Mme la présidente. La parole est à Mme Elsa Schalck. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Elsa Schalck. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre société s’honore et s’honorera toujours en étant aux côtés de ceux qui en ont le plus besoin. Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont en hausse de plus de 2 % par rapport à 2024, ce qui est à saluer dans le contexte budgétaire si difficile que connaît notre pays.

Mais les chiffres ne doivent pas masquer une réalité vécue par de très nombreux concitoyens confrontés à des difficultés grandissantes.

Mon propos portera sur le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes », dont le budget est en hausse de 10 % par rapport à l’an passé. Cette augmentation couvre en grande partie l’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales, qui est en hausse de 7 millions d’euros. L’aide universelle d’urgence est une avancée législative importante, qui résulte, je le rappelle, d’une proposition de loi sénatoriale, dont je tiens à saluer l’auteure, notre ancienne collègue et désormais ministre, Valérie Létard.

Encourager à porter plainte, mettre en place les conditions pour inciter les femmes à quitter le domicile, tel est l’objet même de cette aide financière. L’argent ne doit plus être un frein pour les victimes.

Si nous saluons un budget en hausse, il est toutefois difficile de se réjouir d’une augmentation des crédits, laquelle traduit la hausse des besoins des victimes, toujours plus nombreuses, et reflète autant de situations de détresse pour elles et leurs enfants. En huit mois, plus de 26 000 personnes auraient bénéficié de l’aide universelle d’urgence.

Je rejoins le rapporteur spécial : la réussite de ce nouveau dispositif tient en partie au rôle d’accompagnement du secteur associatif. Je salue et remercie l’ensemble des personnels qui œuvrent en leur sein. Nous connaissons les efforts qu’ils consentent pour écouter, orienter, accompagner et contribuer à ce que toute violence soit dénoncée.

Nous sommes nombreux à saluer le travail des associations d’aides aux victimes, ainsi que des centres d’information sur les droits des femmes et des familles. Ces centres s’inquiètent fort légitimement de l’extension de la prime Ségur sans aucune compensation financière. Je sais que nous débattrons d’amendements autour de cet enjeu. Nous nous devons d’être à leurs côtés.

Nous mesurons la nécessité d’avoir des personnels formés et un accompagnement social et psychologique durable, mais aussi l’impérieuse nécessité d’une coordination entre les différents acteurs.

Les autres dispositifs du programme 137 concernent les centres de prise en charge des auteurs de violences conjugales, les référents départementaux pour les femmes victimes de violences au sein du couple, ainsi que la ligne téléphonique du 3919. Ils demeurent financés à leur niveau de 2024.

Mais, en 2025, la violence à l’égard des femmes est et reste un véritable fléau dans notre société. Le combattre nécessite la mobilisation de tout un chacun, citoyens, associations, acteurs judiciaires. Permettez-moi d’espérer que, à l’avenir, nous aurons davantage de lisibilité, à la hauteur de ces enjeux, et non une succession de dispositifs éparpillés entre différentes missions budgétaires.

Nous sommes le vingt-deuxième jour de l’année et six femmes ont déjà été tuées par leur conjoint, tandis que des milliers d’entre elles continuent à appeler à l’aide, parfois, malheureusement, dans un parfait silence.

Depuis 2017, cette lutte est une grande cause nationale. Certes, des évolutions législatives ont eu lieu et sont à souligner. D’un point de vue juridique, je pense au bracelet antirapprochement, au téléphone grave danger, récemment aux ordonnances de protection immédiate. D’un point de vue civil, j’ai à l’esprit la question du recouvrement des pensions alimentaires en cas d’impayés.

Nous ne pouvons pas rester au milieu du gué. De très nombreux sujets restent en suspens. Quid de l’égalité salariale et de la transposition de la circulaire européenne sur la transparence des rémunérations d’ici juin 2026 ? Quid de la création d’une Maison des femmes par département avant la fin de 2025, mesure annoncée par l’ancien Premier ministre, Michel Barnier ?

Enfin, nous sommes plusieurs dans cet hémicycle à défendre un principe qui nous tient particulièrement à cœur, madame la ministre, celui de la solidarité fiscale, une violence économique peu visible, mais bien réelle. Il n’est pas concevable qu’une femme, bien que divorcée, continue à être solidairement responsable des dettes contractées par son conjoint, sans son consentement. Ces femmes aussi ont besoin de nous avoir à leurs côtés, et notre société s’honorerait à leur apporter des réponses concrètes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Olivia Richard applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de lautonomie et du handicap. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d’abord de remercier les rapporteurs Bazin, Bocquet et Burgoa pour l’ensemble de leur travail sur cette mission.

