Du reste, si la Cades ne devait pas rembourser la dette sociale que la Sécu n'arrivait à pas à affronter seule, les comptes seraient à l'équilibre ; la Cades pèse sur les comptes de la sécurité sociale et, maintenant, vous souhaitez reporter au-delà de l'élection présidentielle le débat…

Mme la présidente. Veuillez conclure !

Mme Raymonde Poncet Monge. … sur le fait que vous êtes responsable de 100 milliards de déficits.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Madame la ministre, ai-je une tête de lapereau de trois semaines ?

L'alternative me paraît très simple. Pourquoi ne présentez-vous pas un projet de loi organique en 2026 pour solder cette affaire ? Pourquoi vous empressez-vous de transférer, par voie d'amendement au PLFSS, 15 milliards d'euros, apportant ainsi une toute petite réponse partielle au problème et renvoyant le règlement définitif du problème, tiens, au second semestre de 2027, par exemple ?

Parce que, une fois la dette covid transférée à la Cades – même si les compteurs n'ont pas été remis à zéro, la situation avait été assainie –, on voit, après quelques années de gouvernements de votre majorité, madame la ministre, comment vous avez géré la sécurité sociale ! Il y a un énorme paquet – plus de 100 milliards d'euros – de déficits qu'il va falloir transférer à la Cades. Voilà pourquoi vous ne voulez pas de la discussion d'une loi organique en 2026 !

Vous avez une solution technique, le Conseil d'État l'a validée. Très bien, nous ne nous y opposerons pas, nous sommes responsables, nous savons ce que c'est que le compromis, nous ne nous braquons pas dans des postures. Mais ne nous prenez pas pour des lapereaux de trois semaines ! Un débat sur une loi organique au cours de l'année précédant la présidentielle mettrait au jour votre gestion catastrophique de la sécurité sociale, avec le montant symbolique de plus de 100 milliards d'euros ! Et vous n'en voulez pas !

D'où ce transfert de 15 milliards d'euros, qui passera inaperçu dans le PLFSS pour 2026, et puis rendez-vous au second semestre de 2027. Voilà la réalité, tout cela est politique. Je ne sais pas si c'est la commission des affaires sociales qui vous facilite la tâche, madame la ministre, mais dans ce cas, dites-lui un grand merci…

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. D'abord, monsieur Jomier, c'est la commission qui a déposé cet amendement, après avoir constaté qu'il y avait un problème important à régler pour l'Acoss. Nous avons donc proposé au Gouvernement de transférer 15 milliards d'euros à la Cades, afin que ce ne soit plus l'Acoss qui emprunte directement. Nous avons en effet estimé qu'il fallait apporter des soins palliatifs à la sécurité sociale, pour éviter de devoir lui fournir plus tard une aide active à mourir… (Murmures sur les travées du groupe SER.) Et si ce que je dis vous gêne, je m'en fiche ! (Protestations sur les travées du groupe SER.)

Ensuite, madame la présidente, je sollicite une suspension de séance de dix minutes après la mise aux voix de ces amendements, afin que la commission et le Gouvernement puissent harmoniser le reste des amendements.

Mme la présidente. La suspension est de droit quand la demande émane du président de la commission, mon cher collègue.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 1870 et 1871.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 15, modifié.

(L'article 15 est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à dix-neuf heures cinquante.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Après l'article 15

Mme la présidente. L'amendement n° 1455 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Folliot et Fargeot, Mme Sollogoub, MM. S. Demilly, Mizzon, Menonville et Kern, Mmes Romagny et Saint-Pé et MM. Dhersin, Duffourg, Longeot et Delahaye, est ainsi libellé :

Après l'article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le quatrième alinéa du I de l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale est supprimé

II. – Le 4° de l'article 6 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est abrogé.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Nadia Sollogoub.

Mme Nadia Sollogoub. Cet amendement de notre collègue Michel Canévet vise à mettre fin à une dérive qui affaiblit notre système de retraite, à savoir le détournement progressif de la mission du fonds de réserve pour les retraites (FRR), comme l'a souligné Sylvie Vermeillet dans son rapport spécial sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale « Pensions ». Il s'agit donc de mettre fin aux versements du FRR à la Caisse d'amortissement de la dette sociale, afin de restaurer la mission originelle de celui-ci.

Ce fonds, créé par la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, avait pour mission initiale de constituer des réserves financières destinées à contribuer à l'équilibre du régime général de retraite et des régimes alignés, et à assurer la stabilisation du système de retraites face aux générations surnuméraires. Ce mécanisme devait permettre de lisser les effets démographiques à long terme et de garantir la soutenabilité du système par répartition.

