Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bourcier. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Corinne Bourcier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le cancer, et plus précisément le cancer du sein, est un sujet qui me touche familialement, comme il nous touche tous. Il est aujourd’hui très rare de ne pas être ou de ne pas avoir été concerné plus ou moins directement par ce type de cancer.
Je parlerai beaucoup des femmes dans mon intervention, car elles sont très majoritaires parmi les victimes du cancer du sein, mais je souhaite rappeler que 1 % des personnes atteintes sont des hommes.
Madame la rapporteure, chère Cathy Apourceau-Poly, vous l’avez très bien souligné, mais on ne le répétera jamais assez : le cancer du sein est la première cause de mortalité par cancer chez la femme. C’est aussi le type de cancer le plus fréquent en Europe et dans de nombreux pays. Chaque année en France, plus de 60 000 nouveaux cas sont diagnostiqués et l’on sait que 20 000 d’entre eux pourraient être évités. Sur ce point, la période 2022-2023 est malheureusement marquée par une légère diminution du dépistage par rapport à la période précédente.
Nous le savons, l’une des principales causes du non-recours au dépistage est la crainte de la maladie. Il est parfois plus facile pour certaines de rester dans l’ignorance que d’affronter la peur d’un diagnostic redoutable. Et c’est sur cela que la prévention devrait, selon moi, être axée, sachant que 90 % des femmes traitées à temps d’un cancer du sein en guérissent. Il faut donc absolument parvenir à ancrer dans les mentalités qu’il n’y a pas à redouter un dépistage en ce qu’il y a peu à craindre si la maladie est détectée suffisamment tôt.
Malheureusement, pour beaucoup de femmes, les difficultés à bénéficier d’un diagnostic précoce résultent non pas d’un manque d’information ou de sensibilisation à la prévention, mais des difficultés d’accès aux soins dans leur territoire.
Les moins chanceuses doivent alors entamer une lutte contre une maladie qui leur coûte beaucoup : physiquement, psychologiquement, socialement, professionnellement et aussi financièrement.
Pourtant, sur ce dernier aspect, on ne peut pas dire que rien ne soit fait par notre système de protection sociale. Le cancer du sein est reconnu comme une affection de longue durée, régime permettant une prise en charge plus avantageuse des soins pour le patient, notamment au travers de l’absence de ticket modérateur.
Cependant, beaucoup de frais restent tout de même à charge. C’est le cas de certaines franchises ou de certains forfaits que la présente proposition de loi, dans sa version actuelle, vise à supprimer, ce qui poserait alors question au regard des autres pathologies graves. Il reste également les nombreux soins dits de support, mais ô combien nécessaires, et dont le texte suggère la prise en charge intégrale.
Par ailleurs, dans la plupart des cas, le cancer n’est pas une maladie invisible. Même si c’est loin d’être l’unique signe du traitement de cette affection, on pense en premier lieu à la perte des cheveux, des cils et des sourcils.
Sur ce point, je souhaite rappeler l’aberration que constitue la prise en charge actuelle d’une prothèse capillaire : elle devient nulle si le prix d’achat dépasse les 700 euros, ce qui est justement le cas de la plupart des prothèses de qualité acceptable. Nous espérons que le texte permettra d’accélérer les travaux déjà en cours sur cette question.
À titre personnel, je souhaiterais que davantage de moyens soient mobilisés en faveur d’une prévention encore plus poussée, plus technique.
Le débat arrive au bon moment. En cette période d’Octobre rose, de nombreuses actions sont menées. Je remercie toutes les associations et structures en lien avec cette opération de sensibilisation.
Il est impossible de ne pas soutenir l’esprit de la présente proposition de loi, qui tente d’adoucir, autant que cela soit possible, le rude combat que doivent mener les personnes atteintes d’un cancer du sein. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et Les Républicains. – Mme la rapporteure applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Milon. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le cancer du sein est – cela a été rappelé – le cancer le plus fréquent en France. L’âge médian des femmes au moment du diagnostic est de 64 ans. Cette affection représente la première cause de mortalité chez les femmes, mais c’est aussi le cancer qui, dépisté tôt, a l’un des meilleurs taux de survie, soit 88 %.
