Mme la présidente. L’amendement n° 1098, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre V du titre IV livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section … ainsi rédigée :

« Section …

« Taxation des publicités en faveur de boissons alcooliques

« Art. L. …. – I. – Il est institué une taxe perçue sur les dépenses de publicité portant sur la promotion d’une boisson alcoolique.

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises :

« – Produisant, important ou distribuant en France des boissons alcooliques ou leurs représentants

« – Et dont le chiffre d’affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 10 millions d’euros, hors taxe sur la valeur ajoutée.

« III. – La taxe est assise sur les frais d’achats d’espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d’évènements publics et de manifestations de même nature.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 3 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I du présent article.

« V. – Les modalités du recouvrement sont instaurées par décret.

« VI. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2025. »

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. Si la loi Évin était respectée, cet amendement n’aurait pas lieu d’être. Il est bien dommage de devoir en arriver là !

Non seulement la loi Évin aurait dû être adaptée aux nouvelles modalités de la publicité, mais elle n’aurait pas dû être détricotée. On le voit, les publicités pour l’alcool sont présentes dans nos villes et nos campagnes.

Il est faux de dire que la publicité n’a aucun effet sur nos jeunes. Ce n’est pas vrai, vous le savez très bien. Elle a des effets sur la santé, sur l’addiction, mais aussi sur les finances mêmes des entreprises. La publicité coûte en effet beaucoup d’argent, ce qui est aussi un sujet.

Notre amendement vise à taxer à hauteur de 3 % le montant hors TVA des dépenses de publicité des entreprises alcoolières. Le produit de cette taxe doit servir à faire de la prévention et de l’éducation et à lutter contre les addictions.

Je suis à 100 % d’accord : il faut faire de l’éducation et de la prévention, mais cela coûte de l’argent. Nous essayons donc d’en trouver pour mettre en œuvre de telles politiques.

Dans un monde idéal, nous n’aurions besoin ni de taxes ni d’interdit. Il nous suffirait d’être tous des citoyens libres et éclairés. Faisons en sorte que cela soit le cas.

Pour ma part, je n’ai rien contre les lobbies. Je pense que nous en faisons tous partie. Moi, je représente le lobby de la santé, et ce n’est pas quelque chose d’épouvantable ! (Sourires.) Nous pouvons tous contribuer à la santé de tous.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cathy Apourceau-Poly et moi-même n’avons pas rédigé un rapport de plus, destiné à finir sur une étagère ou au fond d’un tiroir.

Nous avons trouvé le moyen que soient mises en œuvre, au travers de ce PLFSS, certaines de nos préconisations – mais pas toutes, j’en suis d’accord. Cela étant, nous ne nous arrêterons pas là.

Nous avons l’intention de travailler sur la publicité, notamment. Je rédigerai, avec vous tous, mes chers collègues, en coconstruction, une proposition de loi sur l’ensemble des problèmes que pose la publicité.

Je suis très sensible à vos arguments. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet, en couvrant aussi les autres addictions, comme le tabac et l’alcool, et en traitant la publicité sur les réseaux sociaux. Je vous en fais la promesse !

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je fais confiance à Mme la rapporteure générale pour travailler sur ce sujet et présenter une proposition de loi.

Nous devons étudier cette question à fond, car il est évident que la publicité est incitative. Avec les réseaux sociaux, il y a une vraie difficulté, parce que les influenceurs sont très difficiles à contrôler. Qui sont-ils, tout d’abord ? Comment savoir à l’avance les discours qu’ils vont tenir et les produits qu’ils vont promouvoir ? Tout cela doit être creusé.

Je suis bien d’accord avec vous, les jeunes ne passent pas par les canaux classiques ; ils ne regardent pas la télévision, mais sont sur les réseaux sociaux, où agissent les influenceurs. Il y a un vrai travail à réaliser sur ce sujet, et il devra être bien charpenté. Je fais confiance à Mme la rapporteure générale pour cela.

En attendant, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement a pour objet d’instaurer une taxe sur la publicité pour les produits alcooliques, afin d’alimenter le fonds de lutte contre les addictions.

Ce fonds, en effet, manque vraiment de moyens. Son premier but est la prévention. Les professionnels travaillant dans les centres d’addictologie ne bénéficient pas de la prime Ségur, ce qui crée un décalage par rapport aux autres professionnels de santé pouvant en bénéficier. Cette taxe pourrait résoudre ce problème.

