M. Aymeric Durox. À l’heure où le secteur rural a recruté 120 000 vendangeurs en Champagne et 25 000 dans le Beaujolais ainsi que 55 000 cueilleurs de pommes et de poires, le recrutement des saisonniers n’a jamais été aussi difficile et beaucoup d’exploitations ont recours à des travailleurs détachés ou extra-européens.
Cet amendement a donc pour objet de pérenniser le système d’exonération de cotisations sociales des travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi. Ce dispositif devait initialement être abrogé le 1er janvier 2021, mais cette échéance a été reportée d’abord à 2023 puis à 2026.
Voter pour cet amendement, c’est apporter notre soutien à ce secteur, qui connaît des difficultés de recrutement et qui doit parfois faire face à des conditions climatiques difficiles. Adoptons cette mesure qui permettra de donner un peu de quiétude et d’espérance à notre ruralité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons ce débat chaque année.
Rappelons-en la chronologie. Ce dispositif devait initialement s’arrêter le 1er janvier 2021. Ensuite, il a été régulièrement prorogé, la Haute Assemblée y étant chaque fois unanimement favorable. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a ainsi étendu le dispositif jusqu’au 1er janvier 2026, la rédaction initiale de ce texte ayant fixé l’échéance au 1er janvier 2024.
Dans ce contexte, vous proposez, mon cher collègue, de rendre ce dispositif pérenne, ce que d’autres sénateurs ont proposé à plusieurs reprises.
Certes, l’article 20 du projet de loi de programmation des finances publiques prévoit que les niches sociales instaurées par un texte promulgué à compter du 1er janvier 2023 ne sont applicables que pour une durée maximale de trois ans, précisée par le texte qui les institue.
Toutefois, le dispositif TO-DE a été instauré antérieurement et la commission était favorable aux prorogations antérieures du dispositif. Elle s’en remet donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Ce dispositif, prorogé jusqu’en 2026, consiste en une exonération de cotisations sociales. Or la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale impose l’évaluation systématique de tous les dispositifs d’exonération. Il serait paradoxal de plaider pour des évaluations régulières des exonérations et des niches tout en pérennisant un dispositif d’exonération sans évaluation préalable. Ce serait complètement contraire à l’esprit de cette loi organique.
Du reste, il me semble de bonne gestion que d’évaluer l’effet des dispositifs, même s’ils s’appliquent durant plusieurs années, avant de se prononcer sur leur éventuelle pérennisation.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 60 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet et Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, MM. Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 1020 rectifié est présenté par MM. Menonville et Bonnecarrère, Mme O. Richard, MM. Bonneau, Chevalier, Bonhomme, Courtial, Bouchet, Kern, Wattebled et Cadec, Mmes Drexler, Aeschlimann et Jacquemet, MM. J.M. Arnaud, Henno et Gremillet, Mme Billon, MM. Chatillon, Tabarot, Duffourg, Bleunven et Klinger, Mmes Saint-Pé et Romagny et MM. Chauvet, H. Leroy et Somon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 4° du III de l’article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 60 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Il s’agit d’inscrire dans le marbre le dispositif TO-DE, dont nous parlons chaque année.
Dans un contexte de dumping social des concurrents européens de notre pays, ce dispositif permet aux agriculteurs employeurs de saisonniers agricoles de maintenir la compétitivité de leur exploitation. L’utilité de ce dispositif n’est plus à démontrer, puisque plus de 900 000 contrats sont conclus chaque année sur son fondement.
Or il arrive à échéance en 2025. Chaque année, l’interrogation sur la prorogation de ce dispositif est comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête des viticulteurs. Sans doute, on peut se donner rendez-vous au moment de l’examen du PLF pour 2025, mais les viticulteurs et les agriculteurs ont actuellement d’autres préoccupations. Ils aimeraient être rassurés quant à la pérennisation de ce dispositif, qui, j’y insiste, a montré toute son efficacité.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 1020 rectifié.
