M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Tant l'amendement portant sur l'article d'équilibre que celui qui porte sur l'article liminaire ont été rectifiés par le Gouvernement, qui avait mal évalué les conséquences financières du vote par la commission de son amendement tendant à relever non pas à 0,5 %, mais à 0,4 %, le taux de la TFF.

Le Gouvernement prend également en compte l'amendement de la commission qui supprime l'affectation d'une partie de la TSBA à la Corse.

Ces deux amendements tendent donc à traduire les conséquences des amendements adoptés en seconde délibération, tant ceux de la commission que ceux du Gouvernement.

Je rappelle que le déficit budgétaire de l'État, à l'issue de la première délibération, était de 147,9 milliards d'euros. À l'issue de cette seconde délibération, ce déficit est ramené à 145,1 milliards d'euros, soit une amélioration de 2,8 milliards d'euros.

Cela résulte, en premier lieu, de l'adoption d'amendements de seconde délibération présentés par la commission, lesquels ont permis d'améliorer le solde de 6,5 milliards d'euros : annulation de la contemporanéisation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée qui coûtait, je l'ai dit, 6,4 milliards d'euros ; maintien du taux d'abattement sur le régime microfoncier, dont le coût, je le rappelle, était estimé à 600 millions d'euros.

En sens inverse, le retour partiel sur l'augmentation du taux de la TTF réduit le solde de 550 millions d'euros par rapport à la délibération initiale.

En second lieu, le Gouvernement a présenté également des amendements tendant à revenir sur des dispositifs votés par le Sénat et qui dégradent globalement le solde.

Je veux, en cet instant, évoquer le maintien du taux de prélèvement forfaitaire unique, qui réduit les recettes de 2 milliards d'euros ; l'annulation de la hausse des tarifs de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN), qui minore les recettes fiscales de 780 millions d'euros ; le maintien du taux réduit de TVA sur l'eau en bouteille plastique, qui diminue de 280 millions d'euros les recettes.

En sens inverse, l'amendement relatif au plafond du chiffre d'affaires pour la franchise en base de TVA améliore les recettes de 581 millions d'euros ; la remise en cause de l'amendement favorisant l'achat de parts de capital d'EDF, à la fois par les salariés et les anciens salariés, réduit les recettes des comptes spéciaux de 1 milliard d'euros ; enfin, le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne est minoré de 223 millions d'euros à la suite de la révision, par la Commission, de l'estimation du besoin de financement.

Au total, tel qu'il ressort de l'examen des amendements de seconde délibération, le solde public s'établirait en 2025 à 5,4 % de PIB. Du fait de cette dégradation du solde, la dette publique atteindrait 115,1 % du PIB. Les dépenses de l'État passeraient de 668 milliards à 670 milliards d'euros et celles des collectivités de 343 milliards à 346 milliards d'euros. Celles de la sécurité sociale, quant à elles, resteraient stables.

Dans ces conditions, et dans la perspective des débats de la semaine prochaine, il est, de mon point de vue et, je l'espère, de notre point de vue à tous, impératif de mener à bien toutes les mesures de dépenses que nous allons examiner et envisager en seconde partie. Nul doute que chacun aura bien présent à l'esprit cet objectif.

Au regard des nombreux amendements qui ont été déposés sur les articles de cette seconde partie, on peut penser que certains ont envie de refaire le match. Ce n'est pas forcément souhaitable.

L'avis de la commission est favorable sur ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° A-27 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 133 :

Nombre de votants 242
Nombre de suffrages exprimés 237
Pour l'adoption 223
Contre 14

Le Sénat a adopté.

Je mets aux voix l'ensemble constitué de l'article d'équilibre et de l'état A annexé, modifié.

(L'article 41 et l'état A annexé sont adoptés.)

