Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour la réplique.

M. Bernard Buis. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces réponses, que je ne manquerai pas de transmettre à tous les maires qui m’ont interrogé.

gestion des boues des stations d’épuration

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, auteur de la question n° 039, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales.

M. Jean-Claude Anglars. Les collectivités territoriales gestionnaires de la compétence assainissement sont confrontées à la problématique de la gestion des boues des stations d’épuration, particulièrement à la question de l’hygiénisation des boues.

Les acteurs s’inquiètent de l’évolution réglementaire en cours, censée définir les modalités de stockage et d’épandage des effluents pour les unités de méthanisation sous statut d’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE).

En effet, dans le contexte de la crise sanitaire, plusieurs arrêtés portant sur la gestion des boues d’épuration urbaine ont créé de nouvelles contraintes pour les services d’assainissement des collectivités territoriales, comme l’impossibilité de l’épandage agricole pour les boues liquides non hygiénisées.

Or les collectivités doivent avoir la visibilité nécessaire pour s’adapter aux modifications réglementaires à venir, relatives aux systèmes de traitement des boues, notamment pour répondre aux futurs critères d’innocuité et évoluer vers la siccité qui pourrait être requise.

Par ailleurs, dans les départements ruraux, comme l’Aveyron, où 90 % des boues de stations d’épuration sont épandues en agriculture – ce procédé reste le plus vertueux, le plus durable et le plus économique –, les collectivités expriment de fortes inquiétudes quant aux importants surcoûts de traitement que vont entraîner les modifications à mettre en œuvre.

Madame la secrétaire d’État, quelles sont les modifications réglementaires envisagées concernant la gestion des boues pour les services d’assainissement collectif ? En parallèle, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour accompagner les collectivités dans la mise en conformité de la gestion des boues des stations d’épuration, et selon quel calendrier ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Dominique Faure, secrétaire dÉtat auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur Anglars et cher voisin (Sourires.), vous avez interrogé ma collègue Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales ; ayant dû s’absenter, elle m’a confié le soin de vous répondre.

La gestion durable des boues de stations d’épuration est essentielle au bon fonctionnement de ces infrastructures et donc à la protection des milieux aquatiques, des zones de baignade ou encore, par exemple, de la conchyliculture.

La réglementation encadrant l’épandage des boues date de 1998 : les nouvelles connaissances scientifiques et techniques acquises depuis lors justifient de renforcer les exigences de qualité des boues d’épuration destinées à une valorisation agronomique en agriculture.

Il est indispensable d’accroître ces exigences pour mieux protéger les sols, mieux protéger la ressource en eau et maintenir une relation de confiance entre les producteurs de boues, les exploitants agricoles et les consommateurs. L’intention du Gouvernement est donc bien de pérenniser cette filière vertueuse sur les plans environnemental et économique conformément aux ambitions de la France, que traduit la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

L’amélioration de la résilience de cette filière a subi de plein fouet les conséquences de la pandémie de covid-19 ; elle n’en est pas moins souhaitable. À ce titre, France Relance a ciblé une aide spécifique aux collectivités territoriales pour faciliter l’hygiénisation des boues et donc leur valorisation.

Par ailleurs, le Gouvernement vient de saisir le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) pour obtenir une analyse du risque sanitaire, au regard de l’épidémie et des restrictions actuelles.

Les discussions sur les projets de textes fixant le futur socle commun d’innocuité aux matières fertilisantes et supports de culture se poursuivent avec les acteurs concernés, notamment les services publics industriels et commerciaux (SPIC) de l’eau, sous le pilotage du ministère de l’agriculture. Marc Fesneau – je n’en doute pas – saura prendre en considération leurs préoccupations.

Pour répondre à ces nouveaux référentiels, il nous faudra améliorer la qualité des boues. La priorité est de diminuer certaines pollutions rejetées dans les réseaux d’assainissement, effluents d’activités industrielles et artisanales ou contaminants présents dans les eaux pluviales du fait de leur ruissellement sur des surfaces souillées.

Pour actionner ces différents leviers, les agences de l’eau constituent un partenaire financier essentiel…

Mme la présidente. Madame la secrétaire d’État, votre temps de parole est épuisé.

Mme Dominique Faure, secrétaire dÉtat. … des collectivités territoriales.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour la réplique.

M. Jean-Claude Anglars. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse et je note que le dialogue est engagé.

Nous sommes effectivement voisins : en bon Aveyronnais, j’espère que l’écoute continuera d’être au rendez-vous et que le bon sens paysan permettra de trouver les meilleures conditions d’application.

situation critique de l’hébergement d’urgence et respect de l’inconditionnalité de l’accueil

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, auteur de la question n° 063, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement.

M. Guillaume Gontard. Ma question s’adressait au ministre du logement.

À Grenoble, durant cinq semaines, l’association « Droit au logement Isère » a installé un campement sur l’esplanade de la caserne de Bonne pour dénoncer l’absence de solutions d’hébergement et rendre visibles les conditions de vie indignes d’une centaine de familles aujourd’hui à la rue ou mal logées.

Ces familles comptent parfois de très jeunes enfants, dont certains handicapés et d’autres en mauvais état de santé. Elles sont en situation de grande précarité et peinent à se nourrir chaque jour.

Alors que la chaleur et la sécheresse rendent la vie à la rue encore plus rude, les appels au 115 se révèlent souvent infructueux ; et, lorsque des hébergements sont proposés, ils sont très souvent inadaptés, accordés à titre temporaire et généralement très éloignés des écoles et des administrations.

Pourtant, cette situation n’est pas une fatalité. L’inconditionnalité de l’accueil est en effet un principe inscrit dans le code de l’action sociale et des familles. De plus, nombre de ces personnes remplissent les critères permettant d’établir le caractère prioritaire de leur dossier au titre du droit à l’hébergement opposable (DAHO) ou du droit au logement opposable (DALO).

Or, depuis des années, des associations, des citoyens et des collectivités territoriales pallient les défaillances de l’État. À Grenoble, la ville a trouvé un hébergement pour ces familles pour le mois d’août et travaille à la réquisition de logements vacants. En Isère, on recense ainsi plus de 17 000 logements vacants et 3 300 bâtiments publics inoccupés.

Cela n’exonère pas l’État de ses obligations en matière d’hébergement d’urgence. Avec d’autres parlementaires de l’Isère et en lien avec les collectivités territoriales, j’ai demandé à la préfecture d’intervenir rapidement pour permettre l’accueil inconditionnel de ces familles sans qu’un tri soit opéré selon leur situation administrative.

Madame la secrétaire d’État, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour répondre à l’insuffisance actuelle des solutions de mise à l’abri et améliorer les conditions de vie dans les centres d’hébergement d’urgence ? Plus spécifiquement, quels moyens apportera-t-on en Isère pour répondre à la situation de ces dizaines de familles à la rue ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Dominique Faure, secrétaire dÉtat auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur Gontard, votre question porte sur l’hébergement et l’accès au logement des plus précaires.

Jamais la mobilisation du Gouvernement en faveur des personnes sans domicile n’a été si grande qu’aujourd’hui. Mais, comme vous le soulignez, il reste malheureusement beaucoup à faire : nombre de situations préoccupantes persistent, et elles exigent l’engagement de tous les acteurs.

La politique d’hébergement est avant tout une politique humaine, centrée sur les personnes.

C’est d’abord une politique de prévention, pour agir en amont et limiter au maximum les discontinuités dans les trajectoires de vie. Des consignes ont ainsi été transmises aux préfets à la sortie de l’état d’urgence sanitaire, afin d’assurer le relogement de toutes les personnes qui feraient l’objet d’un concours de la force publique à l’issue de la trêve hivernale ou, à défaut, de leur proposer une solution d’hébergement et d’accompagnement adaptée à leurs besoins.

C’est aussi une politique d’action pour toutes les personnes contraintes de recourir à l’hébergement d’urgence. L’État a ainsi fait de la politique du « Logement d’abord » le cadre de référence de son action de lutte contre le sans-abrisme depuis 2017, pour que les personnes hébergées accèdent le plus rapidement possible à un logement. Cette politique porte ses fruits : plus de 330 000 personnes sans domicile ont accédé au logement depuis 2018. Dans votre département de l’Isère, 1 269 personnes ont accédé au logement social au cours de la seule année 2021, grâce à l’implication constante de l’ensemble des acteurs.

C’est enfin le financement d’un parc d’hébergements destinés à l’accueil inconditionnel des personnes ayant besoin d’être hébergées, principe fondamental ancré dans la loi française. Ce parc atteint aujourd’hui un niveau historiquement élevé : il dépasse désormais les 190 000 places, ce qui représente 20 000 places de plus qu’avant la crise sanitaire.

En outre, l’État veille à ce que cette politique soit assortie d’un accompagnement de qualité pour chacun, qu’il s’agisse de l’ouverture des droits sociaux, de la petite enfance, de la scolarité des plus grands ou encore de la santé.

En la matière, le Gouvernement agit en lien étroit avec de très nombreuses associations – c’est particulièrement vrai en Isère. Leur implication et leur dévouement, qui sont indispensables, permettent d’aboutir à des solutions concrètes.

De même, il est indispensable que les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les communes, prennent pleinement leur part de responsabilité en lien avec les services de l’État pour répondre au mieux à ces besoins.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

M. Guillaume Gontard. Madame la secrétaire d’État, j’entends bien ce que vous dites. En ce moment, ce sont justement les collectivités territoriales, en particulier la mairie et la métropole de Grenoble, qui pallient les défaillances de l’État.

Pour ces 100 familles qui sont dehors, je demande des mesures concrètes et j’espère les obtenir très rapidement : ces familles attendent une vraie réponse !

Mme la présidente. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

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Mises au point au sujet de votes

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Madame la présidente, lors du scrutin n° 137, notre collègue Stéphane Artano a été noté comme ayant voté contre l’amendement n° 203 rectifié, alors qu’il souhaitait voter pour.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic.

M. Olivier Cadic. Madame la présidente, je vous remercie de bien vouloir prendre en compte que, lors du scrutin public n° 132, je n’ai pas souhaité prendre part au vote, alors qu’il est indiqué que j’ai voté contre l’amendement n° 130 rectifié bis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. Madame la présidente, lors du scrutin n° 132, ma collègue Christine Bonfanti-Dossat souhaitait voter pour, alors qu’elle a été comptabilisée comme ayant voté contre.

Lors du scrutin n° 138 sur l’amendement n° 185, ma collègue Laure Darcos souhaitait voter contre, alors qu’elle a été comptabilisée comme ayant voté pour.

Mme la présidente. Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique des scrutins.

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Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021
Discussion générale (suite)

Règlement du budget et approbation des comptes de l’année 2021

Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021
Article liminaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2021 (texte n° 838, rapport n° 844).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Gabriel Attal, que j’ai l’honneur et le plaisir de remplacer aujourd’hui pour l’examen en nouvelle lecture de ce projet de loi de règlement de l’année 2021.

S’agissant de ce texte, beaucoup de choses ont été dites lors de l’examen en première lecture. Permettez-moi néanmoins d’y revenir brièvement.

À la faveur de l’amélioration de la situation sanitaire, l’année 2021 a été celle de la sortie progressive du « quoi qu’il en coûte », de la reprise économique et du début du redressement de nos comptes.

L’année passée a encore été marquée par de très fortes turbulences sur les plans sanitaire et économique. Cette instabilité explique d’ailleurs le montant des reports de crédits effectués l’année dernière, soit 24,6 milliards d’euros, sur lesquels nous avons eu l’occasion de nous expliquer lors de la première lecture.

Cette année 2021 a aussi été l’an un du redressement des comptes. Sous la conduite de Bruno Le Maire et d’Olivier Dussopt, notre déficit public a diminué de 2,5 points de PIB, passant de 8,9 % à 6,4 %.

Pour autant, cette sortie progressive du « quoi qu’il en coûte » n’a jamais été conduite au détriment des Français, que nous avons le devoir impérieux de protéger des aléas économiques. Durant cette période, nous avons tout fait pour ne pas ajouter la vulnérabilité financière à la vulnérabilité sanitaire.

S’agissant de la protection des ménages, je veux mentionner les 3,8 milliards d’euros mobilisés pour verser une indemnité inflation de 100 euros à 38 millions de foyers, ou encore les 600 millions d’euros engagés pour verser un chèque énergie exceptionnel à 5,6 millions de foyers modestes juste avant les fêtes de fin d’année.

