M. le président. Il faut conclure !

M. Yves Bleunven. La mise en place d’un plan national de restructuration est nécessaire pour s’assurer que la transformation se fasse chez nous, en France, et pour préserver nos compétences, nos emplois, ainsi que notre souveraineté industrielle. (Marques dimpatience sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)

M. le président. Il faut conclure !

M. Yves Bleunven. L’industrie automobile est-elle la prochaine sur la liste noire ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.

M. Marc Ferracci, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de lindustrie, chargé de lindustrie. Monsieur le sénateur, vous avez raison : notre filière automobile connaît des difficultés structurelles, qui touchent notamment les équipementiers. À Vannes, 300 emplois sont concernés ; près de 900 à Cholet.

Sur le site de Vannes se répercutent les difficultés que l’entreprise Michelin rencontre sur le marché des armatures métalliques. Entre 2018 et 2023, elle a perdu onze points de parts de marché.

L’entreprise doit faire face à deux défis extrêmement lourds.

Tout d’abord, elle doit affronter une compétition qui n’est pas toujours juste, en particulier celle que la Chine mène sur les véhicules électriques.

Elle doit aussi accompagner la transition du véhicule thermique vers le véhicule électrique.

M. Mickaël Vallet. Ce ne sont pas les éléments de langage de Michelin…

M. Marc Ferracci, ministre délégué. Face à cela, nous devons d’abord nous préoccuper d’accompagner les salariés en leur trouvant des solutions personnalisées, pour résoudre leurs problèmes de reclassement ou de reconversion et ouvrir des perspectives aux familles.

Nous devons également proposer des solutions plus structurelles qui, monsieur le sénateur, ne peuvent pas se concevoir à une autre dimension que celle de l’Europe.

Hier encore, je discutais à Berlin avec mon homologue allemand. Dans les prochaines semaines, le ministre Antoine Armand et moi-même proposerons un plan pour la filière automobile européenne. Ce plan sera un plan d’urgence, mais il comportera également des éléments structurels permettant de soutenir la demande, l’offre et les investissements, ainsi que des pistes pour revoir la conception de notre politique commerciale.

En effet, monsieur le sénateur, nous devons sortir d’une forme de naïveté à l’égard de certains concurrents comme la Chine, qui ne jouent pas avec les mêmes règles que nos constructeurs et nos équipementiers.

Dans les prochaines semaines, nous serons actifs à l’échelle européenne, et nous mettrons sur la table des propositions qui seront, je l’espère, soutenues par nos partenaires. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI ainsi que sur des travées du groupe UC.)

organisation de la cop29 à bakou et position du gouvernement pour défendre les droits humains et une diplomatie climatique réellement ambitieuse

M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Yannick Jadot. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.

Nous le savons, avec l’élection de Donald Trump, le monde sera encore plus brutal, encore plus menaçant, encore plus instable. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)

D’ailleurs, l’internationale des dictateurs et des autocrates complotistes, climatosceptiques, xénophobes, homophobes, misogynes l’a très bien compris, et a sabré le champagne ce matin. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Yannick Jadot. Mes chers collègues, je ne savais pas que vous aviez voté pour Trump ! (Mêmes mouvements. – M. Stéphane Ravier lève les bras au ciel.)

Plus que jamais, nous avons besoin d’une Europe forte. (M. Stéphane Ravier proteste.)

Plus que jamais, nous avons besoin d’une France forte dans l’Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)

Plus que jamais, nous avons besoin que notre action, notamment internationale, soit guidée par nos valeurs : la défense de la démocratie, de l’État de droit, du progrès social et écologique.

Madame la ministre, cela doit commencer la semaine prochaine à Bakou.

Il y a un peu plus d’un an, le président Aliyev menait une opération militaire d’épuration ethnique des populations arméniennes du Haut-Karabagh. Le Sénat avait dénoncé le régime d’Aliyev, il avait demandé des sanctions. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. Fabien Gay applaudit également.)

Mme Nathalie Goulet. Exactement !