Article 41 et état A
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Article liminaire (fin)

Article liminaire

M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l'article liminaire dans la rédaction suivante :

L'amendement n° A-26 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. -Rédiger ainsi le tableau de l'article liminaire :

En % du PIB sauf mention contraire

2023

2024

2025

2025

Projet de loi de finances pour 2025

 

LPFP 2023-2027*

Ensemble des administrations publiques

 

 

Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel)

-5,1

-5,7

-5,0

-3,3

Solde conjoncturel (2)

-0,3

-0,4

-0,4

-0,4

Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel)

-0,1

-0,1

-0,1

-0,1

Solde effectif (1+2+3)

-5,5

-6,1

-5,4

-3,7

Dette au sens de Maastricht

109,9

112,8

115,1

109,6

Taux de prélèvements obligatoires (y.c UE, nets des CI)

43,2

42,8

43,5

44,4

Taux de prélèvements obligatoires corrigé des effets du bouclier tarifaire

 

 

 

 

Dépense publique (hors CI)

56,4

56,8

56,6

55,0

Dépense publique (hors CI, en Md€)

1591

1658

1701

1668

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) 1

-1,0

2,1

0,8

0,8

Principales dépenses d'investissement (en Md€) 2

25

30

30

34

Administrations publiques centrales

 

 

Solde

-5,5

-5,4

-4,8

-4,3

Dépense publique (hors CI, en Md€)

646

654

670

658

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

-3,9

-0,7

1,1

1,9

Administrations publiques locales

 

 

Solde

-0,4

-0,7

-0,7

-0,2

Dépense publique (hors CI, en Md€)

316

337

346

329

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

2,4

4,8

1,0

0,2

Administrations de sécurité sociale

 

 

Solde

0,4

0,0

0,1

0,7

Dépense publique (hors CI, en Md€)

738

776

795

779

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

-0,1

3,2

0,6

0,3

Les chiffres en comptabilité nationale relatifs au projet de loi de finances pour 2025 se réfèrent, pour 2023, au compte publié par l'INSEE en comptabilité nationale en base 2020, et pour 2024 et 2025, aux prévisions du Gouvernement dans la même base. Les prévisions relatives à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 en comptabilité nationale, antérieures au changement de base des comptes nationaux français, étaient relatives à la base antérieure des comptes nationaux, la base 2014

*Loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

 

1 À champ constant.

 

2 Au sens de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.

 

3 À champ constant, hors transferts entre administrations publiques.

 

 

 

 

 

Cet amendement a déjà été défendu et la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 134 :

Nombre de votants 242
Nombre de suffrages exprimés 237
Pour l'adoption 223
Contre 14

Le Sénat a adopté.

Je mets aux voix l'article liminaire, modifié.

(L'article liminaire est adopté.)

Vote sur l'ensemble de la première partie du projet de loi

M. le président. Avant de passer au vote sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2025, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits par les groupes pour expliquer leur vote.

Je rappelle au Sénat que, conformément à l'article 42 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 et à l'article 47 bis, alinéa 2, de notre règlement, lorsque le Sénat n'adopte pas la première partie du projet de loi de finances, l'ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de cinq minutes pour ces explications de vote, à raison d'un orateur par groupe, l'orateur ne figurant sur la liste d'aucun groupe disposant, quant à lui, de trois minutes.

MM. Pascal Savoldelli, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, Grégory Blanc, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, et Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui étaient inscrits, ont décidé de quitter l'hémicycle. Ils ne prendront donc pas la parole pour expliquer leur vote.

La parole à M. Christopher Szczurek, pour la réunion administrative des Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe politique.

M. Christopher Szczurek. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est soumis doit répondre de sept années d'échec : un dérapage inédit de 50 milliards d'euros, des recettes fiscales disparues, une confiance des ménages et des entreprises volatilisées et, malheureusement, un gouvernement qui devait être celui de la grande remise à plat et qui s'est finalement fait le service après-vente du bilan macroniste.

Le Rassemblement national a pris depuis le début de la discussion budgétaire à l'Assemblée nationale ses responsabilités. Il a présenté des propositions réelles, sérieuses et chiffrées pour assainir avec justice nos comptes publics.

Au Parlement, comme lors des négociations avec le Premier ministre, il a défendu ses mesures qui ne doivent pas être si nulles que vous le prétendez, puisque l'on finit systématiquement par tenter de nous donner des gages pour éviter la censure…

Nous avons proposé des recettes nouvelles, comme la taxation élevée des rachats d'actions ou la fin de niches fiscales indues.

