M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme chaque année, la commission des lois a examiné les crédits du programme « Fonction publique » de la mission « Transformation et fonction publiques » au mois de novembre dernier. Depuis, maints rebondissements sont venus bouleverser jusqu’à hier l’avis que je devais vous rendre aujourd’hui.

En effet, le nouveau gouvernement est revenu sur un certain nombre de mesures dans différents domaines, notamment celui de la fonction publique.

Ainsi, notre commission avait pris acte du reflux annoncé en 2025 des effectifs de la fonction publique, après plusieurs années de croissance continue. La suppression de 2 200 équivalents temps plein et la décrue du coût des mesures générales et catégorielles auraient permis de freiner la progression de la masse salariale de l’État, qui a augmenté de près de 25 % depuis 2017. L’intention du nouveau gouvernement de revenir sur les suppressions de postes annoncées dans l’éducation nationale remet en cause cette perspective.

En ce qui concerne les crédits du programme « Fonction publique » au sens strict, qui financent – je le rappelle – uniquement les actions interministérielles en matière de formation des fonctionnaires, d’action sociale et de gestion des ressources humaines, ils diminueront légèrement en 2025.

Il s’agira désormais d’améliorer l’analyse et le suivi de la performance de ces crédits, notamment pour les prestations d’action sociale et la plateforme « Choisir le service public », en recourant à l’avenir à des indicateurs plus pertinents.

En ce qui concerne la formation des agents, l’expérimentation à l’origine des classes préparatoires Talents et des concours Talents a pris fin le 31 décembre dernier, sans que le rapport prévu au plus tard pour le 30 juin 2024 ait été remis au Parlement. À ce jour, aucun bilan de ce dispositif qui existe depuis 2021 n’a donc été fait. Aucune pérennisation n’a pu être proposée entre-temps, si bien que nous nous trouvons face à un vide juridique pour le moins problématique, qui a suscité des interrogations légitimes pour les candidats inscrits aux prochaines sessions des concours concernés.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé ces derniers jours la prorogation du dispositif. (M. le ministre confirme.) Cette annonce est une première étape, qui ne règle toutefois pas le problème, puisque seule une loi pourra rendre la prorogation effective. A quelques mois des premières épreuves des concours, l’urgence demeure donc. (M. le ministre acquiesce.)

D’autre part, nous partageons les inquiétudes du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) sur l’avenir de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale. De fait, France Compétences participera pour la dernière fois à son financement en 2025.

La contribution de l’État, maintenue cette année, pourrait cesser dès 2026. Alors que le CNFPT peine déjà à répondre aux besoins des collectivités, qui se sont montrées exemplaires en la matière, un tel scénario serait absolument catastrophique.

Enfin, je déplore le manque de cohérence et de courage du Gouvernement. Dans le contexte de contrainte budgétaire que nous ne connaissons que trop bien, il a finalement renoncé à allonger d’un à trois jours le délai de carence en cas d’arrêt maladie. Cette mesure d’équité par rapport au secteur privé aurait pourtant induit une économie d’environ 289 millions d’euros pour l’ensemble de la fonction publique, sans compter son effet probable sur la réduction de l’absentéisme.

J’espère, madame la ministre, monsieur le ministre, que ce soir vous ne renoncerez pas à l’abaissement à 90 % du taux de remplacement de la rémunération des agents publics durant leurs arrêts de courte durée. Cela permettra de dégager quelque 900 millions d’euros d’économie.

La fonction publique et ses agents, qui s’attachent à apporter chaque jour à nos concitoyens un service public de qualité, constituent l’un des premiers atouts de notre pays. Il nous paraît fondamental qu’ils contribuent eux aussi à l’effort de redressement des finances publiques.

Cela étant, si la commission s’est déclarée fin novembre 2024 favorable à l’adoption des crédits du programme « Fonction publique », aujourd’hui le groupe Les Républicains n’apprécie pas les concessions et les reculades du Gouvernement, qui, si elles constituent pour celui-ci une assurance vie, n’en demeurent pas moins une dégradation très importante et inquiétante de la trajectoire de réduction de notre déficit engagée par Michel Barnier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons cet après-midi plusieurs missions.

