Une disposition générale rendant l'information facultative ne paraît donc pas adaptée à la sensibilité des principes à concilier. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Comme vient de l'indiquer Mme la rapporteure Patru, cet amendement est satisfait, monsieur Chasseing. J'en demande le retrait ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l'amendement n° 18 rectifié est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 18 rectifié est retiré.
L'amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Laménie et Rochette, Mme L. Darcos, M. Brault, Mme Bourcier, MM. Chevalier, Capus, Grand, Khalifé et H. Leroy, Mme F. Gerbaud, M. Maurey, Mmes Evren et Richer, MM. Somon et Menonville, Mmes Jacquemet et Aeschlimann, M. Milon, Mme Perrot et M. Belin, est ainsi libellé :
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l'article 226-14 du code pénal, il est inséré un article 226-14-… ainsi rédigé :
« Art. 226-14-…. – L'anonymat du professionnel de santé signalant une suspicion ou un constat de violences intrafamiliales, est garanti à toutes les étapes de la procédure, sauf s'il consent expressément à lever son anonymat après accord du juge. »
« Le refus ou la levée de l'anonymat doit être porté à la connaissance du professionnel concerné, qui peut demander à être entendu par le juge. »
II. – Un décret en Conseil d'État détermine les modalités de mise en œuvre du présent article, notamment les conditions techniques et procédurales garantissant l'anonymat effectif du professionnel.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Les violences intrafamiliales sont un problème majeur et les professionnels de santé sont souvent les premiers témoins des violences subies par les femmes, les enfants ou les personnes vulnérables. La loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales a ainsi renforcé leur rôle en les autorisant à signaler des faits de violence, même sans l'accord de la victime, lorsque la vie de celle-ci est en danger immédiat.
Cependant, de nombreux praticiens hésitent encore à effectuer des signalements, craignant des représailles physiques ou judiciaires de la part de l'auteur des violences ou de son entourage. Dans leur tentative de protéger autrui, ils se retrouvent parfois accusés, et ce malgré l'article 226-14 du code pénal.
Il est donc essentiel de garantir l'anonymat des professionnels de santé lors de ces signalements, pour leur permettre d'agir en toute sécurité. Cette mesure est souhaitée par de nombreux médecins et professionnels de santé.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure. La loi du 30 juillet 2020 permet à un professionnel de santé d'envoyer au procureur de la République un signalement en cas de danger immédiat ou d'emprise concernant une victime de violences intrafamiliales. Il s'agit d'une dérogation à la déontologie applicable aux médecins et d'un acte volontaire accompli de façon consciente.
Les modalités de traitement de ce signalement peuvent faire l'objet d'un accord entre le procureur de la République et le conseil départemental de l'ordre dont relève le professionnel.
Le présent amendement vise à favoriser ces démarches en garantissant l'anonymat du professionnel de santé. Cela ne paraît pas compatible avec les principes fondateurs du procès pénal, qui implique de connaître l'origine d'une accusation.
Surtout, la nature même de la dénonciation rend difficile le maintien de l'anonymat lorsqu'il s'agit de constater des coups et blessures ou un phénomène d'emprise. Le travail avec les procureurs à l'échelon départemental nous semble préférable.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Bien que je comprenne l'intention des signataires de cet amendement, j'émettrai le même avis que Mme la rapporteure, pour les mêmes raisons. Je suis davantage médecin que juriste, mais je peux toutefois affirmer que le dispositif proposé est incompatible avec l'exercice effectif des droits de la défense, à savoir connaître l'accusation portée contre soi, permettre d'être confronté et appeler des témoins à décharge.
Par ailleurs, d'un point de vue opérationnel, cet amendement soulève des difficultés sur le plan technique et pratique. En effet, il est difficile pour le ministère public de n'avoir aucun témoin à citer pour soutenir une accusation.