Or, depuis la réforme des retraites de 2010, la mission du FRR a profondément évolué. Le fonds s'est vu confier la tâche de verser chaque année 2,1 milliards d'euros à la Cades pour participer à l'amortissement de la dette sociale, montant ramené à 1,45 milliard d'euros le 1er janvier 2025. Ces transferts, qui financent principalement des dépenses de la branche maladie, ont progressivement détourné le FRR de son objectif initial et ont conduit à une érosion significative de ses ressources : en dix ans, l'actif géré par le fonds a été presque divisé par deux.

Au travers de cet amendement, nous proposons de mettre fin à ces transferts et de restaurer la mission originelle du FRR : préparer l'avenir des retraites et non combler les déficits passés de l'assurance maladie. C'est une mesure de cohérence et de responsabilité.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de supprimer les dispositions prévoyant que le fonds de réserve pour les retraites alloue un peu plus de 1,4 milliard d'euros par an à la Caisse d'amortissement de la dette sociale ; ce montant était d'ailleurs beaucoup plus important voilà quelques années.

Toutefois, cette somme garantit la solvabilité de la Cades ; d'où l'avis défavorable de la commission sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Vous l'avez souligné, madame la sénatrice, depuis la réforme de 2010, la vocation du FRR n'est plus d'accumuler des réserves pour absorber un choc démographique, puisque ce fonds est chargé de gérer de manière performante les actifs qui lui ont été confiés ; et, de fait, c'est un fonds performant.

Toutefois, vous le savez, notre cadre organique relatif à la dette sociale limite notre capacité à réduire les recettes affectées à la Cades. Aussi, en cohérence avec l'amendement n° 1870 de la commission, qui vient d'être adopté, il me semble logique de vous demander de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi je devrai émettre un avis défavorable à son sujet.

Mme la présidente. Madame Sollogoub, l'amendement n° 1455 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Nadia Sollogoub. C'est un amendement d'appel, il va être retiré, madame la présidente.

Néanmoins, notre collègue Michel Canévet a raison d'appeler l'attention de tous sur une dérive préjudiciable, car l'avenir de notre système de retraite est compromis. Il est malheureux que ce système ait été détourné de sa vocation initiale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes bien d'accord !

Mme Nadia Sollogoub. Cela étant dit, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 1455 rectifié bis est retiré.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je le reprends !

Mmes Émilienne Poumirol et Laurence Rossignol. Très bien !

Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 1455 rectifié ter, présenté par Mme Raymonde Poncet Monge et dont le libellé est strictement identique à celui de l'amendement n° 1455 rectifié bis.

Vous avez la parole pour le défendre, ma chère collègue.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut en effet revenir à l'objet initial du FRR : passer la bosse démographique, prévenir la dégradation du rapport démographique.

Remarquez d'ailleurs que le FRR – institué sous M. Jospin – fonctionnait, dans un système par répartition, comme le système par capitalisation que vous voulez établir : on faisait des réserves sous la forme d'actifs financiers que l'on plaçait et qui rapportaient des revenus. Simplement, il avait vocation à « passer la bosse » et devait à terme diminuer son activité à mesure que l'on passerait cette bosse.

Avec un tel système, on aurait largement évité de devoir instaurer une couche de capitalisation, parce que cela fonctionnait de la même manière. Du reste, il avait un rendement très important.

On a d'ailleurs calculé que, si l'on avait continué de l'alimenter au lieu de le piller pour faire autre chose, il aurait constitué un apport très important qui aurait permis de réduire massivement le déficit de la branche.

Ainsi, il fonctionnait selon le même principe qu'un système par capitalisation et je crois que c'est pour cela qu'on l'a pillé, parce que cela évitait de recourir à un étage de capitalisation. Et c'est cela que ceux qui étaient au pouvoir en 2010 ont voulu en quelque sorte supprimer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Nous voulions aussi reprendre cet amendement.

Le FRR a été créé par Lionel Jospin, qui, lui, avait anticipé la trajectoire des retraites et avait bien vu qu'arrivait le mur de vieillissement que nous connaissons. Aussi, il avait conçu en 2001 un fonds de réserve pour passer cette « bosse démographique » ; il s'agissait en effet d'argent placé, assurant un rendement, qui permettait à l'évidence de passer, au cours des années 2020-2025, le départ en retrait du baby-boom des années 1945-1950.

Je regrette vraiment que, en 2010, on ait choisi, voyant cet argent – « On ne sait pas ce qu'il fait, il dort » –, de le prendre pour alimenter le budget de la sécurité sociale. C'est un véritable détournement ! Je trouve donc normal que l'on veuille redonner au FRR son rôle premier.

La mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) avait entendu ses dirigeants en audition, au cours des travaux de la mission d'information sur le financement de la sécurité sociale dont Mmes Doineau et Poncet Monge étaient rapporteures. Ils nous avaient alors indiqué qu'ils n'avaient plus la capacité à passer cette bosse démographique, parce que le FRR a été pillé pendant quinze ans.

