Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le maintien du prérequis de l’absence de méthodologie alternative n’est pertinent que pour les recherches sur l’embryon, et non pour les recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines. En effet, celles-ci ne présentent plus les mêmes propriétés qu’un embryon, puisqu’elles n’ont pas la capacité de former spontanément un nouvel embryon.

En outre, ce prérequis a eu jusqu’ici pour effet de fragiliser les protocoles de recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines, puisqu’il laissait entendre que le recours aux cellules pluripotentes induites pouvait constituer une solution de rechange pertinente.

Or l’on sait désormais que, si elles sont proches, les cellules souches embryonnaires et les cellules iPS n’ont pas exactement les mêmes propriétés, les cellules iPS résultant d’une reprogrammation de cellules adultes avec de possibles altérations.

Pour ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 80 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 299, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 28

1° Remplacer le mot :

ou

par le signe :

,

2° Après le mot :

extra-embryonnaires

insérer les mots :

ou leur insertion dans un embryon animal dans le but de son transfert chez la femelle

La parole est à Mme la ministre.

Mme Frédérique Vidal, ministre. Dans la mesure où cet amendement visait à mettre le texte en cohérence avec l’article 17, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 299 est retiré.

L’amendement n° 82, présenté par MM. Chevrollier et de Legge, est ainsi libellé :

Alinéa 28

Remplacer les mots :

l’opposition formulée en application du premier alinéa du présent III

par les mots :

l’autorisation délivrée en application de l’article L. 2151-5

La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

M. Guillaume Chevrollier. Le texte initial vise à soustraire au contrôle de l’Agence de la biomédecine les recherches visant à différencier les cellules souches embryonnaires en gamètes.

L’Agence se voit ainsi privée de son pouvoir de décision et de contrôle, qui est si important au vu des enjeux. Cet amendement vise donc à le rétablir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Outre que ses dispositions présentent une incohérence, cet amendement vise à soumettre des recherches sensibles sur les cellules souches embryonnaires à une procédure d’autorisation préalable. Pour ce faire, il tend à renvoyer au régime d’autorisation applicable aux recherches sur l’embryon.

Or les recherches sur l’embryon et celles qui portent sur les cellules souches embryonnaires font l’objet de régimes distincts, inscrits désormais par le projet de loi à deux articles différents du code de la santé publique. Il ne suffit donc pas de faire référence au régime applicable à l’embryon pour le rendre applicable aux cellules souches embryonnaires.

Par ailleurs, l’article 14 prévoit précisément une procédure de vigilance particulière de la part de l’Agence de la biomédecine, pour des recherches sur les cellules souches embryonnaires qui sont aussi sensibles que peuvent l’être celles qui concernent la différenciation en gamètes ou la constitution de modèles embryonnaires.

L’Agence peut en effet s’opposer à ces protocoles si elle estime qu’ils violent les principes éthiques fondamentaux, et, dans ce cas, la décision d’opposition sera systématiquement précédée d’un avis public de son conseil d’orientation.

Je rappelle que la recherche sur les cellules souches embryonnaires n’est possible à partir d’embryons qu’après une autorisation par l’Agence de la biomédecine du protocole de recherches sur l’embryon. Quant aux recherches sur des cellules souches embryonnaires qui ont été importées, il faut aussi une autorisation d’importation de l’ABM.

Pour ces raisons, l’avis de la commission spéciale est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 82.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 135 rectifié quater est présenté par MM. de Legge et Chevrollier, Mmes Noël, Bruguière, Thomas et Chain-Larché, MM. Schmitz et Morisset, Mme Sittler, MM. de Nicolaÿ et Cuypers, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Mayet, Piednoir et Mandelli, Mme Lamure, MM. Bascher et B. Fournier, Mme Ramond, MM. Regnard, Longuet, Leleux et H. Leroy, Mme Micouleau et M. Segouin.

L’amendement n° 182 est présenté par M. Meurant.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 28

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les gamètes ainsi créés ne peuvent en aucune façon servir à féconder un autre gamète, issu du même procédé ou obtenu par don, pour constituer un embryon.

La parole est à M. Dominique de Legge, pour présenter l’amendement n° 135 rectifié quater.

M. Dominique de Legge. Par cet amendement, nous souhaitons préciser que, en aucune façon, les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent être fécondés pour concevoir un embryon.

Mme la présidente. L’amendement n° 182 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’amendement n° 135 rectifié quater vise à préciser que les gamètes obtenus par différenciation de cellules souches embryonnaires ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une fécondation pour constituer un embryon.

La commission spéciale a d’ores et déjà précisé que la création d’embryons par fusion de gamètes, quelle que soit l’origine de ces derniers, est interdite. Bien qu’elle soit redondante a priori, la précision apportée par l’amendement peut néanmoins permettre d’insister sur l’interdiction absolue de constituer des embryons à des fins de recherche.