En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Il peut arriver qu'un praticien éprouve un doute ou qu'il ait peur d'éventuelles représailles. Dans ces conditions, il préfère parfois s'abstenir d'adresser un signalement au procureur. Il faudrait donc, sur le plan pénal, qu'il puisse conserver son anonymat. Voilà pourquoi je maintiens mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Yannick Neuder, ministre. Je partage complètement vos propos, mais, comme l'a rappelé Mme la rapporteure, la loi du 30 juillet 2020 permet déjà aux professionnels de santé d'adresser un signalement au procureur de la République. Pour avoir rencontré beaucoup de professionnels, je peux vous assurer qu'il s'agit d'une pratique courante. Le dispositif en place semble donc fonctionner.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
I. – (Supprimé)
II (nouveau). – La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi modifiée :
1° Après le quatrième alinéa de l'article 33, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sera punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende l'injure commise dans les mêmes conditions envers un membre du personnel exerçant au sein d'un établissement de santé, d'un centre de santé, d'une maison de santé, d'une maison de naissance, d'un cabinet d'exercice libéral d'une profession de santé, d'une officine de pharmacie, d'un laboratoire de biologie médicale ou d'un établissement ou d'un service social ou médico-social. » ;
2° Au premier alinéa de l'article 65-3, les mots : « et quatrième » sont remplacés par les mots : « à cinquième ».
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 24 rectifié bis est présenté par M. Masset, Mme Guillotin, M. Bilhac, Mme Pantel, MM. Cabanel et Fialaire, Mme Jouve et MM. Laouedj, Grosvalet et Gold.
L'amendement n° 34 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
L'article 433-5 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « public », sont insérés les mots : « , à un professionnel de santé ou à un membre du personnel d'un établissement de santé, d'un centre de santé, d'une maison de santé, d'une maison de naissance, d'un cabinet d'exercice libéral d'une profession de santé, d'une officine de pharmacie, d'un prestataire de santé à domicile, d'un laboratoire de biologie médicale, d'un établissement ou d'un service social ou médico-social » ;
2° Au troisième alinéa, après le mot : « intérieur », sont insérés les mots : « d'un établissement de santé, d'un centre de santé, d'une maison de santé, d'une maison de naissance, d'un cabinet d'exercice libéral d'une profession de santé, d'une officine de pharmacie, d'un laboratoire de biologie médicale, d'un établissement ou d'un service social ou médico-social, du domicile du patient ou ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l'amendement n° 24 rectifié bis.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement vise à rétablir le délit d'outrage, tel qu'il figurait dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, afin de protéger les professionnels de santé. La rédaction issue des travaux de la commission des lois du Sénat substitue à cette infraction celle d'injure, ce qui restreint à la fois le champ des comportements visés et la réponse pénale applicable.
L'injure suppose un caractère public, ce qui exclut une grande partie des propos ou comportements violents adressés dans l'intimité des soins. En outre, son régime juridique est moins protecteur puisqu'il implique un dépôt de plainte obligatoire, un délai de prescription court et une qualification matérielle plus complexe.
Ainsi, le rétablissement du délit d'outrage permet de mieux couvrir les atteintes dont sont victimes les soignants. Il corrige également une inégalité entre les professionnels qui exercent dans le secteur privé, aujourd'hui exclu du champ de l'outrage, et ceux qui relèvent du service public.
Enfin, cet amendement tient compte des travaux de notre commission, en élargissant le dispositif initial aux personnels de soutien qui participent directement aux soins.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 34.
M. Yannick Neuder, ministre. Nous sommes totalement favorables à cette proposition ; d'ailleurs, c'est le Gouvernement qui avait déposé cet amendement le premier, avant que vous ne vous en empariez, madame la sénatrice.
Le délit d'outrage semble plus adapté à la situation que vous décrivez. Le Gouvernement et la rapporteure n'ont pas la même analyse de ces problèmes sur le plan juridique, comme en témoignent les discussions que nous avons eues sur ce sujet.
Nous tenons au délit d'outrage, car il répond particulièrement à la demande de nos soignants. Le présent dispositif doit être marquant, significatif, entendu, compris par la communauté des professionnels de santé, qui attend cette proposition de loi avec beaucoup d'impatience.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 12 rectifié ter est présenté par Mme Bourcier, M. Capus, Mme L. Darcos et MM. A. Marc, Chasseing, Rochette, Brault et Chevalier.
L'amendement n° 29 rectifié bis est présenté par Mme Imbert.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
L'article 433-5 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « service public », sont insérés les mots : « ou à un professionnel de santé » ;
2° Au troisième alinéa, après le mot : « intérieur », sont insérés les mots : « d'un établissement de santé, d'un centre de santé, d'une maison de santé, d'une maison de naissance, d'un cabinet d'exercice libéral d'une profession de santé, d'une officine de pharmacie, d'un laboratoire de biologie médicale, d'un établissement ou d'un service social ou médico-social ou ».
La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour présenter l'amendement n° 12 rectifié ter.
Mme Corinne Bourcier. L'article 2, dans sa nouvelle rédaction, ne mentionne plus le délit d'outrage à un professionnel de santé, au profit d'une aggravation des peines lorsqu'un professionnel fait l'objet d'une injure, ce qui ne semble pas approprié.
En effet, l'outrage a un périmètre plus large que l'injure. L'article 2, en l'état, ne permettrait plus de poursuivre certains comportements : les paroles, les gestes, les écrits, les images et les envois portant atteinte à la dignité et au respect.
Par ailleurs, cette nouvelle rédaction n'ajoutera pas grand-chose au droit en vigueur. En effet, le professionnel de santé peut déjà déposer plainte pour injure, alors qu'il ne le peut pas pour outrage, sauf s'il est agent public, ce qui crée un traitement inéquitable au détriment des professionnels du secteur privé. Enfin, cette nouvelle rédaction entraînera plus de difficultés procédurales que le droit commun.
En conséquence, le présent amendement tend à revenir à la version antérieure de l'article 2, afin de créer un délit d'outrage aux professionnels de santé, qui, encore une fois, paraît plus adapté.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l'amendement n° 29 rectifié bis.
Mme Corinne Imbert. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure. Ces amendements sont contraires à la position de la commission des lois, qui considère que l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 répond mieux aux besoins de l'ensemble des professionnels du soin. Celui-ci précise bien que « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure ».
Selon nous, le champ de cette infraction est plus large que celui de l'outrage et correspond à de plus nombreuses situations. La différence essentielle entre l'injure et l'outrage est que celui-ci constitue une infraction visant les personnes chargées d'une mission de service public, ce qui n'est pas le cas de tous les professionnels de santé et des personnels qui travaillent avec eux. Le délit d'outrage pourrait donc exclure de nombreux professionnels du soin.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 12 rectifié ter et 29 rectifié bis ?
M. Yannick Neuder, ministre. Le Gouvernement demande qu'ils soient retirés, au profit des amendements identiques nos 24 rectifié bis et 34, car, comme je le lis sur les lèvres de Mme Imbert, qui m'a déjà soufflé la réponse, ils renferment un dispositif plus large et concernent un plus grand nombre de professionnels de santé.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.
Mme Corinne Imbert. Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 29 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. Si je comprends bien, la commission a choisi l'injure, qui permet, entre autres, de couvrir les médecins libéraux, alors que l'outrage ne s'applique qu'aux praticiens exerçant en milieu hospitalier. Or les médecins libéraux font partie des professionnels qui sont régulièrement agressés. Ainsi, préfère-t-on s'en tenir à l'outrage, ou doit-on retenir un délit plus large, qui permet d'inclure l'ensemble des professionnels de santé ? J'aimerais que M. le ministre apporte des précisions sur ce point.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Yannick Neuder, ministre. Le délit d'outrage couvre bien les hospitaliers et les libéraux, madame Vérien ; notre dispositif ne pose donc aucun problème. Nous préférons le délit d'outrage, car il semble plus adapté et assure une répression plus forte par rapport à la situation ici évoquée.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure. Je précise que le dispositif voulu par le Gouvernement n'est pas opérant en l'état actuel du droit. Je maintiens donc l'avis défavorable qui a été émis par la commission des lois.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 rectifié bis et 34.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé et l'amendement n° 12 rectifié ter et les amendements identiques nos 16 rectifié ter et 33 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Après l'article 2
Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. V. Louault, Chasseing, Chevalier et Rochette, Mme Bourcier et MM. Laménie, A. Marc et Capus, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 222-18-3 du code pénal, il est inséré un article 222-18-… ainsi rédigé :
« Art. 222-18-… – Est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende le fait d'user de menaces ou de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation à l'égard de tout professionnel soumis à un code de déontologie afin d'amener celui-ci à contrevenir aux règles déontologiques qui régissent son exercice professionnel. »
La parole est à Mme Corinne Bourcier.
