Le Sénat n'a pas adopté.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, MM. Lozach, Ros et Ziane, Mme Rossignol, M. Chaillou, Mmes de La Gontrie et Féret, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou et Narassiguin, MM. Redon-Sarrazy, Roiron, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, d'une motion n° 2.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44 alinéa 3 du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (n° 825, 2024-2025).
La parole est à Mme Colombe Brossel, pour la motion. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Colombe Brossel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au début de l'été, en toute fin de session extraordinaire, notre assemblée est appelée à débattre en deuxième lecture de la proposition de loi, rejetée par l'Assemblée nationale, relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle.
À la suite de l'adoption d'une motion de rejet par l'Assemblée nationale, voilà que l'avenir des six entités constituant le service public de l'audiovisuel français est entre les mains du Sénat, par votre seule volonté, madame la ministre.
En effet, vous êtes parvenue à imposer votre calendrier personnel. Dès lors, l'avenir de France Télévisions, de Radio France, de France Médias Monde et de l'INA se joue au mépris du respect élémentaire dû au Parlement, alors même que la jeune sénatrice que je suis a pu constater que la rigueur et le sérieux avec lesquels notre chambre travaille constituent, en temps normal, l'une de nos marques de fabrique plus qu'appréciée.
Sur la forme, la réalité est là : par caprice et pour votre bon plaisir, vous avez décidé de tout faire voler en éclats. Nous faisons face à une situation au-delà du raisonnable, les délais raccourcis ne nous permettant pas d'envisager un examen serein. Que dire du fait de ne pas passer par un projet de loi, ce qui nous prive d'étude d'impact ? Cette situation pose de vraies questions en matière d'élaboration de la loi et de respect du Parlement.
Sur le fond, la proposition de loi soumise à notre examen a été adoptée par le Sénat il y a deux ans. À l'époque – je parle sous le contrôle de Sylvie Robert, en ayant une pensée affectueuse pour notre ancien collègue David Assouline –, la proposition de loi visait avant tout à faciliter les coordinations entre les différentes entités de l'audiovisuel public. En effet, le texte avait pour objet de renforcer, au travers de la création d'une holding non exécutive, les synergies et de permettre des rapprochements tout en limitant les dépenses dans la situation budgétaire déjà complexe que chacun avait en tête.
Mes chers collègues, pourquoi les sénatrices et sénateurs socialistes font-ils le choix, en responsabilité, de poser la question préalable en ouverture de nos débats ?
M. Roger Karoutchi. Parce que c'est ainsi !
Mme Colombe Brossel. La raison est simple : comme nous l'avons indiqué en commission la semaine dernière, ce texte, n'en déplaise à nos collègues de la droite sénatoriale, a profondément changé de nature.
Mme Sylvie Robert. Absolument !
Mme Colombe Brossel. De coordinations en rapprochements, il nous est proposé, à la suite des débats qui ont commencé à l'Assemblée nationale il y a de cela un an, d'approuver ni plus ni moins qu'une fusion de quatre des six entités de l'audiovisuel public.
La gouvernance du patrimoine commun que représente l'audiovisuel public, auquel les Français demeurent profondément attachés, se trouve radicalement transformée. De fait, la création d'une holding exécutive, avec à sa tête une main unique et toute-puissante, entraînera le découpage des différentes entités.
En les recevant il y a quelques semaines, vous disiez, madame la ministre, trouver inspirantes les conclusions du rapport de l'ancienne directrice de France Inter, Laurence Bloch. Une fois de plus, preuve est faite que nous n'avons pas, ici comme ailleurs, les mêmes sources d'inspiration…
Reprenons dans l'ordre et tentons d'analyser les conséquences du chamboule-tout que vous voulez imposer.
Premièrement, une holding serait créée. Elle permettrait d'imprimer une vision stratégique tout en veillant à la complémentarité des offres. Pour qui regarde la télévision ou écoute la radio, il semble pourtant que tout, actuellement, garantit la complémentarité.
Par ailleurs, des incertitudes – le mot est faible – demeurent quant au périmètre de la future structure. Le sort de France Médias Monde est en suspens. La majorité sénatoriale est attachée à son entrée dans la holding, mais on peine à savoir si cette volonté est attachée à une holding de coopération ou à la nouvelle holding exécutive.
