M. Victorin Lurel. Un amendement analogue à celui-ci a été voté par le Sénat le 5 mars dernier. Or ce dispositif n’a hélas ! pas été conservé dans le texte du Gouvernement qui est soumis à notre examen ce soir. Il s’agit d’un dévoiement – disons-le ainsi – de la loi de 2012, qui prévoyait d’interdire les pratiques consistant à accorder des droits exclusifs de distribution, sauf lorsque de tels accords sont favorables aux consommateurs, ce qui peut bel et bien être le cas, puisqu’il existe encore aujourd’hui des exclusivités – et je ne parle pas là des entreprises intégrées. Cela signifie que la loi ne visait pas une suppression pure et simple de telles pratiques.

Le problème, c’est que, de ce fait, certaines entreprises distributrices sont parfois victimes de ruptures abusives de leurs relations commerciales. J’ai en tête des exemples très concrets de sociétés – je ne citerai pas leur nom – ayant décidé, sans aucun préavis ni indemnisation, et sans tenir compte non plus des salariés qui restent en plan, des amortissements ou des frais d’établissement de leurs partenaires, de mettre fin brutalement à ces relations commerciales. De tels comportements contribuent à abîmer les fonds de commerce des distributeurs ou de celles et ceux qui prennent la responsabilité de faire la promotion d’un produit. Il convient naturellement de réparer cet état de fait et de faire le nécessaire pour que les textes soient appliqués.

J’ai cru comprendre, dans le cadre de nos discussions préalables à la séance publique, que mon amendement était satisfait. On m’a même dit que la jurisprudence prévoyait déjà des critères d’indemnisation. Or, si la jurisprudence – que j’ai consultée – porte bien sur les fonds de commerce, elle ne traite ni des salariés, ni de l’amortissement, ni des frais d’établissement.

Mes chers collègues, il importe de faire respecter les textes. Certes, on pourrait inviter les entreprises distributrices lésées, celles qui estiment être victimes d’une rupture abusive, sans indemnisation des préjudices causés, à saisir le tribunal. Mais ce serait méconnaître la réalité ! Parce que lorsqu’une entreprise s’est vu confier plusieurs lignes de produits et qu’elle proteste auprès de la société importatrice au sujet d’un produit parmi d’autres, dans les faits, elle perd tout… Dans ces situations, les chefs d’entreprise concernés sont tétanisés et ne peuvent que subir le préjudice.

C’est pourquoi il me semble essentiel de faire un rappel aux bonnes pratiques, si j’ose dire, et la promotion d’une concurrence, certes trop libre, mais du moins loyale : il faut faire appliquer les dispositions prévues à l’article L. 420-2-1 du code de commerce.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à protéger les entreprises qui subissent une rupture brutale de relations commerciales établies. Or le II de l’article L. 442-1 du code de commerce engage déjà la responsabilité des personnes fautives et les obligent à réparer le préjudice causé, en cas de non-respect d’un préavis de dix-huit mois.

L’amendement de notre collègue Victorin Lurel tend à préciser des critères d’indemnisation qu’il est superflu d’inscrire dans la loi, dès lors que ceux-ci ressortissent déjà de la jurisprudence. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Si je comprends bien, le dispositif proposé, s’il était adopté, reviendrait à dédommager l’entreprise ayant bénéficié d’une exclusivité ; par conséquent serait indemnisé un comportement qui est par nature infractionnel, un comportement qui a profité à l’entreprise présentée comme victime, mais ayant bénéficié d’un avantage concurrentiel illégal.

Cet amendement a pour objet d’introduire une responsabilité civile, qui irait à l’inverse de ce que l’on souhaite, c’est-à-dire le respect de la loi.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 65.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 6
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Article 6 ter (nouveau)

Article 6 bis (nouveau)

L’article L. 910-1 H du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les observatoires peuvent saisir les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes aux fins de vérification des informations qui leur sont transmises. Ces agents peuvent faire usage dans ce cadre des pouvoirs mentionnés au titre V du livre IV du présent code. – (Adopté.)