Ces éléments statistiques objectifs justifient effectivement que l’on s’interroge sur une meilleure prise en charge des soins liés au traitement du cancer du sein. Comme l’a souligné notre collègue rapporteure, le cancer du sein, considéré comme une ALD, bénéficie de ce fait d’une prise en charge intégrale des frais de santé liés à l’affection : chimiothérapie, radiothérapie, mastectomie, chirurgie reconstructrice, pose d’implants et achat de la plupart des prothèses externes.
Cette énumération témoigne de l’effort substantiel réalisé au titre de la solidarité nationale. Mais si l’effort est substantiel, il est insuffisant, puisqu’il ne permet pas de financer l’intégralité des dépenses occasionnées par la maladie. C’est vrai, mais je pose la question : de quelles dépenses parlons-nous ? S’agit-il de dépenses devant relever de l’assurance maladie ? Il s’agit bien ici de faire peser sur celle-ci des dépenses, certes nécessaires, mais qui concernent les conséquences du traitement et qui ne relèvent pas de la santé stricto sensu.
Permettez-moi de rappeler que, depuis décembre 2020, les soins oncologiques de support font partie intégrante du parcours de soins des patients atteints du cancer. Ils sont remboursés par l’assurance maladie. Bien entendu, leur montant est plafonné et, sans doute, limité. Toutefois, ces soins contribuent à une prise en charge globale du patient.
Mes chers collègues, vous le savez comme moi, les choix sanitaires sont opérés dans un système qui doit prendre en considération les ressources disponibles. Or nous débuterons dans quelques jours l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale ; nous mesurerons alors les contraintes budgétaires auxquelles nous devrons apporter des réponses en responsabilité.
Je peux partager votre souhait d’offrir aux patientes une prise en charge intégrale des soins liés au traitement du cancer du sein. Mais je rappelle que nous avons deux types de financeurs en France : l’assurance maladie obligatoire (AMO) et l’assurance maladie complémentaire (AMC). Or je regrette que la proposition de loi n’évoque à aucun moment la contribution financière de ces complémentaires santé dans un domaine qui me semble ressortir de leurs attributions.
Une autre dimension fait largement défaut dans le texte : l’absence de référence au développement des dispositifs de prévention et à leur mise en œuvre effective.
La prévention est l’alpha et l’oméga de toute politique de santé. Nous disposons désormais, pour les radiographies des seins, de logiciels d’intelligence artificielle, qui rendent possibles les diagnostics prédictifs.
Dans une récente loi de bioéthique, nous avons également mis en place les tests ADN, notamment post mortem, qui permettent d’indiquer à certaines femmes que leurs mères ont eu un cancer d’origine génétique et qu’elles-mêmes sont donc soumises à un risque à surveiller.
Ces nouvelles technologies et ces innovations doivent être développées et mises au service de la lutte contre le cancer du sein… et des autres cancers.
À côté de la prévention, il y a la sensibilisation – vous en avez parlé, madame la rapporteure. De ce point de vue, Octobre rose est une réelle réussite, car institutions, associations et particuliers se sont approprié le message et le promeuvent souvent dans une approche festive. Selon la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR) : « Octobre rose est bien plus qu’une campagne de sensibilisation. […] En mobilisant la société dans son ensemble, Octobre rose offre un message d’espoir et de solidarité pour un avenir où le cancer du sein n’est plus une menace pour la santé des femmes. »
Prévention et sensibilisation doivent être incluses dans cette prise en charge intégrale. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, tout n’est pas si rose en ce mois d’octobre.
Derrière cette douce couleur, associée au bonheur et à l’optimisme, se cache une réalité tragique : chaque année, 60 000 nouveaux cas de cancer du sein sont détectés en France, et 12 000 femmes en meurent. En d’autres termes, toutes les quatre-vingts minutes, celle qui s’est battue des mois, voire des années, perd le combat contre la maladie.
Je ne puis m’exprimer sur le sujet sans rendre tout d’abord hommage aux soignants, à l’engagement des collectivités, mais aussi au tissu associatif et à ses bénévoles. Je pense à la Ligue contre le cancer et à toutes les associations qui œuvrent dans nos départements respectifs pour le bien-être des patientes et qui récoltent des dons en faveur de la recherche.
En tant que rapporteure pour avis des crédits de la recherche, je veux souligner que nos chercheurs ont impérativement besoin de davantage de moyens pour mieux cibler les facteurs de risque.
À Antibes Juan-les-Pins, comme dans de nombreuses communes de France, nous avons couru, pédalé, nagé et même « régaté », grâce à SOS Cancer du sein, pour sensibiliser au dépistage.