Nous démarrons l’examen de ces crédits dans un contexte très particulier, vous le savez, un contexte difficile pour notre pays, puisque celui-ci fait l’objet d’une procédure pour déficit excessif, à laquelle le Gouvernement veut apporter des réponses en misant sur un retour à une trajectoire fiable de nos finances publiques, qui passe par un objectif à 5,4 % de déficit pour 2025.

C’est un enjeu d’avenir, un enjeu de souveraineté qui doit guider l’ensemble de la représentation nationale et, évidemment, du Gouvernement.

Dans ce contexte particulièrement difficile sur le plan économique, les crédits alloués à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont non seulement préservés, mais connaissent une hausse. C’est dire combien le Gouvernement a œuvré pour maintenir le soutien de l’État aux personnes vulnérables, ce que plusieurs d’entre vous, tous groupes politiques confondus, ont souligné.

Ce choix est le résultat d’un dialogue nourri avec le Sénat, dont le Gouvernement a souhaité prendre en compte les préoccupations profondes pour préserver nos politiques de solidarité. Je salue à cet égard la position des groupes qui ont annoncé apporter leur soutien à l’adoption des crédits de cette mission.

Sans être exhaustive, permettez-moi de mentionner plusieurs composantes majeures de ce budget : le respect des engagements du pacte des solidarités avec la tarification des cantines à 1 euro et le programme Mieux manger pour tous, les crédits dédiés à la lutte contre la précarité menstruelle ou au dispositif expérimental « territoires zéro non-recours » et, vous l’avez également souligné, le déploiement de la solidarité à la source via le préremplissage des demandes de prime d’activité et de RSA, afin que chacun dispose du niveau de soutien adéquat, que ce soit à la hausse ou à la baisse, lorsque des indus sont détectés.

Étant élue départementale, comme certains d’entre vous, je mesure les difficultés auxquelles sont confrontés tant les familles que les professionnels pour recouvrer les indus.

Par ailleurs, cette mesure répond à un objectif légitime de maîtrise de la dépense publique, qui nous permet de stabiliser les crédits du programme 304, malgré la tendance inflationniste.

Les crédits de cette mission ont également vocation à apporter un soutien financier de 86 millions d’euros aux communes pour l’entrée en vigueur du service public de la petite enfance. Ainsi, les communes pourront investir pleinement leurs nouvelles compétences d’organisation de l’offre sur leur territoire, d’information des parents et de contrôle de la qualité. Ce soutien est complémentaire à celui des caisses d’allocations familiales (CAF), qui est confirmé dans le PLFSS.

En ce qui concerne le programme 157 « Handicap et dépendance », en hausse de 650 millions d’euros, je tiens à souligner la montée en charge de la déconjugalisation de l’AAH, qui représente un gain moyen pour les nouveaux bénéficiaires de 556 euros par mois, supérieur aux 370 euros initialement estimés. Ce programme financera également la sanctuarisation à haut niveau des moyens de l’emploi accompagné.

De plus, des moyens supplémentaires seront accordés à la politique de lutte contre la maltraitance. J’insiste sur le fait que les crédits de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) sont en légère hausse. Cela confirme que ces enjeux font l’objet d’une attention prioritaire de la part du Gouvernement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous essaierons de répondre ensemble à vos interrogations relatives à la situation des Ésat, structures que je connais bien.

En ce qui concerne les questions autour de la prime Ségur, permettez-moi de dire de nouveau le caractère exceptionnel du relatif maintien des crédits de cette mission. Le fait non seulement de maintenir, mais d’augmenter certains des crédits de cette mission relève d’un engagement fort du Gouvernement. Toutefois, nous ne pouvons pas répondre à l’ensemble des questions qui ont été soulevées.

Je défendrai donc une position de responsabilité budgétaire à court terme, tout en m’engageant à traiter les sujets au cas par cas dans l’année à venir, en m’appuyant sur une vision d’ensemble. Mesdames, messieurs les sénateurs, l’examen des amendements de la mission sera pour nous l’occasion d’approfondir ces débats.

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour l’examen de cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à trois heures trente. Cinquante-huit amendements sont à examiner.

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Solidarité, insertion et égalité des chances

30 377 240 010

30 373 601 344

Inclusion sociale et protection des personnes

14 261 751 831

14 262 913 165

dont titre 2

3 400 000

3 400 000

Handicap et dépendance

16 030 371 412

16 025 571 412

Égalité entre les femmes et les hommes

85 116 767

85 116 767

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-1933 rectifié bis, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Duffourg, Menonville, Cambier, Maurey et Delcros, Mmes Antoine et Vermeillet, M. Folliot et Mmes Jacquemet et Romagny, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

640 000

 

640 000

Handicap et dépendance

 

85 000

 

85 000

Égalité entre les femmes et les hommes

 

74 000

 

74 000

TOTAL

 

799 000

 

799 000

SOLDE

- 799 000

- 799 000

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-2054 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin et MM. Capus, Laménie, Malhuret, Brault, Chevalier, Grand, V. Louault, A. Marc, Rochette et L. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

508 000 000

 

508 000 000

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

TOTAL

 

508 000 000

 

508 000 000

SOLDE

- 508 000 000

- 508 000 000

La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Cet amendement de Vanina Paoli-Gagin et de plusieurs de nos collègues vise à diminuer de 2 % les crédits de cette mission, ce qui équivaut à une économie de 508 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. L’amendement n° II-1933 rectifié bis vise à annuler 799 000 euros relevant, théoriquement, des dépenses de fonctionnement. Toutefois, ce coup de rabot nous semble d’ordre forfaitaire. Or il importe que les gisements d’économies soient précisément identifiés avant de procéder à une diminution de crédits.

Autrement dit, nous estimons que cet amendement n’est pas opérant : avis défavorable.

Quant à l’amendement n° II-2054 rectifié bis, il tend à diminuer de 2 % les crédits de la mission, soit la bagatelle de 508 millions d’euros… Pour information, en loi de fin de gestion pour 2024, environ 2,2 millions d’euros de crédits ont été récupérés sur l’ensemble des crédits de la mission, qui dépassaient 30 milliards d’euros. Nous en sommes donc à l’épaisseur de l’épaisseur du trait : les prévisions sont précises.

Aussi, pour enlever 508 millions d’euros au budget de cette mission, il faudrait déterminer clairement sur quoi ils sont prélevés, quelle politique est remise en cause et comment cette économie est pratiquée dans les faits.

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Nous avons rappelé les enjeux majeurs de solidarité, de soutien aux publics vulnérables et de protection de nos enfants que recouvre cette mission.

D’un point de vue strictement budgétaire, les baisses de crédits sont évidemment une bonne chose, mais nous avons cherché un équilibre entre l’impératif budgétaire et les enjeux majeurs de solidarité.

Le Gouvernement demande le retrait de ces deux amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Laménie, l’amendement n° II-2054 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Marc Laménie. Au vu des explications du rapporteur et de la ministre, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-2054 rectifié bis est retiré.

Monsieur Canévet, l’amendement n° II-1933 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-1933 rectifié bis est retiré.

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° II-87 rectifié est présenté par M. Canévet et Mme Romagny.

L’amendement n° II-627 est présenté par le Gouvernement.

L’amendement n° II-2053 rectifié bis est présenté par Mme Paoli-Gagin et MM. Capus, Laménie, Malhuret, Brault, Chevalier, Grand, V. Louault, A. Marc, Rochette et L. Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

91 791 830

 

91 791 830

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

TOTAL

 

91 791 830

 

91 791 830

SOLDE

- 91 791 830

-91 791 830

La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° II-87 rectifié.

M. Michel Canévet. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter l’amendement n° II-627.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Cet amendement vise à annuler les crédits sur la prime d’activité à hauteur de 91,8 millions d’euros. Il s’inscrit dans le cadre de l’effort budgétaire nécessaire pour respecter la trajectoire que nous avons fixée d’un déficit autour de 5,4 % du PIB en 2025.

Cette annulation de crédits sur le programme 304 porte sur la prime d’activité, dont les paramètres vont être ajustés à la marge pour tenir compte de la dynamique importante du Smic ces dernières années. Celle-ci a conduit à ce que la prime d’activité puisse être perçue par des personnes appartenant aux 50 % des Français les plus aisés, ce qui est contraire à son objectif initial.

Cette mesure sera donc concentrée sur les plus aisés des bénéficiaires de la prime d’activité et ne provoquera pas de perte en valeur absolue. En effet, la valeur augmentera aussi, mais dans de plus faibles proportions pour les personnes les plus aisées.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Que signifie « aisé » pour vous ?

