M. Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je veux remercier les différents orateurs pour la qualité de leurs interventions et pour la sympathie de leurs propos. Malheureusement – cela ne surprendra personne –, ces arguments de qualité ne suffisent pas à modifier l’avis du Gouvernement. Je vous renvoie notamment aux raisons évoquées par le sénateur de Belenet, soulignant la responsabilité que le Gouvernement pense être la sienne en matière de régulation du droit et de sa lisibilité.
Cela étant dit, je voudrais apporter deux précisions.
La première fait écho à plusieurs interventions.
Le Gouvernement n’a considéré à aucun moment que le travail de M. le président Maurey et de Mme la sénatrice Vermeillet, utilement complété, je l’ai dit précédemment, par le rapport de M. Bonnecarrère, avait pour objectif de créer une forme de droit à l’impunité. Je reconnais bien volontiers le sens de la démarche du Sénat, qui veut ouvrir des droits sans créer d’impunité.
La seconde précision, qui a peut-être un caractère plus personnel, répond à différentes interventions, notamment à celle de Mme la sénatrice Gruny.
Si nous devions un jour parvenir à un accord sur ce sujet, ne serait-ce qu’en améliorant les règles existantes en matière de reconnaissance et de régularisation d’un certain nombre d’erreurs, je suis personnellement convaincu de l’inopportunité de procéder à une distinction en fonction de la taille des collectivités. Autant je suis convaincu de la nécessité d’accompagner plus fortement les collectivités de petite taille en matière d’ingénierie, autant, si nous devions trouver un terrain d’entente sur cette question que l’on résume sous le vocable de « droit à l’erreur » et que, par prudence, j’appelle « amélioration du droit existant », je pense que cette évolution devrait s’appliquer à l’ensemble des communes, sans prendre le risque de créer un effet de seuil.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à créer un droit à l’erreur des collectivités locales dans leurs relations avec les administrations et les organismes de sécurité sociale
Article unique
Après le chapitre III du titre unique du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE III bis
« Droit à régularisation en cas d’erreur
« Art. L.1113-8. – I. – Une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales ayant méconnu une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l’objet d’une sanction pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d’une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire dans le délai indiqué.
« La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la collectivité ou le groupement en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de fraude ou de méconnaissance délibérée de la règle applicable à cette situation.
« II. – Le I s’applique aux relations liant les collectivités territoriales et leurs groupements avec les administrations de l’État, ses établissements publics administratifs ainsi que les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d’une mission de service public administratif.
« III. – Le présent article n’est pas applicable :
« 1° Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires particulières applicables aux relations mentionnées au II ont pour objet ou pour effet d’assurer une protection équivalente à celle conférée par le I ;
« 2° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l’Union européenne ;
« 3° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l’environnement ;
« 4° Aux sanctions prévues par un contrat ;
« 5° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l’égard des professionnels soumis à leur contrôle. »
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par M. Maurey et Mme Vermeillet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La preuve du caractère délibéré du manquement ou de la fraude incombe à l’autorité qui prononce la sanction.
La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Je voudrais d’abord dire à M. le secrétaire d’État que j’ai quand même beaucoup de mal à comprendre sa position. Comme le rapporteur l’a dit, la mesure que nous proposons est gratuite, de bon aloi et elle supprime un irritant. Je ne comprends donc pas cette sorte d’obstination à refuser la proposition de loi du Sénat. Je n’ose imaginer que, si elle est refusée avec autant d’obstination, c’est justement parce qu’elle vient du Sénat…
Les réserves qui avaient pu paraître légitimes sur la rédaction, auxquelles j’avais moi-même souscrit, acceptant de retirer mon amendement lors de l’examen du projet de loi Engagement et proximité, ont été levées grâce au travail de la commission des lois. J’avoue donc ne pas comprendre.
Je suis malheureusement au regret d’observer, une fois de plus, un décalage entre les belles paroles du Gouvernement, ses nouvelles déclarations d’amour à l’égard des maires, devenus, depuis à peu près un an, des gens formidables dont on ne peut pas se passer, les piliers de la République, et sa position dogmatique, obstinée qui consiste à s’opposer à une mesure simple et pragmatique.