Nous proposons aussi, et c'est sans doute le plus important, des mesures d'économies réelles, touchant par exemple aux dépenses délirantes de l'État dans la dispendieuse aide publique au développement ou dans le maquis des opérateurs et des agences publiques.

Nous avons également exigé que la contribution nette – et bien trop nette – à l'Union européenne soit diminuée d'un chouïa. Même cela semble relever du tabou intellectuel, moral, mais, surtout, idéologique. Vous me direz qu'il ne peut y avoir de baisse unilatérale et qu'il faut la négocier. Chiche ! D'autres l'ont fait et ont obtenu gain de cause.

Mes chers collègues, je n'aurai de cesse de dire que le problème politique français numéro un est non pas l'incompétence, mais le conformisme. Bruno Retailleau avait fort bien réemployé le terme marxiste d'« impossibilisme » dans un pays où gouverner, c'est se heurter à des blocages permanents.

C'est pourtant la majorité au Sénat qui, par posture, refuse nos 25 milliards d'économies prêtes sur un plateau, votant régulièrement les amendements de la gauche, que je respecte par ailleurs, puisqu'elle joue parfaitement son rôle, même si nous la combattons.

C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues de la majorité, je ne vous comprends pas. Vous vous réjouissez d'un retour au pouvoir tout relatif et à la légitimité tout aussi relative puisque fondée autour d'un groupe qui compte parmi les plus modestes à l'Assemblée nationale, et ce retour au pouvoir, vous n'en faites rien.

Comment rassurer nos compatriotes quand même la Chambre haute se perd dans des mesurettes inutiles touchant, encore et toujours, les classes populaires prises en étau entre une imposition délirante et le spectre de la récession économique ?

Comment comprendre, par exemple, les sept heures de travail gratuites supplémentaires, presque vexatoires, sur lesquelles Laurent Wauquiez vous a bien eus, selon un mode opératoire qui lui est propre : « Travailler plus pour gagner plus », même selon une logique libérale, ça ne devrait jamais être « travailler plus pour renflouer l'État ».

La vraie menace pour ce pays, mes chers collègues, c'est celle de l'extrême centre, incarné non par nos collègues de l'Union Centriste, qui sont parmi les plus raisonnables et cordiaux ici, mais bien par ce trou noir administratif, financier, technocrate, qui ne permet à rien de vivre en dehors de lui et considère que tout ce qui est simple est simpliste et que tout ce qui est populaire est populiste.

Le chiraquisme n'a pas plus réparé le mitterrandisme que le sarkozysme n'a permis d'enrayer le jospinisme, preuve que les modèles qui n'ont pas fonctionné par le passé ne se mettent pas à être bénéfiques sur un coup de poker.

Vous êtes nombreux ici, mes chers collègues, à être brillants, c'est incontestable ; il est simplement dommage que cela ne vous préserve pas de mauvais choix avant tout et surtout par posture et par dogmatisme.

Vous vous en doutez, nous voterons contre cette première partie du projet de loi de finances, en attendant de voir ce que la semaine prochaine nous réserve.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

M. Marc Laménie. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, pour la première fois, l'Assemblée nationale nous a transmis un projet de loi de finances vierge de toute modification.

L'examen calamiteux du budget à l'Assemblée nationale a vu des alliances contre nature déboucher sur le vote de plus de 35 milliards d'euros d'impôts nouveaux – 35 milliards d'impôts nouveaux dans le pays le plus fiscalisé du monde !

Après cet exercice navrant, les regards se sont tournés vers le Sénat. L'attention de nos concitoyens et de nos élus locaux s'est alors portée sur notre chambre, attendant de nous la sagesse et les débats apaisés qui nous caractérisent.

Ces derniers, il faut le dire, ont été particulièrement respectueux. Même s'il existe entre nous des désaccords profonds et même si des visions de la France différentes se sont opposées, nous avons débattu avec une sérénité qui fait du bien à notre démocratie.

Parlons du fond, mes chers collègues.

Je l'ai dit en introduction de mon propos, les députés ont voté 35 milliards d'euros d'impôts nouveaux. La copie que veut rendre le Sénat est-elle meilleure ? La Chambre haute du pays le plus fiscalisé de l'OCDE a vu malheureusement des majorités se créer pour voter le retour de l'exit tax, la création d'un nouvel impôt de solidarité sur la fortune (ISF), l'augmentation de la flat tax, l'augmentation du versement mobilité et des droits de mutation dont s'acquittent nos concitoyens lors de l'achat d'un bien immobilier. Ont également été votées les hausses de la taxe sur les services numériques et de la taxe sur les transactions financières.

Ces augmentations d'impôt ont été heureusement réduites en seconde délibération. Notre groupe ne s'associe pas à cette démarche d'augmentation systématique de la fiscalité, laquelle, mes chers collègues, constitue une erreur manifeste d'appréciation par laquelle on tente, une nouvelle fois, de nous faire oublier que notre pathologie, c'est la dépense publique excessive et insuffisamment efficace.

Comme toujours, ces milliards d'euros de taxes et d'impôts nouveaux pèseront durablement sur nos concitoyens, sur la compétitivité de nos entreprises et donc sur nos territoires. Toute augmentation d'impôt a toujours un caractère récessif et fait baisser le rendement des prélèvements.

Avec mes collègues du groupe Les Indépendants, nous avons souhaité redonner du pouvoir d'achat, à coût constant pour l'État, en faisant voter la monétisation des jours de RTT et la prolongation de l'exonération fiscale et sociale des pourboires.

Nous avons également promu des mesures de financement de l'innovation et du logement, qui ont été adoptées.

Enfin, et parce qu'elles sont le cœur battant de la République, nous avons contribué à atténuer la facture pesant sur les collectivités territoriales.

Le groupe Les Indépendants soutient le Gouvernement, qui fait un travail difficile dans cette période inédite. Sous l'impulsion du Premier ministre Michel Barnier, le Gouvernement a construit un budget d'urgence, avec la volonté de faire porter l'effort budgétaire pour un tiers sur une augmentation de fiscalité ciblée et pour deux tiers sur une baisse des dépenses publiques.

Aussitôt ce texte adopté, nous devrons sortir de cette gestion du budget dans l'urgence et repenser durablement notre conception de l'État pour décider ensemble comment construire notre avenir.

Dès le début de l'examen de ce budget, le groupe Les Indépendants a dit qu'il préférait aux révolutions fiscales une augmentation temporaire, ciblée et très encadrée de la fiscalité pesant sur les entreprises et les ménages qui peuvent la supporter.

Cette augmentation de la fiscalité, qui n'est pas une solution de plus long terme, devrait en partie nous permettre d'éviter une crise financière. Le texte qui est issu des travaux du Sénat est allé trop loin en la matière, il faut le dire. Notre groupe promeut une baisse pérenne des dépenses publiques qui soit soutenable. C'est la raison pour laquelle les sénateurs Les Indépendants seront très attentifs aux propositions d'économies, au moins deux fois supérieures aux hausses de fiscalité votées, que vous allez, j'imagine, nous proposer.

Notre groupe, fidèle à sa ligne, présentera en seconde partie une série d'amendements tendant à diminuer les dépenses des missions autres que régaliennes, auxquelles il faut ajouter la santé, l'éducation, la lutte contre le réchauffement climatique, la recherche et l'innovation, que nous souhaitons sanctuariser.

Mes chers collègues, la crise politique qui nous menace justifie que nous fassions corps autour du Gouvernement pour ne pas entretenir une potentielle crise budgétaire et financière, dont les premières victimes seraient nos concitoyens, nos collectivités et nos entreprises.

M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour le groupe Les Républicains.

M. Albéric de Montgolfier. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici donc parvenus au terme de l'examen des articles de la première partie. Bien évidemment, ce PLF revêtait un caractère tout à fait inédit et exceptionnel. Certes, me direz-vous, nous en avons vu d'autres, notamment lors de la crise des « gilets jaunes », qui nous avait conduits, dans des circonstances un peu particulières, à adopter un amendement supprimant la trajectoire de hausse des carburants.