M. Yannick Jadot. Loin de calmer le président Aliyev, l’organisation de la COP29 le pousse à exacerber la répression contre les populations arméniennes, à menacer toujours plus l’Arménie et à enfermer les opposants politiques. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Madame la ministre, je suis le premier à défendre le principe des COP et la coopération internationale en matière de climat. Mais quand un pays utilise cette occasion pour réprimer ou vendre sa diplomatie pétrolière, notre responsabilité, votre responsabilité, c’est de ne pas y participer !

Madame la ministre, nous vous demandons de boycotter cette COP, pour le climat, pour les Arméniens et pour les droits humains ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K. – MM. Akli Mellouli et Guy Benarroche se lèvent en soutien de lorateur. – Mmes Alexandra Borchio Fontimp et Elsa Schalk ainsi que MM. Stéphane Le Rudulier et Louis-Jean de Nicolaÿ applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de lénergie, du climat et de la prévention des risques. Monsieur le sénateur Jadot, ce n’est pas à vous que j’apprendrai que l’urgence climatique est majeure et qu’il nous appartient d’agir pour porter les couleurs de l’accord de Paris. Cet accord historique, que nous avons collectivement soutenu, a permis de faire baisser la trajectoire d’augmentation des émissions de gaz à effets de serre. S’il n’avait pas été rendu possible par la France, la situation actuelle serait encore plus calamiteuse en matière de dérèglement climatique.

Je ne vous apprendrai pas non plus que la COP est une négociation onusienne, multilatérale, ni qu’elle est la seule à réunir tous les pays du monde en relation avec le climat.

Bien entendu, j’aurais préféré que cette COP se tienne ailleurs qu’à Bakou.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. L’année dernière, lorsque nous avons participé au vote, Bakou l’a emporté face à l’Arménie. Je me réjouis que, cette année, les Européens aient réussi à faire en sorte que la prochaine COP Biodiversité ait lieu en Arménie et non en Azerbaïdjan.

M. Stéphane Ravier. Oh ! Quelle victoire !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je serai très claire : aucun dirigeant français ne participera aux segments de haut niveau, pour la première fois depuis l’accord de Paris, mais nous ne mènerons pas la politique de la chaise vide. En effet, cela reviendrait à servir la politique de nos opposants en laissant la place à ceux qui pousseraient un accord contre le climat, pour les énergies fossiles, contre l’Europe et contre la France.

Monsieur le sénateur, il y a les combattants – j’en fais partie –, et il y a ceux qui regardent les trains passer. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe GEST.)

violences commises le week-end du 1er novembre

M. le président. La parole est à Mme Marie-Jeanne Bellamy, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Jeanne Bellamy. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Fusillades à Valence et à Rennes, bus incendiés, barbecue sauvage dans la métropole de Lyon, attaque à la hache dans le RER : de nombreux faits divers ont défrayé la chronique ces derniers temps. Nous assistons à une escalade inquiétante de la violence. Si ces violences se déroulaient traditionnellement dans les grandes métropoles, elles se propagent désormais à tous les territoires, jusqu’à toucher nos communes rurales.

Monsieur le ministre, pour mettre fin aux polémiques au sujet de la fusillade de Poitiers dans la nuit du 31 octobre, pourriez-vous nous éclairer quant au nombre précis de personnes présentes sur place lors de cet affrontement ?

Plus généralement, nous sommes nombreux à nous interroger sur les causes profondes de cette dégradation et sur les moyens de l’enrayer. Citoyens, élus locaux, nous ne pouvons plus assister impuissants à ce déferlement de haine et de violence. Le constater et le déplorer est une chose ; agir et le combattre en est une autre.

Quels moyens déploierez-vous pour rétablir la sécurité publique ? De quel arsenal pénal disposez-vous ? Comment aider les élus locaux à rassurer leurs administrés ?

Il faut stopper l’hémorragie et s’attaquer aux causes profondes. La seule chose qui permet au mal de triompher est l’inaction. Monsieur le ministre, nous connaissons votre courage, et nous comptons sur votre détermination. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre de lintérieur. Madame la sénatrice Marie-Jeanne Bellamy, je ne veux entrer dans aucune polémique au sujet des chiffres, parce qu’un adolescent de 15 ans est mort.

