Mme Martine Berthet. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° II-1830 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à faciliter le cumul de l’allocation aux adultes handicapés avec un temps partiel, au-delà de 50 %. Il est très important de maintenir ce dispositif, qui affecte très directement la vie quotidienne des personnes en situation de handicap qui travaillent.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. Nous étions effectivement favorables, l’année dernière, à la mesure évoquée par nos collègues permettant aux bénéficiaires de l’AAH parvenus à l’âge de la retraite de poursuivre une activité tout en continuant à percevoir l’allocation.
L’année dernière, cette mesure n’a été que partiellement mise en œuvre, faute d’avoir été préparée par les administrations. Toutefois, notre rapport budgétaire pour 2025 montre que la dynamique des dépenses d’AAH était principalement tirée par l’évolution très rapide de l’AAH-2, c’est-à-dire l’allocation versée aux personnes dont le taux d’incapacité est compris entre 50 % et 79 %.
Il ne semble donc pas nécessaire, alors que le coût de la déconjugalisation entraîne également une hausse des dépenses d’AAH, d’ajouter aux facteurs d’accélération de ces dépenses. Nous pouvons difficilement augmenter les dépenses sur tous les postes. Des choix ont été faits, nous devons nous y tenir.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. J’insiste sur l’intérêt de maintenir ce dispositif en adoptant les amendements identiques. Monsieur le rapporteur spécial, non seulement cette mesure n’a pas été mise en œuvre, mais elle a même été annulée au printemps dernier.
Nous proposons donc de la rétablir afin de faciliter l’accès à l’emploi des bénéficiaires de l’AAH qui cumulent cette allocation avec une activité professionnelle. Mes chers collègues, mettez-vous à la place d’une personne en situation de handicap qui, parce qu’elle retrouve un emploi, perdrait le bénéfice de l’AAH.
De plus, le montant de l’AAH n’est pas exceptionnel. J’entends bien qu’il faille faire des économies, mais je trouve injuste de le faire sur le dos de personnes en situation de handicap, qui sont déjà en difficulté.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1489 rectifié et II-1830 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-1806, présenté par Mme Le Houerou, M. P. Joly, Mme Canalès, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Inclusion sociale et protection des personnes dont titre 2 |
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40 000 000 |
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40 000 000 |
Handicap et dépendance |
40 000 000 |
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40 000 000 |
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Égalité entre les femmes et les hommes |
|
|
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TOTAL |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à allouer une compensation financière aux Ésat à la suite de l’instauration de la complémentaire santé obligatoire pour les travailleurs de ces établissements.
L’article 14 de la loi du 18 décembre 2023 pour le plein emploi introduit au sein du code de l’action sociale et des familles une obligation de couverture pour les travailleurs en situation de handicap au sein des Ésat à compter du 1er juillet 2024, ce qui est une bonne chose. Conformément à ces dispositions, cette couverture doit respecter les garanties minimales prévues pour les salariés, ainsi que le financement de 50 % du régime obligatoire applicable.
Si cette réforme représente une avancée significative pour les droits des travailleurs en Ésat, elle engendre néanmoins des charges financières importantes pour les établissements, dont une part importante rencontre déjà des difficultés budgétaires.
Mme la présidente. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-102 rectifié est présenté par M. Mouiller, Mme Aeschlimann, MM. Sol et Belin, Mme Schalck, M. Reichardt, Mmes Demas, Di Folco et Belrhiti, M. Pellevat, Mmes Ventalon et Bellurot, M. Bouchet, Mme Lassarade, M. C. Vial, Mme Muller-Bronn, M. Khalifé, Mme Estrosi Sassone, MM. Klinger et H. Leroy, Mme Richer, MM. Panunzi, Cadec et Somon, Mmes Deseyne et Puissat, MM. J.M. Boyer et J.P. Vogel, Mme Gruny, M. Daubresse, Mme Berthet, MM. Savin et Reynaud, Mmes Imbert et M. Mercier, MM. Frassa et Bas, Mme Gosselin, M. Bruyen, Mmes Dumont, Malet et Micouleau, MM. Perrin, Rietmann, Pointereau, J. B. Blanc et Brisson, Mmes Valente Le Hir et Lopez et MM. Genet, Rapin, Sido, Naturel, Piednoir et Favreau.
