PRÉSIDENCE DE M. Mathieu Darnaud
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Transformation d’un groupe de travail en commission spéciale
M. le président. Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole ayant été transmis au Sénat, le groupe de travail dont les membres ont été nommés en séance le 8 novembre dernier peut être transformé en commission spéciale.
Il n’y a pas d’opposition ?
Il en est ainsi décidé.
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Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
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Financement de la sécurité sociale pour 2024
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2024 (projet n° 77, rapport n° 84, avis n° 80).
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur ce projet de loi ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre Ier de la deuxième partie, aux amendements identiques nos 487 rectifié, 712 rectifié bis et 1235 rectifié, tendant à insérer un article additionnel après l’article 10 quinquies.
DEUXIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2024
TITRE Ier (SUITE)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre II (suite)
Simplifier le recouvrement social et le financement de la sécurité sociale
Après l’article 10 quinquies (suite)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 487 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel et Daubet, Mme Girardin, MM. Grosvalet, Guérini et Guiol et Mme Pantel.
L’amendement n° 712 rectifié bis est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 1235 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès et Féret, M. Fichet, Mmes Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Chantrel, Jacquin, Mérillou, Kerrouche, Ouizille, Ziane et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le I de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter du 1er janvier 2023, est compensée par la suppression dans la même proportion d’une mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale existante. »
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 487 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Selon l’Insee, au cours du premier semestre 2021, le taux de marge des entreprises atteignait près de 36 %, un niveau jamais atteint depuis 1949.
Parallèlement, l’Institut de recherches économiques et sociales évalue le montant des aides publiques reçues par les entreprises à 8,4 % du PIB, ce qui en fait l’un des plus hauts de l’OCDE.
Dans ce contexte, il nous semble important de limiter la mise en place de nouveaux dispositifs d’exonération de cotisations sociales.
Aussi, cet amendement vise à ce que tout nouveau dispositif d’exonération soit compensé par la suppression d’une exonération existante pour un montant équivalent, afin de ne pas affaiblir la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 712 rectifié bis.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, plutôt que le doublement des franchises médicales sur les médicaments et les consultations, avec une perspective de recettes de 800 millions d’euros – il est dans les tuyaux –, nous demandons l’application du principe de compensation systématique et intégrale de toute nouvelle exonération de cotisations sociales, par la suppression, dans le même temps et dans les mêmes proportions, d’un dispositif d’exonération existant pour un montant équivalent.
Le coût total des mesures d’exonération prétendument en faveur de l’emploi a atteint 73,8 milliards d’euros en 2021 pour l’ensemble des régimes de sécurité sociale, ce qui correspond à une hausse de 9,3 % – que vous avez évoquée hier, monsieur le ministre.
Ainsi, quand ils ne sont pas compensés, ces dispositifs d’exonération ont entraîné, en 2021, une dépense publique ou une perte de recettes – voire les deux – estimées par la Commission des comptes de la sécurité sociale à près de 32 milliards d’euros pour la branche maladie, près de 16 milliards d’euros pour la branche vieillesse, 13 milliards d’euros pour la branche famille, 0,3 milliard d’euros pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) et 0,4 milliard d’euros pour la branche autonomie.
La Cour des comptes, dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, a constaté, en 2019, que certaines niches ne sont que rarement remises en question, même lorsque des évaluations concluent à leur inefficacité. N’oublions pas que dans chaque niche se cache un chien… En cela, elles sont bien défendues !
Ces dispositions de contournement sont d’autant plus problématiques que le manque à gagner pour la sécurité sociale n’est désormais pas intégralement compensé par l’État.
Nous souhaitons geler le nombre de dispositifs, en attendant de les réduire.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 1235 rectifié.
M. Bernard Jomier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le dispositif proposé n’a pas de valeur juridique : une loi ne peut contraindre une loi à venir.
L’article 20 de la loi de programmation des finances publiques empêche d’ores et déjà les niches fiscales de dépasser 14 % des recettes des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, ce qui implique, en pratique, de respecter une règle de gage de ce type.
J’ai bien entendu les différents argumentaires qui ont été développés. La règle serait de ne pas créer de niches supplémentaires. Pourtant, certains proposent d’en créer encore…
La commission est défavorable à ces trois amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. En effet, la loi de programmation des finances publiques prévoit déjà un plafonnement général à 14 %, ce qui permet de répondre aux attentes des auteurs de ces amendements.
En outre, je rappelle que la compensation intégrale par crédit budgétaire de toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations sociales figure déjà dans la loi.
Par ailleurs, une nouvelle annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit l’évaluation des niches sociales.
