M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 86, présenté par Mme Guhl, MM. Fernique, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« En complément des primes distribuées aux producteurs de produits qui remplissent des critères d’écoconception pour une meilleure performance environnementale selon le cahier des charges prévues par l’organisme, une prime peut également être attribuée pour les produits soumis au principe de responsabilité élargie du producteur en application du 11° de l’article L. 541-10-1, en fonction de critères sociaux basés sur leurs engagements à respecter les salaires vitaux tels que prévus dans la directive 2024/1760 du 13 juin 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et modifiant la directive (UE) 2019/1937 et le règlement (UE) 2023/2859. Cette prime est établie en fonction de la publication par les entreprises de leur stratégie échéance et budgétisée pour combler les écarts de salaires dans leurs chaînes d’approvisionnement entre le salaire réellement touché par les travailleurs et travailleuses et les salaires vitaux.

La parole est à Mme Antoinette Guhl.

Mme Antoinette Guhl. Cet amendement vise à introduire une modulation des primes des entreprises du textile en fonction de leur engagement à garantir un salaire vital aux travailleurs et travailleuses de leurs chaînes d’approvisionnement.

Comme vous le savez, le secteur textile est l’un des plus concernés par la violation des droits humains ; dans de nombreux pays, les salaires versés aux ouvriers et ouvrières de l’industrie textile sont deux à cinq fois inférieurs à un salaire vital. Des millions de femmes, souvent très jeunes, en paient le prix : je veux parler de ces 60 millions de travailleuses dans le monde qui occupent les postes les plus précaires, pour lesquelles l’amplitude horaire travaillée est parmi les plus longues et qui sont parmi les moins bien rémunérées.

Alors que le devoir de vigilance institué à l’échelon européen prévoit que les entreprises doivent garantir des revenus décents à leurs fournisseurs, 1 % seulement des grandes marques communiquent aujourd’hui sur les rémunérations réellement versées aux salariés de leurs chaînes de production.

Il est temps d’agir.

Aussi, cet amendement vise à inciter les entreprises à réduire l’écart entre le salaire versé et le salaire vital, en s’appuyant, pour définir ce dernier, sur les estimations de l’OCDE.

M. le président. L’amendement n° 84, présenté par Mme Varaillas, MM. Basquin, Corbisez et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« En complément des primes distribuées aux producteurs de produits qui remplissent des critères d’écoconception pour une meilleure performance environnementale selon le cahier des charges prévues par l’organisme, une prime peut également être attribuée pour les produits soumis au principe de responsabilité élargie du producteur en application du 11° de l’article L. 541-10-1, en fonction de critères sociaux basés sur leurs engagements à respecter des salaires et des revenus décents mentionnés aux alinéas 46, 47 et 54 de la directive européenne 2024/1760 du 13 juin 2024. Le calcul et le montant de cette prime sont définis par décret.

La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Comme notre collègue vient de le faire à l’instant, je tiens à évoquer un aspect important pourtant absent de ce texte : l’exploitation des travailleuses et travailleurs en amont de la chaîne de production et la pression qui pèse sur eux. Les populations les plus pauvres de la planète sont celles qui en paient le prix fort.

L’industrie du textile dit « jetable » exploite des enfants et des femmes, dont les salaires sont précaires et les conditions de travail indécentes.

Cet amendement vise à inclure dans cette proposition de loi la notion de salaire décent, que certaines associations appellent aussi salaire vital.

Moins de 3 % des vêtements vendus en France sont fabriqués dans notre pays ; l’emploi dans le textile a été divisé par trois depuis 1990, au profit de pays dans lesquels les salaires sont deux à cinq fois moins élevés que chez nous.

Produire localement permet d’agir sur le respect des normes environnementales et de réduire les importations, donc, le coût des transports.

L’adoption de cet amendement constituerait une avancée majeure, non seulement pour respecter l’environnement, mais aussi pour soutenir nos entreprises face à la concurrence déloyale qu’exercent ces entreprises étrangères, toujours au détriment des salariés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. L’impact social de la mode express constitue en effet un enjeu essentiel, mais celui-ci a vocation à être abordé dans le cadre d’une autre réflexion.

N’oublions pas la vocation première d’un éco-organisme et d’une écocontribution, qui visent principalement à assurer la transition du secteur vers une économie circulaire et qui n’ont donc pas vocation à garantir le respect de critères sociaux tels que la garantie de salaires vitaux.

