire autrement, mais il y a peut-être d’autres solutions, surtout lorsque l’on se pique de modernité, que de s’acharner à faire fonctionner quelque chose qui ne peut pas fonctionner !
Mme Françoise Gatel. Mais si, ça fonctionne !
M. le président. En conséquence, l’article 2 est rétabli dans cette rédaction.
Article additionnel après l’article 2
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, MM. Morisset, Rapin, Panunzi, Brisson et Chaize, Mme Gruny, M. Meurant, Mmes Duranton et Berthet, MM. de Legge, Paccaud, Vogel, Lefèvre, Milon et D. Laurent, Mme Chauvin, MM. Dufaut et Pierre, Mmes Bories, Noël et Deromedi et MM. Revet et Dallier, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le sixième alinéa du I de l’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au 1° du présent I, une commune nouvelle constituée sur le périmètre d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut s’opposer au transfert de la compétence en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, au nouvel établissement public de coopération intercommunale qu’elle a intégré. »
La parole est à M. Stéphane Piednoir.