En outre, personne ne parvient à comprendre ce que vient faire l'Institut national de l'audiovisuel dans cette galère. Où est la cohérence s'agissant d'un établissement public à caractère industriel et commercial qui n'a pas les mêmes missions que les autres entités ? Ses salariés sont chargés d'œuvrer à la conservation du patrimoine audiovisuel et à la mise en valeur de celui-ci.
La réforme envisagée aurait pour but de renforcer l'audiovisuel public. Voilà un objectif étonnant : y a-t-il plus puissant que l'audiovisuel français ? Pour la bonne information des plus éloignés de nos débats, je livrerai quelques chiffres. France Télévisions et Radio France sont respectivement le premier groupe de télévision gratuite et le premier groupe de radio français, avec une part d'audience respective de 29,3 % et 29,8 % en 2023. À l'échelle internationale, Radio France Internationale (RFI) et France 24 représentent de vrais porte-voix de la puissance du réseau audiovisuel, notamment en Afrique. En matière de radio, la dernière vague d'audience rendue publique par Médiamétrie pour la période avril-juin 2025 confirme la place privilégiée de France Inter avec plus de 7 millions d'auditeurs par jour, pour la quatrième année consécutive. Ne cherchez plus, le compte y est !
A contrario, on nous parle de synergie et de complémentarité, mais – je reviens sur ce point, monsieur le rapporteur – le rapprochement depuis 2018 d'ICI, anciennement France Bleu, avec France 3 ne brille pas de mille feux !
M. Laurent Lafon, président de la commission. Nous sommes d'accord !
Mme Colombe Brossel. Deuxièmement, des synergies seraient recherchées. Battons en brèche une idée reçue : les coopérations existent déjà. C'est le cas pour les achats de contenus, mais aussi en matière de création éditoriale. En la matière, je pense à l'offre éducative de France Télévisions, Lumni. À celles et à ceux qui se demandent pourquoi utiliser plusieurs micros, nous répondons que deux ou trois valent mieux qu'un.
En effet, la diversité du paysage actuel garantit celle du traitement de l'information : les choix éditoriaux ne sont pas les mêmes entre France 2 et les antennes d'ICI. Nous avons pu nous en rendre compte à de nombreuses reprises, notamment lors de la couverture du procès des viols de Mazan. La complémentarité des points de vue et des travaux journalistiques était une véritable avancée démocratique.
L'offre est bien complémentaire : arrêtons d'évoquer des regroupements à tout-va. Il ne viendrait à l'idée de personne de regrouper Air France et la SNCF au motif que, dans les deux cas, il s'agit de transport…
La gouvernance est le troisième et dernier point que je souhaite évoquer. Ainsi donc, la concentration du pouvoir exécutif dans les mains d'une seule et unique personne serait le gage d'une plus grande « efficacité », sans que l'on ait la moindre idée du rôle qui sera celui des futurs directeurs généraux. De surcroît, dans le nouveau paysage, les salariés, qui sont pourtant plus de 16 000, ne seront plus représentés que par deux collègues au sein du conseil d'administration : drôle d'idée de la représentativité, quand on sait par ailleurs que les sujets ne manqueront pas dans un contexte de polyvalence accrue pour les personnels et de dégradation des conditions de travail par une harmonisation moins-disante…
Au bout du compte, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : tant sur le fond que sur la forme, c'est une réforme à marche forcée que l'on tente de nous imposer. Et nous résisterons, car ce qui se joue là est essentiel : il s'agit de lutter contre la remise en cause, que nous ne pouvons accepter, de l'intégrité et de l'autonomie des différentes maisons de l'audiovisuel public.
Les sénatrices et sénateurs socialistes refusent ce qui n'est autre qu'une mise au pas de l'audiovisuel public. Notre groupe refuse d'ouvrir cette fenêtre qui, demain, permettrait de faire advenir les conditions d'une future privatisation. Nous sommes déterminés à tout mettre en œuvre pour garantir les principes démocratiques de l'audiovisuel face à d'éventuelles évolutions politiques à venir.
Assurément, nous ne souhaitons pas qu'en France, comme c'est déjà le cas de l'autre côté des Alpes, il soit demain possible de supprimer toute limitation du temps de parole du Gouvernement dans les débats électoraux, et que les messages gouvernementaux puissent être diffusés sans médiation journalistique. Le modèle de Mme Meloni n'est définitivement pas le nôtre.
