M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. Monsieur le ministre, je vous remercie pour l’intérêt que vous portez à ce sujet. Il nous semble, de notre côté, qu’une spécialité d’infirmière en psychiatrie et santé mentale serait vraiment bienvenue.
L’état de santé mentale des Français et des Françaises est alarmant – je sais que vous en êtes conscient. Les maladies psychiatriques touchent aujourd’hui une personne sur cinq, soit au total 13 millions de personnes dans notre pays. Et la situation est particulièrement alarmante chez les plus jeunes.
Par ailleurs, le virage ambulatoire n’a pas compensé les fermetures de lits : 6 741 lits ont été fermés dans le secteur psychiatrique et la diminution des capacités d’accueil à temps complet n’a été compensée qu’à 30 % par les créations de places d’accueil à temps partiel dans le cadre du virage ambulatoire.
L’état préoccupant de nos services d’hospitalisation a des conséquences notables sur l’attractivité du métier d’infirmier et d’infirmière en psychiatrie. Dans beaucoup de ces services, de plus en plus de postes sont vacants. De nombreux services ont dû fermer des lits et le secteur de ville ne peut pas compenser cela. Cette situation dégrade les capacités d’accueil et la qualité des soins et accroît la pénibilité du travail pour les professionnels, ce qui rend ces missions encore moins attractives.
L’adoption de cet amendement ne réglerait pas tous les problèmes, mais il permettrait de redonner du sens à la profession d’infirmier en psychiatrie et santé mentale et de mieux la reconnaître.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Je maintiens mes amendements, qui me semblent très importants.
Monsieur le ministre, j’ai moi-même fait la différence avec ce qui existait auparavant. Le diplôme général d’infirmier, l’infirmier diplômé d’État, a été une fusion des deux statuts, mais cette fusion n’a-t-elle pas de facto noyé la spécialité psychiatrique ? N’a-t-elle pas finalement disparu ? Or, même si le statut a disparu, la fonction existe toujours bel et bien. Il existe toujours des infirmières dans les hôpitaux psychiatriques, sauf qu’elles n’ont plus de spécialité reconnue.
C’est cette question qui est au centre de mes amendements. Englober les ressortissants de l’Union européenne était la seule manière d’entrer dans le sujet et, s’ils sont concernés, les infirmiers français le sont aussi naturellement.
Je lance vraiment un appel au Gouvernement pour qu’il agisse d’un point de vue réglementaire afin de reconnaître, de nouveau, une spécialité infirmière en psychiatrie et santé mentale.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous soutiendrons cet amendement, que nous avions nous-mêmes proposé sous une autre forme.
Monsieur le ministre, vous indiquez vouloir faire des propositions en ce sens. Avec Jean Sol et Daniel Chasseing, nous travaillons actuellement sur la santé mentale. Je l’ai dit : beaucoup d’acteurs de ce domaine estiment que la suppression de la spécialité infirmière en psychiatrie et en santé mentale était une erreur.
Il ne s’agit pas forcément de reproduire le modèle précédent à l’identique. Pour ma part, je préfère parler d’infirmiers en psychiatrie plutôt que d’infirmiers en santé mentale. Je parle avec les mots de quelqu’un qui n’est pas une professionnelle de santé, mais il me semble que l’exercice de la profession d’infirmier en psychiatrie fait appel à des compétences que ne possèdent pas nécessairement l’ensemble des infirmiers et des infirmières.
Des situations très particulières nous ont été rapportées, témoignant de difficultés rencontrées par certains établissements en raison de ce manque de compétences, qui, certes, s’acquièrent sur le tas – et je rends hommage à tous les infirmiers qui interviennent dans le domaine psychiatrique –, mais sur lesquelles nous devrions mener une réflexion approfondie.
L’unanimité des acteurs entendus sur le sujet m’a moi-même interpellée.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je soutiendrai également cet amendement.
Céline Brulin l’a dit : les infirmiers psychiatriques jouaient un rôle spécifique, très important. Dans les services, on regrette désormais souvent la disparition de cette formation. Il n’est peut-être pas possible de relancer ce diplôme. Cependant, la problématique est fréquemment exprimée par les acteurs de terrain.
Dans certains départements en avance sur d’autres, nous l’avons vu, l’infirmière en pratique avancée en psychiatrie et santé mentale occupe une place importante, notamment dans les centres médico-psychologiques, qui manquent de psychiatres et de pédopsychiatres. Le couple infirmière psychiatrique-IPA apporte un véritable « plus » dans ces structures, tout comme dans les équipes mobiles. Toutes deux forment un binôme très efficace, l’une pouvant prescrire les médicaments, l’autre bénéficiant d’une bonne connaissance des pensionnaires hospitalisés accueillis en CMP.
Ce couple doit pouvoir continuer à opérer, même si l’IPA en psychiatrie et santé mentale présente un grand intérêt, surtout dans un contexte de pénurie de psychiatres et de pédopsychiatres.
M. le président. L’amendement n° 16 rectifié, présenté par Mmes Guillotin et Jacquemet, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mmes M. Carrère et Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en œuvre de négociations conventionnelles visant à inscrire les actes et examens effectués par les infirmières puéricultrices dans les services départementaux de protection maternelle et infantile parmi les actes pris en charge par l’assurance maladie.
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Je suis bien consciente de l’aversion du Sénat pour les demandes de rapport.
Cet amendement d’appel s’inscrit dans la lignée des recommandations du rapport Transformation de l’offre de soins périnatals dans les territoires : le travail doit commencer.
Les indicateurs de santé périnatale se sont fortement dégradés dans notre pays. Son taux de mortinatalité infantile classe la France au plus bas du classement des pays de l’OCDE, à la 23e place, tandis que les taux de mortalité maternelle et de syndromes du post-partum restent importants. Or, dans ce paysage, les services de protection maternelle et infantile sont de plus en plus fragiles.
Dans les services de PMI travaillent en grande partie des infirmières puéricultrices. Or leurs actes ne peuvent être remboursés par la sécurité sociale, faute de nomenclature adaptée pour leur cotation. Cette situation fragilise la santé financière des services de protection maternelle et infantile.
Monsieur le ministre, mon amendement invite le Gouvernement à engager une réflexion sur la création d’une nomenclature spécifique pour les actes des infirmières puéricultrices. Cela permettrait de mieux reconnaître leur travail, de sécuriser les budgets des PMI et d’étendre leurs capacités d’action sur le terrain.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. J’ai participé à la mission d’information sur la périnatalité. Aussi, ma chère collègue, je comprends votre position. Toutefois, conformément à sa doctrine établie en la matière, la commission a émis un avis défavorable sur votre demande de rapport.
Nous vous sommes toutefois reconnaissants de mettre en avant, à l’occasion de ce débat, ce sujet important pour les infirmiers puériculteurs, et espérons que vous pourrez obtenir des réponses du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Madame la sénatrice, je vous remercie d’évoquer ce sujet. Le constat est clair : un problème de nomenclature empêche en effet la cotation des actes des infirmières puéricultrices. Cependant, ce sujet, de nature technique, doit être distingué de la question de la mortalité infantile : il n’y a pas de lien de cause à effet entre les deux.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Pour ma part, je m’engage à me pencher sur ce problème de cotation.
Par ailleurs, j’aurai l’occasion de vous faire des propositions dans les jours à venir pour enrayer la progression de la mortalité infantile. Je ne les détaillerai pas ce soir, car vous les connaissez parfaitement. À ce titre, il ne me semble pas que la mortalité infantile, dans toutes ses dimensions, soit en hausse : le problème concerne essentiellement la mortalité néonatale, soit lorsque le décès intervient entre la naissance et le vingt-huitième jour de l’enfant. En outre, la problématique est multifactorielle : l’âge de la mère, notamment, est un facteur important. Soyons donc prudents avant de tirer des conclusions, et formulons les bonnes propositions pour améliorer le taux de mortalité infantile en France.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je retire mon amendement, puisque, de toute façon, mon but n’était pas de le faire adopter. Cependant, je n’ai fait ni confusion ni raccourci : le rapport sénatorial que j’ai cité offrait une vision étayée, à 360 degrés. La PMI sert aussi à assurer le suivi des enfants dès la naissance, ainsi que celui des mères, des couples et des familles, qui ne vont pas toujours très bien en post-partum.
Monsieur le ministre, je tenais surtout à vous alerter sur la nécessaire modification de la nomenclature des actes des infirmières puéricultrices
Je vous remercie de m’avoir entendue.
M. le président. L’amendement n° 16 rectifié est retiré.
L’amendement n° 41, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation à l’article 1er de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, les bacheliers s’inscrivent directement dans l’institut de formation en soins infirmiers de leur choix. Les modalités de sélection des instituts sont fixées par décret au niveau national.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à exclure l’accès aux Ifsi de la plateforme Parcoursup.