Article 6 bis (nouveau)
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Article 6 quater (nouveau)

Article 6 ter (nouveau)

Au IV de l’article L. 462-5 du code de commerce, après la première occurrence du mot : « les », sont insérés les mots : « départements et les » – (Adopté.)

Article 6 ter (nouveau)
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Article 7

Article 6 quater (nouveau)

Après l’article 59 duodecies du code des douanes, il est inséré un article 59 terdecies A ainsi rédigé :

« Art. 59 terdecies A. I. – Les agents de la direction générale des douanes et droits indirects, les agents de la direction générale des finances publiques et les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent communiquer, sur leur demande, aux présidents des régions d’outre-mer, du Département de Mayotte, de la collectivité de Saint-Martin et au président de l’observatoire des prix, des marges et des revenus territorialement compétent tous documents et renseignements de nature fiscale détenus ou recueillis dans le cadre de l’ensemble de leurs missions respectives relatives aux importations de produits sur leur territoire.

« II. – Les informations transmises en application du I ne sont pas diffusées ni rendues publiques.

« III. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »

M. le président. L’amendement n° 141, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après l’article 59 unvicies du code des douanes, il est créé un article 59… ainsi rédigé :

« Art. 59…. – Sur demande des conseils régionaux de Guadeloupe et de La Réunion, des collectivités territoriales de Martinique et de Guyane, du conseil départemental de Mayotte ainsi que des présidents de l’observatoire des prix, des marges et des revenus territorialement compétents, l’administration des douanes et droits indirects transmet :

« 1° Les informations nécessaires à l’établissement des exonérations d’octroi de mer et des listes de biens pouvant faire l’objet de taux différenciés, selon l’annexe 1 de la décision du Conseil n° 2021/991 du 7 juin 2021 relative au régime de l’octroi de mer dans les régions ultrapériphériques françaises et modifiant la décision n° 940/2014/UE ;

« 2° Par redevable assujetti, le montant de l’octroi de mer exonéré à l’importation ;

« 3° Par assujetti, le montant de l’octroi de mer dû au titre des livraisons de biens produits localement.

« La nature, l’utilisation et la publication de ces données, dans le respect des obligations de discrétion et du secret professionnel, sont précisées par décret. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Naïma Moutchou, ministre. À travers cet amendement, le Gouvernement propose une nouvelle rédaction de l’article 6 quater pour clarifier et sécuriser la transmission des données fiscales aux conseils régionaux de la Guadeloupe et de La Réunion, aux collectivités territoriales de Martinique et de Guyane, au conseil départemental de Mayotte, ainsi qu’aux présidents des observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR) territorialement compétents.

Le dispositif prévoit une dérogation qui est strictement encadrée par le secret professionnel. Il autorise l’administration des douanes à communiquer des données utiles aux collectivités et aux présidents des OPMR, notamment les informations nécessaires à l’établissement des exonérations d’octroi de mer et des listes de biens pouvant faire l’objet de taux différenciés ou d’exonérations.

Cette disposition, qui fait référence à une décision du Conseil de l’Union européenne, serait introduite dans le code des douanes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur de la commission des affaires économiques. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. À titre personnel, je suis favorable à ce que l’on conserve l’article dans sa version actuelle, c’est-à-dire tel que nous l’avons inséré dans le texte de la commission. L’amendement du Gouvernement vise effectivement à réduire la transmission des informations couvertes par le secret fiscal et le secret des affaires aux seules données relatives à l’octroi de mer. Est-ce bien cela, madame la ministre ? (Mme la ministre acquiesce.)

Or je rappelle que, dans de telles circonstances, la loi de 1951 sur le secret statistique – même si la direction régionale des finances publiques (DRFIP) peut être informée, mais alors l’information reste au sein des services de l’État – prévoit l’engagement de la responsabilité pénale des exécutifs régionaux. Lorsque, par exemple, on accorde plus de 500 000 euros d’exonérations à une entreprise au cours de l’année – ce qui arrive fréquemment dans nos territoires –, il s’agit d’une aide d’État qui est interdite. Et si le président de l’exécutif local n’a pas fait le nécessaire, quand bien même il n’en aurait pas conscience, parce qu’il n’en serait pas informé par les douanes, sa responsabilité est bel et bien engagée.