Quant à cet amendement, cosigné par Sylvie Vermeillet, il tend à répondre aux remarques de certains orateurs, qui ont souligné qu’il pouvait y avoir un doute au sujet de la preuve. Il vise donc à préciser que la preuve du caractère délibéré du manquement ou de la fraude incombe à l’autorité qui prononce la sanction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Avant de donner cet avis, je veux remercier M. le secrétaire d’État de sa petite ouverture lors de sa conclusion. Je n’exclus pas totalement que, la réflexion se poursuivant, cette disposition puisse, certes, sous l’égide gouvernementale, trouver une issue favorable dans le texte 3D.
Concernant l’amendement présenté par M. Maurey, nous comprenons tous son idée : il est important que la preuve de la mauvaise foi reste à la charge de l’administration. Je précise cependant que ce principe me paraît maintenant largement acquis. Il sous-tend l’ensemble des droits spéciaux en cette matière.
Vous dire que cette précision est nécessaire serait vraiment excessif. Elle ne nuit pas au texte, sauf à considérer que tout ajout en soi ne fait pas gagner en clarté la disposition. La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est défavorable.
Monsieur le président Maurey, M. le rapporteur fait le choix du symbole ; j’opte pour la lisibilité du droit.
J’ajoute un seul argument : la disposition que vous proposez ne fait pas disparaître ce qui est peut-être l’un de nos principaux griefs. Nous vous reprochons de créer un droit qui nous paraît un peu plus permissif que pour les particuliers, en ce sens qu’il ne tient pas compte de l’erreur isolée, alors que la loi Essoc retient la notion d’erreur isolée et non récurrente pour les particuliers.
M. le président. Je mets aux voix l’article unique, modifié.
(L’article unique est adopté.)
Article additionnel après l’article unique
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par M. Maurey et Mme Vermeillet, est ainsi libellé :
Après l’article unique
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre IV du titre III du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section ainsi rédigée :
« Section …
« Droit à régularisation en cas d’erreur dans le cadre d’une demande de subvention
« Art. L. 2334-…. – Une collectivité ayant commis une erreur matérielle lors de la formalisation d’une demande de subvention prévue au présent chapitre ou ayant oublié d’y joindre une ou plusieurs pièces exigées ne peut se voir refuser l’octroi de la subvention sollicitée au seul motif de cette erreur ou de cet oubli. La collectivité demandeuse doit pouvoir être mise en mesure, dans un délai raisonnable, de corriger toute erreur matérielle ou de compléter sa demande avant la décision d’octroi ou de refus de la subvention. »
La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Cet amendement vise une situation évoquée lors de la discussion générale, notamment par Mme Costes.
Dans certains cas – c’est vrai que cela ne se produit pas toujours –, une collectivité, notamment une commune, peut se voir refuser une subvention de l’État – DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux) ou DSIL (dotation de soutien à l’investissement local) –, parce que son dossier n’est pas complet. Il arrive que l’administration préfectorale ait le réflexe de signaler qu’il manque des pièces et de demander aux élus de compléter le dossier. Il arrive malheureusement aussi qu’elle profite de lacunes dans le dossier pour le refuser – c’est une manière de faire un premier tri, je n’oserais pas dire un tri sélectif, mais quand même !
Cet amendement vise à inscrire clairement dans la loi qu’un dossier incomplet ne peut justifier le refus pur et simple de cette subvention, l’autorité préfectorale ayant l’obligation de demander à la commune de le compléter. (M. Loïc Hervé applaudit.)
Mme Josiane Costes. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Je veux dire un mot avant de donner l’avis sur cet amendement.