L’amendement n° II-1734 est présenté par M. Burgoa, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° II-1964 rectifié ter est présenté par M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Rochette, Brault, V. Louault, Wattebled, Chevalier, Fialaire, Menonville, Lemoyne et Milon, Mme Petrus et M. Haye.
L’amendement n° II-2167 rectifié est présenté par Mme Billon, MM. Cambier et J.M. Arnaud et Mmes Perrot, Jacquemet, Romagny, Antoine et Housseau.
L’amendement n° II-2170 rectifié est présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, MM. Daubet et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve, M. Masset et Mme Pantel.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Inclusion sociale et protection des personnes dont titre 2 |
18 000 000 |
18 000 000 |
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Handicap et dépendance |
18 000 000 |
18 000 000 |
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Égalité entre les femmes et les hommes |
||||
TOTAL |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Je ne reviendrai pas sur l’argumentaire d’Annie Le Houerou, que nous partageons. L’objet de cet amendement est le même que celui de son amendement, sauf que nous proposons un abondement non pas de 40 millions d’euros, mais de 18 millions d’euros.
Je rappelle simplement que l’État s’est engagé à assumer la moitié du coût du financement de 50 % de la complémentaire obligatoire par les Ésat, c’est-à-dire 25 % du total. En faisant le calcul, nous trouvons que le montant de cette charge s’élève à 18 millions.
Cet amendement vise donc simplement à traduire un engagement pris par l’État.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-1734.
M. Laurent Burgoa, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à traduire budgétairement l’annonce gouvernementale de prendre en charge la moitié du coût employeur de la complémentaire santé. À cette fin, il tend à augmenter les crédits du programme 157 de 18 millions d’euros.
Afin de respecter les règles de recevabilité financière, cette somme est prélevée sur les crédits du programme 304.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° II-1964 rectifié ter.
M. Daniel Chasseing. La loi sur le plein emploi devait instaurer une complémentaire santé obligatoire, prise en charge à hauteur de 50 % par l’employeur.
Actuellement, 60 % des Ésat ne financent pas de complémentaire santé et 30 % d’entre eux sont en déficit.
Le précédent gouvernement s’était engagé à assumer 25 % de la part employeur, qui s’élève à 600 euros, c’est-à-dire 150 euros par travailleur. En multipliant ce chiffre par le nombre de personnes travaillant en Ésat – 120 000 –, nous obtenons le chiffre de 18 millions d’euros.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° II-2167 rectifié.
Mme Annick Billon. Cet amendement visant à traduire un engagement de l’État a été très bien défendu par le président de la commission des affaires sociales.
J’ajoute que le coût de cette complémentaire santé représente une charge globale substantielle pour les Ésat. Selon le rapport IGF-Igas de février 2024, la part d’Ésat en situation de déficit atteindrait de 41 % à 43 % du fait de cette obligation. C’est un argument supplémentaire pour voter cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° II-2170 rectifié.
Mme Maryse Carrère. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. Nos travaux sur le PLF pour 2025 ont en effet souligné l’introuvable financement de la part employeur de la complémentaire santé dans les Ésat. La mise en œuvre de cette obligation en 2025 aboutirait à ce que la part des Ésat en déficit atteigne 41 % à 43 %, contre 29 % auparavant.