Notre modèle, c'est celui dans lequel 66 % des Français interrogés déclarent faire confiance aux médias publics.
M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
Mme Colombe Brossel. Alors que les fausses informations pullulent, cette confiance est nécessaire. Elle est rendue possible par le professionnalisme et la capacité d'innovation des journalistes. Ils sont des piliers au service d'une information de qualité, sourcée, riche de la confrontation des idées, émergeant depuis un écosystème capable de garantir le respect du pluralisme. Voilà ce qui permet de créer un lien de confiance.
Or force est de constater que les fondements de l'audiovisuel public comme service public de confiance, diffuseur d'information, de divertissement et de création, à l'unisson des aspirations de la société, sont plus que jamais menacés.
Au moment de conclure mon propos, je ne peux m'empêcher de penser au long film – pour le coup, un mauvais film – du parcours parlementaire de cette proposition de loi. Celui-ci suscite en moi un réel sentiment d'incompréhension. Madame la ministre, cinq de vos prédécesseurs, s'exprimant de façon pour le moins inhabituelle, ont dit leur refus de ce débat, le qualifiant qui d'« inopérant », qui de « [perte de] temps ». Et, d'un même mouvement – là encore, c'est loin d'être toujours le cas –, toutes les organisations syndicales pointent un contresens historique. On a rarement raison seul, même lorsque l'on est ministre…
Pourquoi tant de haine et de défiance de la part du Gouvernement ? Répondre à cette question, c'est donner un motif suffisant et impérieux de voter avec nous cette motion de procédure. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?…
Quel est l'avis de la commission ?
M. Cédric Vial, rapporteur. Sans surprise, l'avis de la commission est défavorable. (Oh ! sur les travées du groupe SER.)
Je vais donner quelques éléments de réponse.
Vous avez parlé de la force du service public en France par rapport à ce que l'on observe ailleurs en Europe. Je vous rappelle que dix-neuf pays européens sur vingt-sept ont organisé une concentration et un rapprochement des médias radiophoniques et télévisuels.
M. Max Brisson. Eh oui !
M. Cédric Vial, rapporteur. Seuls huit pays ont conservé une organisation telle que celle qui prévaut dans notre pays : la France, donc, l'Allemagne, la Bulgarie, la Lettonie, la République tchèque, la Roumanie et la Suède. Telle est la réalité européenne aujourd'hui.
Par ailleurs, madame Brossel, vous avez parlé de fusion ; mais, justement, il n'est pas question de fusion : nous créons une holding. J'y insiste : la logique de cette réforme n'est pas une logique de fusion ; vous faites donc une petite erreur d'interprétation de la lettre de ce texte. (Mmes Colombe Brossel et Sylvie Robert protestent.)
Je veux aussi revenir en deux mots sur ce que vous avez dit au sujet de l'INA. Vous semblez ne pas comprendre ce que vient faire l'INA dans le regroupement ; or son intégration est une chance pour cet organisme. Au-delà des missions d'archivage et de dépôt légal qu'il exerce pour l'ensemble du secteur audiovisuel, public comme privé, l'INA est aussi le principal organisme de formation pour tous les métiers de l'audiovisuel. C'est une occasion unique pour l'INA, du point de vue de ses missions de formation comme d'archivage et d'éditorialisation, que de pouvoir intégrer un groupe comme celui-ci – je le dis en tant qu'administrateur de cet organisme.
Vous avez dénoncé le manque d'efficacité du rapprochement entre France 3 et France Bleu, mais nous sommes bien d'accord avec vous, ma chère collègue : c'est précisément l'une des raisons de cette réforme. On a testé ce que l'on appelle les « coopérations par le bas », en demandant à deux chaînes dotées chacune de leur propre organisme de pilotage de se mettre d'accord pour créer une organisation nouvelle : cela ne fonctionne pas – au pire, par leurs stratégies respectives, l'une et l'autre se tournent le dos ; au mieux, les arbitrages sont longs, voire inexistants. C'est justement parce que l'on constate que la méthode que vous préconisez ne fonctionne pas qu'il convient de franchir une étape supplémentaire, afin de construire un vrai média de proximité. Chacun doit le comprendre, à plus forte raison ici, dans la chambre des territoires.