C’est la raison pour laquelle la commission spéciale émet un avis favorable. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. L’interdiction de la conception in vitro à des fins de recherche est inscrite dans la loi depuis 2004. Elle figure donc déjà parmi les grands principes éthiques qui guident nos réflexions et n’a pas été modifiée.

Cela s’applique bien évidemment aux recherches sur les cellules souches embryonnaires comme aux recherches sur les cellules souches pluripotentes induites.

Votre demande est donc satisfaite, monsieur le sénateur. C’est la raison pour laquelle je vous demande de le retirer ; à défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur de Legge, l’amendement n° 135 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Dominique de Legge. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 135 rectifié quater.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 317, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéa 31

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 317.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 77 rectifié quater, présenté par MM. Chevrollier, de Legge, Schmitz et B. Fournier, Mme Bruguière, M. Regnard, Mme Deroche et MM. Morisset, Cardoux, de Nicolaÿ, Vial, Chaize, Meurant, H. Leroy, Segouin et Mayet, est ainsi libellé :

Alinéa 32

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

5° Après le premier alinéa de l’article L. 2151-8, tel qu’il résulte du 2° du présent III, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’importation de cellules souches embryonnaires ne peut être autorisée que lorsque ces cellules souches ont été obtenues dans un pays signataire de la convention d’Oviedo. » ;

La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

M. Guillaume Chevrollier. Cet amendement tend à prévoir que l’importation de cellules souches embryonnaires humaines ne peut être autorisée que lorsque ces cellules souches ont été obtenues dans un pays signataire de la convention d’Oviedo.

Il est en effet étonnant que de nombreuses autorisations d’importation délivrées par l’Agence de la biomédecine portent sur des lignées de cellules souches provenant des États-Unis, d’Israël, d’Angleterre, autant de pays qui ont refusé de signer la convention d’Oviedo, dont l’article 18 a pour objet, je le rappelle, de protéger l’embryon. Ces pays sont dotés d’une législation moins protectrice de l’embryon que la France.

Pour éviter un contournement de la loi française ou internationale qui constituerait une fraude à la loi, la France doit autoriser des importations de lignées en provenance de pays qui ont les mêmes exigences qu’elle, et non de pays moins-disants éthiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’amendement tend à restreindre l’importation de cellules souches embryonnaires humaines aux seules lignées provenant de pays signataires de la convention d’Oviedo.

Néanmoins, le code de la santé publique prévoit déjà que l’importation de ces cellules souches ne peut être autorisée par l’Agence de la biomédecine que si elles ont été obtenues dans le respect des principes éthiques fondamentaux prévus par notre législation, principes qui découlent précisément de la convention d’Oviedo.

Que des lignées soient importées de pays n’ayant pas signé ou ratifié la convention d’Oviedo n’implique pas en effet nécessairement que ces lignées aient été produites en méconnaissance des principes éthiques posés par cette convention.

Chaque fois qu’elle autorise une importation de cellules souches embryonnaires, l’Agence de la biomédecine vérifie que ces cellules ont bien été obtenues dans le respect des principes éthiques. À titre d’information, dans son rapport d’activité publié en 2019 et concernant l’année 2018, une seule autorisation d’importation de cellules souches embryonnaires a été délivrée par l’Agence de la biomédecine.

Pour ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Le véritable enjeu dans ce domaine, et ce point de vue est sans doute largement partagé, est que les lignées utilisées, notamment les lignées importées, aient été dérivées dans le respect des principes éthiques.

C’est ce que nous réaffirmons dans le projet de loi, et tel est l’objet du contrôle rigoureux exercé par l’Agence de la biomédecine avant toute autorisation d’importation.

En restreignant le droit d’importer des lignées de cellules souches embryonnaires aux seuls États signataires de la convention d’Oviedo, l’on priverait les équipes de recherche françaises de la possibilité d’utiliser des lignées qui font référence partout dans le monde et qui – le fait est attesté – respectent les exigences éthiques. J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 77 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 153 rectifié, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Morisset, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Vaspart et Brisson, Mme Lanfranchi Dorgal et M. Bonhomme, est ainsi libellé :

Alinéas 47 et 54

Après la référence :

L. 2151-5

insérer la référence :

, L. 2151-6

La parole est à M. Michel Vaspart.

M. Michel Vaspart. Cet amendement est défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à assurer la coordination induite par l’amendement n° 151 rectifié, discuté précédemment ; mais, compte tenu de la suppression de l’article 17, ces dispositions n’ont plus d’intérêt. J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Même avis !