M. Olivier Henno. Cet amendement identique de M. Franck Menonville a été très bien défendu par notre collègue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous comprenons la pertinence de cet amendement, puisque ce dispositif soulage les entreprises agricoles. Ce débat pose d’ailleurs la question de l’excès de cotisations dans ce pays : c’est un fait, quand les affaires sont difficiles, quand l’exploitation est difficile, l’hypothèse de l’exonération totale ou partielle des cotisations sociales doit être envisagée.
Cela étant dit, cette mesure coûterait 500 millions d’euros. Or la sécurité sociale n’a pas forcément les moyens d’être si généreuse.
Pour autant, la commission a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. J’aurai le même commentaire que sur l’amendement n° 994 rectifié.
Il existe une loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, adoptée par le Parlement, qui dispose que les exonérations de cotisations sociales font l’objet d’évaluations régulières avant leur prorogation.
Je puis entendre les inquiétudes liées à l’incertitude sur une potentielle remise en cause du dispositif. C’est la raison pour laquelle il avait été prolongé pour une période de trois ans, ce qui donnait de la visibilité tout en permettant au Parlement d’évaluer régulièrement les dispositifs et de vérifier leur bonne utilisation, ce qui me semble également important.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 60 rectifié et 1020 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 quinquies.
Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 4 rectifié est présenté par M. Verzelen.
L’amendement n° 62 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme Girardin, MM. Grosvalet, Guiol et Laouedj et Mme Pantel.
L’amendement n° 586 rectifié quater est présenté par MM. Chasseing, Guerriau et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. A. Marc et Capus, Mme Paoli-Gagin, M. Brault, Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme O. Richard et M. H. Leroy.
L’amendement n° 1016 rectifié ter est présenté par M. Menonville, Mme N. Goulet, M. Bonnecarrère, Mme Jacquemet, M. P. Martin, Mmes Aeschlimann et Drexler, MM. Cadec, Chaize, Kern, Bouchet, Courtial, Bonhomme et Bonneau, Mme Perrot, MM. J.M. Arnaud, Henno et Gremillet, Mme Billon, MM. Chatillon, Tabarot, Duffourg, Bleunven et Klinger, Mmes de La Provôté et Saint-Pé et M. Somon.
L’amendement n° 1154 rectifié quater est présenté par Mme Loisier, MM. Canévet et Bacci, Mmes Gacquerre, Berthet et Pluchet, M. Longeot et Mme Romagny.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le troisième alinéa du I de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
a) Après la référence : « 1°, », est insérée la référence : « 2°, » ;
b) Les mots « , à l’exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
L’amendement n° 4 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 62 rectifié bis.
Mme Nathalie Delattre. Le dispositif TO-DE représente un soutien vital pour les agriculteurs employeurs de main-d’œuvre. Néanmoins, certains employeurs agricoles ne peuvent bénéficier de ces exonérations. C’est notamment le cas des entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf), alors qu’elles sont confrontées à une augmentation importante de leurs coûts d’exploitation.
En effet, depuis la loi de finances pour 2015, ce dispositif est limité aux agriculteurs employeurs de main-d’œuvre à titre individuel ou collectif et aux travaux forestiers, « à l’exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers ».
Pourtant, ces entreprises, qui emploient 15 % des salariés de la production agricole, sont confrontées, comme les autres, à une perte de compétitivité, la crise sociale, économique et maintenant énergétique n’ayant pas arrangé les choses.
C’est pourquoi nous proposons que les entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers puissent bénéficier de nouveau de l’exonération de cotisations sociales pour l’emploi des travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 586 rectifié quater.
M. Daniel Chasseing. Il est défendu !
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 1016 rectifié ter.
M. Olivier Henno. Défendu également !
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 1154 rectifié quater.
Mme Anne-Catherine Loisier. Cet amendement a été excellemment présenté, mais je veux ajouter une précision.