La commission est défavorable aux amendements nos 86 et 84.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 86.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 84.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Rochette et Malhuret, Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme L. Darcos, MM. Laménie, Brault, Grand et Chevalier, Mme Bourcier, MM. A. Marc et Chasseing, Mme Perrot et M. L. Hervé, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« … – Les pénalités applicables aux produits soumis au principe de responsabilité élargie du producteur en application du 11° de l’article L. 541-10-1 et déterminées en fonction du critère défini au II du présent article ne sont pas applicables aux produits comportant plus de 50 % de laine, de soie ou autres matières naturelles délicates.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement tend à exempter des pénalités prévues par le présent texte les produits composés principalement de matières délicates comme la laine et la soie.

Ces matières naturelles représentent moins de 1,5 % du volume des textiles produits à l’échelle mondiale, selon les données de Textile Exchange. Or elles risquent d’être injustement dévalorisées par notre système.

De nombreuses marques et usines françaises réputées pour la qualité de leur production, comme les pulls en cachemire, les pulls marins, les bonnets ou les chaussettes, ont recours à ces fibres délicates.

Cet amendement a donc pour objet d’éviter que ces matières et ces acteurs soient injustement affectés par des pénalités.

M. le président. L’amendement n° 15 rectifié bis, présenté par MM. Lefèvre, Bacci, Saury et Bruyen, Mmes Belrhiti et Josende, M. Milon, Mme Micouleau, MM. Henno, Cambon et Belin, Mmes Lavarde et Imbert, M. Naturel, Mmes Billon, Vermeillet et Lassarade, MM. D. Laurent et Houpert, Mme Dumont, MM. Rapin, Bouchet, Genet et Brisson, Mme Romagny, M. Sido, Mmes Ventalon et Dumas, M. L. Hervé et Mmes Guidez et P. Martin, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ces pénalités ne sont pas applicables aux produits comportant plus de 50 % de laine, de soie ou autres matières naturelles délicates. »

La parole est à M. Fabien Genet.

M. Fabien Genet. Il s’agit d’un amendement identique proposé par notre collègue Antoine Lefèvre, qui partage cet attachement aux matières naturelles et délicates que sont la laine, la soie et le cachemire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. Ne perdons pas de vue notre objectif : combattre la mode express, laquelle constitue une menace à la fois environnementale, sociale et économique.

Je comprends les auteurs de ces amendements, qui souhaitent protéger certaines matières naturelles. Toutefois, il est nécessaire que la pénalité s’applique à l’ensemble des produits issus de producteurs de la mode express, quelle que soit leur composition, et ce afin de prévenir des stratégies de contournement de la part de ces acteurs, qui éviteraient ainsi de remettre en cause leur modèle commercial délétère.

La commission est donc défavorable aux amendements nos 7 rectifié bis et 15 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements. Cependant, je tiens à vous rassurer : s’il est question d’entreprises dont les pratiques garantissent la durabilité de leurs produits, et qui s’illustrent notamment par l’utilisation de fibres délicates, celles-ci ne seront pas concernées par la pénalité.

En revanche, il conviendra de pister les entreprises qui trichent et revendiquent, parfois, une composition 100 % soie sans que cela corresponde à la réalité.

Nous avons récemment échangé avec les équipes de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) au sein de son laboratoire de Lyon. De nombreux articles relevant de la fast fashion sont présentés comme contenant ces fibres délicates. Un examen en laboratoire s’avère indispensable pour déqualifier ces produits et constater qu’il s’agit en réalité de fibres synthétiques, caractéristiques de cette mode express.

Il sera donc tout à fait possible de cibler les acteurs qui n’adoptent pas des pratiques commerciales durables. Les entreprises que vous avez à l’esprit – qu’il me semble deviner – ne seront pas concernées par l’application de la pénalité, dès lors qu’elles respectent le critère de durabilité.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 41 rectifié est présenté par Mme Bonnefoy, M. Gillé, Mme Bélim, MM. Devinaz, Fagnen, Jacquin, Omar Oili, Ouizille, Uzenat, M. Weber et Kanner, Mmes Espagnac et Linkenheld, M. Michau, Mmes Monier, Canalès et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 54 est présenté par MM. Fernique, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« … – Le montant de la pénalité applicable au produit est affiché sur la plateforme de vente en ligne des personnes morales mentionnées aux I et I bis de l’article L. 541-9-1-1 ainsi que sur la facture produite lors de l’achat.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter l’amendement n° 41 rectifié.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement tend à imposer que les pénalités appliquées aux écocontributions en fonction de la participation du producteur aux pratiques commerciales de la mode éphémère fassent l’objet d’une publication obligatoire sur les plateformes de vente en ligne et sur les factures remises à l’achat.