Permettez-moi, tout d’abord, de commencer par un argument factuel. Depuis que l’accès aux Ifsi dépend de Parcoursup, il y a trois fois plus d’abandons au cours des études d’infirmier ou d’infirmière, ce qui est un problème en soi.
Ensuite, vous devez, comme moi, avoir entendu des retours assez négatifs de la part d’étudiants. Il faut souligner un fait remarquable : de nombreux Ifsi restent adossés à des hôpitaux de proximité. Ainsi, des jeunes issus de milieux ruraux ou de quartiers populaires suivent ces formations, par vocation, certes, mais aussi pour de simples raisons de proximité – et, à terme, ils alimentent les effectifs des hôpitaux de proximité.
Or, avec Parcoursup, un étudiant peut se retrouver en Ifsi alors que ce n’était que son septième ou huitième choix sur la plateforme – ou alors, il peut y être admis, conformément à son premier choix, mais à l’autre bout de la France !
Par ailleurs, et cela ne concerne pas seulement cette profession, le métier d’infirmier répond à une forme de vocation – j’ai consciente que l’expression peut sembler obsolète. Or je ne suis pas sûre que Parcoursup soit l’algorithme idéal pour déterminer la vocation d’un jeune !
Enfin, vous l’évoquiez, monsieur le ministre, il arrive que l’on devienne infirmier après un parcours de vie. C’est un métier du lien, de la relation aux autres, et ce sont parfois les expériences de vie qui donnent envie de se tourner vers cette forme d’altérité.
Si chacun d’entre vous laisse parler sa raison, cet amendement sera adopté, j’en suis certaine !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Est-ce l’avis de la raison ? (Mme Céline Brulin sourit.)
Sortir les formations infirmières de Parcoursup constituerait une réforme d’ampleur, sans articulation avec le reste des formations en santé. Cette mesure nécessite une étude d’impact préalable et des concertations avec les étudiants infirmiers, ce que le délai d’examen du texte rend impossible.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Mon avis est également défavorable.
Cependant, madame Brulin, je vous remercie de cet amendement.
Je le vois bien : il y a quelque chose qui ne va pas.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
M. Yannick Neuder, ministre. C’est un sujet que j’ai évoqué à de nombreuses reprises lorsque j’étais député, notamment auprès de l’association Régions de France, dont la commission santé, formations sanitaires et sociales était présidée par Françoise Jeanson, qui est désormais vice-présidente du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.
Le sujet est important et nécessite un traitement à part entière. Je m’y suis moi-même intéressé en tant que ministre. J’ai notamment convié dans mon bureau le référent de la plateforme Parcoursup. J’ai cependant été quelque peu désarçonné en apprenant que 80 % des étudiants des Ifsi étaient issus de la région, car j’étais persuadé que ces instituts étaient caractérisés par un très grand brassage.
Cependant, comme vous, je crois que l’on peut encore parler de vocation. A minima, les métiers du soin requièrent un certain engagement. Or je ne suis pas certain que cela corresponde au mode de sélection de Parcoursup.
Cependant, tout n’est pas noir ou blanc, et je reste donc pondéré dans mes propos. Parcoursup a en effet introduit une forme de diversité et de mixité dans les Ifsi, puisque les concours, auparavant, étaient payants, et assez onéreux.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il faudrait les rendre gratuits.
M. Yannick Neuder, ministre. Cela avait d’ailleurs posé un problème de financement, dont il avait fallu discuter à l’échelle de la région : les frais de concours contribuant aux recettes des Ifsi, il avait fallu les compenser dès lors que la sélection des candidats s’effectuait sur la plateforme Parcoursup.
Le sujet est important et grave. Il nous renvoie d’ailleurs également aux messages que nous devons envoyer à nos étudiants. Souvent, l’Ifsi est adossé à un hôpital de proximité, mais il arrive que ce ne soit pas le cas, s’agissant des instituts de plus petite taille. Les étudiants représentent ainsi un vivier pour l’ensemble des établissements médico-sociaux, en particulier en milieu rural. Le lien de proximité est donc important.
J’ai donc un avis mitigé. J’ai échangé sur le sujet avec mon collègue chargé de l’enseignement supérieur. Je suis favorable à une collaboration avec la commission des affaires sociales du Sénat, si le président Mouiller accepte de m’accorder un peu de son temps, pour travailler sur ce problème, qui me paraît trop grave pour être traité par un simple amendement à vingt-deux heures.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Yannick Neuder, ministre. Je vous remercie néanmoins de l’avoir soulevé, car je ne suis pas certain que le fonctionnement actuel soit le meilleur pour nos étudiants et nos patients.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Comme ma collègue Céline Brulin, je pense que l’exercice du métier d’infirmière, comme des métiers du soin et de l’éducation, répond à une vocation.