Ces entreprises de travaux forestiers sont aujourd’hui soumises à une forte saisonnalité. En effet, elles ne peuvent plus travailler en hiver, parce que cela détériore les chemins, ni au printemps, parce que le code de l’environnement interdit le débroussaillage du mois de mars au mois d’août ; mais ensuite, elles ne peuvent plus travailler non plus, parce que les salariés ne sont pas disponibles !
Elles sont confrontées à des surcoûts de charges qui rendent absolument nécessaire l’emploi de saisonniers. C’est un élément déterminant dans la capacité de ces entreprises à assumer leurs missions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous remercie, ma chère collègue, d’avoir si parfaitement défendu cette filière, à laquelle je ne suis évidemment pas insensible.
Néanmoins, la commission refuse traditionnellement de lui étendre le bénéfice de l’exonération visée : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Je partage l’avis de la rapporteure générale.
D’une part, les Etarf bénéficient des dispositifs d’allégement de cotisations sociales. Ainsi, les rendre éligibles à ce dispositif pourrait les inciter à utiliser plus de travailleurs précaires au détriment de salariés de droit commun.
D’autre part – je m’emploierai désormais à préciser le coût de chaque amendement –, une telle mesure entraînerait pour la sécurité sociale une perte de recettes de 80 millions d’euros.
Je vous éclairerai de cette manière, à mesure que les amendements sont adoptés, sur le coût pour les finances sociales de dispositions, qui, petit à petit, s’agrègent et finissent par alourdir la facture pour notre sécurité sociale : avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.
Mme Anne-Catherine Loisier. J’entends vos arguments, monsieur le ministre, mais je pourrais vous donner, en réponse, le coût du risque d’incendie et le coût de la perte de biodiversité.
Mme Anne-Catherine Loisier. Nous devons aborder ces sujets dans le cadre d’une approche globale et le coût de la défense contre l’incendie va bien au-delà du chiffre que vous avez indiqué.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 62 rectifié bis, 586 rectifié quater, 1016 rectifié ter et 1154 rectifié quater.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 66 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet et Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, MM. Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À l’avant-dernier alinéa du I de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 25 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Mme Nathalie Delattre. Cet amendement vise à améliorer le dispositif spécifique d’exonération de cotisations et de contributions sociales patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi du secteur agricole, en faisant passer le seuil de dégressivité de 1,2 à 1,25 Smic.
Nos filières de la viticulture, de l’arboriculture, du maraîchage, de l’horticulture, des pépinières viticoles, des semences et de la polyculture sont confrontées au dumping social de nos concurrents européens, notamment de l’Espagne, de l’Italie ou de l’Allemagne, pays dans lesquels le coût pour l’employeur d’un salarié qui touche le salaire minimal est respectivement inférieur de 35 %, de 68 % et de 30 % par rapport à la France.
Dans ce contexte, le dispositif TO-DE permet chaque année la conclusion de plus de 900 000 contrats, grâce à des charges réduites.
Nous proposons donc d’augmenter le seuil de dégressivité, afin de mieux prendre en compte la réalité des rémunérations des salariés agricoles concernés, en particulier en cette période d’inflation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Il s’agit d’une charge supplémentaire de 20 millions d’euros pour la sécurité sociale : avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.
Mme Nathalie Delattre. Il est sans doute intéressant pour nous d’être tenus informés du coût que peuvent engendrer les mesures proposées, mais cela risque de nous culpabiliser, alors qu’en réalité, derrière nos propositions de mesures, se trouvent des emplois, des réalités humaines.
Je veux bien que l’on parle d’argent, monsieur le ministre, mais nous vous parlons de réalités humaines. Avec Florence Lassarade, nous vous avons parlé de suicide.
Mme Nathalie Delattre. Nous vous parlons de dignité, d’emploi.
Je comprends vos propos, monsieur le ministre, et vous avez raison d’indiquer ce coût, mais on ne peut pas se contenter d’un avis défavorable « parce que ça coûte tant ». Ce n’est pas possible.