Cette fois-ci, il faut bien avouer que le caractère exceptionnel et inédit de ce budget est particulièrement marqué.

D'une part, il a été préparé dans un contexte de dégradation des comptes publics jamais observé depuis 1958, hors périodes de crise.

D'autre part, le contexte politique est tout à fait exceptionnel du fait de l'absence de majorité. C'est ce qui a conduit l'Assemblée nationale à rendre une copie blanche au Sénat, laquelle nous a servi de base de travail. D'ailleurs, M. le ministre avait fort justement reconnu que cette copie n'était pas parfaite, admettant qu'elle puisse être corrigée par le Sénat, notamment au regard de l'urgence dans laquelle il avait dû construire ce PLF.

C'est ce qu'a fait la majorité sénatoriale, en responsabilité, en siégeant jour et nuit, y compris ce week-end. Nous avons ainsi voté près de 500 amendements et inséré environ 200 nouveaux articles, qui modifient sensiblement le texte initial.

Bien évidemment, certaines de ces mesures peuvent dégrader le solde budgétaire : nous les compenserons par des mesures d'économies, notamment en seconde partie.

Dans quel état d'esprit avons-nous agi ? Nous avons travaillé, je l'ai dit, en responsabilité. Il était tout d'abord essentiel de répondre à la crise du pouvoir d'achat. Je pense notamment aux différents amendements que nous avons adoptés tendant à annuler tant l'augmentation de la fiscalité de l'électricité au-delà de son niveau d'avant-crise que le durcissement de la trajectoire de hausse du malus automobile, auquel s'opposait la majorité sénatoriale.

Nous avons également agi en responsabilité pour répondre à la crise du logement en étendant le prêt à taux zéro à l'ensemble du territoire et en exonérant de droits de mutation les donations réalisées dans le cadre familial et destinées à l'acquisition ou à la construction de la résidence principale ainsi qu'à des travaux énergétiques.

Nous avons encore agi en responsabilité pour répondre à la crise agricole. Je pense notamment aux mesures – importantes pour les agriculteurs – d'incitation à la transmission des exploitations agricoles au profit des jeunes agriculteurs ou au maintien du tarif réduit du gazole non routier (GNR) pour les travaux agricoles.

C'est dans un même esprit de responsabilité que nous avons proposé des économies sur les différents opérateurs de l'État en effectuant des prélèvements sur leurs trésoreries exceptionnelles.

Enfin, et nous en avons longuement débattu, nous avons voté des amendements destinés à limiter l'effet récessif de certaines mesures visant les collectivités territoriales, notamment la suppression du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée. De même, nous avons limité l'augmentation du tarif de solidarité sur les billets d'avion, afin d'atténuer son effet sur la desserte des territoires.

Tels sont, parmi d'autres, les apports de la majorité sénatoriale.

Le groupe Les Républicains votera bien évidemment la première partie de ce projet de loi de finances pour 2025, avant que nous n'abordions, dès demain, l'examen de sa seconde partie, sur laquelle nous proposerons des mesures d'économies.

Pour conclure mon intervention, je veux exprimer à la fois un regret et une satisfaction.

Mon regret, qui s'adresse singulièrement au Gouvernement, monsieur le ministre, c'est que, année après année, un certain nombre de sujets reviennent immanquablement dans nos débats, sans que nous avancions, en dépit des travaux qui sont menés. On nous promet seulement « d'y travailler » !

Je pense, au regard de l'évolution des modes de consommation, à la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom), je pense à la fiscalité immobilière, étant entendu que le Gouvernement lui-même reconnaît que le régime d'imposition des plus-values n'est pas efficace, je pense à la fiscalité des Gafam.

En revanche, sur certains autres sujets, nous avons progressé, parfois même unanimement, même s'ils mériteraient d'être approfondis. Je pense notamment aux techniques de contournement de l'impôt sur les dividendes, les CumCum.