Je débuterai mon propos par la mission « Gestion des finances publiques », dont l’une des mesures les plus saillantes prévoit d’étendre le délai de carence des fonctionnaires d’un à trois jours, sous prétexte d’alignement sur le régime du secteur privé.

Sans présager de sa suppression potentielle à la faveur des négociations que le Parti socialiste a réussi à arracher au Premier ministre, je tiens d’abord à rappeler en quoi cette mesure démagogique est un non-sens, bien qu’une partie de cet hémicycle y soit très sensible, puisqu’elle propose de la reprendre chaque année par voie d’amendement – ce qu’a fait M. le rapporteur spécial.

Je parle de démagogie, car la part d’absence d’au moins un jour pour raison de santé au cours d’une semaine est 2,6 % chez les enseignants et de 3,2 % dans la fonction publique d’État, alors qu’elle s’élève à 3,9 % dans le secteur privé. Les enseignants et les agents d’État sont parmi les moins absents.

La situation est différente pour les fonctions publiques territoriale et hospitalière. Néanmoins, je tiens à rappeler que c’est à ces postes que les agents sont le plus exposés à des publics vulnérables. Je pense notamment à ceux qui travaillent dans les crèches, les Ehpad, les hôpitaux et les centres de protection maternelle et infantile (PMI). C’est aussi là que la pénibilité des métiers physiques est la plus importante, que ce soit dans le domaine de la voirie, les collèges, les espaces verts. Si l’on compare des métiers ayant des caractéristiques identiques, il n’y a presque pas de différence en nombre de jours d’absence pour maladie entre le privé et le public.

À ce titre, je tiens à revenir sur l’un des éléments répétés ad nauseam dans ce débat, à savoir la comparaison entre le secteur public et le secteur privé en France. Cette comparaison est faussée, car, dans le secteur privé, le délai de carence de trois jours est largement compensé. Près de deux tiers des salariés bénéficient d’une protection via leur prévoyance d’entreprise. Pourtant, cette réalité est systématiquement occultée dans l’argumentaire en faveur de l’extension du délai de carence dans le public.

Par ailleurs, cette approche s’inscrit dans une tendance récurrente à l’alignement sur le moins-disant social, ignorant notamment que les rémunérations dans le public sont déjà significativement plus faibles que dans le privé à niveau de diplôme équivalent.

De plus, dans un contexte où l’attractivité de la fonction publique est déjà mise à mal, notamment dans l’éducation nationale, l’extension du délai de carence paraît particulièrement malvenue. Cette mesure constituerait une double peine pour des agents déjà confrontés au gel du point d’indice et à des conditions de travail souvent dégradées. Elle risque d’accentuer la crise des vocations que connaissent de nombreux services publics essentiels.

Par conséquent, je rappelle toute l’importance de ne pas étendre ce délai de carence à trois jours dans la fonction publique, tant cela apparaît comme une fausse solution d’équité, fondée sur une comparaison biaisée avec le secteur privé.

Les études disponibles démontrent que les effets d’une telle mesure seraient largement contre-productifs, tant pour la santé des agents que pour l’efficacité du service public.

Au lieu de cette approche punitive, une politique véritablement équitable devrait plutôt avoir pour objectif d’améliorer la protection sociale tant dans le privé que dans le public et de se confronter à une réalité, elle, bien concrète, à savoir que les sous-effectifs chroniques conduisent à une explosion des épuisements professionnels et des maladies liées au travail. Il serait temps de s’atteler aux causes plutôt qu’aux conséquences.

Je m’attarde un instant sur les retraites, plus précisément sur le mode de calcul du déficit prétendument abyssal de notre système de financement, plus spécifiquement de la « dette cachée » qui lui serait afférente.

En effet, dès le début de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a assuré que le déficit du régime des retraites représentait « 50 % des plus de 1 000 milliards [d’euros] de dette supplémentaires accumulés par notre pays ces dix dernières années ».

