Mme Raymonde Poncet Monge. L’objectif de dépenses de la branche vieillesse pour 2025 porte l’empreinte de l’injuste réforme des retraites.
Tant que cette contre-réforme sera maintenue, nous rappellerons ce qu’elle signifie concrètement pour des millions de salariés, du fait de la dégradation des conditions de travail et de l’intensification de ce dernier.
La brutalité de la réforme des retraites atteint durement les catégories populaires en figeant le sas de précarité. Au total, 200 000 personnes supplémentaires sont maintenues aux minima sociaux ou au chômage.
D’autres solutions de financement étaient pourtant possibles, nous en avons défendu un certain nombre – je n’y reviendrai pas. De même, en faisant entrer dans l’assiette de calcul certains dispositifs exemptés, l’on pourrait dégager de nouvelles recettes pour la sécurité sociale.
Cet objectif de dépenses trahit aussi l’absence d’une politique ambitieuse de lutte contre le non-recours. Je pense notamment à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), allocation différentielle dont le taux de non-recours atteint tout de même 50 %.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer l’article 29. On nous répondra que ce n’est pas possible ; en tout état de cause, nous tenons à vous dire que cet objectif n’est pas le nôtre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 29.
(L’article 29 est adopté.)
Article 30
Pour l’année 2025, l’objectif de dépenses de la branche Famille de la sécurité sociale est fixé à 59,5 milliards d’euros.
M. le président. L’amendement n° 66, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à supprimer l’objectif de dépenses de la branche famille, réduit de 200 millions d’euros par rapport au texte de la commission mixte paritaire.
En première lecture, nous avions déjà dénoncé l’insuffisance de cet objectif : nous maintenons qu’il n’est pas à même de répondre aux enjeux, pourtant prioritaires, de la politique familiale et de la petite enfance.
Dans ce domaine, le présent texte ne contient aucune mesure nouvelle. Il se contente d’enregistrer la dépense en année pleine des mesures positives votées, notamment avec notre soutien, au titre des précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale.
La réforme du service public de la petite enfance et le changement de gouvernance que nous soutenons ne forment d’ailleurs qu’une première étape. La crèche, comme tout autre type d’accueil, doit d’abord être pensée sous l’angle du développement et de l’émancipation de l’enfant ; or elle reste conçue principalement, voire uniquement, comme un mode de garde.
Les trois premières années de l’enfant doivent s’articuler au projet de l’éducation nationale. En suivant cette réflexion, l’on répondra en partie à la crise d’attractivité du secteur de la petite enfance, car on rendra du sens au travail des professionnels.
Sans une politique ambitieuse, pour prendre à bras-le-corps la crise de recrutement que je viens d’évoquer, une partie du plan de création de places d’établissement d’accueil du jeune enfant (EAJE) restera lettre morte. Aujourd’hui déjà, des berceaux sont « gelés », faute de professionnels.
En parallèle, nous déplorons le manque d’ambition du Gouvernement au sujet du congé parental. Au lieu d’un montant forfaitaire, il faudrait un dispositif garantissant un meilleur taux de remplacement de la rémunération ; faute de quoi la société assignera encore et toujours les femmes au travail reproductif.
Enfin, le renforcement du soutien financier aux familles les plus pauvres devrait être une priorité. Dans cet esprit, il conviendrait de rétablir les allocations familiales dès le premier enfant.
Ce n’est pas M. le rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille qui me contredira quant au manque d’ambition du budget de cette branche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Madame Poncet Monge, j’entends bien votre ambition pour la petite enfance, mais, encore une fois, sans l’article 30, le présent texte serait inconstitutionnel : les familles seraient dès lors privées de 50 milliards d’euros de prestations.
Je ne crois pas qu’en votant un tel amendement l’on rendrait service aux familles françaises.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Vous pouvez soupirer : cela ne m’empêchera pas de prendre la parole !
Monsieur le ministre, vous ne pouvez brandir un tel argument. Cet objectif ne nous convient pas, et j’ai pris la peine de préciser pourquoi. Ne m’opposez pas une fin de non-recevoir en vous abritant derrière l’intérêt des familles : ce n’est pas très honnête intellectuellement. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 30.
(L’article 30 est adopté.)