M. Michel Vaspart. Je retire cet amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 153 rectifié est retiré.

L’amendement n° 318, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéas 47 et 54

Compléter ces alinéas par les mots :

ou n’ayant pas déclaré leurs activités de conservation de cellules souches embryonnaires conformément à l’avant-dernier alinéa du même article L. 2151-9

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 318.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 14, modifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 84 :

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 281
Pour l’adoption 177
Contre 104

Le Sénat a adopté.

Article 14 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Discussion générale

8

Décision de l’Assemblée nationale sur l’engagement d’une procédure accélérée

Mme la présidente. M. le président de l’Assemblée nationale a informé M. le président du Sénat que la conférence des présidents de l’Assemblée nationale, réunie ce jour, a décidé de ne pas s’opposer à l’engagement de la procédure accélérée pour le projet de loi organique relatif au système universel de retraite et pour le projet de loi instituant un système universel de retraite. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert. C’est un scoop !

Mme la présidente. Acte est donné de cette communication.

9

Communication d’un avis sur un projet de nomination

Mme la présidente. En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des lois a émis, lors de sa réunion de ce jour, un avis favorable – 22 voix pour, 3 voix contre et 5 bulletins blancs – à la nomination de M. Didier Migaud aux fonctions de président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

10

Mise au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, au titre du scrutin n° 80, portant sur les amendements identiques nos 204 rectifié bis et 288, ma collègue Nathalie Delattre est mentionnée comme n’ayant pas pris part au vote, alors qu’elle souhaitait voter contre, et mon collègue Guillaume Arnell est indiqué comme n’ayant pas non plus pris part au vote, alors qu’il souhaitait voter pour.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

11

Article 14 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 15

Bioéthique

Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la bioéthique.

Dans la discussion du texte de la commission spéciale, nous en sommes parvenus à l’article 15.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 16

Article 15

I. – (Non modifié) L’intitulé du titre V du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé : « Recherche sur l’embryon humain, les cellules souches embryonnaires humaines et les cellules souches pluripotentes induites ».

II. – L’article L. 2151-7 du code de la santé publique est ainsi rétabli :

« Art. L. 2151-7. – I. – On entend par cellules souches pluripotentes induites des cellules qui ne proviennent pas d’un embryon et qui sont capables de se multiplier indéfiniment ainsi que de se différencier en tous les types de cellules qui composent l’organisme.

« II. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 1243-3 et, le cas échéant, de l’article L. 1121-1, sont soumis à déclaration auprès de l’Agence de la biomédecine, préalablement à leur mise en œuvre, les protocoles de recherche conduits sur des cellules souches pluripotentes induites ayant pour objet :

« 1° La différenciation de cellules souches pluripotentes induites en gamètes ;

« 2° L’agrégation de cellules souches pluripotentes induites avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires ;

« 3° L’insertion de cellules souches pluripotentes induites dans un embryon animal dans le but de son transfert chez la femelle, sans possibilité de parturition.

« Les protocoles de recherche visant l’objet mentionné au 3° du présent II respectent les deux conditions suivantes :

« – en cas de transfert de l’embryon chez la femelle, il est mis fin à la gestation dans un délai approuvé par l’Agence de la biomédecine ;

« – la contribution des cellules d’origine humaine au développement de l’embryon ne peut dépasser un seuil approuvé par l’Agence de la biomédecine. En tout état de cause, ce seuil ne peut être supérieur à cinquante pour cent de cellules d’origine humaine dans le nombre total de cellules formant l’embryon.

« III. – Le directeur général de l’Agence de la biomédecine s’oppose, dans un délai fixé par voie réglementaire, à la réalisation d’un protocole de recherche ainsi déclaré si le protocole ou ses conditions de mise en œuvre ne respectent pas les principes fondamentaux énoncés aux articles 16 à 16-8 du code civil, les principes éthiques énoncés au présent titre et ceux énoncés au titre Ier du livre II de la première partie du présent code. Cette décision est prise après avis public du conseil d’orientation de l’agence.

« À défaut d’opposition du directeur général de l’Agence de la biomédecine, la réalisation du protocole de recherche peut débuter à l’expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent III.