Avec l’article 6 quater, nous proposons simplement le partage d’informations couvertes par le secret fiscal et le secret des affaires. Nous ne le demandons pas pour nous, puisque ces données ne sont pas publiées, mais pour la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), laquelle va accumuler ces données en vue de produire des études, ce qui permettra de mieux éclairer les décisions du Gouvernement et, je l’espère, des collectivités territoriales.

À titre personnel, je ne peux pas voter un amendement, qui a pour objet de restreindre le périmètre d’une disposition déjà votée par le Sénat il y a quelques mois dans le cadre de la proposition de loi visant à lutter contre la vie chère. Chacun est libre de se déjuger, mais tel ne sera pas mon cas…

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 141.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 6 quater est ainsi rédigé.

Article 6 quater (nouveau)
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Après l’article 7

Article 7

I. – Après l’article L. 441-4 du code de commerce, il est inséré un article L. 441-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 441-4-1. – Les personnes exploitant, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi que dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, un ou plusieurs établissements de commerce de détail à prédominance alimentaire d’une surface de vente supérieure à 400 mètres carrés transmettent, chaque année, à l’autorité administrative chargée de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État, les montants correspondant aux remises, rabais, ristournes ou rémunérations de services liés à la revente des produits ou ayant un objet distinct qu’elles ont obtenus auprès de leurs fournisseurs en application des 1° à 3° du III de l’article L. 441-3 dans le cadre de l’exécution des conventions mentionnées au I de l’article L. 441-4 et, le cas échéant, au I de l’article L. 443-8.

« Les manquements au présent article sont passibles d’une amende administrative, prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 470-2, dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Le montant maximum de l’amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et à 750 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »

II. – Le I est applicable aux remises, rabais, ristournes et rémunérations obtenus dans le cadre des conventions en cours d’exécution à la date de son entrée en vigueur.

M. le président. L’amendement n° 92, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer les mots :

à prédominance alimentaire

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 92.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 93, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le nombre :

400

par le nombre :

350

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission s’en demande l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Pour les mêmes raisons que celles que j’ai invoquées au sujet de l’amendement n° 90, je suis défavorable à cet amendement. La surface de 400 mètres carrés correspond au seuil retenu habituellement.

M. Frédéric Buval, rapporteur. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 93.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 94, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

transmettent,

insérer les mots :

au plus tard le 30 juin de

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission demande l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. Frédéric Buval. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 94.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 95, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ces données sont exprimées en valeur absolue et en pourcentage du tarif ayant constitué le socle de la négociation commerciale, au sens de l’article L. 441-1 du même code, et ventilées par fournisseur et par ligne de produits, selon les catégories mentionnées aux 1° à 3° du III de l’article L. 441-3.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Il s’agit d’un amendement important, mes chers collègues, puisqu’il vise à ce que l’on exprime en valeur absolue et en pourcentage du tarif ayant constitué le socle de la négociation commerciale les données sur les marges arrière et autres avantages obtenus que les distributeurs doivent transmettre. Le dispositif prévoit par ailleurs une ventilation desdites données par fournisseur et par ligne de produits.

Nous demandons davantage de transparence, car, aujourd’hui, tout est opaque. Je sais que ce degré de détail – « par ligne de produits » – risque de poser problème, notamment dans la suite des débats, mais c’est selon moi le meilleur indicateur pour savoir ce qui se passe réellement dans les rayons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. La commission est a priori favorable à l’amendement de Victorin Lurel. Néanmoins, nous demandons l’avis du Gouvernement, afin que celui-ci clarifie ce point.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 95, parce qu’il nous semble qu’un tel dispositif relève davantage du pouvoir réglementaire que de la loi et que ces précisions devraient plutôt figurer dans le décret, mentionné à cet article, qui sera pris en Conseil d’État. Le Gouvernement sera bien entendu attentif à ce que le degré de détail que vous réclamez, monsieur Lurel, soit respecté.