Notre engagement est également symbolisé par ce ruban rose, qui fleurit sur notre poitrine chaque début d’automne pour rappeler l’essentiel : la prévention.
Et pourtant, il reste encore tant à faire. En 2023, le taux de participation au dépistage a chuté. Pire, il est en baisse, et ce depuis dix ans.
Dans un discours de 2006, le président Jacques Chirac alertait déjà sur le faible taux de dépistage des femmes soit par manque d’information, soit par peur irrationnelle associant dépistage et maladie.
Alors, parfois, le rose vire au rouge : celui de la colère face aux inégalités d’accès aux soins, notamment dans les territoires ruraux. Cette colère, nous devons la comprendre, mais nous devons surtout y répondre. Saluons ainsi les belles initiatives entreprises dans nos territoires, à l’image du « bus rose » du centre hospitalier de Menton, qui sillonne les vallées pour faciliter le dépistage.
La présente proposition de loi passe sous silence cet enjeu pourtant crucial, ce que je regrette, car elle vise un autre objectif : faire en sorte que l’assurance maladie prenne en charge à 100 % les soins liés au traitement du cancer du sein.
Malgré le dispositif des ALD, les patientes subissent encore des restes à charge particulièrement lourds, constituant ainsi une forme de double peine, qui s’ajoute à la charge émotionnelle, thérapeutique et sanitaire provoquée par la maladie.
De plus, la question du remboursement de certaines dépenses liées aux soins de support, par exemple, ou à l’acquisition d’accessoires postopératoires, comme les soutiens-gorge compressifs, coûteux, mais indispensables, revient sans cesse. Je me réjouis donc que ce texte l’aborde.
Deux autres sujets, que l’on ne peut plus occulter, sont également traités. Il s’agit, d’une part, de l’accompagnement des familles monoparentales pour la garde de leur enfant durant leur traitement et, d’autre part, du fait que les microentrepreneurs peuvent perdre leurs revenus lorsqu’on leur diagnostique un cancer.
Si je salue les travaux de Mme la rapporteure sur ces diverses thématiques, je tiens néanmoins à attirer votre attention sur une autre question, qui, comme le dépistage, n’a pas été évoquée dans le texte : l’égal accès des patients aux tests moléculaires.
Bien qu’améliorant l’efficacité des traitements tout en limitant les effets secondaires, lesdits tests laissent un reste à charge de près de 50 % aux établissements de santé prescripteurs. Si certains arrivent à en assumer le coût, d’autres ne peuvent tout simplement pas les financer, renforçant ainsi le sentiment d’un système de santé à plusieurs vitesses. Là encore, il faudra certainement que le législateur s’empare de la question.
Le groupe Les Républicains soutiendra naturellement la présente proposition de loi. Pour que celle-ci soit plus juste et – presque – parfaite, nous souhaitons l’adoption des amendements du président Philippe Mouiller visant à rendre les mesures proposées plus équilibrées et plus égalitaires. Il s’agit de recentrer la prise en charge sur les spécificités liées au cancer du sein et d’écarter la création de potentielles inégalités avec les patients frappés par d’autres cancers. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Corinne Bourcier et M. Saïd Omar Oili applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Canayer, ministre déléguée. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous associons à tous les témoignages et à l’ensemble des propos qui ont été tenus durant dans cette discussion générale. La volonté de trouver les meilleures solutions afin d’atténuer le difficile parcours des femmes atteintes d’un cancer pour atteindre la rémission et la guérison nous est commune.
Je me réjouis que, grâce au travail mené sous l’égide de M. le président de la commission des affaires sociales et de Mme la rapporteure, nous puissions parvenir à un texte équilibré permettant la sécurisation juridique de l’accompagnement et de la prise en charge des soins pour ces femmes.
Madame la sénatrice Guillotin, le décret d’application des dispositifs relatifs aux activités sportives adaptées est en cours de finalisation. Il doit être adopté d’ici à la fin de l’année – le cahier des charges est quasiment terminé – pour, nous l’espérons, un déploiement en 2025.
Le plafonnement des dépenses d’honoraires, dont il est question à l’article 1er bis, fait aujourd’hui l’objet de discussions, notamment avec les syndicats de médecins dans le cadre de la convention médicale, afin que les praticiens se conforment aux contraintes fixées par la loi. Le ministère travaille ainsi pour garantir le respect des objectifs de plafonnement que le Parlement votera, je l’espère, aujourd’hui.