M. le secrétaire d’État a évoqué, il y a quelques secondes, le fait que les dispositions proposées seraient plus permissives, en faisant référence à la notion de répétition d’erreurs. Je pense qu’il y a vraiment là une erreur matérielle. C’est vrai que nous avons supprimé dans le texte la notion de « première fois », non pas pour des motifs de permissivité, mais parce qu’elle n’est pas adaptée à nos collectivités. Imaginez, par exemple, une erreur commise par une commune nouvelle. Comment allez-vous interpréter la notion de première fois ? C’est ce type de situation que nous avons voulu éviter.
La préoccupation exprimée par l’amendement de M. Maurey est largement satisfaite. En effet, l’article R. 2334-23 du code général des collectivités territoriales apporte déjà des garanties en imposant une obligation de demander les pièces manquantes dans un délai de trois mois à compter du dépôt du dossier pour l’aide de la DETR et pour la DSIL.
En revanche, je reconnais volontiers, tout en émettant un avis défavorable, que la question posée par le président Maurey est pertinente. Il interroge sur la manière dont les services de l’État facilitent la vie des collectivités locales. Vous avez, monsieur le président Maurey, exprimé, lors de votre toute dernière intervention, l’idée que les pratiques ne sont pas forcément les mêmes dans tous les territoires, certains services préfectoraux acceptant assez aisément les régularisations tandis que d’autres avaient des positions plus drastiques.
Je m’autorise une suggestion à M. le secrétaire d’État pour permettre d’atteindre l’objectif louable visé par le président Maurey. Pourrait-il un jour envisager, sans l’intégrer dans la loi, l’idée, qui relève des pratiques de l’administration, d’inciter – je ne sais pas si vous pouvez le faire par voie de circulaire ou à l’occasion de réunions – les préfets au maximum de bienveillance à l’égard des collectivités locales pour leur permettre de régulariser leurs dossiers de subvention ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est le même que celui de M. le rapporteur.
Je veux prendre quelques instants pour clarifier la position du Gouvernement concernant le droit à l’erreur spécifique en matière de subvention que cet amendement vise à introduire. Je commencerai en exprimant ce qui relève plus de l’appréciation que de l’argument.
L’amendement tel que vous le présentez peut sembler dépeindre une situation d’octroi de subvention qui nous paraît assez éloignée de la réalité du terrain, même si j’entends, comme M. le rapporteur, que des situations peuvent parfois être différentes d’un territoire à un autre. En tout cas, il ne s’agit pas pour nous d’inciter les services de l’État, préfectoraux ou autres, à profiter de la moindre inadvertance des collectivités pour refuser l’octroi d’une subvention.
M. Hervé Maurey. Ça arrive !
M. Loïc Hervé. On l’a vécu !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Les préfets sont, au contraire, invités à se rapprocher des collectivités pour échanger avec elles sur les projets les plus pertinents. Nous formons le vœu que la création du ministère de la cohésion des territoires renforce ce mouvement.
Nous ne souhaitons pas que les préfets refusent une subvention à un projet intéressant au motif d’une simple erreur qui aurait été commise par la commune ou l’EPCI.
Je veux aussi préciser que, si l’amendement était adopté, il ne viendrait nullement créer un droit pour l’obtention d’une subvention au profit des projets ainsi régularisés, puisque le préfet reste le maître de la décision d’octroyer la subvention – cela, je crois que nous le partageons –, l’octroi d’une subvention relevant du pouvoir d’appréciation des autorités qui l’attribuent et le bénéfice d’une subvention étant conditionné au respect par le demandeur des critères au-delà même des questions de forme.
L’amendement proposé est satisfait – M. le rapporteur l’a dit – par le droit et peut-être de manière indirecte. Le caractère complet du dossier est un préalable à la décision d’octroyer ou non une subvention aux termes de l’article R. 2334-23 du code général des collectivités territoriales. Le régime actuel est très favorable aux collectivités, puisque, si l’incomplétude du dossier n’est pas signalée au demandeur, le dossier est réputé complet au bout d’un délai de trois mois. En cela, votre amendement trouve donc satisfaction.