M. le président. Quel est désormais l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Nous abordons ici la question des changements structurels qui seraient nécessaires pour que le dispositif de transmission des informations soit plus clair, plus transparent et, je l’espère, plus efficace. Il est question ici des indicateurs, des informations relatives aux marges arrière, un sujet que nous traiterons plus en profondeur dans quelques instants. Il s’agit de mettre fin à l’opacité qui préside au système actuel.

Voter contre le présent amendement et contre ceux que je défendrai ultérieurement sur les marges arrière aura pour conséquence que le droit de la concurrence dans les outre-mer restera inchangé. Aussi, mes chers collègues, je vous invite fortement à voter mon amendement, d’autant plus que les informations dont il est question resteront secrètes et que leur transmission donnera simplement à l’État davantage de moyens de prendre les bonnes décisions.

M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Mes chers collègues, je vous invite également à voter cet amendement. Le chapitre dont nous discutons a trait à la transparence et à la vie chère : si nous voulons savoir précisément comment agir et être réellement efficaces, il va falloir faire du cas par cas, car on voit bien que chaque territoire est différent. Pour avancer rapidement sur ce sujet, il faut savoir où se font les marges arrière, qui, nous le savons, sont très élevées. Nous avons besoin de visibilité sur ces données.

Au sein de la délégation sénatoriale aux outre-mer, la question des marges arrière a été souvent abordée. Pour agir véritablement et ne plus naviguer dans le brouillard, il faudra nécessairement faire la lumière sur ce dossier.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 95.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 96, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les fournisseurs également implantés dans les collectivités mentionnées au premier alinéa, les informations transmises permettent de distinguer, pour chacun d’eux, les avantages commerciaux consentis aux distributeurs de ces collectivités, de ceux consentis hors de ces territoires.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Il s’agit là encore de mettre en place un indicateur, mais cette fois-ci pour faire ce que l’on appelle, en anglais, du benchmarking, et, plus précisément, des comparaisons par territoire et non pas seulement, comme certains le veulent, entre les commerces de détail à prédominance alimentaire – on n’en tirerait rien !

Que se passe-t-il en matière de marges arrière en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et ailleurs ? Il faut pouvoir comparer les données en outre-mer avec celles de l’Hexagone. Ainsi, on sera mieux informé, et on pourra donc mieux décider.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Je crois comprendre l’objectif que vous visez, monsieur Lurel : au fond, vous voulez savoir s’il y a, oui ou non, une discrimination au niveau des marges arrière de la part des fournisseurs entre territoires d’outre-mer et Hexagone.

Mais le dispositif, tel que vous le proposez, n’est pas cohérent avec l’économie générale de l’article 7 : l’extension du périmètre de la mesure va créer une obligation impossible à respecter pour certains distributeurs et pourrait décourager des sociétés implantées dans l’Hexagone de continuer à exercer elles-mêmes une activité de distribution en outre-mer. Une telle mesure serait donc contre-productive.

En outre, le but que vous cherchez à atteindre me semble correspondre à celui que s’est fixé le Gouvernement à l’article 8.

Je suis par conséquent défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 96.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 110, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elles doivent en outre déclarer l’identité et le siège social des centrales d’achat ou des sociétés importatrices avec lesquelles elles sont liées, directement ou indirectement, ainsi que les conditions d’achat et de vente intragroupe. Ces informations sont transmises à l’Autorité de la concurrence.

La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement a pour objet d’introduire une exigence simple, mais essentielle : la transparence sur les liens entre les distributeurs et leurs centrales d’achat ou sociétés importatrices. Il tend à combler un angle mort que nous connaissons bien, celui des marges cachées dans les groupes intégrés.