Je considère que tout cet appareillage permet de satisfaire les auteurs des amendements, raison pour laquelle j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je veux moi aussi insister sur le principe établi par la loi Veil en 1994 selon lequel toute mesure d’exonération générale de cotisations à la sécurité sociale devrait systématiquement être compensée par l’État.
Cela n’est plus le cas, loin de là ! On assiste à de nombreuses exonérations. Vous en inventez très régulièrement de nouvelles, monsieur le ministre, si bien qu’aujourd’hui, comme vous l’avez vous-même reconnu hier soir, les exonérations de cotisations sociales et fiscales se chiffrent à 87 milliards d’euros.
Vous avouerez que cette somme ferait un bien immense au budget de notre sécurité sociale… Elle nous permettrait de résorber ce déficit abyssal, qui ne fait que se creuser et qui va continuer dans cette voie, puisque votre trajectoire prévoit un déficit de plus de 17 milliards d’euros en 2027.
Notre amendement tend à limiter la mise en place de nouveaux dispositifs d’exonération et, à tout le moins, à s’assurer que chaque nouveau dispositif s’accompagne de la suppression d’un dispositif existant pour un montant équivalent.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, j’aimerais savoir où nous en sommes de ce plafonnement général à 14 %, dont j’entends bien qu’il s’agit d’une règle de gage.
En tout état de cause, si l’on en est à 12 %, notre dispositif a un sens : cela veut dire qu’il ne faut plus en rajouter…
M. le président. La parole est à M. Thomas Cazenave, ministre délégué.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Madame la sénatrice, nous sommes très précisément, pour 2024, à 13,7 %.
Mme Raymonde Poncet Monge. Merci !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 487 rectifié, 712 rectifié bis et 1235 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1044 rectifié, présenté par Mme Havet, MM. Patriat et Iacovelli, Mme Nadille, MM. Théophile, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Haye, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Mohamed Soilihi, Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch et Mme Schillinger, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au a du 19° ter de l’article 81 du code général des impôts, la seconde occurrence du mot : » publics » est supprimée.
II. – Au d du 4° du III de l’article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale, le mot : « publics » est supprimé.
III. – À l’article L. 3261-2 du code du travail, la seconde occurrence du mot : » publics » est supprimée.
IV. – Les dispositions de cet article entrent en vigueur au 1er juillet 2024.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
VI. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Nadège Havet.
Mme Nadège Havet. Pour contribuer au développement de l’usage du vélo pour se rendre au travail, une participation obligatoire de l’employeur, à hauteur de 50 % des frais de location de vélos engagés par les employés, existe déjà, au même titre que pour les abonnements de transport collectif.
Cette mesure concerne actuellement les seuls loueurs publics.
Cet amendement vise à étendre l’obligation de prise en charge par l’employeur du remboursement des frais de location de vélos auprès de services privés au-delà des seuls services publics de location.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le code du travail dispose déjà que l’employeur prend à sa charge 50 % du coût des trajets des salariés entre l’entreprise et le domicile, qu’ils empruntent les transports publics ou, ce qui est sans doute moins connu, qu’ils utilisent les services publics de location de vélos. Ces avantages sont exonérés d’impôt sur le revenu et de contribution sociale généralisée (CSG).
En pratique, dans l’expression « transports publics », le terme « publics » s’oppose non pas à « privés », mais à « personnels » : la nature de la société de transport n’est donc pas en cause.
Dans le cas particulier des services publics de location de vélos, le terme « publics » ne se réfère donc pas au caractère public ou privé de l’entité de location de vélos.
Par conséquent, la commission est favorable à cet amendement, dont l’adoption apporterait une clarification utile.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Madame la sénatrice, cet amendement va dans le bon sens en ce qu’il apporte des précisions utiles, qui permettent d’étendre les cas de prise en charge à l’offre de services privés : avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 quinquies.