Sur un plan plus général, le droit distingue déjà très bien la vérification de la complétude du dossier et la décision d’attribution elle-même à l’article R. 2334-25 du code général des collectivités territoriales. En effet, il y est précisé que « l’attestation du caractère complet du dossier de même qu’une dérogation accordée sur le fondement du II de l’article R. 2334-24 ne valent pas décision d’octroi de la subvention ».
Le droit en vigueur prévoit donc d’ores et déjà une forme de droit à l’erreur en cas de dossier incomplet, même si cela ne se présente pas tout à fait sous la forme que vous proposez dans l’amendement.
Enfin, votre amendement – en tout cas, sa présentation – met en avant la complexification des dossiers et la moindre assistance des services de l’État, alors que nous nous efforçons de mettre en œuvre un mouvement de simplification.
Je précise devant vous que les règles de gestion des différentes dotations d’investissement ont été très largement harmonisées, ce qui facilite les demandes de subventions. Elles ont été rassemblées dans une circulaire unique, dont la première édition date de 2019, ce qui nous amènera, je l’espère, à répondre à l’invitation de M. le rapporteur à veiller à une véritable harmonisation et homogénéité des règles d’appréciation de la construction du montage des dossiers et de l’attribution des subventions.
De plus en plus de préfectures ont recours à des solutions dématérialisées permettant – lorsque c’est possible – une simplification du dépôt des demandes.
Pour toutes ces raisons et parce que nous avons commencé à répondre à l’invitation de M. le rapporteur, je considère que votre amendement est satisfait. J’émets moi aussi un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour explication de vote.
Mme Sylvie Vermeillet. Je voudrais ajouter à la présentation de M. Hervé Maurey que l’article 4 de la loi Essoc précise que « l’absence d’une pièce au sein d’un dossier déposé par un usager en vue de l’attribution d’un droit ne peut conduire l’administration à suspendre l’instruction de ce dossier dans l’attente de la transmission de la pièce manquante ».
Il s’agit ici d’accorder ni plus ni moins le même droit aux collectivités ! Nous avons tous, dans nos départements, des exemples de communes qui n’ont pas pu recevoir la subvention demandée parce qu’il manquait une pièce dans le dossier.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez qualifié ce texte de superfétatoire. Or, concrètement et moralement, il est essentiel pour les collectivités ! Le signal envoyé est quand même extrêmement fort. Je crois que, pour le coup, vous allez absolument dans le sens contraire : vous risquez d’envoyer un signal qui va leur faire très mal !
Notre texte propose simplement d’accorder le droit à l’erreur aux petites communes, comme vous l’accordez déjà aux entreprises du CAC 40. Cela me semble tout à fait légitime. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je voterai cet amendement. Si on cherchait une preuve que l’État ignore ce qui se passe réellement dans les territoires, on l’aurait ici. Il est absolument évident qu’il y a des problèmes ici ou là.
Ce que montre aussi notre débat, c’est que ce n’est pas ainsi que l’on réglera le problème. De quoi s’agit-il ? Il s’agit, si j’ai bien entendu ce qu’a dit M. le secrétaire d’État, de faire appliquer par la loi des dispositions qui ne sont pas applicables par la loi. Or, ce qui est en cause, c’est l’action du Gouvernement sur son administration. Évidemment, la haute administration est tellement éloignée des territoires qu’elle croit qu’on ne peut fabriquer des textes qu’à Paris et nulle part ailleurs.
J’ai l’impression – c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de m’abstenir sur cette proposition de loi – que si l’on veut vraiment régler ce type de problème, c’est en faisant le siège du Gouvernement. Il faut exiger qu’il explique à ceux qui ne veulent pas l’entendre qu’il y a un problème majeur de relations – peut-être pas partout – entre une partie de la haute administration et les collectivités locales qui se débattent pour essayer de faire évoluer leurs dossiers.