Mme Corinne Bourcier. Un tiers des motifs d'agression correspondent à des menaces subies par les professionnels de santé visant à obtenir des actes indus au regard de la déontologie. Cette situation place le professionnel face au dilemme profond consistant à choisir entre sa sécurité et les règles éthiques qui déterminent sa pratique et engagent sa responsabilité professionnelle.
Cette intimidation constitue donc une agression, non seulement contre le professionnel, mais aussi contre la valeur essentielle de cette déontologie dans l'organisation de la société.
La protection pénale contre le préjudice particulier d'ordre moral qui touche des professions impliquées dans la conservation des droits fondamentaux de la personne, causé par ce délit de menace, n'est actuellement pas assurée par l'article 222-18 du code pénal.
Elle se limite ainsi au préjudice qui est subi par les seules personnes définies comme participant à une mission de service public, aux termes de l'article 433-3-1 du même code.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure. Ce dispositif a été conçu par l'association Médecins pour demain, dont la commission a reçu les membres. Leurs propos étaient assez touchants ; ils nous ont notamment expliqué avoir le sentiment, face à ce genre de menaces, de devoir choisir entre le serment d'Hippocrate ou la vie.
Cela étant, la commission sollicite le retrait de cet amendement, car il est satisfait par l'article 433-3 du code pénal, qui punit « de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende le fait d'user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation pour obtenir [d'un professionnel de santé qu'il] accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ».
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Même avis.
Mme Corinne Bourcier. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 14 rectifié ter est présenté par Mme Bourcier, M. Capus, Mme L. Darcos et MM. A. Marc, Chasseing, Rochette, Brault et Chevalier.
L'amendement n° 31 rectifié bis est présenté par Mme Imbert.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au dernier alinéa de l'article L. 4233-1 du code de la santé publique, après le mot : « menaces », sont insérés les mots : « , d'outrages ».
La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour présenter l'amendement n° 14 rectifié ter.
Mme Corinne Bourcier. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l'amendement n° 31 rectifié bis.
Mme Corinne Imbert. Il est défendu également.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure. La commission est défavorable à ces amendements, pour deux raisons. En premier lieu, par cohérence avec la position qu'elle a adoptée vis-à-vis des amendements déposés à l'article 2, elle estime que le délit d'outrage est moins adapté au cas des professionnels que le délit d'injure.
En second lieu, ces amendements ne visent à étendre la faculté de se constituer partie civile, en cas d'outrage commis à l'encontre d'un professionnel de santé, qu'au Conseil national de l'ordre des pharmaciens (Cnop). Cela créerait une grave distorsion entre les ordres professionnels.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Je vous assure que nous modifierons le texte pour retenir le délit d'outrage. Sur ces amendements, je m'en remets à la sagesse du Sénat, bien que je rejoigne l'argument de la rapporteure sur l'effet de distorsion entre les ordres professionnels.
Nous souhaitons que tous les professionnels de santé puissent bénéficier d'une anonymisation du dépôt de plainte, afin d'éviter les représailles. Si le professionnel de santé exerce dans un établissement, on demandera à celui-ci de se substituer au professionnel. Or, si ce n'est pas un praticien hospitalier ou un professionnel exerçant au sein d'un établissement médico-social, il faut trouver le bon substitut.