La commission des finances émet donc un avis favorable sur les amendements identiques nos II-102 rectifié, II-1734, II-1964 rectifié ter, II-2167 rectifié et II-2170 rectifié et demande le retrait de l’amendement n° II-1806 à leur profit ; à défaut l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Tout d’abord, je salue le travail important qui est mené par les Ésat, dont la transformation favorise le retour à l’emploi en milieu ordinaire de nos concitoyens en situation de handicap. Partout sur le territoire, ces établissements cherchent de nouveaux modes de fonctionnement pour diversifier leurs activités et proposer des parcours qui se rapprochent le plus possible du sur-mesure.
Bien évidemment, le Gouvernement continue de travailler pour atteindre les objectifs inscrits dans la loi pour le plein emploi en faveur d’une convergence des droits des travailleurs en Ésat vers un statut de salarié. Néanmoins, compte tenu du contexte économique, il m’est difficile d’émettre un avis favorable sur ces amendements.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° II-1806 et s’en remet à la sagesse du Sénat sur les cinq amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous sommes favorables à ces amendements. Selon l’adage, gouverner, c’est prévoir. Lorsque la loi pour le plein emploi a été adoptée, nous disposions d’un état des lieux : un tiers des Ésat était déjà en déficit, un autre tiers était en équilibre précaire et le dernier tiers était excédentaire. Aussi, il n’est pas étonnant, un an plus tard, que 40 % des Ésat rencontrent des difficultés financières : ceux dont l’équilibre était précaire sont sur le point de basculer.
Compte tenu du manque d’anticipation, il me semble légitime que vous acceptiez de cibler des crédits sur les établissements en difficulté. Cela répondrait à la demande des services. Il convient au moins de soutenir et d’anticiper les établissements pour lesquels la marche était trop haute.
Au regard des travées dont émanent ces amendements, ils devraient être adoptés. Pour ma part, si j’ai évoqué ce sujet dans la discussion générale, je n’ai pas osé déposer un tel amendement.
Tout, de même, quel manque d’anticipation ! Nous laissons venir la catastrophe, puis nous réparons…
Mme la présidente. Madame la ministre déléguée, acceptez-vous de lever le gage sur les cinq amendements identiques ?
Mme la présidente. Il s’agit donc des amendements identiques nos II-102 rectifié bis, II-1734 rectifié, II-1964 rectifié quater, II-2167 rectifié bis et II-2170 rectifié bis.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° II-610 est présenté par M. Pellevat.
L’amendement n° II-1488 rectifié est présenté par Mme Berthet, M. Bas, Mmes Bellurot et Belrhiti, MM. Bouchet, Cadec et Genet, Mmes Josende, Joseph, P. Martin et Micouleau, MM. Milon et Naturel, Mmes Richer et Ventalon et M. P. Vidal.
L’amendement n° II-1542 rectifié ter est présenté par M. Mouiller, Mmes Puissat, Deseyne et Lassarade, MM. Khalifé et Sol, Mmes Aeschlimann, Muller-Bronn, Petrus, Gruny, Malet, Bonfanti-Dossat et Imbert, MM. Daubresse, H. Leroy, Frassa et Anglars, Mme Estrosi Sassone, M. Brisson, Mme M. Mercier, MM. Panunzi et Savin, Mme Dumont, MM. C. Vial et Michallet, Mme Borchio Fontimp, M. Paul, Mme Nédélec, M. J.B. Blanc, Mme Demas, MM. Pointereau, de Legge, Sido, Rapin et Gremillet, Mme Di Folco et M. Bruyen.
L’amendement n° II-1808 est présenté par Mme Le Houerou, M. P. Joly, Mmes Féret et Canalès, M. Kanner, Mme Conconne, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Inclusion sociale et protection des personnes dont titre 2 |
16 000 000 |
16 000 000 |
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Handicap et dépendance |
16 000 000 |
16 000 000 |
||
Égalité entre les femmes et les hommes |
||||
TOTAL |
16 000 000 |
16 000 000 |
16 000 000 |
16 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
L’amendement n° II-610 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° II-1488 rectifié.