M. le président. L’amendement n° 650 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mmes Estrosi Sassone et Primas, MM. Klinger, J.B. Blanc, Cuypers, Menonville et Lefèvre, Mme Dumont, M. D. Laurent, Mme Goy-Chavent, MM. Chatillon et Panunzi, Mmes Richer et Noël, MM. Levi, Bruyen et Michallet, Mme Puissat, M. Sol, Mme Berthet, MM. Bouchet, Bacci, Chasseing et Longeot, Mmes Muller-Bronn et Demas, MM. Bonhomme, Belin, Tabarot, de Nicolaÿ, Paul, Pellevat et Milon, Mme Malet, MM. Allizard, S. Demilly et Folliot, Mmes Nédélec et Micouleau, MM. Meignen et Duffourg, Mmes Billon et Garnier, MM. Cadec, Pointereau, Sido, Gremillet et Savin, Mme Romagny, M. Henno, Mmes Pluchet, Bonfanti-Dossat et Lassarade, M. Rietmann, Mme Belrhiti, M. P. Martin, Mmes Drexler, Lopez et Josende, M. Somon, Mme de La Provôté et MM. Bleunven et Rapin, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Les salariés travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi des sociétés coopératives agricoles et leurs unions qui se consacrent au conditionnement des fruits et légumes, telles que citées à l’article 1451 du code général des impôts, bénéficient des dispositions du présent article.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Daniel Laurent.
M. Daniel Laurent. Cet amendement a pour objet d’étendre aux coopératives agricoles de fruits et légumes et leurs unions le bénéfice du dispositif TO-DE.
En effet, à ce jour, seules les exploitations agricoles bénéficient de l’exonération des cotisations et contributions sociales patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi.
Or les coopératives de fruits et légumes sont dirigées par les exploitants agricoles produisant les fruits et légumes et sont donc des employeurs agricoles. Elles constituent le prolongement de l’exploitation de leurs adhérents.
À ce titre, et selon la même saisonnalité que leurs adhérents, les coopératives qui conditionnent des fruits et légumes sont amenées à embaucher un grand nombre de saisonniers. Or leur exclusion du bénéfice du TO-DE freine ces embauches, ce qui pénalise le développement de l’emploi en agriculture, pourtant un élément important de la compétitivité de la ferme France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous assistons depuis quelques minutes à des présentations d’amendements tendant à élargir le bénéfice des exonérations de cotisations sociales.
En tant que rapporteure générale du budget de la sécurité sociale, je ne reste pas insensible à la situation de tous ces secteurs, qui participent de la vie de nos territoires.
Toutefois, nous sommes ici pour défendre l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. Et cet équilibre, au-delà de nos discussions, a des conséquences sur nos vies au travers de la santé, des aides importantes pour les familles, des pensions pour les retraités, de l’autonomie et de l’accompagnement des personnes handicapées.
Nous ne nous désintéressons pas de tous les secteurs d’activité mentionnés, mais la réalité est que nous faisons face à une grande difficulté : rendre notre système de protection sociale pérenne. Cela devrait nous préoccuper avant toute chose. Nous aurons d’autres occasions de nous pencher avec précision sur les problèmes que rencontrent, soit de façon conjoncturelle, soit de façon pérenne, certaines filières.
Je tenais à vous faire ce petit rappel. Il me semble très important d’avoir bien en tête que l’équilibre du système doit être défendu à tout prix.
La commission demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Ce texte étant un projet de loi de financement de la sécurité sociale, il a trait à l’équilibre financier de celle-ci et à son budget. Or la mesure proposée a un coût estimé entre 10 millions et 15 millions d’euros.
En outre, l’adoption de cet amendement risque d’encourager les coopératives à s’appuyer sur des travailleurs précaires, alors qu’elles pourraient tout à fait faire appel à des salariés permanents.