Voilà le fond du débat et voilà pourquoi il est intéressant. Notre discussion montre qu’il y a bien un problème. Je crains qu’il ne faille ajouter une obligation pour qu’on arrive à le régler. Mais, de toute façon, comme elle ne sera pas respectée…
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je voudrais dire à Mme Vermeillet que l’article 4 de la loi Essoc qui a été cité concernant l’instruction d’un dossier incomplet vise des dossiers ayant pour objet de délivrer ou de garantir un droit aux usagers. Or les dispositions de cet amendement concernent l’obtention d’une subvention.
Comme je l’ai rappelé, notamment en citant des articles du code général des collectivités territoriales, l’octroi ou le bénéfice d’une subvention relève non du droit mais de l’appréciation par l’autorité délivrant la subvention du respect d’un certain nombre de critères et de la qualité des projets. C’est la raison pour laquelle l’instruction d’un dossier valant obtention d’un droit et l’instruction d’un dossier de demande de subvention ne sont pas tout à fait de même nature.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article unique.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. Je veux dire pourquoi je voterai cette proposition de loi.
Dire que ce texte est superfétatoire, c’est considérer que les collectivités locales sont des sous-traitantes, voire des filiales de l’État. Or nous avons une liberté d’administration qui fait que nous devons pouvoir avoir des relations avec l’État, tout comme une entreprise ou un particulier. Moyennant quoi, nous devons pouvoir disposer des mêmes droits, notamment de ce droit à l’erreur.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinquante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Déclaration de naissance au lieu de résidence des parents
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe Union Centriste, la discussion de la proposition de loi relative à la déclaration de naissance auprès de l’officier d’état civil du lieu de résidence des parents, présentée par M. Hervé Marseille et plusieurs de ses collègues (proposition n° 152, texte de la commission n° 236, rapport n° 235).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Hervé Marseille, auteur de la proposition de loi.
M. Hervé Marseille, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a d’abord un constat : en 2019, près de 800 000 enfants sont nés en France, selon les dernières statistiques de l’Insee publiées fin décembre. Pour autant, il faut souligner un déséquilibre territorial, puisque près de la quasi-totalité de ces naissances est enregistrée dans seulement 500 communes. Bon nombre de villes et de villages restent vierges au chapitre des naissances, et ce phénomène ne cesse de s’accroître au gré des fermetures des hôpitaux et des maternités.
Bien entendu, des futurs parents, des femmes choisissent que l’accouchement se fasse à domicile, mais cette pratique demeure aujourd’hui très marginale en termes de statistiques. La notion même de maison ou de ville natale, si chère aux férus d’histoire et de patrimoine, s’évapore au fil des ans, des siècles.
Dans les villes où la maternité a fermé, dans les villages dépourvus de structures, il n’existe pratiquement plus de déclaration de naissance. À Meudon, l’une des plus belles villes d’Île-de-France (Sourires.) – ville qui compte plus de 45 000 habitants et dont j’ai été le maire pendant une vingtaine d’années –, il n’existe plus sur le papier de « Naissances à Meudon ». En effet, le service de maternité ayant fermé il y a quatre ans, les accouchements ont donc lieu dans la ville voisine de Clamart, à l’hôpital Béclère, ou à Sèvres ou encore à Paris XIVe.
Les restructurations territoriales de l’offre sanitaire ont déjà eu des répercussions sur les administrés en les obligeant à consulter, à se faire soigner ailleurs que dans la commune où ils habitent.
Actuellement, on assiste à un « assèchement » des registres d’état civil. Or nous voudrions que les communes ne soient pas seulement là pour enregistrer des décès. Faire vivre nos communes, c’est aussi faire en sorte de valoriser le dynamisme démographique des territoires, de maintenir des archives communales au bénéfice des généalogistes.
Depuis près de vingt ans, de manière récurrente, des collègues parlementaires – que ce soit au Sénat, avec Robert Badinter il y a quelques années, ou à l’Assemblée nationale, avec M. Bouillon –, des élus ont milité pour une modification de l’article 55 du code civil.
Des questions au Gouvernement ont souvent été posées, des amendements ont été déposés à la faveur de textes régissant les collectivités territoriales, et tout récemment encore : je pense notamment lors de l’examen du projet de loi Engagement et proximité.