Mme Martine Berthet. En 2022, les établissements et services d’aide par le travail (Ésat) ont bénéficié d’un soutien financier dédié, grâce à une enveloppe relevant du plan de relance : le fonds d’accompagnement de la transformation des établissements et services d’aide par le travail (Fatésat).
En 2023, ce fonds d’accompagnement était doté de 15 millions d’euros, finançant aussi bien la diversification, le développement et l’adaptation des activités que le conseil destiné à renforcer les compétences des travailleurs.
Malgré un bilan positif et une forte mobilisation du secteur, plusieurs Ésat n’ont pu présenter de projet. Dans certains cas, ils n’étaient pas suffisamment préparés. Dans d’autres, les délais imposés étaient trop courts.
Lors du comité de suivi du plan de transformation des Ésat, en 2023, une dotation de 16 millions d’euros a été envisagée pour répondre aux besoins non couverts.
Dans le droit fil de cette proposition, je suggère d’augmenter de 16 millions d’euros les crédits de l’action n° 12, « Allocations et aides en faveur des personnes handicapées », du programme 157, « Handicap et dépendance ». Ces crédits seraient prélevés sur l’action n° 11, « Prime d’activité et autres dispositifs », du programme 304.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° II-1542 rectifié ter.
M. Philippe Mouiller. Ces dispositions venant d’être très bien défendues, je ne reviendrai pas sur leur contenu. Je précise simplement notre but : il s’agit ni plus ni moins de rendre service au Gouvernement.
Ces derniers temps, les différents postes ministériels changent régulièrement de titulaires : la vie politique est ainsi faite ! Mais le Sénat reste, pour sa part, un pôle de stabilité. Nous travaillons dans la durée, en gardant à l’esprit les débats et propositions successives, ainsi que les divers engagements pris par l’exécutif.
Lorsque le Gouvernement s’est attelé à la transformation des Ésat, nous n’avons pas caché nos inquiétudes. Nous étions certes conscients de la nécessité de faire évoluer ces structures, afin que, peu à peu, les travailleurs des Ésat bénéficient du droit commun ; mais nous avions également à l’esprit les missions tout à fait spécifiques, ainsi que les contraintes budgétaires et financières de ces établissements.
Lors de plusieurs conseils nationaux du handicap, le Gouvernement a évoqué la création d’un tel fonds d’accompagnement, qui, à l’origine, devait être doté de 30 millions d’euros.
Compte tenu de la complexité de la procédure d’appel à projets, le Gouvernement a décidé, dans une certaine précipitation, de créer une première enveloppe de 15 millions d’euros, afin de lancer l’opération. Il semblait sous-entendu que les 15 millions d’euros restants seraient accordés plus tard. Madame la ministre, confirmez-vous les engagements pris devant le Sénat ? Permettrez-vous l’attribution de cette seconde enveloppe ?
Nous sommes, comme vous, soucieux de préserver l’équilibre budgétaire ; c’est précisément pourquoi nous raisonnons ici à enveloppe fermée. La mesure que nous proposons ne creusera pas le déficit public.
J’y insiste : assurer le respect des engagements pris par l’exécutif, c’est, somme toute, rendre service au Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° II-1808.
Mme Annie Le Houerou. Le Fatésat peut se prévaloir d’un bilan très positif : il a permis de mobiliser l’ensemble du secteur, malgré des délais resserrés.
En particulier, il a favorisé des dynamiques locales grâce à divers partenariats, initiatives innovantes et projets de formation. Je pense par exemple, dans le département dont je suis l’élue, à la légumerie créée en lien avec le centre hospitalier de Guingamp : une telle initiative n’aurait pu voir le jour sans ce fonds, qu’il convient bel et bien de développer.