Monsieur le ministre, je vous sais toutefois gré d'avoir bien identifié ces différents sujets, très humblement, en promettant d'y travailler. Dans le temps qui nous était imparti, il était sans doute difficile de mener à son terme cette entreprise, mais je prends note avec satisfaction de votre engagement. D'autant que, sur l'ensemble de ces sujets, l'apport du Sénat a été décisif : rappelez-vous, mes chers collègues, la ténacité dont nous avons fait preuve, au fil des ans, sur la fiscalité des Gafam ou sur la fraude à la TVA. Chaque fois, on nous expliquait que rien n'était possible et, finalement, la ténacité du Sénat a payé.

C'est donc dans cet esprit de responsabilité que nous allons continuer de travailler. Monsieur le ministre, en dépit de quelques incidents de fin de séance, nous avons eu avec vous des échanges courtois et de qualité, et les réponses que vous nous avez apportées étaient toujours très étayées.

Je remercie également le rapporteur général ainsi que l'ensemble des services du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Vincent Capo-Canellas et Frédéric Buval applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Fouassin, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

M. Stéphane Fouassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme d'une semaine particulièrement importante pour notre pays comme pour nos concitoyens.

Nous devions trouver le juste équilibre entre les impératifs de redressement de nos finances publiques et le soutien nécessaire aux nombreuses politiques prioritaires : il me semble que nous sommes globalement parvenus à une bonne répartition des efforts budgétaires.

Bien que perfectible, la première partie du projet de loi de finances contient en effet de nombreuses avancées. Je pense, par exemple, aux mesures adoptées en faveur des territoires ultramarins.

M. Stéphane Fouassin. Dans un contexte particulièrement sensible, marqué par la lutte contre la vie chère, nous avons voté la baisse des taux de TVA en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion. Nous avons également exempté les outre-mer de l'augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d'avion.

De même, je me félicite du travail transpartisan que nous avons accompli pour préserver le pouvoir d'achat des Français, en limitant l'augmentation du tarif d'accise sur l'électricité à son niveau pré-crise.

En parallèle, nous avons adopté un dispositif permettant de faciliter la transmission des exploitations agricoles. On sait qu'il s'agit d'une des principales problématiques du secteur. Plus largement, nous sommes parvenus à atteindre l'un des objectifs initiaux de ce PLF : améliorer notre solde budgétaire sans obérer notre capacité à investir, grâce à des efforts bien dosés.

Conscients des inquiétudes des collectivités territoriales quant à la soutenabilité de leurs finances, nous avons rejeté l'article relatif à la réforme du fonds de compensation pour la TVA. Au titre de la seconde partie, nous soutiendrons, de même, la refonte du fonds de réserve qui sera proposée.

Ces choix équilibrés témoignent de notre esprit de responsabilité. Il eût été imprudent d'aller plus loin. Nous n'en devrons pas moins poursuivre nos travaux de fond quant au financement des collectivités territoriales.

L'adoption de certains amendements sur lesquels nous venons de délibérer une seconde fois nous inspirait diverses réserves. Je pense à l'augmentation, de 30 % à 33 %, du taux global du prélèvement forfaitaire unique. Une telle hausse aurait pu se révéler lourde de conséquences sur l'épargne des Français. Je songe aussi à la contemporanéisation des versements de TVA aux collectivités territoriales à compter de 2025. Cette mesure répondait certes à des attentes légitimes, mais elle aurait singulièrement aggravé le déséquilibre de nos finances publiques. À ce titre également, nous avons su faire preuve de responsabilité.

Je le répète, nous sommes conscients que ce budget demeure perfectible. Mais nous estimons que, dans l'ensemble, le volet recettes du projet de loi de finances a été singulièrement amélioré. Il relève un défi particulièrement ambitieux : rétablir les finances publiques en limitant les externalités négatives pour les Français comme pour les entreprises.

Les membres de notre groupe voteront donc cette première partie à la quasi-unanimité. Nous espérons que l'esprit de responsabilité ayant guidé nos débats perdurera tout au long de l'examen de la seconde partie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. le rapporteur général applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est au cœur d'une véritable crise de confiance que nous nous apprêtons à voter le volet recettes du projet de loi de finances pour 2025.