Selon ses calculs, qu’il défend depuis le mois de décembre 2022, le déficit du système s’établit entre 40 milliards et 45 milliards d’euros par an. Cependant, le système était excédentaire en 2022 et en 2023, et il n’était déficitaire que de 6 milliards d’euros en 2024.

Au nom du groupe socialiste, je tiens à dénoncer ce mode de calcul pour le moins fantaisiste.

Je le rappelle, le financement de notre système de retraite est mixte, c’est-à-dire qu’il repose très majoritairement sur les cotisations, mais aussi sur les financements de l’État.

Les cotisations employeur de l’État sont particulièrement élevées non parce que les pensions du secteur public seraient très élevées, mais parce que l’État doit compenser deux phénomènes : la baisse du nombre de fonctionnaires et le gel du point d’indice.

C’est donc parce qu’il a fait de sévères économies budgétaires sur la masse salariale du secteur public, et non parce qu’il dépense sans compter – comme certains aimeraient à le penser –, que l’État doit cotiser un montant très élevé pour les retraites des fonctionnaires.

Lorsqu’il était haut-commissaire au plan, M. le Premier ministre soutenait que tout ce qui n’est pas financé par des cotisations, c’est de la dette. Ce raisonnement, totalement absurde, qui n’est pas repris par les économistes spécialistes de la question, n’est pas le fruit du hasard : il correspond à une volonté de dramatiser le déficit dans l’objectif de forcer à faire des économies, en menant ce que l’on appelle « la politique des caisses vides ».

Objectivement, les retraites ne sont pas à l’origine du creusement de la dette ces dernières années, sauf si l’on considère que ce poste de dépense est particulièrement illégitime. En réalité, il ne l’est pas plus que l’éducation ou l’armée. Le discours sur la « dette cachée » des retraites brouille complètement la légitimité de ces dépenses et ne favorise pas l’émergence de solutions.

Alors que les partenaires sociaux se voient confier la mission de s’entendre afin de retravailler la réforme des retraites de 2023, le groupe socialiste rappelle que seul un débat honnête et apaisé nous permettra collectivement de sortir par le haut d’une réforme rejetée par 86 % des actifs en 2023. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Marie-Claude Lermytte. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, couvrir de manière exhaustive les importants défis auxquels l’État doit faire face en seulement quatre minutes, particulièrement quand il s’agit de sujets aussi essentiels que les pensions de retraite, le patrimoine immobilier de l’État ou encore l’administration fiscale, est un exercice difficile. Ces thèmes centraux méritent une attention particulière.

L’ensemble de ces crédits traduisant la qualité de nos services publics sont destinés à accompagner la transformation durable de l’action de l’État et de ses agents, afin de la rendre plus efficace au service des usagers.

Permettez-moi de vous faire part de deux observations.

Ma première observation concerne la modernisation de la fonction publique grâce au recours à la dématérialisation des procédures de déclaration ou de contrôle.

Si la dématérialisation a pour objectif d’améliorer le service envers les usagers, il paraît toutefois difficile d’aller plus loin dans la mesure où les citoyens, les collectivités locales et les acteurs économiques réclament fortement le maintien de la présence territoriale des services publics.

Un certain nombre de nos concitoyens rencontrent encore des difficultés d’accès à internet, en raison soit de l’absence de haut débit dans certaines zones, soit de la complexité de l’utilisation de cet outil. J’espère que des mesures spécifiques sont prévues pour accompagner ces usagers dans la transition numérique.

Ma seconde observation concerne l’importance de la lutte contre l’absentéisme afin d’assurer la continuité et la qualité des missions de service public.

L’extension du délai de carence d’un à trois jours et la limitation du remboursement des congés maladie à 90 % pour les arrêts de trois jours à trois mois pourraient contribuer à une meilleure équité entre le secteur public et le secteur privé, tout en dégageant une économie potentielle d’environ 1,2 milliard d’euros par an.

Cette approche s’inscrit dans une perspective plus large de réduction des dépenses, soutenue par le groupe Les Indépendants, qui préconise une diminution de 2 % des crédits d’un grand nombre de missions du budget de l’État.