La suppression du concours a eu lieu en 2019. Les arguments alors invoqués étaient la volonté de démocratiser l’accès à la formation et de renforcer l’égalité des chances, au regard des moyens onéreux qu’exigeait la sélection. Nous aurions cependant pu nous contenter de rendre le concours gratuit : cela nous aurait épargné bien des soucis…
L’accessibilité de la formation par le biais de Parcoursup, à compter de 2019, devait permettre de rendre les procédures moins lourdes, moins chères, plus simples et moins centralisées. Cependant, les chiffres en disent long sur les résultats.
En 2015, 10 % à 15 % des jeunes arrêtaient leur formation avant la fin du cursus. En 2020, ils étaient 15 % à 20 %. En 2025, cette part est supérieure à 20 %. Nous devons nous poser les véritables questions. Certes, la proportion de jeunes qui interrompaient leur formation alors que celle-ci était accessible sur concours était déjà importante, mais elle restait plus faible qu’aujourd’hui.
Monsieur le ministre, il est important de s’interroger sur cette situation : quand la formation en Ifsi est le sixième ou le septième choix d’un étudiant, forcément, il ne va pas jusqu’au bout du cursus…
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, la commission des affaires sociales a récemment lancé une mission sur l’enseignement, qui s’intéresse précisément aux dysfonctionnements relatifs au Pass (parcours accès santé spécifique) – LAS (licence accès santé).
Si vous êtes d’accord pour ouvrir le chantier sur l’accès aux Ifsi, je proposerai que cette mission élargisse son périmètre de travail à ce sujet. Tous les membres de la commission qui le souhaitent seront invités à y participer.
Je vous proposerai rapidement un rendez-vous.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Yannick Neuder, ministre. Je suis très content de la proposition du président de la commission, et, naturellement, je l’accepte. Plus vite on pourra avancer, mieux ce sera. Avec le ministre chargé de l’enseignement supérieur, nous souhaitons réformer le Pass-LAS à l’horizon septembre 2026. Nous sommes donc dans les temps pour nous pencher sur les Ifsi. Je vous remercie de cette étroite collaboration.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, je vous remercie de ces propositions. J’émettrai cependant un bémol : ce n’est pas la première fois que je soulève cette question.
Mme Céline Brulin. Ce n’est pas non plus la première fois que nombre de mes collègues me rejoignent sur ce constat. Pourtant, la situation n’a pas avancé, malheureusement, et les conséquences sont lourdes, puisque nous nous privons chaque fois de personnels de santé qui pourraient rejoindre les rangs des infirmiers.
Bien entendu, nous aimerions avoir une étude d’impact. Plusieurs de mes collègues l’ont dit : ce texte aurait pu faire l’objet d’un projet de loi. Monsieur le ministre, nous vous croyons sur parole lorsque vous rappelez qu’il est compliqué de lancer des initiatives gouvernementales actuellement ! (M. le ministre sourit.) Pour autant, je regrette de vous entendre dire que nous voudrions traiter le sujet à la va-vite, à vingt-deux heures, alors que nous examinons précisément une proposition de loi sur les infirmiers : au contraire, il aurait été inimaginable de ne pas mentionner ce sujet à cette occasion, quelle que soit l’heure.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Ce n’est pas ce que nous avons dit.
Mme Céline Brulin. Je vous prends au mot, tous, afin que nous avancions sérieusement et concrètement. Personnellement, je suis disponible pour mener ce travail, comme d’autres membres de mon groupe. Nous ne pouvons plus attendre encore très longtemps : cela me fend le cœur de voir des jeunes qui, souhaitant s’engager dans ce métier, s’en trouvent exclus simplement parce qu’une plateforme en a décidé autrement !
M. le président. Madame Brulin, l’amendement n° 41 est-il maintenu ?
Mme Céline Brulin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 41 est retiré.
L’amendement n° 71 n’est pas soutenu.