Article 31
Pour l’année 2025, l’objectif de dépenses de la branche Autonomie de la sécurité sociale est fixé à 42,6 milliards d’euros.
M. le président. L’amendement n° 67, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement, le dernier de notre discussion, vise à supprimer l’objectif de dépenses de la branche autonomie. Bien entendu, M. le ministre me répondra que son adoption priverait nombre de personnes et de structures des crédits qui leur sont destinés, parmi lesquels les 300 millions d’euros destinés aux Ehpad.
Néanmoins, je tiens à le répéter : face au vieillissement de la population et aux besoins de compensation du handicap, le secteur social et médico-social souffre, en France, d’un manque structurel et durable de moyens humains et financiers.
La transition démographique n’est pas financée.
L’équilibre escompté de la branche autonomie n’est en fait qu’un trompe-l’œil, tant les difficultés financières des Ehpad sont lourdes.
Les services domiciliaires sont eux aussi dans une situation financière dramatique. Leurs difficultés sont encore plus anciennes et, désormais, ils ne recrutent plus. Le manque de personnel entraîne une baisse d’activité qui les fait basculer sous leur point d’équilibre budgétaire, dans la mesure où, de manière quelque peu obsolète, ils sont financés à l’activité horaire. En conséquence, nombre de ces services disparaissent, alors que la nécessité du virage domiciliaire revient sans cesse dans les discours.
Le présent texte ne réserve aucune mesure au secteur domiciliaire, hormis une aide à la mobilité.
L’ensemble des établissements médico-sociaux souffrent d’une pénurie de professionnels, ainsi que d’un taux d’encadrement insuffisant. Ils peinent en particulier à recruter des professionnels qualifiés, le secteur étant perçu comme peu attractif en raison de salaires faibles et surtout de conditions de travail pénibles, encore dégradées par le manque de personnel.
Monsieur le ministre, avant de conclure, j’attire votre attention sur la mise en œuvre, à domicile, des prestations de suppléance du proche aidant. Nous nous félicitons que ce dispositif soit enfin pérennisé, mais deux questions demeurent entières : premièrement, comment sera-t-il financé ? Deuxièmement et surtout, comment assurera-t-on la maîtrise du reste à charge pour les bénéficiaires ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Chantal Deseyne, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie. Ma chère collègue, votre amendement m’étonne un peu, car, comme vous le savez, il tend à supprimer un article obligatoire du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En outre, pour 2025, l’objectif de dépenses de la branche autonomie est fixé à 42,6 milliards d’euros, en hausse de 200 millions d’euros. Cette seconde somme, fléchée vers les Ehpad, représente une augmentation de 6 % par rapport à 2024.
Pour ma part, je me félicite que la branche autonomie soit préservée et je souhaite que nous puissions, tous ensemble, travailler rapidement à de nouvelles pistes de financement.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Madame la sénatrice, je ne vous dirai pas que le vote de cet amendement rendrait le présent texte inconstitutionnel, puisque de tels arguments n’ont pas l’heur de vous plaire… Je relèverai simplement que l’enveloppe destinée aux Ehpad a été portée, depuis la première lecture, de 100 millions à près de 300 millions d’euros.
Cet effort n’est naturellement pas suffisant pour traiter l’ensemble des problématiques liées à la situation de nos Ehpad et, a fortiori, au grand âge. Mais, je le répète, j’estime que nous allons dans le bon sens. Quoi qu’il en soit, je préfère l’adoption d’un budget, même imparfait, au rejet de ce texte. Il faut à tout prix éviter le chaos pour nos anciens.
Le Gouvernement émet à son tour un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 31.
(L’article 31 est adopté.)
Article 32
Pour l’année 2025, les prévisions des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de sécurité sociale sont fixées ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
|
Prévision de charges |
|
Fonds de solidarité vieillesse |
21,1 |
– (Adopté.)
Vote sur l’ensemble de la troisième partie
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
(La troisième partie du projet de loi est adoptée.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 159 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Pour l’adoption | 225 |
Contre | 104 |
Le Sénat a adopté définitivement. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
3
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mardi 18 février 2025 :
À onze heures :
Questions orales.
À quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Explications de vote des groupes, puis scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture (texte de la commission n° 251, 2024-2025) ;
Proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport, présentée par M. Michel Savin et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 668, 2023-2024).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt et une heures quinze.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER