M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Les trois amendements présentés par Mme Cohen ressemblent fortement à ceux qu’elle a défendus à l’article 8, il y a quelques instants. Cela témoigne de la constance de sa position en la matière. Le Gouvernement demeure défavorable à la suppression des allégements de charges patronales qui se sont substitués au CICE.
M. le président. L’amendement n° 832 rectifié, présenté par Mme Lubin, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Leconte, Montaugé, Sueur, Antiste et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Courteau, Duran, Fichet et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Lalande, Mmes Lepage, Monier, Perol-Dumont, Préville et Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. –Le deuxième alinéa de l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, la réduction est applicable à l’ensemble des établissements et services mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles quel que soit leur statut. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à harmoniser les allégements de cotisations sociales entre établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) des secteurs privé et public. Il nous paraît injuste que les Ehpad du secteur public ne soient pas soumis aux mêmes règles, en matière de cotisations sociales, que ceux des secteurs privé, commercial et non lucratif. Les Ehpad publics se trouvent actuellement en situation de désavantage concurrentiel injustifié. Je rappelle qu’ils offrent des tarifs plus adaptés aux revenus de la majorité des personnes âgées de ce pays et permettent un accès plus aisé à l’aide sociale à l’hébergement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis est défavorable. La réduction de cotisations patronales d’assurance maladie a compensé la disparition du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, dont les Ehpad ne bénéficiaient pas.
Cela dit, cet amendement soulève la question du financement du grand âge et de la dépendance. Je me tourne vers le Gouvernement : si des réductions de cotisations sociales ne peuvent remplacer les besoins de nature budgétaire, le Sénat tout entier attend avec impatience ses propositions pour améliorer la situation des Ehpad, notamment de ceux du secteur public.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Même avis pour les mêmes raisons.
Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement comprend l’impatience du Sénat. Mme Dubos travaille avec Mme Buzyn pour élaborer le plan de soutien aux Ehpad et à la prise en charge de la dépendance. Je n’ouvrirai pas le débat à cet instant ; il serait long, mais passionnant.
Nous devrons également poser la question du financement. Nous avons eu l’occasion, lors de la présentation en commission du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d’évoquer différentes pistes, ainsi que certains écueils : il faudrait parfois modifier des lois organiques pour atteindre les objectifs affichés par les uns ou les autres. Nous aurons rapidement l’occasion de revenir sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Je n’ai rien compris… Je ne vois pas très bien ce qui s’oppose à l’alignement des règles s’appliquant aux Ehpad du secteur public sur celles qui valent pour les établissements gérés par des associations ou des acteurs privés. Jusqu’à présent, je n’ai entendu aucune justification des avis défavorables de la commission et du Gouvernement.
Si la situation existante n’est ni juste ni justifiée, il faut la modifier ; c’est tout l’intérêt de l’amendement proposé. Je le voterai, parce qu’il me semble nécessaire de rétablir une certaine équité entre les différents types d’établissements, qui doivent tous disposer des mêmes avantages.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 589, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 1,6 ».
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement de repli tend à limiter le champ d’application de l’allégement de cotisations patronales familiales issu du pacte de responsabilité aux seuls bas salaires, c’est-à-dire aux rémunérations inférieures à 1,6 fois le SMIC.
Comme l’a démontré le Conseil d’analyse économique dans une note de janvier 2019 intitulée « Baisse des charges : stop ou encore ? », ce dispositif, qui s’applique aujourd’hui aux rémunérations s’élevant jusqu’à 3,5 fois le SMIC, est inefficace en termes de créations d’emplois et d’amélioration de la compétitivité. Il est en outre coûteux pour les finances sociales, la perte de recettes pour la branche famille atteignant 8 milliards d’euros.
Nous ne sommes pas les seuls à dénoncer l’inefficacité du CICE, puisque deux députés du groupe La République en Marche ont déposé un amendement visant à supprimer la réduction de 1,8 point des cotisations patronales à la branche famille pour les salaires compris entre 2,5 et 3,5 fois le SMIC.