Nous visons le même objectif que vous, madame la ministre : réduire le déficit de la sécurité sociale et développer la prévention. Nous avons ici l’occasion de nous rapprocher de ces deux objectifs.

Cet amendement vise également à atteindre deux objectifs complémentaires : responsabiliser les grands industriels de l’alcool, en les impliquant financièrement dans la réduction des risques, et diversifier les ressources du fonds contre les addictions.

Je le rappelle, l’alcool est à l’origine de 41 000 décès par an en France. Les jeunes sont particulièrement vulnérables, puisque 79 % des 15-21 ans déclarent voir des publicités pour de l’alcool chaque semaine sur les réseaux sociaux. Et 23 % des adolescents reconnaissent que ces publicités leur ont donné envie de consommer de l’alcool.

Les réseaux sociaux, notamment par l’intermédiaire des influenceurs, permettent souvent de contourner la loi Évin. L’OMS souligne d’ailleurs l’utilisation croissante d’un marketing ciblé et agressif par les industries. Il devient donc nécessaire d’adopter une réglementation efficace sur le sujet.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Les dépenses de publicité, qui ne sont qu’une petite partie des dépenses de marketing, sont comprises entre 300 millions d’euros et 400 millions d’euros.

Vous avez raison, madame la ministre, la taxation n’est sans doute pas le meilleur moyen. C’est aussi ce qu’avait dit le ministre l’année dernière. La réglementation, pourquoi pas ? Mais à condition de rehausser collectivement le niveau d’exigence envers les plateformes et les réseaux sociaux. L’Assemblée nationale a travaillé sur le sujet : nous devons être plus stricts.

Surtout, madame la ministre, il faut dix-neuf mois pour une condamnation ! Le groupe Meta a déjà été condamné, par exemple, pour avoir hébergé des influenceurs faisant régulièrement de la publicité interdite. La loi Évin existe ; simplement, elle n’est pas suffisamment appliquée.

Il faut donc renforcer notre arsenal. C’est à la commission des affaires sociales d’alerter, et à la commission des lois de renforcer l’arsenal. En tout cas, nous devons vraiment nous saisir de ce sujet de santé publique, car les jeunes sont de plus en plus sur les réseaux sociaux.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Nous arrivons au terme des amendements sur l’alcool, et, quel que soit le sujet, quelles que soient nos propositions, qu’il s’agisse des prix, des taxes, de la publicité, cela ne va jamais !

Aucun des amendements ne trouve grâce à vos yeux. Il y a toujours de bonnes raisons pour les rejeter, qu’elles soient techniques, liées au droit européen, ou encore qu’il faille prendre le temps d’en discuter, ne pas se précipiter…

Des pointillés, au bout d’un moment, cela trace une ligne. D’ailleurs, nous l’assumons pour nous-mêmes : nos amendements tendent à dessiner une politique, qui est de réduire la consommation d’alcool chez les jeunes comme chez les adultes.

Je voudrais donc poser une question à nos collègues. En 1952, la consommation d’alcool était de 138 litres de vin par an et par personne. En 1975, elle est tombée à 100 litres. Aujourd’hui, elle serait à peu près à 40 litres par an et par personne. Pour vous, est-ce une bonne nouvelle ? Je n’en suis pas sûre.

Pour moi, c’en est une. La baisse de la consommation d’alcool chez les Français, selon moi, constitue une excellente nouvelle, à la fois pour la santé, le budget de la sécurité sociale, les services d’addictologie, les violences faites aux femmes et aux enfants…

M. Laurent Somon. La sécurité routière…

Mme Laurence Rossignol. En effet ! Nous prônons la santé publique pour tous. Je ne suis pas sûre que vous soyez d’accord.

Vos arguments pour rejeter nos amendements révèlent que, en réalité, vous voulez que les Français continuent à consommer de l’alcool. Pour vous, les enjeux économiques l’emportent sur les enjeux sanitaires.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1183 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1098.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 9 bis - Amendements n° 621 rectifié, n° 1183 rectifié bis et n° 1098
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
Article additionnel après l'article 9 bis - Amendements n° 1177 rectifié, n° 723 rectifié bis, n° 296 rectifié, n° 1162 rectifié, n° 589 rectifié, n° 559 rectifié bis, n° 1094, n° 297 rectifié et n° 469 rectifié

Mme la présidente. L’amendement n° 1262, présenté par Mmes Bélim et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après la section 3 du chapitre V du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, il est inséré une section ainsi rédigée :

« Section…

« Taxation des publicités en faveur de boissons alcooliques

« Art. L. 245-…. – I. – Il est institué une taxe perçue sur les dépenses de publicité portant sur la promotion d’une boisson alcoolique à La Réunion. Le produit de cette taxe est versé à la Caisse nationale de l’assurance maladie.