Doit-il s'agir des unions régionales des professionnels de santé (URPS) ou des ordres professionnels ? Quoi qu'il en soit, il faut choisir une solution qui convient à tout le monde, pour bien enclencher le dépôt de plainte, éviter les représailles et ainsi protéger le professionnel de santé.
Nous devons retravailler ce sujet, car il faut que nous parvenions à un dispositif uniforme, afin que la protection du soignant ne dépende pas de son appartenance à tel ordre à telle profession.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 14 rectifié ter et 31 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 2.
Article 2 bis
(Supprimé)
Mme la présidente. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. V. Louault, Chasseing, Chevalier et Rochette, Mme Bourcier et MM. Laménie, A. Marc et Capus, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au 9° de l'article 10-2, après le mot : « public », sont insérés les mots : « ou un professionnel de santé » ;
2° Au deuxième alinéa de l'article 89, après le mot « public », sont insérés les mots : « ou un professionnel de santé ».
La parole est à Mme Corinne Bourcier.
Mme Corinne Bourcier. Il s'agit d'un amendement déposé par notre collègue Vincent Louault. Seul un médecin sur deux porte plainte à la suite d'une agression physique commise par un patient. Parmi les réticences à cette démarche, il y a la crainte de représailles de l'agresseur ou de son entourage à l'égard du soignant ou de l'un de ses proches. L'impunité qui en résulte contrecarre l'effet dissuasif des lois pénales aggravant les infractions en cause.
L'article 2 bis de la présente proposition de loi avait pour objet de lever une part de ces craintes, en évitant que l'adresse du domicile du soignant n'apparaisse dans la procédure. Le texte optait ainsi pour une déclaration d'adresse de l'ordre professionnel.
La commission des lois, sur avis de la rapporteure, a estimé que le dispositif prévu par le texte engendrait des complications qui risquaient de neutraliser l'effet attendu. Il n'empêche que, en l'état actuel du droit, aucune simplification, pourtant nécessaire, n'est menée pour que les poursuites pénales soient engagées à hauteur des faits signalés.
Cet amendement vise à réécrire l'article 2 bis, en donnant aux professionnels de santé le droit de ne donner que leur adresse professionnelle, souvent connue de l'auteur de l'infraction, dont bénéficient déjà les agents de l'État.
Il est extrêmement important de ne pas révéler son adresse. Lorsque je travaillais au sein d'un établissement bancaire, mes collègues et moi-même ne donnions jamais notre adresse personnelle lorsque nous étions victimes d'une agression.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Anne-Sophie Patru, rapporteure. Cet amendement, qui a été lui aussi proposé par l'association Médecins pour demain, soulève plusieurs difficultés. En premier lieu, il est entièrement satisfait pour ce qui concerne l'ensemble des professionnels de santé exerçant dans un établissement public.
En effet, le 9° de l'article 10-2 du code de procédure pénale prévoit que « lorsque la victime est une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public et que l'infraction a été commise en raison de ses fonctions ou de sa mission, elle est informée qu'elle peut déclarer, sans cet accord, son adresse professionnelle ».
Concernant les professionnels de santé qui exercent au sein des établissements privés, ils peuvent déjà, en l'état actuel du droit, déclarer l'adresse de leur ordre ou de leur avocat, s'ils ne souhaitent pas que leur adresse personnelle soit connue. Cette déclaration d'adresse nécessite l'accord du tiers concerné, tout simplement pour s'assurer que celui-ci s'appliquera à transmettre toutes les informations au plaignant, comme les convocations.
On estime que cet accord n'est pas nécessaire pour le service public, car l'employeur public a pour charge d'assurer la protection fonctionnelle de ses agents, donc de leur transmettre toutes les informations nécessaires s'ils déclarent leur adresse professionnelle lors du dépôt de plainte.
Cette garantie n'existe pas pour les employeurs privés. C'est pourquoi il est nécessaire de maintenir le droit en vigueur, qui impose l'accord du tiers dont le plaignant déclare l'adresse.