Madame la ministre, au printemps dernier, votre prédécesseur déclarait vouloir renouveler le Fatésat grâce à une enveloppe de 16 millions d’euros. Il s’agissait de répondre aux besoins non couverts, notamment pour les Ésat n’ayant pu déposer de projet faute d’une préparation suffisante, les délais imposés étant très brefs. Notre amendement tend à déployer les crédits dont il s’agit.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. Mes chers collègues, nous avons déjà évoqué le Fatésat lors de nos débats de l’année dernière. La ministre de l’époque nous avait recommandé d’attendre les conclusions d’un rapport de l’inspection générale des finances (IGF) et de l’inspection générale des affaires sociales (Igas) portant sur les droits des travailleurs en Ésat.
Ce rapport a été publié en février 2024. Il conclut que la reconduction du Fatésat suppose « une meilleure évaluation de l’utilisation des crédits et de leur impact sur l’activité économique des Ésat aidés ». Il précise que la consolidation de la résilience économique des Ésat constitue un préalable à tout dispositif d’aide spécifiquement axé sur le secteur.
Toutefois, il n’est pas impossible que la reconduction du Fatésat permette précisément de consolider la résilience économique des Ésat.
Je souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Les structures et initiatives financées par le biais de cette mission ont bien sûr toutes leur importance.
À cet égard, il faut naturellement continuer de soutenir les Ésat. C’est précisément le sens de l’amendement voté à l’instant, lequel tend à renforcer la participation de l’État au financement de la mutuelle dont relèvent les travailleurs d’Ésat. Cette manne bénéficiera in fine aux Ésat, en les aidant à garder leur équilibre financier.
On ne peut pas modifier encore davantage la répartition des crédits de cette mission. Grâce à cet équilibre, nous pourrons continuer à soutenir l’ensemble des dispositifs de solidarité. Vous savez à quel point ces derniers sont nombreux, à l’instar des publics concernés, lesquels ont tous leur importance.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Madame la ministre, dans quelques jours, le 11 février 2025, nous serons tous réunis pour fêter les vingt ans d’une loi essentielle pour toutes les personnes en situation de handicap. En rabotant ainsi les crédits des Ésat, on enverrait un très mauvais signal à nos concitoyens, qui plus est à quelques jours de cet anniversaire.
J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer le quotidien très difficile des hommes, des femmes et des enfants confrontés au handicap. De grâce, un peu de respect pour ce que ces personnes vivent ! N’allons pas chercher des économies dans des secteurs où elles ne sont absolument pas justifiées.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Madame la ministre, je vais m’efforcer de chasser vos alarmes. Les aides sont attribuées dossier par dossier, dans le cadre d’un appel à projets.
Rien n’empêche aujourd’hui de voter ces crédits, conformément, d’ailleurs, aux engagements du Gouvernement. D’autres arbitrages budgétaires suivront, en fonction des évaluations à venir ; vous garderez la main pour préciser l’emploi de cette somme.
Menons cette démarche à son terme : le vote de ces trois amendements identiques ne menace pas l’équilibre général de la mission et vous pourrez, par la suite, vérifier la pertinence de cet accompagnement, structure par structure. Les représentants des Ésat seront sans doute appelés à vous rencontrer prochainement pour traiter d’évolutions plus larges. Toujours est-il que vous maîtriserez la consommation de ces crédits.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. Madame la ministre, j’entends bien l’argument budgétaire, mais nous ne parlons somme toute que de 16 millions d’euros.
Les Ésat jouent un rôle essentiel dans nos territoires : nous qui sommes tous élus locaux, ou du moins l’avons été, sommes bien placés pour le savoir. Nous mesurons, en particulier, la qualité du travail accompli par ces établissements et les grands services qu’ils rendent à la société. Il est certes nécessaire de les faire évoluer, mais cet effort suppose des moyens financiers.
Je ne saurais évidemment engager la commission tout entière. Néanmoins, à titre personnel, j’émets un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, je maintiens l’avis défavorable du Gouvernement, pour les raisons que j’ai mentionnées.