Un dernier mot : vous vous êtes glorifiée des résultats en part de marché de l'audiovisuel public. Vous n'avez pas complètement tort, je l'ai dit dans mon intervention liminaire : certains résultats, exprimés en part de marché, sont intéressants. Mais parlons en valeur absolue : aujourd'hui, moins de 27 % des jeunes regardent la télévision au moins une fois par jour ; les audiences décrochent sur toutes les chaînes linéaires et à la radio.
Mme Audrey Linkenheld. Ça n'a rien à voir !
M. Cédric Vial, rapporteur. Il faut donc qu'une stratégie soit construite pour aller chercher ces usagers là où ils sont, c'est-à-dire sur le numérique. (Exclamations sur des travées des groupes SER et CRCE-K.) En d'autres termes, il faut une stratégie numérique forte. Or l'organisation actuelle de l'audiovisuel public ne le permet pas.
Mme Sylvie Robert. C'est une blague !
M. Cédric Vial, rapporteur. Je confirme l'avis défavorable de la commission sur cette motion tendant à opposer la question préalable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Défavorable.
Mme Laurence Rossignol. Aucune explication ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Laurent Lafon, président de la commission. Je dirai quelques mots en réponse à certains des points qui ont été abordés, mais nous aurons l'occasion d'y revenir tout au long de cette journée et de celle de demain – peut-être aussi de samedi, de dimanche ou des jours suivants.
Mme Sylvie Robert. Y compris lundi !
M. Roger Karoutchi. Plutôt mardi…
M. Laurent Lafon, président de la commission. Concernant le temps qui a été dévolu à l'analyse de ce texte, je veux rappeler que la réflexion sur la création d'une holding n'est pas un sujet nouveau, en particulier pour le Sénat et en particulier pour la commission de la culture. Je veux rappeler également– c'est une façon de leur rendre hommage – que les premiers à avoir évoqué l'idée d'une holding furent Jean-Pierre Leleux et André Gattolin. Je précise qu'André Gattolin, lorsqu'il fait cette proposition, en 2015, est encore membre du groupe écologiste…
Mme Cécile Cukierman. On sait où il est allé après !…
M. Laurent Lafon, président de la commission. En un sens, l'idée de la holding vient donc aussi de la gauche : c'est bien, mes chers collègues, vous avez eu sur ce sujet un moment de lucidité.
J'ai relu – c'est intéressant, je vous invite à le faire – les motifs exposés à l'époque par André Gattolin et Jean-Pierre Leleux pour proposer cette holding. On pourrait reprendre mot pour mot les éléments de leur analyse, qui consonne avec celle que vient de livrer Cédric Vial, notre rapporteur. De quelle réalité, encore plus criante aujourd'hui, prenaient-ils acte en 2015 ? Une révolution technologique, constataient-ils, touche de plein fouet les médias : l'apparition d'internet, des réseaux sociaux et, depuis 2015, des plateformes. Conséquence : les médias traditionnels tels que nous les connaissons – le linéaire – perdent chaque année un public toujours plus nombreux. Le diagnostic est connu, notamment pour ce qui est des jeunes.
Chacun a pu prendre connaissance des chiffres publiés cette semaine par Médiamétrie dans le cadre de son enquête sur les audiences de la radio : 550 000 auditeurs quotidiens de moins en l'espace d'une année, 2,5 millions de moins en l'espace de cinq ans, 5,6 millions de moins en l'espace de dix ans ! C'est un phénomène structurel : chaque année, la radio « classique » perd 15 % de ses auditeurs.
M. Thomas Dossus. Et les podcasts ?
M. Laurent Lafon, président de la commission. Et je pourrais donner des chiffres exactement analogues sur la télévision.
Il faut donc s'adapter. C'est là tout l'enjeu – il n'y en a pas d'autres – de cette réforme : s'adapter pour mieux défendre notre audiovisuel public, le mettre en position de toucher tous les publics et de concurrencer des acteurs dont aucun des orateurs qui sont intervenus jusqu'à présent n'a parlé.
Il existe en effet, dans le champ médiatique, une concurrence exacerbée, qui n'est pas une concurrence franco-française. Ce n'est plus la concurrence que nous connaissions il y a dix ans : c'est la concurrence des plateformes américaines, de Facebook, de Google. Si l'audiovisuel public veut peser face à ces nouveaux acteurs et s'il veut avoir les moyens de résister, le regroupement est indispensable. C'est tout le sens de la réforme que nous vous proposons. (M. Claude Kern applaudit.)