L’amendement n° 1014 rectifié ter, présenté par MM. Tabarot, Mandelli, Perrin, Longeot, Maurey, Rapin, Rietmann, Piednoir, Lefèvre et Levi, Mme Micouleau, M. Bonhomme, Mme Demas, MM. Pellevat, J.B. Blanc et Bouchet, Mmes Schalck, Canayer et V. Boyer, M. Courtial, Mme Joseph, MM. Meignen, Bouloux et Khalifé, Mme Malet, MM. Panunzi, Sol et Pointereau, Mme Josende, MM. Sautarel et Laménie, Mme Gosselin, M. P. Martin, Mme Belrhiti, M. Grosperrin, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Belin, Sido et Chatillon, Mme Lopez, MM. Brisson, Gueret et Cuypers, Mme Herzog, M. Somon, Mmes Di Folco et Romagny et M. H. Leroy, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L’article L. 3261-2 du code du travail est complété par deux phrases ainsi rédigées : « L’employeur peut librement choisir de prendre en charge, le cas échéant, tout ou partie du reste du coût des titres d’abonnements souscrits par ses salariés. Dans de tels cas, il bénéficie des mêmes avantages, dans la limite de 25 % du prix de ces titres, que ceux entourant la part obligatoire de remboursement fixée par voie réglementaire. »
II. La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Philippe Tabarot.
M. Philippe Tabarot. Mes chers collègues, je vais vous présenter un très bon amendement (Sourires.), qui vise à pérenniser une avancée votée par le Sénat.
Face à l’augmentation générale des prix et à l’urgence écologique, il est indispensable de proposer des solutions à même de concilier pouvoir d’achat et baisse des émissions.
Le transport public étant la colonne vertébrale d’une mobilité durable, il faut permettre aux employeurs de participer davantage à la prise en charge des abonnements de transport public de leurs employés.
Jusqu’à l’été 2022, la loi prévoyait certes une exonération de cotisations et de contributions sociales, mais dans la limite de 50 % des frais d’abonnement souscrits par les salariés pour leurs déplacements entre leur lieu de résidence et leur lieu de travail.
Après adoption d’un amendement que j’avais déposé, la loi de finances rectificative pour 2022 a porté ce plafond d’exonération à 75 % pour les années 2022 et 2023, ce qui a permis aux salariés de bénéficier d’un gain supplémentaire de pouvoir d’achat exonéré d’impôt sur le revenu.
Le Gouvernement ayant pérennisé ce dispositif pour l’ensemble des fonctionnaires depuis le 1er septembre dernier, il serait juste que les salariés du secteur privé puissent continuer d’en bénéficier au-delà de 2023.
Ainsi, sur la base du volontariat pour les entreprises, j’y insiste, cet amendement vise à maintenir à hauteur de 75 % la part d’exonération de cotisations et de contributions sociales des frais d’abonnement souscrits par les salariés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agissait d’une disposition temporaire. Si nous devons porter une attention particulière à ces usagers, nous devons la même attention aux caisses de la sécurité sociale.
Toutefois, comme il s’agit d’un excellent amendement, avant de m’en remettre à la sagesse du Sénat, je sollicite l’avis du ministre…
M. Philippe Tabarot. Merci, madame la rapporteure ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Le bulletin officiel de la sécurité sociale permet déjà à l’employeur de prendre en charge une fraction supérieure à 50 % du coût des titres d’abonnement, voire la totalité. Dans ce cas, la participation facultative – au-delà de 50 % – est exonérée, dans la limite des frais réellement engagés, soit jusqu’à 100 %.
Les dispositions du bulletin officiel sont donc, d’une certaine manière, mieux-disantes que le dispositif de M. Tabarot. Dès lors, je ne voudrais pas que l’adoption de cet amendement restreigne la portée de la disposition du bulletin officiel.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il y sera défavorable.
M. le président. Monsieur Tabarot, l’amendement n° 1014 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Philippe Tabarot. Oui, monsieur le président : la confiance n’exclut pas le contrôle…
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 quinquies.
L’amendement n° 524 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le f du 4° du III de l’article L. 136-1-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …) Les avantages en nature que représentent pour les salariés occupant un emploi à caractère saisonnier au sens du 3° de l’article L. 1242-2 du code du travail la mise à disposition par l’employeur d’un logement pour une durée n’excédant pas six mois dans des conditions prévues par décret. » ;
2° Après le 7° du II de l’article L. 242-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les avantages en nature que représentent, pour les salariés occupant un emploi à caractère saisonnier au sens du 3° de l’article L. 1242-2 du code du travail, la mise à disposition par l’employeur d’un logement pour une durée n’excédant pas six mois dans des conditions prévues par décret. »
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à la taxe visée à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.
La parole est à M. Christopher Szczurek.
M. Christopher Szczurek. Le travail saisonnier est indispensable au bon fonctionnement de notre secteur agricole et touristique. Cet amendement vise donc à faciliter le recrutement des travailleurs saisonniers en abaissant la fiscalité pesant sur les employeurs qui mettent un logement à leur disposition.
Selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), environ 1 million de personnes sont recrutées pour un travail saisonnier en France chaque année. Près de 25 % d’entre elles travaillent dans l’agriculture, où elles représentent un tiers de l’emploi, particulièrement dans les secteurs fruitiers et les vendanges. Notre économie touristique repose également sur ces travailleurs indispensables à nos entreprises.