J’ai reçu deux rapports, l’un au petit matin, l’autre quelques heures plus tard, de la part des sapeurs-pompiers. Ils indiquaient que 400 à 500 personnes étaient présentes, une partie se livrant à des affrontements, lesquels ont gêné l’intervention des secours.

Mon combat n’est pas un combat statistique. Sous l’autorité du Premier ministre, avec le garde des sceaux, le combat que nous menons est dirigé contre la terrible pieuvre du narcotrafic.

Il doit mobiliser entièrement l’État et les collectivités territoriales, dans un continuum de sécurité. Il faut des caméras de vidéosurveillance, il faut des policiers municipaux – pour ma part, je pense que ces derniers doivent être armés sur le front de l’hyperviolence. (Murmures sur des travées des groupes SER, CRC-K et GEST.)

Vous m’interrogez sur les causes du mal. Elles sont profondes, et le mal vient de loin. J’en citerai deux.

La première, c’est que lorsque, en 1968, on a dit qu’il fallait « interdire d’interdire », on a fait beaucoup de mal à la société. Cette permissivité a fait beaucoup de mal. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)

M. Pascal Savoldelli. Quel moralisme !

M. Bruno Retailleau, ministre. L’autre cause, c’est l’hyperindividualisation, qui exalte le moi, détruit les liens entre tous et affaiblit tous nos cadres communs, au point que de jeunes individus n’éprouvent même plus de sympathie les uns pour les autres, les bandes et les groupes étant structurés uniquement par une sorte de charisme de la violence.

Quelles sont les réponses ? Elles doivent d’abord être judiciaires et sécuritaires, notamment sur la violence, la petite délinquance, le narcotrafic. Le garde des sceaux et moi-même dévoilerons dans quelques jours notre arsenal, qui s’inspirera des recommandations du Sénat. J’espère d’ailleurs que le rapporteur et le président de la commission d’enquête sur le narcotrafic pourront se rendre à Marseille pour ce moment d’unité nationale.

Il y a aussi une autre réponse, culturelle et éducative.

M. le président. Il faut conclure !

M. Bruno Retailleau, ministre. Elle est fondamentale pour transmettre nos valeurs, pour transmettre aussi la grammaire commune de ce que nous sommes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation à l’université

M. le président. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour le groupe Les Républicains.

M. Ronan Le Gleut. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

L’effroyable attaque terroriste du 7 octobre 2023 par le Hamas – rappelons-le, quarante-huit de nos compatriotes y ont péri – et la riposte d’Israël qui s’est ensuivie ont de lourdes conséquences en France, notamment dans les établissements d’enseignement supérieur. Depuis un an se multiplient des débordements étudiants qui conduisent parfois à des situations de blocage inacceptables. (Exclamations sur des travées du groupe GEST.)

Dans ce contexte, plusieurs étudiants de Sciences Po Paris provisoirement suspendus à la suite de dégradations ont été réintégrés il y a quelques jours.

De plus, nous avons appris la semaine dernière qu’une motion étudiante demandant la suspension d’un partenariat avec l’université israélienne Reichman de Herzliya avait été adoptée à l’Institut d’études politiques (IEP) de Strasbourg, malgré l’opposition du directeur de l’établissement.

Monsieur le ministre, vous avez dénoncé avec raison cette décision. Toutefois, les conséquences de ce type de boycott académique seront néfastes pour l’attractivité de notre enseignement supérieur et notre coopération internationale dans le domaine de la recherche.

Au Sénat, nous sommes attachés à la coopération universitaire européenne et internationale. Karine Daniel et moi-même l’avons d’ailleurs récemment rappelé dans notre rapport sur les universités européennes, rendu au nom de la commission des affaires européennes du Sénat.

Les partenariats internationaux des établissements d’enseignement supérieur constituent pour la France un bel outil de rayonnement intellectuel, scientifique et culturel dans le monde.