Cet effort raisonnable est dicté par l’état de nos finances publiques. Un amendement de notre collègue Emmanuel Capus vise ainsi à diminuer de 2 % des crédits de la mission « Gestion des finances publiques ». Le vote de notre groupe sur les crédits de cette mission dépendra du sort réservé à cet amendement.

Face à la menace d’une crise budgétaire, la réduction durable de la dépense publique doit constituer une préoccupation majeure. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, face à l’Himalaya budgétaire qui se dresse devant nous, je concentrerai mon propos sur la mission « Transformation et fonction publiques ». Permettez-moi de saluer d’entrée la stabilité de ses crédits, à hauteur de 275 millions d’euros.

La transformation de la fonction publique, sa modernisation, ainsi que sa capacité à attirer, former et fidéliser des agents compétents sont des défis majeurs pour notre pays, les collectivités territoriales et le bon fonctionnement de nos services publics.

Dans plusieurs filières et métiers, le secteur privé exerce une forte concurrence sur le service public en matière de recrutement. Les conditions de travail, le déroulé de carrière, les perspectives d’évolution et les rémunérations dans la fonction publique ne semblent plus à la hauteur des attentes des candidats et des agents.

En outre, de nombreux agents des fonctions publiques sont touchés par une quête de sens, alors même que la vocation de servir devrait être le cœur et le moteur de leurs métiers.

Pour moderniser l’action publique à l’image des transformations enclenchées dans d’autres pays, il est plus que nécessaire de disposer d’un vivier d’agents publics compétents, formés aux transitions et aux enjeux de demain.

Dans ce contexte, je souhaite revenir sur le programme 148 « Fonction publique » et évoquer plus spécifiquement l’attractivité de la fonction publique. Il s’agit d’un chantier prioritaire, compte tenu de la baisse inquiétante du nombre de candidats aux concours et des tensions de recrutement qui concernent les trois versants de la fonction publique.

Des difficultés récurrentes touchent le recrutement des soignants, des personnels du secteur médico-social, des policiers, mais aussi des enseignants. Nous avons tous en mémoire le spectacle des petites annonces sur le site leboncoin.fr ou les jobs dating désespérés organisés par plusieurs académies pour recruter des enseignants contractuels.

Ces problèmes de recrutement touchent de plein fouet la fonction publique territoriale, alors même que les collectivités territoriales font face à un vieillissement de leurs effectifs, 44 % des agents territoriaux ayant plus de 50 ans. Les besoins de recrutement sont donc appelés à s’accroître considérablement.

Selon une étude du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) menée auprès de 4 000 collectivités, 64 % d’entre elles signalent au moins un champ professionnel en tension. Ces difficultés de recrutement concernent une grande variété de postes – agents de services techniques, animateurs, maîtres-nageurs, ingénieurs et conducteurs de projets, informaticiens…

Le problème est particulièrement épineux dans le secteur de la petite enfance, de nombreuses crèches étant contraintes de fermer des sections ou de réduire leur amplitude horaire faute de personnel qualifié. Il est indispensable que les crèches puissent compter des professionnels compétents en nombre suffisant pour assurer un service de qualité.

Pour renforcer l’attractivité et favoriser les évolutions de carrière dans les métiers de la petite enfance, plusieurs mesures s’imposent. J’en esquisse quelques-unes, régulièrement évoquées par les élus et les cadres en charge de ces sujets dans mon département des Hauts-de-Seine.

Par exemple, privilégier les formations diplômantes en alternance permettrait de réduire les absences prolongées des agents et d’alléger les coûts pour les collectivités. Nous pourrions également encourager la validation des acquis de l’expérience, outil précieux, mais encore trop peu utilisé dans la fonction publique territoriale. Il serait sans doute possible de faciliter l’accès au concours d’auxiliaire de puériculture et d’éducateur de jeunes enfants. Enfin, pourquoi ne pas augmenter le nombre de places offertes, voire supprimer les concours dans certains cas, ou bien tout simplement permettre la promotion interne pour ces cadres d’emploi ?