Madame la sénatrice Romagny, le remboursement des prothèses capillaires est bien évidemment un enjeu fort. Nous le savons, il existe une réelle inégalité entre les femmes qui ont des prothèses capillaires traditionnelles et celles qui recourent à des prothèses capillaires avec des cheveux naturels. Le décret est en cours de validation. Il est soumis à la Haute Autorité de santé, qui doit rendre son avis dans les jours à venir. Des discussions commenceront ensuite avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) sur les modalités de mise en œuvre et d’application, afin de réduire le reste à charge des patientes atteintes de cancer ou d’alopécie. Le décret, qui est prévu pour la fin d’année, sera intégré dans le 100 % Santé.
Madame la sénatrice Féret, l’accès aux radiologues pour le dépistage des femmes atteintes de cancer du sein est effectivement un sujet. Les délais sont beaucoup trop longs. L’assurance maladie, l’Institut national du cancer et le ministère travaillent actuellement pour les réduire, autour de trois axes : d’abord, augmenter le nombre des radiologues agréés pour pouvoir réaliser ces dépistages ; ensuite, dématérialiser la deuxième lecture, afin d’accélérer le processus ; enfin, intégrer l’intelligence artificielle – le sénateur Milon y a fait référence – pour une plus grande efficacité dans les dépistages.
Madame Alexandra Borchio Fontimp, une disposition du projet de loi de financement de la sécurité sociale étend le complément mode de garde de 6 ans à 12 ans pour les familles monoparentales, ce qui leur ouvrira une aide supplémentaire pour pouvoir entamer les parcours de soins.
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant la prise en charge intégrale des soins liés au traitement du cancer du sein par l’assurance maladie
Article 1er
(Non modifié)
Le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par un chapitre XI ainsi rédigé :
« CHAPITRE XI
« Dispositions applicables aux personnes bénéficiant d’un traitement du cancer du sein, de soins consécutifs à un cancer du sein ou d’un parcours de soins global à l’issue d’un traitement du cancer du sein
« Art. L. 16-11-1. – I. – Dans le cadre d’un traitement du cancer du sein, de soins consécutifs à un cancer du sein ou d’un parcours de soins global défini après le traitement d’un cancer du sein mentionné à l’article L. 1415-8 du code de la santé publique, ne sont pas applicables :
« 1° Le forfait journalier mentionné à l’article L. 174-4 du présent code ;
« 2° La participation de l’assuré mentionnée au I de l’article L. 160-13 ;
« 3° La participation forfaitaire mentionnée au II du même article L. 160-13 ;
« 4° La franchise mentionnée au premier alinéa du III dudit article L. 160-13.
« II. – (Supprimé)
« III. – Les soins et les dispositifs prescrits, les prothèses capillaires et le renouvellement des prothèses mammaires, dans le cadre prévu au I du présent article, sont pris en charge intégralement par les organismes d’assurance maladie. Ces soins comprennent notamment les soins de support, lesquels sont définis par décret, après consultation des associations représentatives des patients et de celles représentatives des professionnels de santé.
« IV. – Les modalités d’application du présent chapitre sont précisées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 16-11-2. – Le médecin oncologue fournit au patient des informations détaillées sur les soins de support disponibles dans la région du patient et l’invite à consulter l’annuaire des soins de support oncologiques de la région. Ces informations sont communiquées lors de la consultation précédant le début du traitement. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Valente Le Hir, sur l’article.
Mme Sylvie Valente Le Hir. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, aujourd’hui, la femme que je suis, avant la sénatrice, appelle votre attention.
Je ne souhaite pas évoquer ma santé. Néanmoins, que je le veuille ou non, je porte la parole de nombreuses femmes touchées par le cancer du sein. Comme une femme sur huit, j’ai traversé cette épreuve. Le mois d’octobre a marqué une mobilisation de nombreux acteurs contre le cancer du sein.
Dans le département de l’Oise, dont je suis élue, j’ai pu participer et soutenir de nombreuses actions. J’ai ressenti une véritable adhésion, tous publics et tous âges confondus.