Mme Annick Billon. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Aujourd'hui, vous le savez, mes chers collègues, toutes nos démocraties sont menacées : toutes nos démocraties sont menacées d'illibéralisme et de tendances autocratiques. Or, à chaque fois qu'un pouvoir veut organiser cette dérive illibérale, il s'attaque aux médias.
Il s'attaque aux médias de deux manières.
Première méthode : organiser une hégémonie des médias qui défendent non pas la liberté d'expression, mais le droit à la propagande – exemplairement, en France, le groupe Bolloré.
M. Roger Karoutchi. Oh là là…
M. Yannick Jadot. Le groupe Bolloré, depuis des semaines, depuis des mois, attaque systématiquement le service public de l'audiovisuel ; et il le fait, malheureusement, avec votre concours, madame la ministre.
Vous avez dénoncé la fermeture de C8, et l'on sait pourtant les propos qui étaient tenus sur cette chaîne. Il y a quelques semaines, accordant une interview au JDNews, qui est clairement un journal d'extrême droite, vous avez expliqué votre réforme, mais vous n'avez pas eu un mot – pas un ! – de défense du service public. Ce que défend le groupe Bolloré, c'est le droit à la parole raciste, c'est le droit à la parole homophobe, c'est le droit à la parole climatosceptique !
Et que font les pouvoirs, à chaque fois, dans ce genre de cas ? Ils cherchent à reprendre en main le service public, à le piloter politiquement. Autrement dit, on laisse la porte grande ouverte à la propagande et l'on réduit le service public, sa capacité d'investigation, sa capacité d'enquête et sa liberté d'expression, donc le droit à l'information.
C'est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera cette motion de rejet. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
Demande de vérification du quorum
M. le président. Mes chers collègues, en application de l'article 51 du règlement, je suis saisi d'une demande écrite de vérification du quorum
En application de l'article 51, alinéa 3, du règlement du Sénat, la constatation du nombre des présents est effectuée sur la demande écrite de trente sénateurs dont la présence doit être constatée par appel nominal.
Il va donc être procédé à l'appel nominal des signataires de la demande de vérification du quorum.
Huissiers, veuillez effectuer cet appel.
(L'appel nominal a lieu. – Ont signé cette demande et répondu à l'appel de leur nom : Mme Colombe Brossel, M. Yan Chantrel, Mme Sylvie Robert, M. Jean-Marc Vayssouze-Faure, Mme Annie Le Houerou, Mme Corinne Féret, Mme Émilienne Poumirol, M. David Ros, M. Lucien Stanzione, M. Rémi Cardon, M. Guillaume Gontard, M. Ronan Dantec, Mme Raymonde Poncet Monge, Mme Monique de Marco, M. Thomas Dossus, Mme Ghislaine Senée, M. Yannick Jadot, M. Christian Redon-Sarrazy, Mme Laurence Rossignol, Mme Cécile Cukierman, Mme Cathy Apourceau-Poly, Mme Evelyne Corbière Naminzo, Mme Michelle Gréaume, M. Éric Kerrouche, M. Pierre Ouzoulias, M. Thierry Cozic, M. Rémi Féraud, Mme Karine Daniel, M. Christophe Chaillou, Mme Corinne Narassiguin, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Pierre de La Gontrie et Mme Viviane Artigalas.)
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, la présence d'au moins trente signataires ayant été constatée, il peut être procédé à la vérification du quorum.
Vérification du quorum
M. le président. Je vais procéder à la vérification du quorum.
(La vérification du quorum a lieu.)
M. le président. Mes chers collègues, je constate que la majorité absolue des sénateurs n'est pas présente.
Cette constatation étant faite, je déclare que le Sénat n'est pas en nombre pour procéder au vote.
Aux termes de l'article 51, alinéa 3, de notre règlement, le vote ne peut avoir lieu moins d'une heure après la constatation de l'absence de quorum.
Je vais donc suspendre la séance pour une heure. Elle sera reprise à seize heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures trente,
est reprise à seize heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Question préalable (suite)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 2, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet de la proposition de loi.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission, l'autre, du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 355 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 99 |
Contre | 242 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Rappels au règlement
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour un rappel au règlement.
M. Éric Kerrouche. L'article 51, alinéa 3, du règlement, que nous venons d'utiliser, permet une vérification du quorum sur la demande écrite de trente sénateurs dont la présence est dûment constatée. Néanmoins, à l'alinéa 4 du même article, les modalités d'utilisation de cette procédure dans le temps ne sont pas spécifiées.