Article 2 bis (nouveau)
L’article L. 162-12-2 du code de la sécurité sociale est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les conditions de facturation des indemnités kilométriques des infirmiers, notamment la définition nationale de l’agglomération, précisée par décret, qui servira de référentiel commun pour garantir un traitement équitable sur l’ensemble du territoire. »
M. le président. L’amendement n° 15, présenté par Mme Demas, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Après le mot :
infirmiers,
insérer le mot :
incluant
2° Remplacer le mot :
la
par le mot :
une
La parole est à Mme Patricia Demas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. La commission a naturellement émis un avis favorable sur cet amendement rédactionnel, qui nous donne l’occasion de remercier vivement Mme Demas de son combat au sujet des indemnités kilométriques, qui représente un sujet majeur pour les infirmières et infirmiers libéraux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Je suis également favorable à cet amendement. Cette mesure fait partie intégrante de la négociation qui s’ouvrira, je l’espère, dans quelques heures, une fois que nous aurons voté cette proposition de loi. C’est le sens de la lettre de cadrage que j’adresserai à la Cnam pour permettre une juste revalorisation.
Cette revalorisation est très attendue, notamment par les infirmiers libéraux dans nos territoires, sans lesquels nous ne pourrons accomplir le virage ambulatoire et domiciliaire. Une étude révélait que plus de 50 % des infirmiers envisageaient une autre forme d’exercice professionnel au bout de cinq ans de pratique. Nous avons donc intérêt à renforcer l’attractivité du paramédical dans les territoires.
M. le président. L’amendement n° 14, présenté par Mme Demas, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
agglomération
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à Mme Patricia Demas.
Mme Patricia Demas. Cet amendement vise à sécuriser juridiquement l’article 2 bis, qui permettra d’harmoniser la définition de l’agglomération à l’échelle nationale afin de rendre plus équitable la facturation des indemnités kilométriques sur le territoire.
Il tend à offrir une rédaction plus condensée et à supprimer la mention du décret pour laisser aux partenaires conventionnels la liberté de choisir la définition d’agglomération harmonisée à retenir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. La rédaction de cet amendement est plus respectueuse du dialogue conventionnel cher à notre commission. En effet, elle laisse le soin aux partenaires conventionnels d’opter pour la définition d’agglomération qui leur semblera la plus opportune afin d’harmoniser les modes de détermination des indemnités kilométriques. Ceux-ci nous paraissent les plus à même de trouver une solution équilibrée, au bénéfice des infirmiers libéraux.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 2 bis, modifié.
(L’article 2 bis est adopté.)
Après l’article 2 bis
M. le président. L’amendement n° 69, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1111-1 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cadre de la constitution des dossiers de demande auprès des maisons départementales des personnes handicapées, les infirmiers diplômés d’État sont habilités à renseigner, dans les limites de leurs compétences professionnelles, les éléments médicaux du formulaire, notamment en ce qui concerne l’évaluation fonctionnelle, les soins prescrits et les besoins en accompagnement. Cette participation s’effectue en lien avec le médecin traitant ou le médecin référent du patient.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, notamment les mentions que les infirmiers sont autorisés à compléter, les modalités de traçabilité, ainsi que les garanties en matière de responsabilité professionnelle. »
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. Cet amendement ne semble pas opportun, dans la mesure où il tend à habiliter les infirmiers à renseigner les éléments du questionnaire auprès des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) dans la seule limite de leurs compétences. Les familles auront toujours besoin d’un médecin pour remplir les parties du certificat qui relèvent du champ de compétences des médecins.
Si cet amendement était adopté, les familles qui recouraient à des infirmiers pour remplir une partie du questionnaire devraient donc consulter deux professionnels de santé au lieu d’un, ce qui engorgerait davantage l’accès aux infirmiers sans répondre aux problèmes d’accès aux médecins. In fine, loin de contribuer à l’amélioration de l’accès aux droits, cet amendement reviendrait, en fait, à alourdir la procédure.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 69.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3
(Non modifié)
La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.
Mme Corinne Imbert. Au nom du groupe Les Républicains, je remercie les rapporteurs Anne-Sophie Romagny et Jean Sol de leurs travaux, qui ont permis de sécuriser et d’encadrer certaines dispositions de la proposition de loi.
Les principales modifications apportées au texte évitent d’opposer les professionnels de santé et permettent d’apaiser les tensions. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Je pense, notamment, au rétablissement de l’avis de l’Académie nationale de médecine sur la liste des produits et examens pouvant être prescrits par les infirmiers et à la consécration du principe de coordination interprofessionnelle.
La profession d’infirmier souffre depuis trop longtemps d’une reconnaissance insuffisante et d’un cadre d’exercice obsolète. Les mesures portées par la proposition de loi permettent de mieux valoriser la profession, de refondre son encadrement juridique et de simplifier ses évolutions ultérieures. Elles sont donc les bienvenues. Nous voterons en faveur de ce texte.