Cependant, on ne protège pas les individus sans aider les entreprises qui les emploient. Nous avons donc, durant ces mois de stop and go pandémique, constamment adapté nos dispositifs. Je pense en particulier à l’activité partielle, dont ont bénéficié 3,5 millions de salariés. Globalement, nous avons mobilisé plus de 34 milliards d’euros dans le cadre de la mission « Plan d’urgence face à la crise sanitaire ». Ce faisant, nous n’avons pas fait de cadeaux aux entreprises, comme j’ai pu l’entendre : nous leur avons permis de tenir le choc, de ne pas manquer de trésorerie, de continuer d’investir et d’embaucher.

Je veux aussi rappeler l’effort de relance exceptionnel entrepris l’année dernière. Avec 72 milliards d’euros engagés au 31 décembre dernier sur les 100 milliards prévus, nous avons agi vite et fort pour accélérer la transition énergétique, pour renforcer la compétitivité et le dynamisme de nos industries, mais aussi pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes.

Assumer la fin du « quoi qu’il en coûte » sans laisser les agents économiques à la merci de la crise : voilà la ligne de crête sur laquelle le Gouvernement avance. Et je crois pouvoir le dire, cette politique a fait la preuve de son efficacité l’année dernière.

En faisant le choix de la protection et de la relance, nous avons fait le choix de la croissance et de l’emploi. Avec une croissance de 6,8 % l’année dernière, notre pays fait 1,4 point de mieux que la moyenne de la zone euro. Certains ont voulu y voir uniquement un effet de rattrapage, sans jamais concéder le moindre satisfecit s’agissant de notre gestion. Je veux simplement dire que nous pourrions de temps en temps nous réjouir lorsque notre pays réussit, car c’est le fruit du travail de tous.

S’agissant de la situation de l’emploi, celle-ci n’a jamais été si favorable depuis 2008, avec un taux de chômage ramené à 7,3 % de la population active et un chômage des jeunes au plus bas depuis quarante ans. Là aussi, réjouissons-nous que notre pays aille mieux, après des décennies de chômage de masse.

Grâce à la vigueur de la reprise, nous avons pu compter sur un surplus de recettes fiscales. Par rapport à la loi de finances initiale, ce sont 37,9 milliards d’euros supplémentaires que nous avons encaissés, grâce au dynamisme de l’impôt sur les sociétés, de la TVA et de l’impôt sur le revenu.

À l’occasion de la première lecture, certains d’entre vous ont cherché à démontrer que ce surplus était uniquement lié aux circonstances et à l’effet de l’inflation, sans jamais admettre que notre politique de compétitivité et d’attractivité avait contribué, sans doute, à la bonne santé de nos entreprises et donc au rendement de l’impôt sur les sociétés, et ce malgré une baisse de son taux. Là aussi, j’aurais aimé que nous puissions nous retrouver sur ce constat.

Finalement, et en dépit des critiques formulées, l’année 2021 aura donc été celle de la validation de la stratégie du Gouvernement : soutenir l’activité économique et faire diminuer le chômage, pour plus de croissance et plus de rentrées fiscales. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Éric Gold et Pierre Louault applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Sénat a décidé de rejeter ce projet de loi de règlement le 19 juillet dernier, et la commission mixte paritaire qui s’est ensuivie le lendemain a, sans surprise, conclu à un échec.

Pas davantage de surprise à l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, mercredi 27 juillet, puisque nos collègues députés ont adopté le texte dans des termes identiques à ceux issus de leur examen en première lecture.

Brièvement, je rappellerai les principaux éléments qui ont motivé notre rejet. Tout d’abord, s’il est notable que le niveau global de l’activité a été bon en 2021, il n’est pas encore revenu à celui de l’année 2019. D’ailleurs, nos performances ont été moins bonnes que celles de nos partenaires européens.

Rétrospectivement, on peut observer qu’en 2021 nous avons subi un certain nombre de chocs économiques, dont les effets perdurent en 2022 : problèmes d’approvisionnement en matières premières ; évolution des prix avec l’inflation ; chocs sur les marges des entreprises et sur le coût de financement de la dette.

En tout état de cause, ce rattrapage économique a eu un coût, monsieur le ministre, celui de la dégradation de nos comptes publics. Les recettes publiques ont en effet été sous-évaluées lors de l’examen du PLFR de fin de gestion en 2021, car la prévision de croissance du Gouvernement pour 2021, soit 6,25 %, était excessivement prudente. Cela a d’ailleurs permis au Gouvernement d’affirmer qu’il avait pu dégager une manne supplémentaire de 30 milliards d’euros, s’accordant là un brevet de bonne conduite pour sa gestion.