Nous subissons non seulement les conséquences politiques d'une dissolution inconsidérée, qui laissent planer le doute sur la pérennité du Gouvernement, mais aussi les conséquences financières d'un endettement galopant. Je me dois, à cet égard, de mentionner l'insincérité des comptes présentés par le précédent gouvernement.

La qualité et la sérénité de nos échanges, tout au long de l'examen de la première partie, méritent d'être soulignées. Nos concitoyens apprécient la sagesse et le sérieux du travail sénatorial, contrastant avec la confusion qui règne à l'Assemblée nationale. Quel dommage d'avoir gâché tout cela avec cette seconde délibération ! Mais c'est ainsi…

Au nom du RDSE, je salue le travail accompli par les assistants et les collaborateurs parlementaires de l'ensemble des groupes politiques, sans oublier les services du Sénat – je pense en particulier à l'équipe de la commission des finances.

Je tiens à formuler, quant à la conduite du travail législatif, quelques remarques destinées à éclairer mon vote et celui de mes collègues du RDSE.

La quasi-totalité des amendements que nous avions déposés ont été rejetés, après avoir reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement. Nous ne pouvons pas faire abstraction de cette obstination farouche, d'autant que les rares dispositions votées sur notre initiative ont été supprimées au terme de la seconde délibération.

Depuis plusieurs années, je milite pour la réduction du nombre d'opérateurs publics de l'État. À ce titre, j'ai été agréablement surpris du soutien que m'ont apporté un certain nombre de collègues sénateurs et députés. M. le Premier ministre lui-même s'est fixé pour objectif de supprimer 10 % de ces structures. Je suis d'autant plus étonné du sort réservé aux amendements que j'avais déposés à l'article 33, ayant pour objet l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), les agences de l'eau, l'Agence nationale du sport (ANS) ou encore l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Aucun d'eux n'a pu être adopté…

Je ne proposais pourtant pas la Saint-Barthélemy des opérateurs ! (Sourires sur les travées du groupe RDSE.) Je suggérais simplement de supprimer 1 % de ces structures, bien en deçà de l'objectif fixé par M. le Premier ministre.

Les 3 milliards d'euros d'économies ainsi dégagés auraient pu être affectés aux collectivités territoriales, qui ont bien besoin d'un tel soutien, ou encore au remboursement de la dette.

Il ne s'agit en aucun cas de supprimer les services publics que les diverses agences rendent aux usagers, mais de dépenser mieux en réduisant toute une série de frais – personnel, véhicules, location de bureaux, etc. – représentant 30 % à 40 % de leur budget. Chaque euro décaissé doit être dépensé utilement.

Je ne reviendrai pas sur les taux d'intérêt de la dette, qui atteignent des seuils alarmants, sur le manque d'enseignants, de policiers et de gendarmes ou sur les déserts médicaux. Je ne reviendrai pas davantage sur les lourdeurs administratives paralysantes pour nos administrés, nos entrepreneurs et nos élus locaux. Je n'évoquerai pas non plus le désespoir du monde agricole, qui s'exprime à nouveau ces derniers jours.

Le Sénat a certes allégé la contribution des collectivités territoriales, mais nous aurions pu aller plus loin, notamment au sujet de la dotation globale de fonctionnement.

Mes chers collègues, ces remarques étant faites, vous devinez qu'il m'est impossible d'approuver la première partie du projet de loi de finances pour 2025. Sa rédaction ne prend pas en considération nos attentes, ou si peu ! Mais le rejet du volet recettes mettrait prématurément fin à nos discussions. Or nous devons poursuivre notre travail.

Fidèle à la tradition de notre groupe, qui fait toujours primer le débat, je m'abstiendrai, tout comme la majorité des membres du RDSE. Mais comprenez bien qu'il s'agit d'une abstention négative, en tout cas pour ce qui me concerne.

Monsieur le ministre, les dispositions issues de nos amendements auraient mérité de figurer dans le texte transmis à l'Assemblée nationale, y compris les mesures adoptées sans le soutien du Gouvernement. Un tel gage de démocratie eût été le bienvenu, qui plus est dans le climat actuel. C'était sans compter la seconde délibération. Vous vous privez ce soir d'une légitimité dont vous avez bien besoin.