En outre, je tiens à rétablir un certain nombre de vérités. On ne peut pas prétendre que les crédits dédiés au handicap sont en baisse : c’est totalement faux ! Avec ce projet de loi de finances (PLF), ils progressent par le biais de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), qui est déconjugalisée et qui voit son montant augmenter. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Nous ne traitons ici que d’une toute petite partie du budget du handicap. On trouve ainsi dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) une enveloppe de 270 millions d’euros, grâce à laquelle nous pourrons apporter de nouvelles réponses aux personnes en situation de handicap : l’objectif, à ce titre, est de créer 15 000 solutions en 2025. Ces dernières sont dans les tiroirs ; elles n’attendent qu’une chose, c’est l’adoption du PLFSS, qui a été retardé par la censure du dernier gouvernement.
Mme Céline Brulin. Il y avait longtemps…
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Qu’on ne vienne pas nous expliquer que le gouvernement actuel renonce ou recule en matière de handicap : il fait exactement l’inverse. Loin de diminuer, les crédits dédiés au handicap augmentent, grâce au volontarisme du Gouvernement.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1488 rectifié, II-1542 rectifié ter et II-1808.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-1815, présenté par Mmes Rossignol, Le Houerou et Canalès, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Inclusion sociale et protection des personnes dont titre 2 |
202 000 000 |
202 000 000 |
||
Handicap et dépendance |
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Égalité entre les femmes et les hommes |
202 000 000 |
202 000 000 |
||
TOTAL |
202 000 000 |
202 000 000 |
202 000 000 |
202 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Marion Canalès.
Mme Marion Canalès. Mes chers collègues, on dénombre aujourd’hui en France 40 000 personnes prostituées. Il est nécessaire de renforcer l’action des associations locales et d’adapter les moyens aux besoins grandissants de celles d’entre elles qui sont engagées dans un parcours de sortie de prostitution (PSP).
Il est incompréhensible que, plus de huit ans après l’adoption de la loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel, l’on peine encore à trouver les moyens de faire face à de tels enjeux.
La stratégie interministérielle de lutte contre le système prostitutionnel, lancée en mai 2024, suppose elle aussi des moyens renforcés. En ce sens, il est indispensable d’accorder des crédits supplémentaires aux directions régionales aux droits des femmes et à l’égalité (DRDFE).
Le montant demandé par le biais de cet amendement peut certes paraître élevé ; mais je rappelle que la prise en charge des 40 000 personnes en situation de prostitution exigerait soit 2,4 millions d’euros, soit 240 millions d’euros par an pendant dix ans.
En la matière, on ne peut pas se contenter d’actions ponctuelles : il faut bel et bien déployer une stratégie au long cours pour sortir ces personnes de la prostitution. C’est l’objet de cet amendement présenté par Mme Rossignol.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. La lutte contre le système d’exploitation que constituent le proxénétisme et la prostitution est bien sûr d’une grande importance, encore renforcée par la position abolitionniste adoptée par notre pays.
Les auteurs de cet amendement ont raison de souligner que les associations sont les fers de lance de cette lutte ; d’ailleurs, nous entendons ces dernières tous les ans, lors de l’élaboration du rapport auquel cette mission donne lieu.
Toutefois, la commission est défavorable à cet amendement. D’une part, le montant proposé – il s’agit, je le rappelle, de 202 millions d’euros – nous semble excéder de loin les capacités financières de cette mission. De l’autre, on peut douter de la capacité des acteurs de terrain à mettre en œuvre de telles sommes en si peu de temps.
Cela étant, dans le cadre du programme de contrôle de la commission des finances pour l’année 2025, Pierre Barros et moi-même avons souhaité nous consacrer à l’évolution du financement des violences faites aux femmes, au premier rang desquelles figure évidemment le système prostitutionnel.
J’espère que, d’ici à l’année prochaine, nous bénéficierons d’un chiffrage précis, nous permettant d’avancer sur ce sujet et de présenter un certain nombre de propositions.