« IV. – Le directeur général de l’Agence de la biomédecine peut à tout moment suspendre ou interdire, après avis public du conseil d’orientation de l’agence, les recherches mentionnées au II qui ne répondent plus aux exigences mentionnées au III. »

III. – (Non modifié) Le chapitre III du titre VI du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Recherche sur l’embryon humain, les cellules souches embryonnaires humaines et les cellules souches pluripotentes induites » ;

2° L’article L. 2163-6 est ainsi modifié :

a) Les trois derniers alinéas sont ainsi rédigés :

« “II. – Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules souches embryonnaires :

« “1° Sans avoir préalablement déclaré un protocole auprès de l’Agence de la biomédecine conformément à l’article L. 2151-6 du code de la santé publique, ou alors que le directeur général de l’Agence de la biomédecine s’est opposé à cette recherche, l’a suspendue ou l’a interdite en application du même article L. 2151-6 ;

« “2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires. » ;

b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« “III. – Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules souches pluripotentes induites :

« “1° Sans avoir préalablement déclaré un protocole auprès de l’Agence de la biomédecine conformément à l’article L. 2151-7 du code de la santé publique, ou alors que le directeur général de l’Agence de la biomédecine s’est opposé à cette recherche, l’a suspendue ou interdite en application du même article L. 2151-7 ;

« “2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires.” »

IV. – (Non modifié) L’article L. 511-19 du code pénal est ainsi modifié :

a) Le II est ainsi rédigé :

« II. – Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules souches embryonnaires :

« 1° Sans avoir préalablement déclaré un protocole auprès de l’Agence de la biomédecine conformément à l’article L. 2151-6 du code de la santé publique, ou alors que le directeur général de l’Agence de la biomédecine s’est opposé à cette recherche, l’a suspendue ou l’a interdite en application du même article L. 2151-6 ;

« 2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires. » ;

b) Il est ajouté un III ainsi rédigé :

« III. – Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait de procéder à une recherche sur des cellules souches pluripotentes induites :

« 1° Sans avoir préalablement déclaré un protocole auprès de l’Agence de la biomédecine conformément à l’article L. 2151-7 du code de la santé publique, ou alors que le directeur général de l’Agence de la biomédecine s’est opposé à cette recherche ou l’a suspendue ou interdite en application du même article L. 2151-7 ;

« 2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires. »

M. le président. L’amendement n° 212 rectifié ter, présenté par Mmes Assassi, Cohen, Apourceau-Poly et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Collombat, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Mes chers collègues, nous entrons dans le vif du sujet, en abordant le cœur de la bioéthique.

L’article 15 peut paraître très scientifique : il l’est. Mais ses conséquences sur le modèle de société que nous voulons et sur l’espèce humaine tout entière sont assez vertigineuses.

Cet article instaure un cadre pour les recherches en matière de cellules souches pluripotentes induites, également appelées cellules iPS, qui sont capables de se multiplier indéfiniment et de se différencier en tout type de cellules qui composent l’organisme.

Le texte initial soumettait à une déclaration préalable auprès de l’Agence de la biomédecine deux types de recherches considérées comme sensibles sur le plan éthique : celles qui portent sur la différenciation de cellules iPS en gamètes et celles qui concernent l’agrégation de cellules souches pluripotentes induites avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires.

Nos collègues députés y ont ajouté les recherches visant l’insertion de ces mêmes cellules dans un embryon animal en vue de son transfert chez la femelle et de la constitution d’un embryon chimérique. Nous y reviendrons lors de l’examen de notre amendement de repli.

Cela étant, cet article pose déjà problème pour les deux premiers types de recherches. En effet, il revient à autoriser dans notre droit, en encadrant la pratique, la fabrication de gamètes artificiels à partir de cellules banales du corps humain.

Plusieurs universitaires et chercheurs lancent l’alerte : potentiellement innombrables, ces gamètes au génome éventuellement modifié pourraient créer de très nombreux embryons, parmi lesquels on choisirait le plus « convenable », sans imposer aux patientes les épreuves liées à la fécondation in vitro. « Qui refuserait alors, dans le futur, la promesse d’un bébé “zéro défaut ?” », s’interrogent les mêmes intellectuels.

Selon nous, le risque de dérive eugénique est tout à fait réel.

Certes, le régime déclaratif des recherches est accompagné d’un droit d’opposition de l’Agence de la biomédecine ; mais quels critères celle-ci retiendra-t-elle ? Face aux immenses problèmes soulevés, nous sommes pour l’heure sans réponse : c’est la raison même de cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission spéciale chargée dexaminer le projet de loi relatif à la bioéthique. Si la suppression de cet article était motivée par la crainte de la création d’embryons chimériques, il semble que cette peur ne soit plus justifiée. En effet, nous avons rétabli l’interdiction dont il s’agit en supprimant l’article 17.

Par ailleurs, la suppression de l’article 15 est problématique à deux égards. D’une part, elle empêcherait de soumettre les cellules iPS à un encadrement qui, aujourd’hui, fait cruellement défaut, notamment pour certaines recherches sensibles comme celle qui concerne la différenciation en gamètes. D’autre part, et surtout, elle entraînerait la suppression de l’alinéa complétant l’intitulé du titre V du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique – « Recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires » – en y incluant les cellules souches pluripotentes induites.

C’est à cette condition que l’interdiction, souhaitée, des embryons chimériques sera possible. Voilà pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.