Les lois Égalim l’ont illustré : on a imposé la transparence entre producteurs et distributeurs et encadré les négociations commerciales, mais les grands groupes ont trouvé la parade. Ils ont simplement déplacé la marge en la réalisant en amont, dans les centrales d’achat ou des filiales d’importation, souvent situées hors du territoire, parfois même à l’étranger. Résultat : les prix en rayon continuent d’augmenter, tandis que les profits se font ailleurs, à l’abri du contrôle public.

Dans les outre-mer, une grande partie des marges sont réalisées en amont de la chaîne dans les transactions intragroupe. Ce que nous proposons avec cet amendement, c’est de mettre un terme à cette opacité organisée, en obligeant les enseignes à déclarer l’identité et le siège social de leurs centrales d’achat, et à détailler les conditions d’achat et de vente intragroupe. Cette simple exigence permettra à la DGCCRF et à l’Autorité de la concurrence de reconstituer toute la chaîne de valeur, depuis l’importation jusqu’aux rayons. Car, tant qu’on ignore où la marge est captée, on ne combat pas la vie chère ; au contraire, on la subventionne !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir la transmission à la DGCCRF et à l’Autorité de la concurrence d’informations sur les conditions d’achat et de vente intragroupe, de manière à limiter les pratiques de transfert de bénéfices via des filiales importatrices.

Ce dispositif radical, qui garantit davantage de transparence, peut sembler séduisant, mais il va sans doute trop loin et pourrait se heurter au secret des affaires. C’est pourquoi nous y sommes défavorables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. À y regarder de plus près, cet amendement est satisfait. Il me semble même que le dispositif proposé est moins-disant que celui de l’article 7.

Les auteurs de l’amendement laissent entendre que les mesures à prendre pourraient se limiter aux seuls échanges entre les sociétés du groupe de distribution, alors que l’article 7 vise justement à cibler les échanges avec les vrais fournisseurs, y compris en cas de recours à une centrale d’achat.

Aussi, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 110.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 123, présenté par MM. Mellouli et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 3

1° Première phrase

Remplacer le montant :

375 000 €

par les mots :

1 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos

2° Dernière phrase

Remplacer le montant :

750 000 €

par les mots :

4 % du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé en France lors du dernier exercice clos

La parole est à M. Akli Mellouli.

M. Akli Mellouli. En complément de mon amendement n° 122, qui a été adopté tout à l’heure, le présent amendement tend à fixer à 1 % du chiffre d’affaires annuel le montant de la sanction encourue par les distributeurs qui refusent de transmettre à la DGCCRF les données relatives à leurs marges arrière, et à 4 % du chiffre d’affaires annuel le montant de la sanction encourue en cas de réitération du manquement. Comme mes collègues l’ont souligné, de telles sanctions visent à décourager ceux qui voudraient frauder sur les marges arrière.

En votant l’amendement n° 122 – ce dont je vous remercie et vous félicite –, mes chers collègues, vous avez montré que la République était ferme avec tout le monde, du moins avec tous ceux qui tentent de frauder et qui ne respectent pas les règles du jeu et les lois ; vous avez montré que la République n’était en tout cas pas faible avec les forts. Je vous invite à le prouver de nouveau en votant le présent amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement, qui est similaire à un amendement déjà rejeté en commission, a pour objet de porter à 1 % ou à 4 % du chiffre d’affaires, selon les cas, la sanction en cas de non-transmission par les distributeurs des informations sur les marges arrière prévue à l’article 7 du présent projet de loi.

En vue de garantir l’effectivité du dispositif et de faire en sorte que les grandes enseignes de la distribution transmettent bien les données attendues, l’article 7 prévoit actuellement des amendes de 75 000 euros pour une personne physique et de 375 000 euros pour une personne morale, ces montants étant multipliés par deux en cas de récidive.

Il nous semble qu’il convient d’en rester à un niveau de sanction proportionné à la faute commise. Autant le non-dépôt des comptes, obligation résultant du droit national et du droit de l’Union européenne, doit pouvoir faire l’objet de sanctions en pourcentage du chiffre d’affaires, autant la sanction en cas de non-transmission d’informations sur les marges arrière doit rester mesurée.

La commission est donc défavorable à cet amendement.