Je suis également membre d’un club de femmes atteintes par le cancer du sein, où nous pratiquons l’aviron et participons à des épreuves sportives nationales et internationales. Cette pratique est encouragée et prescrite par le monde médical. La maladie éloigne, isole, fragilise. Aussi, dans ce combat quotidien, il est essentiel de créer du lien, de savoir que l’on n’est pas seule, de bénéficier de l’expérience d’autres femmes. Encourager et être soutenue sont des remèdes indispensables pour faire face aux traitements et à leurs effets secondaires.
Les regards et les mentalités évoluent et nous devons continuer à informer pour toujours mieux dépister.
Cette maladie touche tout le monde, à tout âge : le malade, mais aussi son entourage, les aidants ainsi que les proches. C’est pourquoi je soutiens la présente proposition de loi visant la prise en charge intégrale des soins liés au traitement du cancer du sein par l’assurance maladie.
Évidemment, il n’est pas question de prioriser les maladies. Cependant, j’estime que ce texte constitue une avancée en ce qu’il permettra aux femmes concernées de se sentir reconnues et soutenues.
Nous savons que le cancer est un frein pour trouver un emploi et recourir à un emprunt. Si nous pouvons soulager les contraintes matérielles des personnes atteintes d’un cancer, nous aurons déjà fait un grand pas pour les aider à guérir.
Enfin, je voudrais saluer mon collègue Olivier Paccaud. Le cancer du sein n’a pas été un obstacle à sa décision de m’inviter à mener campagne à ses côtés, l’an dernier, pour siéger ensemble au sein de cet hémicycle. Rares sont ceux qui ont un tel courage. Permettez-moi donc, au travers de cette prise de parole, de lui adresser publiquement un grand merci ! (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, sur l’article.
Mme Silvana Silvani. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de Fabien Roussel pointe fort justement le sujet sensible du cancer du sein et son coût financier pour les personnes qui en sont atteintes.
Je voudrais pour ma part insister sur un élément concernant les facteurs de risque de développement d’un cancer.
Dans son rapport du mois de juin 2023 sur la santé des femmes au travail, la délégation aux droits des femmes du Sénat avait mis en exergue les conséquences du travail de nuit sur le risque de cancer du sein. Selon les études, le risque de cancer du sein augmente de près de 30 % en cas de travail de nuit chez les femmes non ménopausées. Ce risque augmente encore davantage chez les femmes ayant travaillé de nuit plusieurs fois par semaine sur une longue durée. Ainsi, le risque de cancer est deux à trois fois plus élevé pour les femmes qui ont travaillé plus de deux nuits par semaine pendant plus de dix ans. L’exposition croissante des femmes aux horaires atypiques de travail entraîne des conséquences néfastes pour leur qualité de vie, mais aussi pour leur santé.
Cette proposition de loi est donc indispensable pour les infirmières, les aides à domicile, les agents d’entretien – j’en oublie certainement, et j’espère qu’elles m’en excuseront –, qui subissent non seulement des conditions de travail extrêmement difficiles, mais aussi des risques de développer des cancers supérieurs à la moyenne et, in fine, un reste à charge financier particulièrement injuste.
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par M. Mouiller, Mme Lassarade, MM. Darnaud, Bouchet et Pellevat, Mmes V. Boyer et Billon, MM. Chaize et Brisson, Mme Lavarde, M. Favreau, Mme Loisier, M. Cuypers, Mmes Borchio Fontimp et Dumas, MM. Bruyen et Michallet, Mme Estrosi Sassone, MM. Médevielle, Cigolotti et J.P. Vogel, Mmes L. Darcos, Gosselin, Goy-Chavent et Josende, MM. Milon, Houpert, Bazin, Levi et D. Laurent, Mmes Malet, Belrhiti, Berthet, Valente Le Hir et Guillotin, MM. Menonville et Karoutchi, Mmes Phinera-Horth et Lopez, M. Savin, Mmes Eustache-Brinio et de La Provôté, MM. Lefèvre, Grand et Chatillon, Mmes Schalck et Dumont, M. Hugonet, Mmes Gruny et M. Mercier, MM. Capo-Canellas et de Legge, Mme Doineau, M. Khalifé, Mme Lermytte, MM. Reichardt et Piednoir, Mmes Guidez, Aeschlimann, Demas, Micouleau, Muller-Bronn, Puissat et Richer, MM. Sol, Chasseing et P. Martin, Mme P. Martin, MM. Panunzi et Cadec, Mmes Evren, Di Folco, Imbert et Perrot, MM. Saury, Reynaud et Paul, Mme Sollogoub, MM. Kern, Perrion, Chevalier, Longeot, Klinger et J.B. Blanc, Mme F. Gerbaud, MM. Sido et Szpiner, Mmes Devésa et Romagny, MM. Paccaud, Verzelen, Belin, A. Marc, Paumier, Mandelli et Henno, Mmes Deseyne et Bonfanti-Dossat et MM. Burgoa et Rojouan, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 4 à 8
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 10
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« III. – Sans préjudice des II et III de l’article L. 160-13, les soins et dispositifs prescrits et remboursables sont pris en charge intégralement par les organismes d’assurance maladie dans la limite des tarifs servant de base au calcul des prestations prévues à l’article L. 160-8 lorsqu’ils présentent un caractère spécifique au traitement du cancer du sein ou à ses suites.