Toutefois, le comportement de certains étudiants, leurs dérives et leurs initiatives poussant à la suspension de partenariats internationaux pourraient dégrader l’image de notre enseignement supérieur et affaiblir le rayonnement international de la France.

Monsieur le ministre, quelles réponses apporterez-vous face à cette situation ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Patrick Hetzel, ministre de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Ronan Le Gleut, vous m’interrogez sur la motion adoptée par le conseil d’administration de Sciences Po Strasbourg, sur une décision du président de Sciences Po Paris, et plus généralement sur les conséquences de telles initiatives sur le rayonnement de nos établissements à l’étranger.

En ce qui concerne Sciences Po Strasbourg, j’ai souhaité réagir sans délai pour condamner la décision du conseil d’administration. Je déplore qu’il ait adopté cette motion à des fins de prises de position politique. Il s’agit là d’un détournement du rôle premier de l’université qui, je l’ai déjà rappelé, est inacceptable.

En ce qui concerne Sciences Po Paris, j’ai indiqué dès ma prise de fonctions qu’il était impensable de revivre les tensions du printemps dernier. Le nouveau directeur de l’établissement a adopté des mesures strictes et inédites, qui marquent un tournant dans la gestion des incidents sur le campus concerné.

Les quatre étudiants exclus temporairement ont certes été réintégrés, mais après un dialogue très ferme et un avertissement clair sur les mesures qui seraient prises en cas de récidive. Je tiens à le rappeler, la section disciplinaire de Sciences Po Paris reste saisie de ces quatre cas, puisque c’est elle qui est compétente.

Enfin, mon engagement politique en faveur de nos établissements d’enseignement supérieur et de recherche est constant depuis des années. Il l’était lorsque j’étais député, il l’est resté – vous l’imaginez bien – une fois que je suis devenu ministre.

Cela fait trente ans que je me bats pour que nos établissements et notre recherche puissent rayonner et être attractifs à l’étranger. (Mme Laurence Rossignol sexclame.) En tant que ministre, je ne cesserai de défendre l’image de nos universités, tant en France qu’à l’étranger. Monsieur le sénateur, je sais que vous êtes particulièrement animé par cette volonté, ainsi que le rapport sur les universités européennes que vous avez rendu récemment le montre clairement.

Il est impensable de confondre la liberté d’expression, qui doit être totale, avec l’instrumentalisation politique qui en est faite aujourd’hui sur certains campus.

M. le président. Il faut conclure !

M. Patrick Hetzel, ministre. Là encore, je n’aurai de cesse de combattre cette confusion et de rappeler l’impérieuse nécessité…

M. le président. Concluez, s’il vous plaît !

M. Patrick Hetzel, ministre. … de respecter les règles du droit. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

industries et licenciements

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Simon Uzenat. Le 5 novembre 2024 restera comme un mardi noir pour l’emploi dans notre pays, mais non en raison des inévitables conséquences économiques des élections américaines.

En deux annonces, Auchan et Michelin ont brutalement acté la disparition de plus de 3 600 emplois. Je veux ici exprimer, au nom de notre groupe, notre totale solidarité avec les salariés et leurs familles. Car oui, une entreprise, une usine, c’est avant tout une grande communauté humaine, qui ne se gère pas avec un tableau Excel.

Pour Michelin, les fermetures des usines de Cholet et de Vannes illustrent la déprise industrielle, en totale contradiction avec les discours tonitruants du Président de la République et de ses gouvernements successifs, rétrofités ou non.

J’ai échangé hier, sur le site sexagénaire de Vannes, avec la direction et les représentants des salariés. Je peux témoigner du désarroi, de l’incompréhension et de la colère de ces derniers : ils n’ont eu de cesse de fournir tous les efforts attendus, ils fabriquent des produits qui dégagent des marges, ils permettent à l’entreprise de rémunérer généreusement ses actionnaires, et ce sont pourtant eux qui servent de fusibles. Dans ces conditions, leur accompagnement social et la revitalisation des territoires sont un minimum, auquel nous serons très attentifs.