Nous visons ici un triple objectif : renforcer la transparence des pratiques commerciales afin de guider au mieux le choix des consommateurs ; rendre compréhensibles et acceptables les modulations de l’écocontribution, qui peuvent avoir des conséquences sur le prix de vente et, donc, sur le pouvoir d’achat des consommateurs ; compter sur cette publicité peu flatteuse pour inciter davantage les producteurs à mettre fin à ces pratiques commerciales.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour présenter l’amendement n° 54.

M. Jacques Fernique. Cet amendement vient d’être remarquablement défendu : il s’agit de rendre obligatoire l’affichage de la pénalité applicable dans le cadre de l’écocontribution.

Je me permets simplement d’ajouter qu’il s’agit d’un amendement rédigé en concertation avec l’UFC-Que Choisir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. Pour des raisons de lisibilité, il ne me semble pas opportun d’alourdir le contenu de l’information qui figurera sur la plateforme de vente.

Ces amendements nos 41 rectifié et 54 risquent surtout de nous faire perdre de vue l’objectif de cette pénalité, qui est de sanctionner le producteur, et non le consommateur, de produits de la mode express. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Même avis. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 41 rectifié et 54.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 119, présenté par Mme Valente Le Hir, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 17

Remplacer la référence :

L. 541-10-27

par la référence :

L. 541-10-1

II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

4° Au II de l’article L. 541-15-8, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au I de ».

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination légistique.

M. le président. L’amendement n° 99, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer la référence :

L. 541-10-27

par la référence :

L. 541-10-1

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Je retire mon amendement au profit de l’amendement de la commission, qui me semble mieux rédigé.

En conséquence de quoi, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 119.

M. le président. L’amendement n° 99 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 119.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 8 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Rochette et Malhuret, Mme Lermytte, MM. Wattebled, Laménie, Brault, Grand et Chevalier, Mme Bourcier, MM. A. Marc et Chasseing, Mme Perrot et M. L. Hervé, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Après le mot :

pour

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

contribuer à financer la prise en charge de la fin de vie desdits produits lorsque celle-ci se déroule dans des pays non membres de l’Union européenne.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement vise à réintroduire la possibilité d’allouer des financements issus de la REP à la gestion des déchets dans les pays hors de l’Union européenne lorsque ces pays reçoivent des produits textiles, des chaussures et du linge de maison de seconde main.

Cette disposition découle du constat qu’il est inévitable qu’une partie de ces produits devienne des déchets ultimes à très court terme, malgré le tri effectué en France ou dans l’Union européenne, en amont de l’exportation.

M. le président. L’amendement n° 82, présenté par Mme Varaillas, MM. Basquin, Corbisez et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer les mots :

financer des infrastructures de collecte et

par les mots :

assurer la mise en œuvre et le suivi du système de pénalités, et pour financer le développement du réemploi, de la réparation ainsi que des infrastructures

La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. La question de la collecte des vêtements est importante. D’ailleurs, nous nous réjouissons que la filière REP soit financée à cet effet.

Cependant, au-delà de la collecte, les structures qui s’occupent aujourd’hui de récupérer des vêtements pour développer la seconde main manquent de moyens. Souvent, celles-ci fonctionnent sous forme associative, proposent des emplois d’insertion ou des emplois de droit commun, et, de ce fait, doivent reposer sur un modèle équilibré pour perdurer. Elles présentent un véritable intérêt social et environnemental, mais elles doivent être mieux financées et mieux rémunérées, en tenant compte de l’afflux de vêtements non réutilisables.

C’est pourquoi nous souhaitons modifier l’article 2 : nous voulons y faire figurer le financement des structures de réemploi et de recyclage des vêtements.

M. le président. L’amendement n° 44 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, M. Gillé, Mme Bélim, MM. Devinaz, Fagnen, Jacquin, Omar Oili, Ouizille, Uzenat, M. Weber et Kanner, Mmes Espagnac et Linkenheld, M. Michau, Mmes Monier, Canalès et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Compléter cet alinéa par les mots :

, dont le montant est déterminé par décret en tenant compte de la santé économique des filières concernées.

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement tend à préciser que la fraction des écocontributions destinée à financer des infrastructures de collecte et de recyclage sur le territoire national doit être déterminée par décret, en prenant compte la santé économique de l’ensemble des filières.

La filière du recyclage textile est aujourd’hui en grande difficulté et les professionnels de ce secteur indiquent que les éco-organismes ne tiennent pas compte de cette conjoncture très difficile pour les acteurs du recyclage.

À titre d’exemple, le soutien accordé aux Pays-Bas à la tonne triée serait presque deux fois plus important que celui qu’accorde l’éco-organisme français, ce qui nuit à la compétitivité du tri des textiles usagés français.