Or il semble que lesdites modalités découlent d'une décision du bureau datant de 2006, inscrite dans un guide intitulé « La procédure législative », qui spécifie le nombre de demandes de vérification du quorum qui peuvent être présentées par jour de séance.
Nous faisons simplement remarquer que, si le règlement du Sénat fait l'objet d'une validation collective perpétuelle, il n'en va pas de même pour ce document relatif à la procédure législative. Quant à la décision du bureau de 2006, elle est si ancienne que nombre d'entre nous n'ont pu l'entériner, le bureau n'ayant d'ailleurs plus rien à voir avec ce qu'il était à l'époque.
Par conséquent, la limitation à une seule demande de vérification du quorum par jour de séance pose problème. Nous demandons que ce point puisse être explicité et éclairci, car il fait partie des conditions du débat. Nous ne pouvons pas complètement exploiter le règlement, dans la mesure où, encore une fois, celui-ci n'a pas été mis à jour eu égard aux éléments que je viens d'exposer.
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour un rappel au règlement.
M. Roger Karoutchi. Ayant eu le bonheur, avec un collègue socialiste devenu ensuite sénateur En Marche, d'élaborer la réforme du règlement de 2015 sur laquelle nous « vivons » toujours, je me permets d'intervenir, toutes arguties mises à part. L'article 51, alinéa 4, du règlement, auquel fait allusion notre collègue, dispose clairement qu'une fois constatée l'absence de quorum il y a une heure de suspension, après quoi l'on peut voter. Par conséquent, le vote n'est pas en débat.
Deuxième élément, tout aussi clair : depuis toujours, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, la possibilité de demander la vérification du quorum est limitée à une fois par journée de séance.
M. Guillaume Gontard et Mme Raymonde Poncet Monge. C'est un usage !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n'est écrit nulle part !
M. Roger Karoutchi. Mes chers collègues, vous pouvez demander que le règlement soit modifié ou précisé, mais vous ne pouvez pas inventer une règle qui n'existe pas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Laure Darcos applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour un rappel au règlement.
Mme Laurence Rossignol. Mon rappel au règlement se fonde lui aussi sur l'article 51 du règlement, et en particulier sur l'alinéa 4 dudit article.
Cet alinéa précise que le vote qui n'a pu avoir lieu faute de quorum peut avoir lieu une heure après la vérification, mais il ne dit rien des votes suivants.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Laurence Rossignol. Notre collègue Roger Karoutchi a fait un véritable effort de pédagogie ; si j'ai bien compris ce qu'il nous explique, la règle dont nous sommes en train de débattre s'applique en vertu d'une forme de droit coutumier :…
Mme Raymonde Poncet Monge. C'est l'usage, rien de plus…
Mme Laurence Rossignol. … on a l'habitude de procéder de cette manière à l'Assemblée nationale et au Sénat.
En ce qui nous concerne, nous, parlementaires, nous avons beaucoup de respect pour le droit coutumier, mais nous sommes attachés à des règles plus formelles. Nous cherchons donc dans le règlement du Sénat, tel qu'il est rédigé, sur quelle base légale se fonde votre référence à une limite d'une seule vérification du quorum par journée.
M. Roger Karoutchi. C'est la règle ! Cela s'appelle le droit parlementaire.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n'est écrit nulle part !
M. le président. Mes chers collègues, acte est donné de vos rappels au règlement.
En ce qui me concerne, en tant que président de séance, j'applique une tradition constante du Sénat (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)…
Mes chers collègues, puis-je terminer ma phrase ? Le sujet est suffisamment important pour que nous nous écoutions les uns les autres.
M. Thomas Dossus. Ça commence mal !
M. le président. J'aimerais finir ma phrase, s'il vous plaît, monsieur Dossus !
J'applique une tradition constante du Sénat, disais-je, consacrée par la décision du bureau du 24 février 2006 : le quorum ne peut être demandé plus d'une fois par jour sur un même texte ; point.
Pour le reste, j'invite nos collègues qui souhaitent demander des modifications du règlement à le faire par l'intermédiaire de leurs représentants au sein des instances de gouvernance du Sénat, en particulier du bureau. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. Laurent Lafon, président de la commission. C'est très clair !