Par ailleurs, si les dépenses publiques sont inférieures de 10 milliards d’euros à la prévision retenue dans le PLFR de fin de gestion, leur montant nous éloigne encore très fortement des objectifs inscrits en loi de programmation des finances publiques, et notre déficit est aujourd’hui principalement supporté par l’État, tandis que les collectivités locales parviennent quasiment à l’équilibre et que les administrations de sécurité sociale ont divisé par plus de deux leur déficit.

Quant à notre endettement public, il reste à un niveau très élevé en comparaison européenne, puisqu’il est plus de 40 points supérieur à celui de l’Allemagne !

Le budget de l’État, pour sa part, connaît un déficit en 2021 supérieur à 170 milliards d’euros, parce que nous subissons toujours une augmentation de nos dépenses : 420 milliards d’euros pour moins de 250 milliards d’euros de recettes.

Au total, le surcroît de dépenses entre 2019 et 2021 est tout de même – excusez du peu – plus de trois fois supérieur aux sommes mises en jeu lors de la crise financière de 2008 à 2010.

M. François Patriat. Ce n’était pas la même !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Or je n’ai pas le sentiment que cela soit perçu comme une situation exceptionnelle, puisqu’aucune diminution de dépenses n’est à ce jour prévue.

Du point de vue budgétaire, le montant extraordinaire des reports de crédits opérés en 2021 est très contestable : plus de 36 milliards d’euros, alors que, depuis l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le montant des crédits reportés chaque année avait toujours été inférieur à 3,8 milliards d’euros. C’est un rapport d’un à dix, qui n’est pas satisfaisant et que nous ne pouvons voir reconduit.

Par ailleurs, en dépit du brevet de bonne gestion qu’il s’accorde, le Gouvernement continue de s’exonérer des règles organiques sur les principes de spécialité et d’annualité, tout en appelant, dans les mots, du moins, à la rigueur des comptes.

Je rappelle que le Sénat n’avait pas voté la loi de finances initiale pour 2021, dont le présent texte, même révisé, traduit l’exécution. Certes, nous avons voté les PLFR pendant la crise sanitaire, mais nous avons à plusieurs reprises souligné la dérive des comptes publics. Nous avons également exprimé notre désaccord sur le versement d’une indemnité inflation lors du second projet de loi de finances rectificative pour 2021, considérant qu’elle était mal ciblée.

Enfin, évidemment, sur la forme, le président de la commission et moi-même avons marqué notre désapprobation sur le fait que, pour la première fois depuis vingt-deux ans, le Gouvernement avait déposé le projet de loi de règlement après le 1er juillet, soit avec plus d’un mois de retard sur la date limite prévue par la LOLF. C’est un abus contradictoire avec le discours du Gouvernement sur le changement de méthode.

Pour toutes ces raisons, et par cohérence avec le vote du Sénat en première lecture, je propose que le Sénat n’adopte pas le projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2021. Ce sont à la fois les mesures que le budget exécuté comporte et les manœuvres procédurales employées par le Gouvernement en cours d’année qui justifient que nous adoptions cette position. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, sans surprise, la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 20 juillet dernier n’est pas parvenue à un accord sur le projet de règlement du budget et d’approbation des comptes de 2021.

Le Sénat ayant rejeté en première lecture ce texte, et nos collègues députés ayant adopté en nouvelle lecture le même texte qu’en première lecture, l’issue de nos débats est connue d’avance : notre assemblée rejettera le projet de loi de règlement en nouvelle lecture, comme elle l’a fait en première lecture, et le groupe Union Centriste, qui s’est majoritairement abstenu en première lecture, s’abstiendra de nouveau très largement aujourd’hui.

Certes, nous avons rejeté la première partie de la loi de finances initiale pour 2022, mais nous avons voté la première loi de finances rectificative afin d’accompagner la sortie de crise. En revanche, nous ne voterons pas le présent projet de loi de règlement, car il traduit une dérive des finances publiques marquée par une forte augmentation du déficit structurel.

Celui-ci aura en effet doublé sur la durée du quinquennat, passant de 72 milliards d’euros à 145 milliards d’euros !