« Les soins et dispositifs mentionnés au premier alinéa du présent III, qui comprennent notamment les actes de dermopigmentation de la plaque aréolo-mamelonnaire réalisés par des professionnels de santé mentionnés aux livres Ier à III de la quatrième partie du code de la santé publique dûment formés, les sous-vêtements adaptés au port de prothèses mammaires amovibles et le renouvellement des prothèses mammaires, sont définis par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, après consultation des associations représentatives des patients et des organisations syndicales représentatives des professionnels de santé concernés.
III. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 16-11-…. – Il est institué, pour les personnes traitées ou ayant reçu un traitement pour un cancer du sein, et bénéficiant du dispositif prévu au 3° ou au 10° de l’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale, un forfait finançant des soins et dispositifs non remboursables présentant un caractère spécifique au traitement du cancer du sein et à ses suites, sur prescription médicale.
« Le montant du forfait mentionné au premier alinéa est défini par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Les soins et dispositifs mentionnés au premier alinéa sont définis par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, après avis de la Haute Autorité de santé, de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et de l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. L’arrêté peut comporter des critères d’éligibilité au forfait pour chaque soin et dispositif, ainsi qu’une base forfaitaire maximale déterminée. Ces critères peuvent notamment porter sur des spécifications techniques, des normes relatives à la composition ou à la qualité visant à assurer la non-toxicité des produits pour la santé et l’environnement, et sur les modalités de distribution. »
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Cet amendement vise à recentrer le dispositif.
En commission, lorsque nous avons commencé à travailler et à analyser la proposition de loi issue de l’Assemblée nationale – je salue d’ailleurs la qualité du travail de Mme la rapporteure –, nous avons souhaité nous associer à la démarche, mais nous avons perçu qu’une difficulté juridique, voire de principe risquait d’apparaître en cas de prise en charge complète des soins pour les seules personnes concernées par le cancer du sein.
Après discussions avec Mme la rapporteure ainsi qu’avec les membres du groupe politique à l’origine de la proposition de loi, et après négociation avec le Gouvernement, nous avons choisi de centrer le dispositif sur les seuls soins spécifiques au cancer du sein.
Je le précise, les membres des groupes de la majorité sénatoriale, qui pensaient dans un premier temps s’abstenir, se sont ralliés à cette solution et ont très largement cosigné le présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
À titre personnel, je ne considère pas que cette proposition de loi soit en contradiction avec le principe d’égalité. En effet, je considère ce texte comme un premier pas pour améliorer le quotidien des patients atteints d’un cancer du sein, qui permettra d’alléger la charge financière dont ils doivent s’acquitter, avant d’envisager une extension progressive du dispositif à d’autres pathologies associées à de forts restes à charge.
Pour autant, il est important de prendre en considération le risque que plusieurs d’entre vous ont pointé durant la discussion générale, mais aussi en commission. Notre seule boussole doit être l’intérêt des patients, ce qui exige de sécuriser le dispositif d’un point de vue juridique pour que les avancées prévues entrent effectivement en vigueur.
Certes, la rédaction de cet amendement circonscrit la proposition de loi, mais elle est loin de la vider de sa substance. Elle permet même de fluidifier son application au service des patientes, en particulier en ce qui concerne les accessoires non remboursables par la sécurité sociale.
Je crois possible de trouver, ici au Sénat, un accord transpartisan pour reformuler ainsi l’article 1er, afin de répondre aux attentes légitimes des patientes. Je me réjouis que nous dépassions les clivages pour parler d’une seule voix dans l’objectif de renforcer la protection et la prise en charge des femmes atteintes d’un cancer du sein.