Mme la présidente. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.
article 1er
Mme la présidente. L'amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 34, dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Il tient compte des enjeux environnementaux dans l'aire d'activité de l'utilisateur et propose des modalités de préservation de l'environnement en cas d'utilisation de produits phytopharmaceutiques.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Il s'agit d'un amendement de clarification rédactionnelle concernant l'activité de conseil mentionnée au premier alinéa du présent article.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Cuypers, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 23
Remplacer la référence :
1°
par la référence :
2°
et la référence :
2°
par la référence :
3°
II. – Alinéa 24
Remplacer le mot :
lesdites
par le mot :
ces
III. – Alinéa 26
Remplacer la référence :
2°
par la référence :
3°
La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à corriger des erreurs matérielles contenues dans différents alinéas.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Cuypers, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. L'amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 39
Remplacer la référence :
I
par la référence :
II
La parole est à Mme la ministre.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Cuypers, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements précédemment adoptés par le Sénat, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. Laurent Duplomb. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par adresser des remerciements collectifs à tous ceux qui ont aidé à l'élaboration de ce texte.
Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde. Comment notre agriculture est-elle devenue un secteur malade, asphyxié par la surabondance de normes, dont l'image est abîmée par un agri-bashing sans limites, un nombre de suicides inadmissibles et l'abandon de nombreux hectares ?
Le déclin de notre agriculture, engagé il y a trente ans, résulte de trois fautes politiques majeures. La première, la plus ancienne, a consisté à inclure les marchés agricoles dans les négociations de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (Gatt), en 1986.
La combinaison de l'accord de Marrakech de 1994, aboutissement de ces négociations, et de la réforme préalable de la politique agricole commune (PAC), en 1992, a constitué un moment de bascule déterminant, à l'origine de trente ans de déclin de la ferme France.
La Commission européenne a profité d'alliances opportunistes avec les syndicats agricoles de gauche, les écologistes et les pays les plus libéraux, pourfendeurs des dépenses agricoles, pour engager de manière précipitée une profonde réforme de la PAC. (M. Yannick Jadot s'exclame.)
Ce moment de notre histoire agricole a complètement inversé le sentiment des agriculteurs français vis-à-vis de la politique agricole commune. Le tour de passe-passe a été perçu par la majorité d'entre eux comme une trahison. Le désamour s'est ensuite amplifié au fil du temps.
La réforme de la PAC en 1992 a évincé progressivement un système d'aides directes, qui devait compenser la totalité des baisses de prix. (M. Jean-Claude Tissot s'exclame.) Or l'Union européenne a progressivement renié ses engagements, passant d'une compensation totale à des compensations de plus en plus partielles.
Il a par la suite été décidé que le versement de ces aides serait lié au respect de nouvelles conditions environnementales, toujours plus nombreuses. De fait, aujourd'hui, après un long processus de détricotage, la PAC est de moins en moins protectrice du revenu agricole, de moins en moins agricole et de moins en moins commune.
Deuxième faute politique : la promotion de l'agroécologie, véritable miroir aux alouettes,…
M. Yannick Jadot. Vous allez les tuer, les alouettes !
M. Laurent Duplomb. … mauvaise graine semée lors du Grenelle de l'environnement, que le gouvernement socialiste suivant a voulu établir comme l'alpha et l'oméga de la politique agricole en 2014, via la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Dans la foulée, en 2019, l'Union européenne s'était engagée dans la même voie avec le Pacte vert et la stratégie Farm to Fork.
L'agroécologie serait, pour ses promoteurs, l'avenir de l'agriculture française, européenne, voire mondiale, une sorte d'auberge espagnole qui rassemble tous les éléments de la paresse intellectuelle et des poncifs anticapitalistes. (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les promoteurs de l'agroécologie, forts de leurs certitudes agronomiques et environnementales, considérant l'économie comme une variable d'ajustement, n'ont que du mépris pour les « minables réactionnaires productivistes » qui osent parler d'économie.
Aussi, les agroécologistes affirment, contre toute réalité, que l'ensemble des études montrent combien l'agroécologie protège le revenu des agriculteurs. Or les experts du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) soulignent, dans un rapport de 2023 consacré aux arbitrages entre biodiversité et souveraineté alimentaire, qu'aucune certitude ne peut être établie. (M. Daniel Salmon s'exclame.)
Ce concept, lancé et développé avec trop peu de précautions, a été un choix politique approximatif, mal évalué, et dont les agriculteurs payent le prix aujourd'hui. L'écologisation de tous les débats, y compris en matière agricole, conduit malheureusement à leur simplification outrancière, empêchant toute discussion.
La science est diverse, de plus en plus compartimentée et « anéconomique », portée par un agenda politique anti-économique où se croisent anticapitalisme, malthusianisme et antilibéralisme. (M. Yannick Jadot s'exclame.)
Beaucoup de promoteurs de l'agroécologie se satisferaient bien d'une liquidation de notre agriculture, pour des raisons environnementales.
Comme le disait Charles Péguy, « le kantisme a les mains pures, mais il n'a pas de mains ». Autrement dit, si nous continuons dans cette voie, nous aurons une agriculture propre, certes, mais nous n'aurons plus d'agriculture du tout. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Troisième faute : le dogme de la montée en gamme, promu à partir de 2017, a fait reculer la compétitivité de la ferme France. Pour l'agriculture française, comme pour celle des autres pays européens, exporter, c'est être en compétition avec d'autres agricultures. C'est aussi, sur notre marché national, pouvoir produire à des coûts suffisamment bas pour éviter l'importation massive de produits étrangers.
Or notre compétitivité agricole s'est fortement dégradée au cours des dernières décennies. Le Sénat s'est penché sur cette question en 2022 et sa conclusion est sans appel : la stratégie des pouvoirs publics pousse les agriculteurs dans l'impasse.
Mme la présidente. Veuillez conclure, cher collègue !
M. Laurent Duplomb. Dans ce contexte, le choix de la montée en gamme, clairement affirmé par le président Macron en 2017, dans son discours à Rungis, à l'occasion de la clôture des États généraux de l'agriculture et de l'alimentation, a été une erreur. (Marques d'impatience sur les travées des groupes GEST et SER.)
Mme la présidente. Je vous demande de conclure !
M. Laurent Duplomb. Pensée par ceux qui n'ont pas de fins de mois difficiles, cette stratégie n'est pas au service des plus modestes, qui sont voués progressivement à se nourrir de produits importés plus compétitifs et moins chers.
Plusieurs voix à gauche. C'est fini !
M. Laurent Duplomb. Alors, changeons de modèle et soutenons l'agriculture française ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commission.)
Mme la présidente. Je vous demande à tous de bien vouloir respecter le temps de parole qui vous est imparti.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, après plusieurs mois de discussions, nous arrivons au terme de l'examen de la proposition de loi de notre collègue Laurent Duplomb. Nous franchissons une étape importante tant ce texte est attendu par nos agriculteurs, qui demandent depuis longtemps des réponses concrètes à leurs difficultés.
Sur le terrain, nous voyons tous que les agriculteurs n'en peuvent plus de ces règles plus strictes que celles qui sont imposées à l'échelon européen, du manque de solutions de substitution aux produits interdits ou encore des complexités administratives. Le présent texte vise justement à leur apporter des réponses claires, pratiques et responsables.
L'article 1er revient sur la séparation des activités de vente et de conseil des produits phytopharmaceutiques, une mesure peu efficace et contradictoire. Les distributeurs pourront désormais réaliser ces deux activités.
L'article 2, issu des travaux de la commission mixte paritaire, n'a pas réintroduit la possibilité accordée au ministre de l'agriculture de suspendre, dans certaines conditions, une décision de l'Anses portant sur l'homologation de produits phytopharmaceutiques. La CMP a créé un comité des solutions à la protection des cultures, qui permettra non seulement de suivre la disponibilité des méthodes et des moyens de protection des cultures chimiques et non chimiques, mais aussi de donner un avis sur les priorités attendues par les filières concernant leurs usages.
Cette solution équilibrée et mesurée semble bien loin des caricatures entendues dans les médias ces derniers jours, annonçant même une mise sous tutelle de l'Anses !
Le texte ne réintroduit pas non plus les néonicotinoïdes, contrairement à ce que nous avons entendu un peu partout récemment. Il autorise seulement l'utilisation d'acétamipride, après avis du conseil de surveillance, pour certaines cultures qui n'ont aujourd'hui que peu de solutions de remplacement. L'acétamipride faisait l'objet d'une interdiction franco-française qui, dans les faits, pénalisait nos agriculteurs par rapport à leurs voisins européens.
L'autorisation vaudra pour une période de trois ans, avant d'être éventuellement renouvelée, année après année, en attendant une solution viable pour nos agriculteurs.
M. Jean-Claude Tissot. Il en existe déjà !
Mme Patricia Schillinger. Il convient de le rappeler, les agriculteurs n'utilisent pas ces produits par plaisir. Nous devons donc continuer d'investir dans la recherche.
Une autre mesure très attendue par nos agriculteurs réside dans la reconnaissance d'intérêt général majeur des ouvrages ayant vocation à prélever et à stocker de l'eau à des fins agricoles. Encore une fois, l'article 2 n'est pas une porte ouverte aux mégabassines dans tous les territoires, contrairement à ce que certains affirment.
Cette mesure sera réservée uniquement aux zones affectées d'un déficit quantitatif pérenne compromettant le potentiel de production agricole.
Depuis plusieurs mois, nous avons voté divers textes en matière d'agriculture, mais c'est celui-ci qui produira le plus d'effets, à court terme, pour nos agriculteurs. Cette proposition de loi préserve l'avenir de notre agriculture et va dans le sens de la sauvegarde de notre souveraineté alimentaire.
Face au dogmatisme et aux facilités de certains partis politiques, ce texte de bon sens…
M. Daniel Salmon. Le bon sens ? On voit où il nous mène !
Mme Patricia Schillinger. … répondra à plusieurs attentes du terrain, sans rien céder à la déraison.
Sur ces sujets, nous devrons également veiller à ce que les agriculteurs soient soumis aux mêmes règles du jeu, partout en Europe, sans risquer une concurrence déloyale.
Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe RDPI votera majoritairement en faveur de ce texte, mais il restera vigilant sur son application. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Henri Cabanel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, sans remettre en cause son fondement ni tomber dans la surenchère ou le renoncement, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui a su tirer le meilleur d'une navette parlementaire pour le moins mouvementée.
À ce titre, les discussions en commission mixte paritaire se sont déroulées avec la bienveillance, le respect et l'écoute chers à notre chambre.
Mon groupe, qui, dans le débat et la recherche de compromis, au-delà des clivages partisans, voit la célébration de notre intérêt général, n'a pu que déplorer l'absence de discussion en séance publique à l'Assemblée nationale. C'est bien l'illustration de notre échec à tous de faire de la démocratie parlementaire le rempart contre les populismes, les dogmatiques et les électoralismes.
Cette proposition de loi cherche avant tout à mettre fin à la marginalisation de nos agriculteurs et à leur apporter davantage de justice sociale, pour qu'ils puissent enfin bénéficier des mêmes règles que leurs homologues européens. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
À cet égard, ne dramatisons pas le message selon lequel ce texte marquerait le retour des néonicotinoïdes sur notre sol. Il est bien question d'autoriser l'acétamipride, mais il s'agit d'un simple droit dérogatoire, encadré par plusieurs garde-fous, et non d'une norme.
D'ailleurs, à ceux qui déclarent que cette dérogation est au service de l'agro-industrie et qu'elle exacerbe les clivages entre les modèles agricoles, je rappellerai, comme l'a souligné Mme la ministre, que l'Anses n'a jamais retiré l'autorisation de mise sur le marché de l'acétamipride. C'est notre vote à nous, parlementaires, voilà sept ans, qui a interdit l'usage de produits à base de néonicotinoïdes. Comme d'habitude, nous avons pris cette décision sans en évaluer les conséquences concrètes, laissant ainsi des filières sans solution.