Cet amendement vise donc à garantir que cette réalité soit prise en considération dans le cadre d’un futur décret.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. La commission a prévu, sur mon initiative, que les compléments de contribution prélevés par les écocontributions soient orientés vers le financement de l’industrialisation du recyclage sur le territoire national plutôt que vers le traitement de ces déchets hors de l’Union européenne.

Favoriser le développement du recyclage des textiles en France est un objectif à privilégier, d’un point de vue environnemental, pour réduire l’impact carbone de nos déchets, et d’un point de vue économique, pour relocaliser une partie de la chaîne de valeur de la filière textile.

Les déchets collectés sur notre territoire doivent être traités en France : il est donc primordial de renforcer nos capacités de recyclage pour absorber le gisement actuellement exporté.

Je souhaite enfin préciser que, du point de vue de la justice sociale, il ne paraît pas particulièrement vertueux d’exporter nos déchets dans des pays en voie de développement.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 8 rectifié bis.

Madame Varaillas, dans le dispositif de l’amendement n° 82, vous énumérez la quasi-totalité des missions de l’éco-organisme Refashion. Celles-ci sont toutes nécessaires, j’en conviens. Il me semble néanmoins nécessaire de viser tout particulièrement le financement des infrastructures de recyclage, qui nécessite des investissements substantiels.

Aussi la commission est-elle défavorable à votre amendement.

L’amendement n° 44 rectifié tend à soulever un véritable problème, qui a notamment été abordé dans le rapport inter-inspections sur les performances et la gouvernance des filières REP, celui de l’équilibre des relations économiques entre opérateurs de déchets et éco-organismes. L’enjeu est très vaste et ne se limite pas à la seule filière REP textile.

Toutefois, madame Bonnefoy, le dispositif de cet amendement, s’il part d’une bonne intention, ne réglera pas la question. Je vous invite par conséquent à vous rapprocher de Jacques Fernique et Marta de Cidrac, qui s’intéressent à ces sujets dans le cadre d’une mission d’information sur le bilan de la loi Agec.

En attendant, je vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 8 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 82.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 44 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 115, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les opérateurs de gestion de déchets ne peuvent gérer des déchets issus de produits relevant du 11° de l’article L. 541-10-1 que s’ils disposent de contrats passés en vue de la gestion de ces déchets avec les éco-organismes ou systèmes individuels agréés. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Cet amendement est très important, car il s’inscrit dans le cadre de la refonte de la filière REP textile que nous menons avec l’ensemble de ses acteurs. Son dispositif va dans le sens de la présente proposition de loi, qui prévoit d’inciter les acteurs à engager une transition vers plus de durabilité et à contractualiser de manière plus transparente, afin d’organiser notre filière de réemploi et de recyclage en garantissant sa sécurité. Il répond en ce sens à une attente forte du secteur.

Aujourd’hui, seul un tiers des textiles usagés sont collectés, le reste terminant sa vie dans les poubelles. Seuls 30 % de ces textiles collectés sont recyclés, majoritairement hors d’Europe, et une proportion encore plus faible d’entre eux est réemployée en France. Or nous ne disposons d’aucune donnée fiable sur ces exportations massives de déchets, en particulier sur leur fin de vie réelle dans les pays de destination.

Le principe de contractualisation obligatoire auprès de l’éco-organisme agréé que vise à instaurer cet amendement doit permettre d’améliorer la traçabilité des flux de déchets et leur bilan environnemental global, tout en favorisant le développement de solutions de traitement de proximité.

Pour investir dans de telles solutions, il est en effet nécessaire d’anticiper les volumes à traiter et les risques afférents.

Cette mesure n’a pas pour objet de remettre en cause les modèles existants déjà vertueux, mais bien d’objectiver les situations et de mettre fin à celles qui ne seraient pas satisfaisantes. Une telle obligation constituera également un levier majeur pour lutter contre le trafic illégal, qui facilitera grandement les contrôles des services d’inspection.

Je tiens à rendre hommage au travail de Marta de Cidrac, engagée depuis longtemps dans une réflexion sur ces filières REP, et qui connaît bien ces sujets, en particulier les insuffisances actuelles en matière de contractualisation.

Le levier juridique que vous pourriez nous accorder en votant cet amendement serait très efficace dans le cadre de la remise à plat de ces filières.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. Cette mesure n’est pas directement liée à la mode express, mais elle constituerait une évolution bienvenue à la filière REP textile. Elle permettrait en effet de lutter contre le traitement des déchets par des filières parallèles, qui nuit aux acteurs de l’économie circulaire.