Ceux-ci souffrent néanmoins d’une situation particulièrement précaire, ce qui rend ces métiers peu attractifs : discontinuité des revenus, faible protection sociale, difficultés de l’accès au logement. Ainsi observe-t-on une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, récurrente dans ce domaine, qui oblige de nombreux employeurs à recourir à des travailleurs étrangers, voire illégaux.
Il est donc nécessaire de favoriser le recrutement par des mesures fiscales incitatives, afin de répondre aux difficultés de logement des saisonniers dans les zones touristiques et agricoles. À cette fin, le présent amendement tend à exclure de l’assiette des cotisations et de la CSG les avantages en nature que représentent les logements des saisonniers, pour une durée n’excédant pas six mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’objectif des auteurs de cet amendement est très légitime : on sait combien il est compliqué pour les travailleurs saisonniers de se loger.
Pour autant, comme je viens de le dire, prévoir des niches supplémentaires revient à grever davantage les comptes de la sécurité sociale ; or, comme l’indique le pourcentage cité à l’instant par M. le ministre, nous avons atteint une limite à cet égard : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je partage l’argument de Mme la rapporteure générale.
Par ailleurs, nous avons pris des mesures exceptionnelles d’exonération, portant notamment sur les revenus des travailleurs saisonniers. Ces exonérations sont totales pour les rémunérations égales ou inférieures à 1,2 fois le montant mensuel du Smic, puis dégressives au-delà jusqu’à s’annuler pour les rémunérations égales ou supérieures à 1,6 Smic. En outre, nous aidons très largement les filières, à hauteur de plus de 3 milliards d’euros.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 946, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 241-2. – I. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont également constituées par des cotisations assises sur :
« 1° Les avantages de retraite, soit qu’ils aient été financés en tout ou partie par une contribution de l’employeur, soit qu’ils aient donné lieu à rachat de cotisations ainsi que les avantages de retraite versés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1, à l’exclusion des bonifications ou majorations pour enfants autres que les annuités supplémentaires ;
« 2° Les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 131-2 ;
« 3° Le produit de la contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, prévue par l’article L. 245-13 ;
« 4° Le produit de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15.
« Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par arrêté ministériel pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés.
« Les cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont à la charge des employeurs et des travailleurs salariés et personnes assimilées ainsi que des titulaires des avantages de retraite et des allocations et revenus de remplacement mentionnés aux 1° et 2° du présent I.
« II. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par une fraction égale à 38,81 % du droit de consommation prévu à l’article 575 du code général des impôts. »
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Nous proposons de financer la prise en charge à 100 % des dépenses de santé par l’assurance maladie via le rétablissement des cotisations patronales à la branche maladie.
Vous le savez, depuis 2015, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a permis d’exonérer les employeurs de 6 points de cotisations sociales, et sa transformation en réduction pérenne des cotisations maladie pour les employeurs n’a eu aucun effet, ou si peu, sur la création d’emplois en France. Pis, cela a contribué à aggraver la situation des comptes sociaux, avec une perte de recettes pour l’État et la sécurité sociale d’un montant de 28 milliards d’euros pour 2024.
Au travers de cet amendement, nous proposons une solution pour dégager des recettes. Plutôt que de dérembourser 500 millions d’euros de frais dentaires, comme vous le prévoyez, monsieur le ministre, mieux vaudrait renouer avec une sécurité solidaire intégrale, débarrassée des barrières financières.
Selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) de 2021, portant sur les dépenses de santé de 2020, l’assurance maladie obligatoire prend en charge 79,8 % des dépenses de consommation de soins et de biens médicaux, les organismes complémentaires supportent 12,3 % de ces dépenses, et ce qui reste, soit 6,5 %, est à la charge des ménages.
La sécurité sociale rembourse 92,8 % des soins hospitaliers et 92 % des transports sanitaires, contre seulement 69,2 % des soins de ville, 73,8 % des médicaments et 45 % des autres biens médicaux.
Le montant total des dépenses d’un remboursement intégral par l’assurance maladie peut être estimé autour de 24,5 milliards d’euros. Ce montant serait largement inférieur si l’on tenait compte des effets directs ou indirects d’un remboursement à 100 %.
Cela n’entraînerait évidemment pas la suppression des complémentaires santé. Le ministre de la santé a indiqué vouloir opérer un virage en termes de prévention ; il nous semble que ces organismes pourraient y contribuer.