M. Henri Cabanel. Nous cherchons non pas à opposer les filières les unes aux autres, mais à trouver le juste compromis, afin qu'aucune agriculture ne soit laissée au bord du chemin. Le RDSE est toujours dans la nuance et cherche le bon équilibre entre économie, environnement et santé.
Mon groupe se satisfait que certaines lignes rouges franchies au départ – je pense notamment à la mise sous tutelle de l'Anses et à la révision de la définition des zones humides – ne soient plus présentes dans la version finale du texte, grâce au travail de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, que je tiens à saluer.
L'Anses a besoin de mener ses travaux de manière indépendante et sereine. Cette indépendance garantit à la fois la rigueur scientifique de ses décisions et sa crédibilité.
N'oublions pas que nos agences de sécurité sanitaire ont été mises en place après plusieurs crises de grande ampleur – amiante, sang contaminé, vache folle –, qui ont toutes montré la nécessité de structurer une expertise scientifique capable d'évaluer les risques, d'éclairer et de protéger la décision publique en matière sanitaire.
Ne nous y trompons pas, la défiance envers les institutions scientifiques a toujours nourri les crises sanitaires, les polémiques et, in fine, l'impuissance publique. C'est pourquoi notre priorité doit être de réaffirmer le rôle central de l'Anses et de garantir son indépendance.
Alors que la France est confrontée à une canicule depuis plusieurs jours, nous ne pouvons continuer à opposer productivité et transition vers l'agroécologie, quand des solutions existent pour les faire converger.
C'est la raison pour laquelle je regrette que la commission mixte paritaire n'ait pas souhaité conditionner l'accès des exploitations aux réserves d'irrigation agricole à la réalisation préalable d'un diagnostic permettant une évaluation de l'état de fertilité des sols.
Favoriser le développement des bassines, c'est apporter une réponse à court terme ; c'est aussi reporter les véritables changements structurels auxquels notre agriculture devra se confronter.
Madame la ministre, je terminerai cette explication de vote par un message : ce texte bienvenu doit aider notre agriculture à se relever et à sortir des impasses dans lesquelles nous l'avons entraînée. Mon groupe votera majoritairement en sa faveur. Toutefois, là encore, dans un contexte de perte d'attractivité des professions agricoles, nous oublions des éléments importants : l'accès au foncier agricole et le revenu.
Je ne peux terminer mon propos sans évoquer notre viticulture. Aux côtés de Daniel Laurent et Sébastien Pla, je suis rapporteur de la mission d'information sur l'avenir de la filière viticole française. Nous vous ferons part de nos propositions, une fois notre travail achevé.
La rentrée de septembre, juste après les vendanges, s'annonce explosive. Il faudra alors avoir le courage de prendre les bonnes décisions, en responsabilisant les professionnels viticoles et en conditionnant les aides publiques qui seront nécessaires.
Ne donnons plus un seul euro sans contrepartie. Vous pouvez nous faire confiance pour formuler des propositions en ce sens. J'espère, en retour, que nous pourrons compter sur vous. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Franck Menonville. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, aujourd'hui est un grand jour pour notre agriculture et pour nos agriculteurs.
Nous sommes réunis parce que la CMP qui s'est tenue lundi sur la proposition de loi que nous défendons depuis l'automne dernier avec Laurent Duplomb s'est révélée conclusive.
Nous avons travaillé de concert ces derniers mois. Notre mission était simple : redonner aux agriculteurs les moyens de produire et de restaurer leur compétitivité. Notre boussole était claire : il n'est pas de souveraineté nationale sans souveraineté alimentaire.
Cette bataille ne fut pas facile et les pressions furent nombreuses. Notre parcours a été semé d'embûches, n'est-ce pas, mon cher Laurent Duplomb ?
Je tiens à vous remercier, madame la ministre, ma chère Annie Genevard, de votre écoute, de votre soutien, de votre détermination et de la qualité de nos échanges.