Oui, la filière automobile traverse une période très difficile, mais le mal est plus profond. Il prend racine dans le terreau de la naïveté européenne, dans notre décrochage face à une concurrence internationale de plus en plus féroce.

Malgré votre politique de l’offre, les défaillances d’entreprises atteignent un niveau record. On dénombre plus de 180 plans de licenciements en France. Tous les territoires et tous les secteurs sont touchés, y compris ceux qui sont liés à la transition énergétique.

Nous l’avons entendu, le Gouvernement va enfin demander des comptes au sujet de l’utilisation des aides publiques et proposer un plan de soutien européen à la filière automobile, mais cela ne saurait suffire. Agirez-vous enfin pour défendre efficacement les salariés, protéger durablement nos entreprises, nos emplois industriels et notre souveraineté productive, en cohérence avec les objectifs de décarbonation ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.

M. Marc Ferracci, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de lindustrie, chargé de lindustrie. Monsieur le sénateur, vous l’avez indiqué, la filière automobile est en difficulté.

Le site de Michelin à Vannes produit notamment des armatures métalliques. Des difficultés similaires touchent d’autres sites, dans d’autres pays : Michelin a annoncé il y a quelques mois la fermeture de sites équivalents en Pologne et en Allemagne.

Face à cette situation, notre stratégie et notre politique industrielles doivent reposer sur deux principes. Le premier, c’est de protéger l’existant pour assurer, lorsque les difficultés surviennent, que l’accompagnement des salariés, leur reclassement ou leur éventuelle reconversion se fassent dans les meilleures conditions possible, en y mettant les moyens.

La direction de Michelin s’y est engagée, sur l’initiative et sous la pression des membres du Gouvernement. Je l’ai moi-même rencontrée, ma collègue Astrid Panosyan-Bouvet l’a également rencontrée, et nous avons tous deux formulé cette exigence d’accompagnement et de revitalisation des sites.

L’enjeu, c’est de ne pas se laisser perdre des savoir-faire et des compétences, de ne pas mettre des familles dans des situations d’anxiété et de faire en sorte que les territoires continuent de vivre. Je le disais plus tôt, la direction de Michelin s’est engagée à ce que, dans les territoires concernés, autant d’emplois soient recréés qu’il n’en sera supprimé.

Monsieur le sénateur, nous ne devons pas transiger sur un second principe, selon lequel, demain, des investissements doivent revenir dans notre pays pour y créer des emplois.

M. Mickaël Vallet. Allez le dire aux salariés de Michelin !

M. Marc Ferracci, ministre délégué. C’est ce qui nous a permis, depuis 2017, de faire progresser l’emploi industriel en France, d’inverser la courbe de la désindustrialisation, de faire en sorte que, en 2022 et en 2023, l’emploi industriel continue de progresser.

Il ne faut pas abandonner cette stratégie qui repose à la fois sur des mesures de compétitivité globale et de stabilité fiscale, mais aussi sur une stratégie européenne. Nous devons agir à l’échelle européenne pour faire face à la compétition. Nous ferons des propositions en ce sens à nos partenaires européens, pour adopter un plan de sauvetage et de soutien à la filière automobile européenne dans les prochaines semaines. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour la réplique.

M. Simon Uzenat. « Protéger l’existant », ce n’est pas protéger l’existant politique. Or nous avons l’impression que vous voulez maintenir à tout prix une ligne qui ne produit pas d’effets, et qui est même désastreuse sur le plan économique, ce dont nous avons une fois de plus l’illustration.

En outre, pour créer des emplois dans nos territoires, nous avons besoin d’une France et d’une Europe beaucoup plus volontaristes, qui mettent les moyens, appliquent les règles…

M. le président. Il faut conclure !

M. Simon Uzenat. … et les fassent respecter.

Le gouvernement actuel, pas plus que ses prédécesseurs, n’est pas au rendez-vous. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)

décret du 30 octobre 2024 et tâches administratives imposées aux médecins

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Milon. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé et de l’accès aux soins.