La Cour des comptes elle-même a demandé une étude en profondeur de l’efficacité des 52 milliards d’euros d’allégements généraux.
Olivier Véran, rapporteur général du projet de budget de la sécurité sociale à l’Assemblée nationale, a également critiqué les allégements de charges pour les salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC, évoquant un effet d’aubaine qui coûte cher sans s’accompagner de créations d’emplois.
Nous vous proposons donc de vous mettre au diapason de votre propre majorité, monsieur le secrétaire d’État,…
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas possible ! (Sourires.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. … en réduisant le champ des exonérations de cotisations patronales, dont tout le monde s’accorde à dire qu’elles n’apportent aucun bénéfice pour l’économie et pour l’emploi !
M. le président. L’amendement n° 830 rectifié, présenté par Mme Lubin, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Leconte, Montaugé, Sueur, Antiste et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Courteau, Duran, Fichet et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Lalande, Mmes Lepage, Monier, Perol-Dumont, Préville et Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 2 ».
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à limiter le champ d’application de l’allégement de cotisations patronales familiales issu du pacte de responsabilité aux salaires inférieurs à 2 fois le SMIC.
Dans une note de janvier 2019 du Conseil d’analyse économique, intitulée « Baisse des charges : stop ou encore ? », ce dispositif, qui s’applique actuellement aux rémunérations allant jusqu’à 3,5 fois le SMIC, est décrit comme inefficace en termes de créations d’emplois et de renforcement de la compétitivité. Il est en outre coûteux pour les finances sociales, induisant une perte de recettes de 8 milliards d’euros pour la branche famille.
Le nouveau ciblage proposé permettrait d’apporter 2,7 milliards d’euros de recettes nouvelles à la sécurité sociale en 2020.
Par ailleurs, selon les auteurs du rapport, seules les exonérations ciblées sur les bas salaires emportent des conséquences en matière de créations d’emplois. Il faut donc corriger ce dispositif d’exonérations afin de ne conserver que celles qui sont utiles à l’emploi.
Il est difficilement compréhensible que l’on puisse bénéficier d’exonérations pour des salaires s’élevant à 3,5 fois le SMIC. Cela devient dangereux pour les finances de la sécurité sociale en général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à ces amendements, dont l’adoption aboutirait évidemment à un alourdissement du coût du travail.
Leurs auteurs posent néanmoins une bonne question, monsieur le secrétaire d’État, celle de l’efficacité des allégements de charges en fonction du niveau des revenus auxquels ils s’appliquent. Il serait sans doute intéressant de réfléchir à la question du meilleur format de ces aides à niveau de prélèvements obligatoires égal.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’avis est défavorable sur les deux amendements.
Madame Apourceau-Poly, le Gouvernement est au diapason de sa majorité, puisque celle-ci n’a pas voté ces dispositions…
Monsieur le rapporteur général, évaluer la pertinence de ce que l’on appelle parfois les « niches sociales » paraît effectivement utile. J’ai en tête un certain nombre de débats que nous avons eus, ici ou à l’Assemblée nationale, sur le bornage des niches fiscales ou sociales. Il s’agit non pas de les remettre en cause systématiquement, mais de procéder à des évaluations à intervalles réguliers. Un tel processus semblait effrayer un certain nombre de parlementaires qui craignaient que « bornage » signifie « suppression ». À nos yeux, ce terme signifie « évaluation » et « recherche du meilleur ciblage ».
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 584 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 811 rectifié est présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Leconte, Montaugé, Sueur, Antiste et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Courteau, Duran, Fichet et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Lalande, Mmes Lepage, Monier, Perol-Dumont, Préville et Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-17 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 584.
Mme Michelle Gréaume. Mes chers collègues, nous vous proposons une autre solution en vue de dégager des recettes pour le budget de la sécurité sociale (Exclamations amusées sur des travées du groupe Les Républicains.) : supprimons le dispositif d’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires !
M. Roger Karoutchi. Oh non ! (Sourires.)
Mme Michelle Gréaume. Présenté comme une mesure en faveur du pouvoir d’achat, ce dispositif contourne la revendication légitime d’une augmentation générale des salaires et entraîne, en outre, une perte de recettes pour la sécurité sociale de 2 milliards d’euros par an, non compensée, là encore, par l’État.
La seule réponse apportée aux travailleurs de ce pays ne saurait être une désocialisation des heures supplémentaires ou l’octroi d’une prime exceptionnelle, lequel, je vous le rappelle, est facultatif.
Eu égard à la forte dégradation des conditions de vie de nos concitoyens, dénoncée notamment par les « gilets jaunes », il est nécessaire d’adopter une autre politique salariale : augmenter le SMIC entraînera mécaniquement une hausse des salaires qui lui sont légèrement supérieurs.
Les salariés, aujourd’hui fortement précarisés, et les caisses de la sécurité sociale ne s’en porteront que mieux. C’est une politique de bon sens, mais encore faut-il que le Gouvernement cesse de faire toujours plus de cadeaux aux entreprises en les exonérant de cotisations sociales, ce que nous dénonçons depuis le début de l’examen de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 811 rectifié.
M. Yves Daudigny. Notre position est claire et sans ambiguïté : nous nous opposons frontalement à la désocialisation et la défiscalisation des heures supplémentaires, pour plusieurs raisons.
La non-compensation par l’État à la sécurité sociale des exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires est à nos yeux un dévoiement du principe de séparation entre le budget de l’État et le budget de la sécurité sociale, institué par la loi Veil de 1994. Cette non-compensation prive les organismes sociaux de sommes leur revenant pourtant de plein droit, creuse leur déficit et les pousse d’année en année à s’endetter davantage. La sécurité sociale devient ainsi une variable d’ajustement du budget de l’État, ce que nous ne pouvons accepter.
Le groupe socialiste s’oppose également à la désocialisation des heures supplémentaires et complémentaires, car il s’agit d’un non-sens économique. Le pays connaissant un taux de chômage de 9 %, il conviendrait de ne pas inciter à effectuer des heures supplémentaires, mais plutôt d’encourager l’emploi.
L’Observatoire français des conjonctures économiques indiquait, dans une note de juillet 2017, que cette mesure pourrait détruire 19 000 emplois et empêcher la création de 38 000 à 44 000 emplois à l’horizon 2022. Il estimait que cette mesure coûterait 0,1 point de PIB aux finances publiques.
Enfin, le gain de pouvoir d’achat, pour ceux qui bénéficient de la désocialisation des heures supplémentaires, est à mettre en rapport avec la sous-indexation des prestations familiales et sociales, largement destructrice de pouvoir d’achat.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 125 rectifié quinquies est présenté par M. Karoutchi, Mme Deromedi, MM. Perrin, Raison et Dallier, Mmes Bruguière et Delmont-Koropoulis, M. Houpert, Mme Duranton, MM. Daubresse, D. Laurent et Mayet, Mmes Chauvin et Eustache-Brinio, MM. Cambon et Kennel, Mme Noël, MM. Pellevat, Poniatowski, Danesi, de Legge, B. Fournier, Cuypers, Brisson, Calvet et Bazin, Mmes L. Darcos et Giudicelli, M. Chatillon, Mme Malet, M. Paul, Mmes Sittler et Lopez, MM. Pierre, Laménie, Bascher, Piednoir, Pointereau, Grosperrin et Bonhomme, Mme Garriaud-Maylam, MM. Husson et Mandelli et Mme Lherbier.
L’amendement n° 223 rectifié sexies est présenté par MM. Morisset, Bizet, Grosdidier et Mouiller, Mme Puissat, MM. Gremillet et Sol et Mme A.M. Bertrand.
L’amendement n° 300 rectifié quater est présenté par Mmes Bonfanti-Dossat et Micouleau, M. Charon, Mme Richer, MM. Lefèvre, Courtial et Panunzi, Mme Berthet, MM. Duplomb et Dufaut, Mme Gruny et M. H. Leroy.
L’amendement n° 473 rectifié ter est présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Decool, Menonville et Fouché, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Laufoaulu, Capus, Wattebled et A. Marc, Mme Goy-Chavent et M. Saury.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 5° du I de l’article L. 241-17 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les rémunérations versées aux salariés à temps partiel au titre des heures de dépassement de leur durée de travail fixée au contrat définies aux articles L. 3123-25 et L. 3123-28 du même code dans leurs rédactions antérieures à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter l’amendement n° 125 rectifié quinquies.
M. Roger Karoutchi. Il est curieux que cet amendement soit en discussion commune avec les précédents, car il vise à proposer exactement l’inverse… (Sourires.)
Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, la plupart de mes amendements ont été victimes de l’article 40 et de l’article 41 de la Constitution. Celui-ci est l’un des rares survivants : si vous pouviez faire un petit geste… (Rires.)
L’exonération de charges ne s’applique pas en cas d’accord collectif de modulation du temps de travail, dispositif abrogé par la loi du 20 août 2008, mais qui demeure applicable dès lors que les accords collectifs le mettant en place ont été conclus antérieurement à la loi du 20 août 2008, et ce sans limitation de durée. Cet amendement tend donc à introduire dans le texte une référence à la modulation du temps de travail, pour les salariés tant à temps plein qu’à temps partiel, afin d’éviter leur exclusion du bénéfice d’une mesure pourtant voulue générale et de permettre de prendre une disposition concrète profitant notamment aux salariés des services d’aide et d’accompagnement à domicile.
Il s’agit de corriger un déséquilibre, pour ne pas dire une injustice. Je demande simplement que les salariés concernés par le dispositif de modulation du temps de travail puissent bénéficier du système général d’exonération de charges.
Je ne vois pas pourquoi le gain de pouvoir d’achat lié à l’exonération de charges sociales des heures supplémentaires devrait être mis en parallèle avec la sous-indexation des prestations familiales. Pour ma part, gain de pouvoir d’achat et meilleure indexation des prestations familiales, je veux les deux !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour présenter l’amendement n° 223 rectifié sexies.
M. Jean-Marie Morisset. Je ne doute pas que le rapporteur général sera attentif à la demande pressante de notre collègue Karoutchi ! (Sourires.)
Chacun connaît la situation des services de soins à domicile dans nos territoires ruraux. Ils emploient des salariés à temps partiel pour des raisons d’organisation du temps de travail et de besoins des territoires : on ne peut pas recruter à temps plein lorsque le travail s’effectue le matin et le soir.
L’adoption de cet amendement permettrait de répondre à un certain nombre de préoccupations de nos services de soins à domicile, qu’ils soient gérés par des associations ou par les collectivités territoriales.
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour présenter l’amendement n° 300 rectifié quater.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Cet amendement vise à étendre l’exonération de cotisations salariales sur les heures supplémentaires à un grand nombre de salariés des services d’aide à domicile. Nous n’ignorons pas la difficulté de leur métier, exigeant en temps et en énergie, qui souvent demeure mal rémunéré alors qu’il est pourtant absolument essentiel !
Permettre à des salariés qui travaillent sous un régime de mi-temps modulé d’effectuer des heures supplémentaires en étant mieux rémunérés adresserait un signal fort à ces travailleurs courageux. Nous savons tous que ce secteur manque d’attractivité, en raison notamment de la faiblesse des rémunérations.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 473 rectifié ter.
M. Daniel Chasseing. L’instauration du dispositif d’exonération de cotisations salariales des heures supplémentaires a été une initiative très importante. Pour le premier semestre de 2019, il a permis un gain de pouvoir d’achat de 25 millions d’euros, pour 7,2 millions d’heures supplémentaires réalisées. Cela va dans le sens d’un apaisement des problèmes sociaux que nous connaissons depuis un certain nombre d’années.
Ce fut donc une très bonne décision, mais si le dispositif est très satisfaisant pour les personnes employées à temps plein, il l’est moins satisfaisant pour les salariés à temps partiel, nombreux dans le secteur de l’aide à domicile, par exemple.
Mes chers collègues, la mesure proposée ne permettra pas de créer des emplois, mais pourquoi les personnes travaillant à temps partiel ne pourraient-elles pas bénéficier du dispositif d’exonération de cotisations salariales des heures supplémentaires ? Les salariés des services d’aide à domicile ne sont pas très bien rémunérés. Une telle extension leur apporterait un gain de pouvoir d’achat non négligeable. Il s’agit d’un amendement de justice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable aux amendements identiques nos 584 et 811 rectifié,…
Mme Laurence Cohen. C’est bizarre !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … dont l’adoption nuirait directement au pouvoir d’achat des intéressés. Je rappelle que l’exonération porte sur les cotisations salariales, et non sur les cotisations patronales.
Quant aux amendements identiques nos 125 rectifié quinquies, 223 rectifié sexies, 300 rectifié quater et 473 rectifié ter, le Sénat a déjà eu l’année dernière ce débat sur l’exonération des heures supplémentaires. Il est apparu que la modulation du temps de travail, qui se définit via un accord d’entreprise, est conforme au code du travail. Les périodes durant lesquelles le salarié travaille davantage sont compensées par d’autres où le salarié travaille moins. Les heures supplémentaires sont couvertes par le dispositif d’exonération si elles sont réelles ; son application n’est pas pertinente s’il y a eu de nombreuses périodes pendant lesquelles le salarié a moins travaillé. Il s’agit d’un système de compensation sur la durée définie dans l’accord d’entreprise, souvent l’année. Il me paraît cohérent d’en rester au droit en vigueur.
Je veux bien faire un petit geste, monsieur Karoutchi, en vous demandant de bien vouloir retirer votre amendement ! (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. Ah non !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable aux amendements nos 125 rectifié quinquies, 223 rectifié sexies, 300 rectifié quater et 473 rectifié ter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 584 et 811 rectifié pour les raisons évoquées par M. le rapporteur général.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 125 rectifié quinquies, 223 rectifié sexies, 300 rectifié quater et 473 rectifié ter, lorsque l’on parle de temps partiel, il y a parfois une forme de confusion entre les heures complémentaires et les heures supplémentaires. Dès lors que, dans le cadre d’un temps partiel modulé, des heures complémentaires sont intégrées dans le contrat de travail, elles n’ont pas le statut d’heures supplémentaires et ne font pas l’objet d’une exonération de cotisations ou d’une défiscalisation. En revanche, M. le rapporteur général l’a souligné, si des heures sont effectuées au-delà de ce que prévoit le contrat de travail, que ce soit au titre du principal ou du complémentaire, elles ouvrent le bénéfice des systèmes d’exonération de cotisations sociales ou de défiscalisation. Il paraît logique au Gouvernement d’en rester au système actuel. Par conséquent, l’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je vois… Vous avez raison, restez sur vos fondamentaux ! Cela étant, dans les zones rurales, beaucoup de salariés des services d’aide à domicile travaillent à temps partiel, et les périodes durant lesquelles ils font beaucoup d’heures ne sont pas toujours compensées par d’autres moins chargées. Certains effectuent réellement des heures supplémentaires, sans rattrapage possible en période creuse. Que dire à ces personnes ? Restez chez vous pour compenser les heures faites en excès il y a quinze jours ou la semaine dernière ?
Je ne demande pas la lune ! Je demande simplement que ceux qui effectuent réellement des heures supplémentaires par rapport à leur temps partiel bénéficient de l’exonération. Si c’est là une mesure inéquitable, il faut m’expliquer en quoi ! Ou alors, il faut complètement remettre en cause le système d’exonération des heures supplémentaires !
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour explication de vote.
Mme Martine Berthet. Dans le secteur des services d’aide et d’accompagnement à domicile, les salaires sont faibles, mais les frais de déplacement sont importants, particulièrement dans nos zones de montagne. La plupart du temps, ces frais sont à la charge des salariés. Dans certains secteurs, nous n’arrivons même plus à faire fonctionner les services d’aide à domicile, faute d’agents. L’extension de l’exonération à ces salariés serait donc très appréciable. Je voterai ces amendements.