Mes chers collègues, un autre point de vigilance concerne l’apprentissage au sein de la fonction publique. Comme l’a souligné la rapporteur Mme Di Folco, la baisse constante des dotations versées au CNFPT par France Compétences surprend, notamment les sommes versées au titre de la prise en charge des frais de formation des apprentis dans les métiers publics. Les financements inscrits en 2025 ne permettront de couvrir que 9 000 contrats d’apprentissage, soit moins de la moitié des 21 000 nécessaires.

L’apprentissage est pourtant un levier majeur d’insertion pour les jeunes, un vivier de compétences, ainsi qu’un moyen d’adaptation aux besoins des collectivités locales. Celles-ci constituent parfois le dernier recours de candidats qui peinent à trouver un contrat d’apprentissage auprès d’un employeur privé. Ce désengagement progressif est donc inquiétant.

J’en viens aux deux sujets qui fâchent : la durée légale de travail et les jours de carence dans la fonction publique.

La durée annuelle effectivement travaillée par les agents de la fonction publique territoriale est toujours inférieure à la durée légale fixée à 1 607 heures et à celle des agents des deux autres fonctions publiques. Faire travailler les agents publics territoriaux à la même hauteur que les autres agents de la fonction publique constituerait une source d’économie. (M. Thomas Dossus sexclame.)

Du reste, il est illusoire de penser que l’on peut faire tourner une collectivité ou délivrer un meilleur service public en travaillant moins.

Au demeurant, ce reproche contribue à alimenter certains stéréotypes sur les métiers de la fonction publique, ce qui nuit de façon itérative à leur attractivité.

De même, l’allongement du délai de carence d’un à trois jours représenterait une source d’économie substantielle – cela est documenté – et permettrait de lutter contre l’absentéisme qui reste plus élevé dans le public que dans le privé.

Cette question a évidemment de multiples causes et doit faire l’objet d’un travail de fond. Outre le coût induit pour la collectivité, je tiens à souligner la dégradation des conditions de travail qui en résulte pour les collègues présents à leur poste qui doivent absorber la charge de travail des absents, au risque d’entretenir sans fin la spirale de l’absentéisme.

M. Thomas Dossus. Ce n’est pas de l’absentéisme dans ce cas !

Mme Marie-Do Aeschlimann. Fallait-il pour autant renoncer purement et simplement à appliquer cette mesure ? Je ne le pense pas. Ce qui est sûr, c’est que de moins en moins d’actifs comprennent l’inégalité de traitement entre le public et le privé.

J’en viens à la question, tout aussi difficile, de la complexité administrative.

La simplification administrative est un sujet qui semble tenir à cœur au Gouvernement, qui prévoit de faire adopter rapidement un projet de loi de simplification de la vie économique. Cela tombe bien, car il s’agit aussi d’une priorité de la réflexion sénatoriale depuis longtemps.

Le Premier ministre a également annoncé qu’il souhaitait poursuivre la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle en diffusant celle-ci dans l’action publique, l’industrie, la formation et la recherche à l’aide d’un programme d’investissement dans les infrastructures.

On ne peut que se féliciter que le Gouvernement mette l’accent sur la simplification. La Haute Assemblée a eu l’occasion à maintes reprises de dénoncer le coût de la complexité administrative pour nos concitoyens, nos entreprises et nos collectivités locales.

Mes collègues sénateurs Devinaz, Moga et Rietmann ont déjà tiré la sonnette d’alarme en 2023. Dans leur rapport d’information La sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises, ils comptent près de 44 millions de mots formant le flux de ces normes. La France occupe le 107e rang sur 140 pour le fardeau administratif, selon l’indice de compétitivité mondiale. Selon l’OCDE, cette complexité a un coût estimé à 3 % du PIB.

Le constat n’est pas nouveau. Georges Pompidou déclarait déjà en 1966 : « Il y a trop de lois, trop de textes, trop de règlements dans ce pays ! » Depuis, on a le sentiment que plus cela change, plus c’est la même chose, voire que cela empire.

Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur cet impérieux chantier. Que comptez-vous faire pour aider les collectivités territoriales à se désengluer de la complexité administrative ? Le constat est connu, notamment depuis le rapport d’information de Mme Gatel et M. Pointereau relatif à la simplification des normes imposées aux collectivités territoriales, et les États généraux de la simplification organisés au Sénat en 2023. Le Sénat a d’ailleurs voté un train de mesures pour la simplification et le toilettage de divers codes l’an dernier.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Marie-Do Aeschlimann. L’inflation normative complexifie les projets locaux.

Mes chers collègues, monsieur le ministre, la fonction publique est au cœur de la modernisation de l’action de notre pays. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile.

M. Dominique Théophile. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour examiner les crédits de quatre missions primordiales et de deux comptes d’affectation spéciale non moins importants. J’en soulignerai les points clés.

La situation des finances publiques appelle à faire un effort collectif sans précédent en matière de réduction des dépenses de fonctionnement de l’État.

Dans ce contexte, les crédits de paiement de la mission « Transformation et fonction publiques » ont ainsi été réduits de 407 millions d’euros, soit une baisse significative de 28 %, tout en conservant la même ambition de transformation.

En effet, le plan Talents du service public poursuivra son déploiement pour permettre une meilleure représentativité de la fonction publique dans sa diversité.

Le développement de l’apprentissage constitue également un axe structurant de ce plan. Un certain nombre de freins ont été levés ces dernières années pour favoriser l’apprentissage dans la fonction publique. Ce budget doit permettre d’atteindre en 2025 la conclusion d’au moins 9 000 contrats d’apprentissage par an dans la fonction publique territoriale ; je le souhaite en tout cas.

Ce budget traduit des engagements forts dans d’autres domaines essentiels. La mission « Gestion des finances publiques » s’inscrit pleinement dans la dynamique de modernisation et de proximité de l’action publique engagée depuis 2017. Un montant de 10,97 milliards d’euros lui est alloué cette année, en augmentation de 72 millions d’euros par rapport à l’année précédente, principalement en raison de la hausse des dépenses de personnel.

La diminution de 0,8 % des dépenses de fonctionnement et de 7,8 % des dépenses d’investissement nous paraît légitime, notamment en raison de la réduction des dépenses immobilières.

Nous saluons d’ailleurs les rénovations énergétiques et l’optimisation du parc immobilier de l’État, qui illustrent la volonté du Gouvernement de s’inscrire dans une stratégie plus vertueuse, alliant maîtrise de nos finances et transition écologique.

Ces ajustements contribuent à la rationalisation des dépenses sans compromettre les réformes structurantes en cours, telles que l’expérimentation du compte financier unique visant à renforcer la gestion comptable et financière des collectivités locales, le déploiement accru de l’intelligence artificielle pour lutter plus efficacement contre la fraude, ainsi que le renforcement des moyens alloués aux renseignements douaniers et à Tracfin.

Le contexte de l’examen de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions », est particulier. La réforme paramétrique des retraites d’avril 2023 entre pleinement en effet ; en outre, la revalorisation des pensions sur l’inflation est en vigueur depuis le 1er janvier 2025.

Avec 5,9 milliards d’euros, cette mission demeure essentielle pour le versement des pensions de milliers d’affiliés, principalement ceux qui le sont aux régimes spéciaux des transports terrestres. Sont principalement concernés des agents de la SNCF et de la RATP, des marins ou encore des anciens mineurs.

Enfin, nous voterons les crédits de la mission « Crédits non répartis », particulièrement importante en raison de l’imprévisibilité de la vie publique.

Pour autant, nous soutiendrons les amendements du Gouvernement et du sénateur Canévet, qui annulent 70 millions d’euros de crédits sur le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques », car il s’agit d’une légitime participation de cette mission aux efforts budgétaires que nous devons consentir.

En conclusion, le groupe RDPI votera en faveur des budgets de ces missions pour 2025, indispensables pour la modernisation de notre administration, la gestion financière de l’État et la soutenabilité de nos régimes sociaux et de retraite.