Des propositions de loi en faveur du lieu de domicile des parents ont bien émergé, mais elles ont été repoussées au motif que la possibilité de domiciles distincts représentait un obstacle juridique.
Je pense aussi à la proposition de loi présentée en 2003 par Jean-Marc Pastor, cosignée par Robert Badinter, qui préconisait une procédure de double déclaration des naissances au cas où la naissance n’a pas lieu dans la commune où sont domiciliés les parents.
À mon tour, j’ai pris l’initiative de déposer une proposition de loi visant à offrir aux parents la possibilité de faire apparaître le nom de leur commune de résidence dans l’acte d’état civil. Ce ne serait ni une contrainte ni une obligation, mais simplement une faculté. Il paraît bon d’accorder une liberté de choix. Je tiens à remercier les 83 collègues, issus de nombreux groupes politiques de notre assemblée, qui ont bien voulu cosigner ce texte. L’Association des maires de France, qui avait engagé une réflexion en 2018 sur ce sujet, m’a fait part de son soutien à cette proposition de loi ; je ne peux que m’en réjouir.
Pour les communes, dont on ne cesse de rappeler qu’elles sont les cellules de base de notre démocratie, ce texte représente un « acte politique fort », comme l’a justement dit le président de notre commission des lois, M. Philippe Bas. C’est pourquoi j’ai à cœur de défendre ce texte, dans une période où nos collectivités et leurs élus ont besoin d’être soutenus.
Nous sommes toujours fiers et heureux que tel artiste, écrivain, scientifique, peintre ou sculpteur soit né dans notre ville ou notre village. Le dispositif de cette proposition de loi a aussi été voulu comme un marqueur d’identité.
Il est donc proposé de modifier l’article 55 du code civil, qui, je le rappelle, découle de la loi du 20 novembre 1919 et dispose, dans sa rédaction actuelle, que « les déclarations de naissance sont faites dans les cinq jours de l’accouchement, à l’officier de l’état civil du lieu ». Une nouvelle version de cet article vous est soumise au travers de cette proposition de loi.
Je précise que l’article 1er a été retravaillé en commission des lois. Je saisis cette occasion pour remercier Mme Agnès Canayer, qui a bien voulu être rapporteure de ce texte et avec qui les échanges ont été particulièrement instructifs et constructifs. Les réflexions et les travaux de la commission ont permis d’améliorer ce texte, en particulier son article 1er, qui a gagné en opérationnalité, et donc en efficacité.
Ainsi, aux termes de la rédaction préconisée par la commission des lois, quand une naissance surviendra dans une commune autre que celle du domicile des parents, l’officier d’état civil du lieu de naissance enverra une copie intégrale de l’acte de naissance à son homologue du lieu de domicile des parents, qui la transcrira sur ses registres. En outre, ce dispositif serait d’abord mis en œuvre à titre expérimental, pour une durée de trois ans.
Naturellement, cette nouvelle disposition, si elle est adoptée, obligera certains services municipaux à s’adapter, ou plutôt à mettre à jour leur mode de fonctionnement. Je ne pense pas, néanmoins, que la charge de travail puisse être importante.
Ce texte constitue une évolution, pas une révolution. Je sais que le Gouvernement est sensible à cette problématique et je ne mésestime pas les précisions et les améliorations à apporter afin de sécuriser définitivement ce dispositif et, par conséquent, les registres de l’état civil.
Monsieur le secrétaire d’État, bien que ce sujet soit du ressort des attributions de Mme la garde des sceaux, je ne doute pas que ce sujet vous soit déjà familier, puisque vous avez déjà répondu, en juin 2019, à une question orale d’un collègue député portant sur ce thème. Je vous remercie de votre présence au banc du Gouvernement aujourd’hui.
J’espère que, à l’issue de notre discussion, cette initiative recueillera un large assentiment et, par la suite, bénéficiera des apports de la navette parlementaire. Je vous remercie d’avance, mes chers collègues, de votre soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et LaREM. – M. François Calvet applaudit également.)