Enfin, cet amendement ouvrirait la voie à une extension de la déclaration d'adresse professionnelle à toutes les professions ayant un contact même approximatif avec le public. Cette évolution ne semble pas souhaitable eu égard au droit à un procès équitable, car les autres professions seraient désavantagées.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yannick Neuder, ministre. Nous n'avons pas la même analyse que Mme la rapporteure. Cet amendement vise à compléter le droit existant pour ouvrir aux professionnels de santé la possibilité de déclarer leur adresse professionnelle lors d'un dépôt de plainte.
Je partage le souci de ses auteurs de faciliter le dépôt de plainte, en permettant aux professionnels de ne pas révéler leur adresse personnelle, ce qui limite la peur des représailles. C'était l'un des objectifs de l'article 2 bis, dans sa version adoptée à l'Assemblée nationale. Or il a été supprimé par la commission des lois du Sénat, en raison de certaines redondances avec le droit existant.
L'article 10-2 du code de procédure pénale est mieux-disant que l'article 2 bis pour les seuls professionnels des établissements publics chargés d'une mission de service public, car il permet la déclaration de l'adresse professionnelle sans autorisation du procureur ou du juge d'instruction.
En revanche, les autres professionnels ne sont pas explicitement couverts par le droit en vigueur. Cet amendement est donc tout à fait pertinent en ce qui les concerne. En conséquence, le Gouvernement émet un avis favorable.
Mme Corinne Bourcier. Merci !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 2 bis demeure supprimé.
Article 3
I. – (Supprimé)
II. – Après l'article 15-3-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-3-4 ainsi rédigé :
« Art. 15-3-4. – Sans préjudice du second alinéa de l'article 433-3-1 du code pénal, lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de constituer l'une des infractions prévues aux articles 222-1, 222-9 à 222-13, 222-15, 222-16, 222-17, 222-18, 322-1, 322-3 et 433-3 du même code et lorsque cette infraction est commise à l'encontre d'un professionnel de santé ou d'un membre du personnel exerçant au sein d'un établissement de santé, d'un centre de santé, d'une maison de santé, d'une maison de naissance, d'un cabinet d'exercice libéral d'une profession de santé, d'une officine de pharmacie, d'un laboratoire de biologie médicale ou d'un établissement ou d'un service social ou médico-social, à l'occasion de l'exercice ou en raison de ses fonctions, l'employeur, après avoir recueilli le consentement écrit de la victime, peut déposer plainte. Le présent alinéa n'est pas applicable lorsque les faits sont commis entre professionnels de santé ou membres du personnel.
« Le présent article ne dispense pas l'employeur du respect des obligations prévues au second alinéa de l'article 40 du présent code.
« Il ne donne pas à l'employeur la qualité de victime.
« Pour l'application du présent article aux professionnels de santé exerçant à titre libéral, un décret précise les modalités selon lesquelles les ordres professionnels peuvent porter plainte pour les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes ou pédicures-podologues qui en font expressément la demande. Le même décret détermine l'organisme représentatif autorisé à porter plainte pour les autres professionnels libéraux mentionnés à la quatrième partie du code de la santé publique. »
III (nouveau). – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le I de l'article L. 4312-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil départemental ou interdépartemental autorise son président à ester en justice. Il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession d'infirmier, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à cette profession. » ;
2° Après le troisième alinéa de l'article L. 4321-18, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession de masseur-kinésithérapeute, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à cette profession. »
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 2 rectifié septies est présenté par Mme Aeschlimann, M. Panunzi, Mme Josende, MM. Daubresse, Somon et Burgoa, Mmes Lavarde, Estrosi Sassone, Gosselin, Belrhiti, Bellurot, Ventalon, Garnier, Noël, Billon, Joseph, Muller-Bronn et Drexler, MM. Bouchet et Margueritte, Mmes Dumont, Berthet, Canayer et Romagny, M. Genet et Mme Gruny.