Le 30 octobre 2024, en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 adoptée au moyen du 49.3 sans que soient repris les amendements votés par le Sénat, a été publié un décret relatif au document destiné à renforcer la pertinence des prescriptions médicales, sans tenir compte de l’avis des professionnels de santé, pourtant les premiers concernés.

Ce texte sous-entend que la majorité des prescriptions de médicaments ne serait pas pertinente, ce qui, vous en conviendrez, madame la ministre, est offensant pour nos confrères et affaiblit leur image.

Il vise à ce que « la prise en charge d’un produit de santé puisse être conditionnée au renseignement par le prescripteur d’éléments relatifs aux circonstances et aux indications de prescription », et précise « que ces renseignements sont portés sur l’ordonnance ou sur un document dédié […] présenté au pharmacien ou éventuellement à un autre professionnel de santé exécutant la prescription ». Question : si ce document n’existe pas, la prescription sera-t-elle honorée ?

Ce document sera également transmis à la caisse d’assurance maladie. Madame la ministre, quid du secret médical ?

Par ailleurs, alors que l’on parle de déserts médicaux et de la nécessité de redonner du temps médical aux médecins, vous ajoutez une obligation administrative supplémentaire qui ne me semble pas aller dans le sens de la simplification.

Madame la ministre, ma question est simple : êtes-vous prête à abroger ce décret qui ne fait qu’entraver un temps médical déjà contraint par beaucoup de bureaucratie ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Sonia de La Provôté et Raymonde Poncet Monge, ainsi que M. Bernard Fialaire, applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la santé et de l’accès aux soins.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur Milon, votre question, importante, me donnera l’occasion d’éclairer le Sénat sur ce sujet.

Premièrement, ce décret a été rédigé en concertation avec les syndicats médicaux et avec les associations de patients.

M. Bernard Jomier. Ils n’en veulent pas !

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Deuxièmement, ce décret fait partie des engagements conventionnels signés avec les médecins en juin 2024.

Son objet est simplement de lutter contre le mésusage de certains produits de santé, et il ne concerne que les médicaments dont l’usage est détourné.

Un exemple : l’usage de certains traitements antidiabétiques, comme les analogues du GLP-1 dont l’Ozempic, est parfois détourné pour faire perdre du poids à des personnes qui ne sont pas diabétiques.

Ce phénomène se répand, en particulier à cause de la promotion sur les réseaux sociaux de ce type d’usages.

Il me semble que l’assurance maladie n’a pas à prendre en charge des produits utilisés en dehors du cadre des indications thérapeutiques.

Je comprends les réserves face à la suradministration et le besoin de préserver du temps médical. Je me rendrai compte par moi-même du déroulement de cette tâche ; on m’a expliqué qu’elle consistait en deux clics, et que l’assurance maladie répondait directement.

Je le rappelle, cette démarche ne s’applique que pour certains types de médicaments dont l’usage est détourné. Le dispositif est simplifié.

Bien entendu, la liberté de prescription n’est aucunement remise en cause, non plus que le secret du dossier médical du patient, qui demeure intact. Rien n’est révélé sur l’état de santé des patients à la caisse d’assurance maladie, étant entendu que le pharmacien est, lui, soumis au secret professionnel. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.

M. Alain Milon. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Il me semble qu’il faudrait tout de même se mettre à la place des médecins, dans leurs cabinets. Ils devront prescrire des médicaments, en particulier pour des diabétiques, mais ce n’est pas à eux de vérifier si leurs patients utilisent ces médicaments à d’autres fins. C’est aussi le rôle de la sécurité sociale que de vérifier l’usage qui est fait du médicament prescrit, et les médecins n’ont pas à justifier en permanence leurs prescriptions.

Sinon, le risque est d’aller très loin, notamment pour certaines maladies au sujet desquelles le secret médical est particulièrement important, comme le VIH.

Dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, je présenterai un amendement visant à abroger ce décret. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Sonia de La Provôté et Raymonde Poncet Monge applaudissent également.)

lutte contre le sans-abrisme