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° II-2053 rectifié bis.

M. Marc Laménie. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Arnaud Bazin, rapporteur. Madame la ministre, j’avais en quelque sorte dévoilé nos cartes dans mon intervention liminaire, puisque j’ai annoncé que nous émettrions un avis de sagesse que l’on pourrait qualifier de bienveillante à cet amendement dans le cas où vous préciseriez la nature de son objet.

La mesure que vous proposez représente une économie de près de 92 millions – tout de même ! –, qui porte uniquement sur le paramétrage de la prime d’activité. Vous venez de nous expliquer que cette économie était ciblée sur une moindre augmentation de la prime d’activité pour ses bénéficiaires dont les revenus sont les plus élevés, si l’on peut dire, dans la mesure où il s’agit de bas revenus.

Par ailleurs, je vous ai également demandé si vous aviez anticipé un éventuel moindre recours à cette prime en raison de la conjoncture économique difficile, qui pourrait conduire à une hausse du chômage, et donc à une baisse du nombre de potentiels requérants. Qu’en est-il ?

La commission émet donc un avis de sagesse sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Cette tendance n’affecte pas les crédits de la mission. Nous avons uniquement tenu compte des répercussions de l’évolution du Smic dans notre calcul.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Quelle évolution du Smic ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Je répète que le principe est non pas de supprimer l’accès à la prime d’activité, mais simplement d’en limiter la hausse, en particulier pour les revenus des plus aisés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Madame la ministre, vous avez déclaré dans votre avis sur les deux premiers amendements que le Gouvernement n’avait pas l’intention d’abaisser de quelque manière que ce soit les crédits de cette mission, et vous nous proposez maintenant d’annuler près de 92 millions d’euros de crédits, en expliquant qu’il s’agit non pas d’une baisse, mais d’une moindre hausse.

Par ailleurs, vous évoquez les « plus aisés » ; quand on connaît le plafond de revenus pour percevoir la prime d’activité, je ne comprends pas bien de qui vous parlez…

Enfin, vous parlez de modifications à la marge. Permettez-moi d’être franche, madame la ministre : vos propos relèvent d’un langage technocratique, que l’on utilise lorsqu’on ne veut pas dire réellement les choses.

Vous justifiez votre mesure par la dynamique du Smic, dont je vous rappelle qu’elle correspond à celle de l’inflation. Au bout du bout, le pouvoir d’achat des personnes concernées n’a pas augmenté. Aussi, malgré toutes les explications que vous pouvez nous donner, j’estime que cette baisse est un très mauvais signal.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis très surprise que le point de sortie de la prime d’activité concerne les salariés « les plus aisés » : pour ma part, j’aurais plutôt parlé des moins pauvres… Je rappelle que la France a la fâcheuse habitude de substituer la prime d’activité à une politique salariale complètement déficiente.

Comme vous ne convoquez pas de conférence des salaires, nous subissons une déflation salariale : lorsque le Smic augmente, il ne fait que suivre l’inflation et les salaires se tassent. Dès lors, la prime d’activité comble l’absence de politique salariale des entreprises.

Mme Raymonde Poncet Monge. De plus, la prime d’activité était, paraît-il, censée réduire la pauvreté des salariés aux plus bas revenus. Pendant longtemps, vous avez refusé d’augmenter les prestations sociales, estimant qu’il valait mieux mener des politiques incitatives comme la prime d’activité, qui marquait un écart entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas.

Dorénavant, vous ne faites ni l’un ni l’autre : vous n’augmentez pas les prestations sociales et vous modifiez, du jour au lendemain, les paramètres de la prime d’activité pour toucher « les plus aisés »… Ce n’est pas sérieux.

Pouvez-vous nous dire quel est le point de sortie de la prime d’activité ? Vous nous dites que le sixième décile des revenus salariaux serait concerné par la mesure, ce qui me semble pour le moins étonnant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Nous sommes nous aussi surpris, voire atterrés, de cette réduction de crédits de 92 millions d’euros sur la prime d’activité. Certes, le Smic a augmenté ces dernières années, mais cela s’explique par le fait que l’inflation a terriblement augmenté en parallèle, comme l’ont expliqué les orateurs précédents.

On ne peut pas considérer que les personnes rémunérées au Smic soient mieux traitées aujourd’hui qu’il y a quelques années, puisqu’elles ont dû, comme l’ensemble des Français, faire face à des augmentations de prix très importantes.