Je salue également votre volonté de tenir vos engagements, ainsi que ceux de vos prédécesseurs, notamment au travers du budget pour 2025 et de ses allègements de charges, dans le cadre non seulement de l'examen de la loi du 24 mars 2025 d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture (LOA), que j'ai rapportée au Sénat avec Laurent Duplomb, mais aussi du présent texte.
Je vous remercie aussi, madame la présidente de la commission des affaires économiques, ma chère Dominique Estrosi Sassone, de la confiance que vous nous avez témoignée tout au long des discussions et de votre rôle déterminant lors de la CMP.
Je tiens à remercier nos rapporteurs, en particulier Pierre Cuypers, pour le travail de longue haleine qu'il a mené avec beaucoup de patience et de conviction durant ces semaines de négociations avec l'Assemblée nationale, dont nous savons combien elles furent difficiles.
Les négociations dans le cadre de la CMP ont donc eu pour point de départ le texte adopté par le Sénat, en raison de la motion de rejet votée par l'Assemblée nationale.
Ce texte avait toutefois déjà maturé depuis sa mouture initiale, en commission et en séance ; il a continué d'être enrichi par les débats en commission à l'Assemblée nationale. C'est pourquoi nous avons choisi de faire droit, en CMP, aux suggestions de nos collègues députés Julien Dive, Marc Fesneau, Jean-Luc Fugit et Stéphane Travert, à chaque fois que cela nous semblait compatible avec l'esprit initial de notre proposition de loi : diminuer les contraintes pesant sur nos agriculteurs.
Soyez rassurés, mes chers collègues, la version de compromis qui vous est soumise n'a aucunement restreint la portée de ce texte. N'en déplaise à ses détracteurs, celui-ci est très attendu par le monde agricole.
Il apporte des réponses concrètes aux mobilisations de 2023 et 2024 ; il impulse le choc de simplification, de compétitivité et de liberté dont nos agriculteurs ont tant besoin ; il allège les contraintes qui pèsent sur eux et les asphyxient au quotidien ; il lutte contre les surtranspositions franco-françaises, sources de concurrence déloyale intra-européenne ; il rétablit le nécessaire équilibre entre compétitivité agricole et exigences environnementales ; il érige l'activité agricole en priorité nationale ; il vient, enfin, compléter les dispositions de la LOA.
Ce texte constitue donc un signal fort de notre volonté de réarmer la compétitivité de notre agriculture et d'enrayer le déclin de la ferme France ; il octroie à nos agriculteurs les mêmes moyens que ceux dont bénéficient les agriculteurs de nos partenaires européens et offre des solutions à des filières qui se trouvent dans l'impasse.
Ce combat ne doit pas se limiter à la seule agriculture, il doit s'étendre à l'ensemble des secteurs de notre économie. La France, pour retrouver sa performance économique, a besoin d'un choc de compétitivité, d'un choc de simplification et d'un choc de liberté. Notre agriculture est un fleuron qui doit contribuer au rayonnement de notre pays.
Vous le savez, cette proposition de loi est pour moi l'expression d'une conviction profonde. Elle traduit l'idée que c'est depuis nos territoires, au nom de l'intérêt national et dans un cadre européen, que notre agriculture peut et doit nourrir nos concitoyens, garantir notre souveraineté alimentaire et répondre aux défis démographiques et climatiques, dans un contexte géopolitique toujours plus incertain.
Le mot de la fin est pour vous, mon cher Laurent Duplomb. Je tiens à dire le plaisir qui fut le mien de travailler à vos côtés et aux côtés de Pierre Cuypers, notre rapporteur. Nos personnalités sont différentes, mais complémentaires, et nous sommes animés par une même volonté d'œuvrer en faveur de notre pays et de son agriculture.
En conclusion, les membres du groupe Union Centriste, et son président, Hervé Marseille, que je remercie de sa confiance, voteront bien évidemment ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Vincent Louault applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
M. Gérard Lahellec. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que l'Assemblée nationale a voté une motion de rejet préalable du texte, la CMP est parvenue à un accord entre sénateurs et députés.
Curieux exercice démocratique que de confier à 14 parlementaires sur 925 le soin de configurer une proposition de loi pour, nous dit-on, « libérer » le métier d'agriculteur.