« II. – Sont redevables de cette taxe les entreprises :

« 1° Produisant, important ou distribuant en France des boissons alcooliques ou leurs représentants ;

« 2° Et dont le chiffre d’affaires du dernier exercice est supérieur ou égal à 2 millions d’euros, hors taxe sur la valeur ajoutée.

« III. – La taxe est assise sur les frais d’achats d’espaces publicitaires, quelle que soit la nature du support retenu et quelle que soit sa forme, matérielle ou immatérielle, ainsi que les frais d’évènements publics et de manifestations de même nature.

« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 1 % du montant hors taxes sur la valeur ajoutée des dépenses mentionnées au I du présent article.

« V. – Les modalités du recouvrement sont précisées par décret. »

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2025.

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Madame la présidente, mes chers collègues, cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à créer à La Réunion une taxation sur les publicités en faveur de boissons alcooliques, afin de lutter contre la consommation excessive d’alcool.

Je parle bien de mon territoire, La Réunion. Les études révèlent que, si l’on y boit en moyenne moins d’alcool que dans le reste de la France, 10 % des usagers y consomment 69 % du volume total.

La consommation moyenne a beau être moindre qu’ailleurs, cette alcoolisation massive et chronique d’une frange de la population a des répercussions sanitaires et sociales trop importantes : accidents de la route, cancers, maladies chroniques, violences intrafamiliales.

Pis, nous déplorons près de 600 morts prématurées par an – un chiffre retenu par Santé publique France – et 5 000 passages aux urgences par an. Des vies sont brisées parfois dès leur commencement, en raison du syndrome de l’alcoolisation fœtale, beaucoup plus documenté à La Réunion que partout ailleurs en France.

C’est pourquoi les entreprises qui incitent à la consommation d’alcool à La Réunion – je dis bien à La Réunion ! – doivent participer financièrement à la prévention des risques et des dommages liés à cette substance.

Le présent amendement vise à taxer la publicité pour les produits alcooliques, afin de financer le fonds de lutte contre les addictions. D’une part, en s’acquittant de cette taxe, les industriels de l’alcool contribueront financièrement à diminuer les risques inhérents à leurs produits. D’autre part, cette contribution permettra de diversifier les ressources de ce fonds et de concrétiser l’engagement pris par le Gouvernement dans son plan de lutte contre le cancer.

La prévention est une priorité de la politique de santé publique. Traiter la situation de La Réunion, qui est confrontée à une consommation d’alcool excessive, est nécessaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Défavorable également.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. C’est consternant ! Je me souviens que, il y a quelques années, Nassimah Dindar, sénatrice de La Réunion qui siégeait au sein du groupe Union Centriste, défendait la hausse de la taxation du rhum. Elle savait ce qu’est le syndrome d’alcoolisation fœtale et à quel point il touche les habitants de La Réunion. Elle a su être incisive et faire preuve de courage.

Aujourd’hui, Audrey Bélim, sénatrice de La Réunion, exprime une volonté des acteurs de santé de La Réunion. Comment pouvez-vous répondre simplement « avis défavorable », madame la rapporteure générale, sans la moindre argumentation ? Franchement, les bras m’en tombent !

Laurence Rossignol a rappelé les enjeux économiques. Mais La Réunion fait face à une situation particulière, et ses élus eux-mêmes ont le courage d’affronter cette question. Or voilà que notre collègue est confrontée à des responsables nationaux qui ont baissé les bras, qui n’ont plus de volonté politique, qui se couchent et qui renoncent. Quand on n’a plus de force politique, il faut faire autre chose !

Quelle est votre stratégie ? Ne plus régler les problèmes ?

M. Jean-Jacques Panunzi. Que vous proposez-vous ?

M. Bernard Jomier. Ne pas répondre aux questions que nos collègues de La Réunion soulèvent sur l’alcool ? C’est inacceptable !

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Dans cet hémicycle, nous avons pour mission de représenter les collectivités territoriales et les territoires. Nous avons pour habitude d’écouter nos collègues quand ils décrivent leur territoire et qu’ils formulent des propositions.

Une collègue de La Réunion dépose un amendement qui ne vise que son département. Elle lance un appel au secours, elle nous dit, dans cet hémicycle : « Aidez-moi, aidez-nous, nous n’en pouvons plus des ravages de l’alcoolisme à La Réunion. »

Or Mme la ministre de la santé jette un « défavorable » laconique, sans entendre, sans respecter même une collègue élue, dont je vous garantis pourtant qu’elle a bien en tête, bien plus que n’importe lequel d’entre nous, les enjeux économiques et sanitaires de son territoire. C’est un véritable déni de reconnaissance à l’égard d’une collègue !

De plus, comme Bernard Jomier le rappelait, elle n’est pas la première élue de ce même territoire à formuler la même proposition – Mme Dindar appartenait à un autre groupe politique. Nous pourrions peut-être considérer qu’elles savent de quoi elles parlent, ces deux femmes.

Eh bien non ! Je ne me crois pas en mesure de déclarer qu’elles se trompent. C’est pourtant ce que vous faites, madame la ministre, madame la rapporteure générale. Vous lui refusez le droit de proposer ce qu’il y a de mieux pour son territoire. Ce n’est pas acceptable dans notre assemblée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Nous nous sommes rendus à La Réunion, nous, les sénateurs socialistes, et nous y avons visité le centre d’hébergement d’urgence (CHU), dont notre collègue nous avait précisément parlé.

La Réunion a la chance de disposer d’un centre spécialisé dans le syndrome d’alcoolisation fœtale, ce qui n’est pas le cas partout. Nous avons donc des informations très précises sur ce syndrome, grâce à cette ressource médicale, grâce aussi aux sénateurs et aux députés de tous bords qui se sont investis. Nous avons donc beaucoup à apprendre de La Réunion.

D’une manière générale, nous avons beaucoup à apprendre des territoires sur tous les enjeux de santé publique de l’alcool, qu’il s’agisse des femmes enceintes, des bébés à naître ou des enfants touchés indirectement par ce syndrome, que l’on ne détecte pas toujours.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.

Mme Audrey Bélim. Je précise qu’il n’est pas question de punir ceux qui produisent de l’alcool ni ceux qui en consomment.

Nous avons bien conscience que la consommation excessive concerne une part infime des consommateurs. Mais elle est dangereuse pour la santé publique. Chez nous, ce n’est pas un fait divers, c’est un fait de société, que l’on rencontre chaque jour.

Les violences intrafamiliales, notamment, sont un véritable sujet, et elles surviennent toujours sur fond d’alcool. Nous avons besoin de traiter cette problématique à La Réunion. Voilà des années que l’on en parle, et nous comptons réellement sur votre compréhension.

Mon amendement ne vise pas l’ensemble de la France, mais seulement La Réunion. Il tend à créer la possibilité d’accompagner ce territoire, pour le défendre face à ce fléau.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.

Mme Jocelyne Guidez. Je voterai cet amendement : mon père étant martiniquais, j’ai un pied dans l’Hexagone et un autre outre-mer, et je sais les effets de l’alcool dans nos îles – pas uniquement à La Réunion.

Ma chère collègue, votre amendement vise à instaurer une taxation sur la publicité. Si vous aviez proposé de taxer le rhum, je m’y serais opposée, car nous l’avons déjà fait, et son prix a déjà beaucoup augmenté. Or sa production fait vivre l’île et tourner son économie, puisqu’il s’agit de l’un des principaux produits vendus aux visiteurs.

Toutefois, taxer la publicité, j’y suis favorable. Nos jeunes traînent sur les plages, boivent non seulement du rhum, mais aussi beaucoup de bière, en tout cas en Martinique. C’est catastrophique. Un rapport a par ailleurs été rédigé sur les violences conjugales, qui sont bien plus dramatiques encore que dans l’Hexagone.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je voterai également cet amendement. Bernard Jomier a bien fait de rappeler le travail de Nassimah Dindar sur ce sujet. Les mêmes causes produisent malheureusement les mêmes effets, dans un territoire déjà fragile. Il est important que nous votions cette mesure pour adresser un signal.

Nous faisons de la politique au sens social du terme, aussi. Notre soutien serait donc un très bon signal pour le territoire que vous défendez si bien, ma chère collègue.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. Moi aussi, je voterai cet amendement, tout comme Laurent Somon.

Avant Mme Dindar, Mme Payet avait beaucoup travaillé sur le sujet, contre vents et marées. J’avais conduit une délégation – M. Jomier y participait – sur l’île de La Réunion, où nous avons travaillé avec le CHU, notamment sur le syndrome d’alcoolisation fœtale.

Or nous avions été tout à fait surpris par les publicités dans cette île : elles portaient non sur les alcools locaux, mais sur les alcools étrangers !

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cette taxe sur les publicités alimenterait un fonds de prévention et d’éducation. Or, madame la rapporteure générale, vous avez dit que ces politiques étaient prioritaires – pour moi, sur un sujet systémique, rien n’est prioritaire et tout va ensemble.

En l’occurrence, il s’agit de prendre sur une publicité qui incite à la consommation pour abonder un fonds consacré à la prévention dont la situation sanitaire montre qu’elle est nécessaire. Certaines marques ont des budgets de publicité faramineux, ce qui crée, au moins en partie, le problème. Vous devriez approuver qu’elles soient responsabilisées et qu’elles contribuent à la prévention, puisque celle-ci constitue selon vous un préalable, madame la rapporteure générale.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Buval, pour explication de vote.

M. Frédéric Buval. Mon groupe votera cet amendement. Nous avons les mêmes problèmes à la Guadeloupe et à la Martinique, où les jeunes commencent à boire de l’alcool – fort – dès le primaire – j’y insiste. Après une rasade de rhum, pour apaiser le feu de l’alcool, quand nous prendrions un peu d’eau, ils boivent une bière ! Imaginez les ravages…

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je souhaite m’excuser auprès de Mme la sénatrice Bélim si j’ai pu lui donner l’impression, ne fût-ce qu’une seconde que je ne m’intéressais pas à ces sujets.

Je les connais bien, je me suis rendue à La Réunion quand j’étais ministre chargée des personnes handicapées et j’ai vu ce qu’était le syndrome d’alcoolisation fœtale. J’ai noté quels étaient les besoins de ces enfants qui présentaient des déficits intellectuels à la suite de cette intoxication précoce. J’ai bien mesuré, avec tous les acteurs, l’ampleur du phénomène. Je comprends donc très bien la situation.

Nous devons financer et mener des politiques de prévention au plus près des familles. Certains comportements sont ancrés dans la tradition : c’est l’usage, on fait comme cela, c’est dans les familles… Faire changer les choses, c’est compliqué. Il en va de même dans l’Hexagone, d’ailleurs.

Ma réponse ne reflète donc ni méconnaissance du problème ni manque d’intérêt de ma part, bien au contraire. Je me suis simplement ralliée à la proposition de Mme la rapporteure générale d’écrire un texte construit sur le sujet, tenant compte bien sûr des spécificités des outre-mer. D’où mon avis défavorable.

Madame la sénatrice Rossignol, puisque vous m’avez interpellée, vous êtes assez expérimentée pour savoir que, quand un amendement ne peut être mis en œuvre techniquement ou juridiquement, le Gouvernement doit le dire, même si cette disposition constitue un marqueur politique ou vise à ouvrir un débat important.

Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. Je me joins à mes collègues pour soutenir cet amendement, et pas uniquement parce que l’une de mes collègues du groupe est sénatrice de La Réunion.

Nous recevons de ces territoires beaucoup de messages, d’analyses et d’informations qui nous montrent que les problématiques de la vie quotidienne y sont extrêmement aiguës, tout comme les enjeux institutionnels d’ailleurs, et que les situations y sont très différentes de celles que nous connaissons dans l’Hexagone – elles requièrent donc un traitement différent de celui que nous connaissons ici.

Cet amendement tend à cibler les publicités. Ce serait adresser un signe à nos collègues et à nos concitoyens ultramarins que de l’adopter, sans attendre l’élaboration d’une proposition de loi systémique. Rien ne nous empêchera, ensuite, de travailler sur un tel texte. Je rappelle d’ailleurs que beaucoup d’amendements visant ce territoire n’ont pas été adoptés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Malet, pour explication de vote.