Malgré un fort rebond des recettes fiscales, le déficit de l’État est, en 2021, quasiment identique à son niveau de 2020, année dont chacun mesure le caractère exceptionnel. Nous regrettons que le Gouvernement n’ait pas utilisé ces recettes supplémentaires pour réduire l’endettement, comme l’y invitait la commission des finances du Sénat. Notre dette publique approche désormais les 3 000 milliards d’euros. Elle s’est accrue de 665 milliards d’euros en cinq ans, et le PLFR, malheureusement, ne fera qu’aggraver la situation.

La cote d’alerte, pour reprendre une expression de notre ministre de l’économie et des finances, était donc atteinte bien avant cette année.

Cette incapacité à maîtriser nos finances publiques est d’autant plus inquiétante que nous assistons désormais à une remontée des taux d’intérêt. Les taux à dix ans, qui sont restés négatifs et pratiquement constants depuis 2019, sont devenus positifs. À la mi-juin, ils étaient proches de 2 % et pourraient atteindre 3 % à la fin de décembre.

Nous le voyons avec le collectif budgétaire que nous sommes en train d’examiner en parallèle, la seule charge de la dette s’est déjà alourdie de 15 milliards d’euros en 2022 ! Nous ne pouvons plus continuer à vivre dans un tel déni de réalité. Nous ne pouvons plus, vous ne pouvez plus, monsieur le ministre, vous abriter éternellement derrière la crise sanitaire et son caractère exceptionnel.

M. François Patriat. Quel cynisme !

M. Hervé Maurey. Le dérapage de nos finances publiques n’est pas imputable à la seule crise de la covid-19. Les dépenses courantes, indépendantes de la crise sanitaire et du plan de relance, ont augmenté en 2021 de 17,6 milliards d’euros, le tout sans la moindre économie en regard.

Le rapport de la Cour des comptes est, à cet égard, cinglant et éloquent quant au manque d’ambition réformatrice du Gouvernement. Les quelques mesures du début de quinquennat n’auront pas permis au pays d’affronter la crise covid et, désormais, l’inflation, dans de bonnes dispositions financières.

Nous regrettons que, dans le même temps, l’État n’ait pas répondu aux difficultés financières des collectivités locales. Je rappelle qu’elles ont subi près de 7 milliards d’euros de pertes en 2020 et 2021, dont 3,2 milliards d’euros pour les seules communes et leurs groupements, du fait de la covid.

Les réponses apportées par le Gouvernement ont été, sur ce point, clairement insuffisantes, malgré les demandes du Sénat. En dépit des dénégations du Gouvernement, les faits sont là : la Cour des comptes indique que, à la fin de 2021, plus de 45 % des communes disposent d’un niveau d’épargne qui reste inférieur à celui de 2019.

Le refus initial du Gouvernement de prévoir dans le cadre du projet de loi de finances rectificative que nous examinons actuellement une compensation pour la revalorisation du point d’indice et des dépenses énergétiques démontre une nouvelle fois le peu d’attention que celui-ci porte à nos collectivités.

D’autres raisons justifient notre position d’abstention.

Elles tiennent notamment aux conditions d’examen du texte, qui ne permettent pas au Parlement de remplir convenablement sa mission d’évaluation et de contrôle.

Premier texte financier du second quinquennat, le projet de loi de règlement est examiné à la hâte, puisque le texte a été déposé le 4 juillet, alors qu’il aurait dû l’être avant le 1er juin, en application de l’article 46 de la LOLF.

On est loin des bonnes intentions proclamées à l’attention du Parlement, et notamment du Sénat, par le Gouvernement.

Cette situation n’est pas admissible, à plus forte raison quand on connaît l’état de nos comptes publics. Une loi de règlement est vidée de son utilité lorsque le Parlement ne dispose pas du temps nécessaire pour exercer ses prérogatives de contrôle et d’évaluation.

Au-delà de ces problèmes de calendrier, il n’est pas admissible non plus que soient à ce point malmenés les principes budgétaires et, à travers eux, la portée de l’autorisation parlementaire. Qu’il y ait plus de 20 milliards d’euros de crédits reportés et des crédits ayant servi à financer d’autres programmes budgétaires que ceux prévus par la représentation nationale illustre, une fois de plus, le manque de respect du Gouvernement pour le Parlement.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Union Centriste s’abstiendra majoritairement, laissant à ses membres leur liberté de vote, comme il est de coutume. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)