Curieux exercice démocratique que de confier à une CMP la charge d'aboutir à un texte quand les députés ont fait valoir une motion de rejet préalable.
Curieux exercice démocratique, enfin, que d'inclure dans les versions originelles de ce texte, comme de la LOA, des dispositions dont on connaît le caractère inconstitutionnel. J'en veux pour preuve cet article qui inscrivait dans la loi le caractère peu grave d'une atteinte à l'environnement si l'acte était réputé involontaire.
Un seul point de satisfaction, cependant : le retrait de l'encadrement des compétences de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail en matière d'autorisation de produits phytosanitaires.
Maigre consolation, toutefois, car la nouvelle version de la loi ressemble à peu de choses près au texte initial, les principaux articles qui font débat ayant été maintenus.
Dire qu'une telle procédure est légale et permet d'imposer un texte qui, au fond, ne recueille un soutien majoritaire qu'au Sénat ! La majorité sénatoriale disposant de la majorité politique en CMP, le tour de passe-passe est aisé.
M. Rémy Pointereau. C'est la Constitution !
M. Gérard Lahellec. Je ne suis pas certain que cela corresponde à l'esprit de nos institutions, de notre Constitution, ni au respect du bicamérisme.
M. Jean-Jacques Panunzi. C'est conforme à la Constitution, donc à son esprit !
M. Gérard Lahellec. Par l'instrumentalisation de telles procédures, nous ne réhabiliterons pas la vie politique dans notre pays ; il ne faudra dès lors pas s'étonner, demain, des commentaires démagogiques qui nous concerneront tous.
Certes, nos agriculteurs n'en peuvent plus. Lorsque les crises qu'ils subissent les conduisent dans une impasse, comment ne pas comprendre que toutes les procédures et autres paperasseries qu'on leur impose les exaspèrent ?
Il est facile, dès lors, de s'en prendre aux normes, aux administrations, aux fonctionnaires, à l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) ou à l'Anses, plus facile que de s'attaquer aux causes réelles de cette situation de crise.
Un chiffre suffit à l'illustrer : la décapitalisation de nos cheptels laitiers et allaitants a fait perdre en sept ans quelque 409 000 têtes au cheptel français. Dans mon seul département des Côtes-d'Armor, entre 2023 et 2024, en un an seulement, la production laitière a chuté de 10 millions de litres.
Il importe de prendre en compte l'ensemble de ces difficultés dans un débat ouvert sur la sécurité économique qu'il faut leur garantir. Nous aurions d'ailleurs pu prolonger les propos de notre collègue Laurent Duplomb lorsqu'il évoquait la réforme de la PAC de 1992, dont nous mesurons encore aujourd'hui les conséquences.
Cette proposition de loi reste donc à contre-courant, car pour défendre la pérennité d'une agriculture de production, il nous faudra une grande ambition publique en matière de recherche, ainsi que des préconisations et des garanties solides pour notre santé.
Je songe, par exemple, à ce fourrage miraculeux qu'est le maïs. Nous savons qu'il s'agit d'une plante facile et commode, mais dont le grand inconvénient est d'être gourmande en eau durant les périodes sèches. Il faudra donc envisager progressivement des cultures de substitution, sans pour autant rompre le fonctionnement de la filière. Il nous faut prendre à bras-le-corps ces grands défis ; nous aurons besoin pour cela de recherche et d'expérimentation, d'expertise technique, sanitaire et agroécologique.
La version du texte qui nous est soumise instaure une forme de déréglementation des normes pour nous aligner sur la situation d'autres pays moins-disants, pas seulement sur le plan écologique, mais aussi sur les plans social et environnemental.
Ce sont là autant de raisons qui nous conduisent à voter contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Yannick Jadot. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en 2020, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) avait lancé une enquête auprès des parlementaires, dont il ressortait que 20 % d'entre eux considéraient que les scientifiques exagéraient les risques du changement climatique.
À droite, c'était un véritable tsunami : 44 % des parlementaires, soit près d'un sur deux, jugeaient que la science exagère.