Par ailleurs, nous avons constaté ces dernières années que de plus en plus de salariés étaient rémunérés au Smic dans notre pays. En 2023, plus de 17 % des salariés étaient au Smic. Ce chiffre aurait diminué à 14 % en 2024, mais seulement 8 % des salariés français étaient payés au salaire minimum il y a trente ans. Dès lors que davantage de personnes touchent le Smic, je ne vois pas comment nous pourrions réaliser une telle économie sur leur dos…

Enfin, tous les orateurs de la discussion générale ont expliqué les divers besoins au sein de cette mission. Je pense notamment à l’aide alimentaire : de plus en plus de nos concitoyens demandent de l’aide aux associations de solidarité. Compte tenu de cette situation, on pourrait imaginer que les crédits économisés sur la prime d’activité soient reportés pour répondre à d’autres besoins.

Nous nous opposons à cet amendement et nous sommes nous aussi choqués par vos propos laissant entendre que la prime d’activité serait perçue par des salariés aisés. Mais peut-être méconnaissons-nous la situation, auquel cas il faut nous éclairer, madame la ministre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Madame la ministre, vous annoncez, par cet amendement, une diminution des crédits de la mission de 92 millions d’euros. Vous omettez de nous rappeler que le montant de l’enveloppe consacrée à la prime d’activité a déjà subi une réduction de 188 millions d’euros par rapport au texte initial. Auriez-vous la mémoire sélective ?

Vous justifiez cette mesure par la dynamique du Smic ces dernières années, mais comme l’ont expliqué mes collègues, l’augmentation du Smic s’explique par la hausse de l’inflation.

Enfin, je dénonce moi aussi vos propos. Comment pouvez-vous parler des salariés les plus aisés au sujet des bénéficiaires de la prime d’activité ? À quel niveau de salaire considérez-vous qu’un salarié est aisé ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, je ne reviendrai pas sur les arguments de mes collègues. Je souhaite simplement vous interroger sur le non-recours à la prime d’activité, qui est, me semble-t-il, très élevé. Or il est question d’en automatiser le versement. Où en sommes-nous de ce projet ? Les salariés dont les revenus sont insuffisants malgré leur travail pourront-ils en bénéficier bientôt ? Quel est le taux de non-recours ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Mes propos ont été déformés de manière quelque peu caricaturale : je ne parle évidemment pas des salariés les plus aisés de manière générale ; je parle simplement des bénéficiaires de la prime d’activité les plus aisés. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)

Mme Émilienne Poumirol. C’est scandaleux !

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Grâce à ce nouveau paramétrage, nous ciblons les hausses de la prime d’activité sur ceux de ses bénéficiaires qui ont les revenus les plus bas.

Madame la sénatrice Le Houerou, le non-recours est en effet un enjeu majeur, auquel la solidarité à la source doit nous permettre de répondre. Le but du Gouvernement est bel et bien que les personnes qui pourraient prétendre à percevoir la prime d’activité la perçoivent effectivement. L’objectif est d’y parvenir au 1er mars 2025, car nous voulons aller le plus vite possible pour lutter contre le non-recours.

Madame la présidente, je me permets de répéter que l’économie que nous réalisons sur la prime d’activité ne remet pas en question le principe d’une hausse de celle-ci et qu’elle nous permet de préserver le budget des solidarités. Dans un contexte économique très difficile, nous maintenons un effort important en direction de nos concitoyens les plus vulnérables.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-87 rectifié, II-627 et II-2053 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.) – (Marques de désapprobation sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)

Mme Silvana Silvani. Quand même… Cela va trop loin !

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° II-611 est présenté par M. Pellevat.

L’amendement n° II-1489 rectifié est présenté par Mme Berthet, M. Bas, Mmes Bellurot et Belrhiti, MM. Bouchet, Cadec et Genet, Mmes Josende, Joseph, P. Martin et Micouleau, MM. Milon et Naturel, Mmes Richer et Ventalon et MM. C. Vial et P. Vidal.

L’amendement n° II-1830 rectifié est présenté par M. P. Joly, Mmes Le Houerou et Canalès, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

13 000 000

 

13 000 000

Handicap et dépendance

13 000 000

 

13 000 000

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

TOTAL

13 000 000

13 000 000

13 000 000

13 000 000

SOLDE

0

0

L’amendement n° II-611 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° II-1489 rectifié.