Comme j’ai pu par ailleurs le constater au cours des consultations que j’ai menées, cette disposition fait consensus. Aussi, la commission est favorable à l’amendement n° 115.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 115.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Après l’article 2

M. le président. L’amendement n° 108 rectifié, présenté par Mmes Schillinger, Havet et Phinera-Horth, M. Buis, Mme Nadille et M. Fouassin, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 541-10-27 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette obligation s’applique également aux dons effectués à des structures de l’économie sociale et solidaire ou d’intérêt général, par les personnes morales ou physiques dont l’activité relève des pratiques décrites à l’article L. 541-9-1-1, lorsque ces produits, faute de possibilité de réemploi effectif, deviennent des déchets. Cette reprise est conditionnée à la fourniture, par la structure bénéficiaire, des éléments de traçabilité permettant d’attester que ces produits proviennent d’un metteur sur le marché relevant des pratiques décrites à l’article L. 541-9-1-1. Un décret précise les modalités de cette traçabilité. »

La parole est à Mme Marie-Laure Phinera-Horth.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. Les dons de produits inutilisables issus de la mode express constituent un vrai problème – j’en conviens. La suppression de la réduction d’impôt les concernant me paraît en partie répondre au problème.

Le dispositif proposé, qui consiste à prévoir un retour des dons textiles non utilisés à l’éco-organisme, me paraît ingénieux. Je m’interroge toutefois sur sa faisabilité et sur son impact sur l’équilibre économique de la filière REP textile.

Aussi, je souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Cet amendement vise à prévoir que les éco-organismes de la filière REP textile soient tenus de reprendre les invendus donnés qui ne sont pas réemployés. Or, en France, depuis fin 2023, en application de la loi Agec, il est interdit de mettre en décharge ou d’incinérer les invendus, toutes catégories de produits confondues, y compris les textiles. Ces invendus doivent prioritairement faire l’objet d’un réemploi, notamment via le don, ou, à défaut, d’un recyclage.

Les dons réalisés dans ce cadre sont strictement encadrés. Le bénéficiaire du don peut ainsi en refuser tout ou partie jusqu’à ce qu’il procède à l’enlèvement des produits, lorsque, notamment, ses capacités de transport, de stockage ou les possibilités de redistribution ne sont pas suffisantes ou qu’après contrôle visuel des produits ceux-ci ne paraissent pas fonctionnels ou conformes aux exigences réglementaires en vigueur en matière d’hygiène.

Si, toutefois, une structure de l’économie sociale et solidaire accepte les produits et que ceux-ci ne sont finalement pas réemployés dans leur totalité, ils deviennent des déchets. L’éco-organisme est alors tenu, en application de la législation, de les reprendre gratuitement.

Votre amendement étant pleinement satisfait, madame la sénatrice, je vous demande de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. Quel est désormais l’avis de la commission ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. Avis défavorable.

M. le président. Madame Phinera-Horth, l’amendement n° 108 rectifié est-il maintenu ?

Mme Marie-Laure Phinera-Horth. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 108 rectifié est retiré.

Article 3

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 83, présenté par Mme Varaillas, MM. Basquin, Corbisez et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Après l’article L. 229-61 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 229-61-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 229-61-1. – Est interdite la publicité relative à la commercialisation de produits dans le cadre d’une pratique commerciale consistant à renouveler très rapidement les collections vestimentaires et d’accessoires, définie à l’article L. 541-9-1-1, ou faisant la promotion directe ou indirecte des entreprises, des enseignes ou des marques ayant recours à cette pratique commerciale dans la mesure où la production excessive de vêtements, de linge de maison et de chaussures compromet l’objectif de protection de l’environnement et de lutte contre le réchauffement climatique.

« La publicité mentionnée au premier alinéa du présent article inclut les pratiques des personnes physiques ou morales qui, à titre onéreux, utilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque et qui exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique. »

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2026.

La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. La publicité, nous le savons, est l’un des moteurs de la consommation. Shein a investi plus de 43,8 millions d’euros en publicité digitale en 2023, quand Temu, lui, a dépensé 27,5 millions d’euros, ce qui fait respectivement de ces entreprises le premier et le deuxième annonceur digital dans notre pays en 2023. Ce n’est pas un hasard si ces enseignes sont deux poids lourds de la fast fashion.

Notre objectif étant de réduire le gaspillage, il nous paraît insuffisant de nous borner à contraindre les annonceurs à accompagner les messages publicitaires d’une information du consommateur sur les incidences environnementales de la fast fashion, comme le prévoit l’article 3 bis.

Il est donc souhaitable de rétablir l’article 3, dont la rédaction initiale peut contribuer à réduire sérieusement le nombre de ventes de vêtements.