Mme Viviane Malet. Madame la ministre, vous avez parlé de politique de prévention. Or cet amendement vise à instaurer un maillon de cette politique. Il a été très bien défendu par ma collègue.

Je connais moi aussi les dégâts qui se produisent dans certaines familles à La Réunion et je voterai donc cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, je vous prie moi aussi de m’excuser pour le laconisme de mon avis.

À propos du premier amendement que vous avez présenté, j’ai bien indiqué que je prenais en compte les difficultés particulières de certains territoires. Et sur ce sujet, j’ai annoncé que nous devrions rédiger une proposition de loi. Je connais bien Nassimah Dindar, avec qui j’ai eu de nombreux échanges sur les difficultés de son territoire.

Les comportements pathologiques liés à l’alcool ne sont pas circonscrits à La Réunion, toutefois. J’en parlais à l’instant avec Victorin Lurel : nous devons travailler sur tous les outre-mer, mais aussi, comme l’a dit la ministre, sur certains territoires de l’Hexagone.

Pour rappel, 10 % de la population est responsable de 60 % de la consommation d’alcool en France. C’est à cela qu’il faut s’attaquer, et non à l’ensemble des consommateurs. Soyez assurés que ce sujet me préoccupe autant que vous. J’y suis extrêmement sensible, et les dispositions de votre amendement nous touchent.

Ce débat figurera au compte rendu de l’examen de ce PLFSS. Sans doute me suis-je exprimée trop brièvement, je le reconnais. Or, sur un sujet aussi important pour les familles et pour la vie de vos territoires, le laconisme n’est pas approprié. En tout cas, nous devons préparer, ensemble, une proposition de loi susceptible d’être adoptée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1262.

(Lamendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)

Article additionnel après l'article 9 bis - Amendement n° 1262
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
Article additionnel après l'article 9 bis - Amendements n° 3 rectifié, n° 489 rectifié, n° 846 rectifié, n° 1007, n° 1244 rectifié bis, n° 291 rectifié, n° 292 rectifié, n° 651 rectifié, n° 1212 rectifié bis et n° 560 rectifié bis

Mme la présidente. Je suis saisie de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 1177 rectifié, présenté par M. Iacovelli, Mmes Nadille et Havet, MM. Omar Oili et Buis, Mmes Ramia et Duranton, MM. Lévrier et Buval, Mmes Lermytte et Cazebonne et M. Rohfritsch, est ainsi libellé :

Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 1613 ter du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Art. 1613 ter I. – Il est institué une contribution perçue sur les produits alimentaires transformés destinés à la consommation humaine contenant des sucres ajoutés et, pour les boissons sucrées et préparations liquides.

« II. – La contribution est due par la personne qui réalise la première livraison des produits mentionnés au I, à titre gratuit ou onéreux, en France, en dehors des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, de la Nouvelle-Calédonie, des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton, à raison de cette première livraison.

« Est assimilée à une livraison la consommation de ces produits dans le cadre d’une activité économique. La contribution est exigible lors de cette livraison.

« III. – Le tarif de la contribution mentionnée au I est le suivant :

Quantité de sucre (en kilogrammes de sucre ajoutés par quintal de produits transformés et en kilogrammes de sucres ajoutés par hectolitre de boisson)

Tarif applicable (en euros par quintal de produits transformés et en euros par hl de boisson)

Inférieure ou égale à 1

3,03

2

3,54

3

4,04

4

4,55

5

5,56

6

6,67

7

7,58

8

9,6

9

11,62

10

13,64

11

15,66

12

17,68

13

19,70

14

21,72

15

23,74

« Au-delà de quinze kilogrammes de sucres ajoutés par quintal de produit transformé et par hectolitre de boisson, le tarif applicable par kilogramme supplémentaire est fixé à 2,02 € par quintal de produit transformé et par hectolitre de boisson.

« Pour le calcul de la quantité en kilogrammes de sucres ajoutés, celle-ci est arrondie à l’entier le plus proche. La fraction de sucre ajouté égale à 0,5 est comptée pour 1.

« Les tarifs mentionnés dans le tableau du présent III aux deuxième et troisième alinéas sont relevés au 1er janvier de chaque année, à compter du 1er janvier 2025, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année.

« Ces montants sont exprimés avec deux chiffres après la virgule, le deuxième chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq.

« IV. – La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.

« V. – Le produit de cette taxe est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Xavier Iacovelli.