M. Jean Sol. Comment faisons-nous ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. C’est la raison pour laquelle je ne souhaite pas étendre ce dispositif : avis défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 quinquies.
L’amendement n° 445 rectifié ter, présenté par M. P. Martin, Mme Canayer, MM. Chauvet, Bacci, Rietmann, Henno, Levi et Pellevat, Mmes Jacquemet, Noël et Richer, M. Reichardt, Mme Devésa, MM. Burgoa, Bonnus, Laugier, Courtial et Kern, Mmes Antoine, Romagny et Guidez, MM. Houpert, D. Laurent et Bonhomme, Mme Vermeillet, M. Sautarel, Mme Vérien, MM. Cigolotti et Tabarot, Mme Saint-Pé, MM. Wattebled, Lafon, Anglars, Bouchet, Longeot et Verzelen, Mme Gatel, M. Pointereau, Mme Demas, M. J.P. Vogel, Mme Nédélec, MM. Menonville, Bouloux, Cadec, A. Marc, Reynaud et Mandelli, Mmes Billon et de La Provôté et MM. Bleunven et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 52 de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « ou agent public » ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « salariés », sont insérés les mots : « ou agents publics » ;
2° Le premier alinéa du II est ainsi modifié :
a) Après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « ou agent public » ;
b) Après le mot : « ses », la fin de l’alinéa est ainsi rédigée : « emplois, dès lors que son employeur est soumis aux obligations fixées à l’article L. 5422-13 et au chapitre IV du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail. » ;
3° Au IV, après le mot « salariés », sont insérés les mots :« ou agents publics » ;
4° Au V, après le mot : « salariés », sont insérés les mots : « ou agents publics ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Pascal Martin.
M. Pascal Martin. L’article 52 de la loi du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie a instauré, sur l’initiative du Sénat, un dispositif de réduction de cotisations patronales en contrepartie de la mise à disposition par les employeurs de leurs salariés engagés en tant que sapeurs-pompiers volontaires au profit des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis).
La réduction de cotisations patronales avait initialement vocation à bénéficier à l’ensemble des employeurs, qu’ils soient publics ou privés. Toutefois, sous la pression de la majorité gouvernementale à l’Assemblée nationale, les employeurs publics ont été exclus du dispositif dans le texte de la commission mixte paritaire.
Le bénéfice de cette réduction de cotisations patronales pour les employeurs publics paraissait pourtant parfaitement justifié, a fortiori pour les communes rurales, pour lesquelles la mise à disposition de leurs employés constitue une charge non négligeable.
En excluant les employeurs publics du dispositif, le législateur s’est donc privé, dans un contexte de crise du volontariat, d’un vivier de recrutement de sapeurs-pompiers volontaires significatif, alors même que la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF) s’est donné pour objectif de recruter 50 000 volontaires d’ici à 2027 pour répondre à l’augmentation de la sollicitation opérationnelle à laquelle sont confrontés les Sdis.
Le présent amendement vise donc à remédier à cette situation en modifiant l’article 52 de la loi du 10 juillet 2023 de manière à inclure les employeurs publics dans le champ des bénéficiaires potentiels du mécanisme de réduction des cotisations patronales accordé en contrepartie – j’y insiste – de la mise à disposition de leurs employés sapeurs-pompiers volontaires au profit des Sdis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Compte tenu de l’enjeu essentiel que constitue le recrutement de sapeurs-pompiers volontaires, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous souhaitez retoucher un texte dont l’encre est à peine sèche ! En effet, la loi a été promulguée le 10 juillet dernier à la suite d’un accord entre les deux chambres et le Gouvernement en commission mixte paritaire. Nous réviserions alors un dispositif sans rien connaître de son application ! Revenir aujourd’hui sur cet équilibre trouvé par le Parlement, sur son initiative, me paraît prématuré.
Par ailleurs, cette mesure représenterait un coût pour la sécurité sociale de 50 millions d’euros.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. (M. Laurent Burgoa proteste.)