Il convient donc de lui redonner son rôle premier : c'est un fonds de réserve pour les retraites.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1455 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 16

Sont habilités en 2026 à recourir à des ressources non permanentes afin de couvrir les besoins de financement des régimes dont ils gèrent la trésorerie les organismes mentionnés dans le tableau ci-dessous, dans les limites indiquées :

 

(En millions d'euros)

Encours limites

Agence centrale des organismes de sécurité sociale

83 000

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire

360

Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines

450

Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales

13 400

 – (Adopté.)

Après l'article 15
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026
Article 16 bis (nouveau) (début)

Article 16 bis (nouveau)

Le premier alinéa de l'article L. 139-3 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Après le mot : « an », il est inséré le mot : « , prioritairement » ;

2° Après le mot : « consignations », il est inséré le mot : « subsidiairement ».

Mme la présidente. L'amendement n° 633, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet article a été ajouté par l'Assemblée nationale et nous proposons de le supprimer, car son dispositif ne correspond pas à l'intention de ses auteurs.

Ces derniers souhaitent que l'Acoss se finance prioritairement auprès de la Caisse des dépôts et consignations et subsidiairement sur les marchés. C'est ce qui est arrivé au moment de la crise sanitaire : quand la dette a été trop importante, l'Acoss s'est tournée vers la Caisse des dépôts et consignations et vers un pool, un groupement, de banques.

Toutefois, cela ne correspond pas à la rédaction de cet article, qu'il convient donc de supprimer. Tel est l'objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La Caisse des dépôts et consignations est une entité publique assimilable à un établissement bancaire. Les conditions de taux actuellement proposées par les établissements bancaires, même la CDC, seraient plus coûteuses pour la sécurité sociale que l'émission de titres de court terme sur les marchés financiers. La charge des intérêts payés par l'Acoss étant répartie entre les branches de la sécurité sociale en fonction de leur solde prévisionnel, celle-ci a donc tout intérêt à recourir aux financements les moins coûteux.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur votre amendement, madame la rapporteure générale.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 633.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 16 bis est supprimé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Didier Mandelli.)

PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

Article 14 (précédemment réservé)

Pour l'année 2026 est approuvé le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

255,0

267,5

-12,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

17,1

18,0

-1,0

Vieillesse

304,5

307,5

-3,0

Famille

60,1

59,4

0,7

Autonomie

41,8

43,5

-1,7

Toutes branches (hors transferts entre branches)

659,5

676,9

-17,5

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 1188 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

L'amendement n° 1569 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marianne Margaté, pour présenter l'amendement n° 1188.

Mme Marianne Margaté. Par cet amendement de suppression, nous exprimons notre très vive inquiétude quant au tableau d'équilibre prévu pour les différentes branches de la sécurité sociale en 2026. Avec de telles perspectives de dépenses et de recettes, nous sommes très loin de répondre aux besoins de financement de la sécurité sociale, comme aux besoins sociaux et de santé de la population.

Nous sommes très loin également d'un rétablissement pérenne des comptes sociaux, d'une remise à flot de nos hôpitaux et de nos Ehpad et d'une répartition équitable des efforts. De fait, le PLFSS pour 2026 repose sur une compression des dépenses de santé à hauteur de 6 milliards d'euros, sur un gel des prestations sociales et sur une sous-indexation des pensions de retraite. Nous refusons l'ensemble de ces choix, dépourvus de justice sociale, qui s'attaquent aux plus fragiles pour préserver les plus forts.

Pour toutes ces raisons et parce que nous savons pertinemment que ce budget exige d'être soutenu par une politique de santé publique et non d'être sous-tendu par la seule obsession de réduire un déficit public global, nous n'adhérons pas aux objectifs de dépenses et de recettes prévus pour 2026. Tel est le sens de notre amendement de suppression.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l'amendement n° 1569.

Mme Anne Souyris. Par cet amendement de suppression, nous souhaitons nous opposer au tableau d'équilibre de la sécurité sociale présenté par le Gouvernement. Les dépenses affichées ne permettent absolument pas de répondre aux défis auxquels la sécurité sociale est confrontée : vieillissement de la population, inflation ou encore hausse du nombre de maladies chroniques.

En réalité, c'est toute la trajectoire budgétaire pour 2026 que nous contestons. Le déficit annoncé pour l'année prochaine, de 17,5 milliards d'euros, n'est pas un hasard ; il est largement lié aux exonérations massives de cotisations sociales, souvent non compensées par l'État, qui affaiblissent les comptes sociaux.

Nous partageons l'objectif d'un équilibre des finances de la sécurité sociale, mais pas au prix d'une réduction continue des moyens indispensables au fonctionnement de notre modèle social. Il n'est pas possible d'invoquer l'amélioration du solde pour justifier des mesures de casse sociale comme le gel des prestations, la hausse des franchises ou encore le sous-financement des soins.

Au contraire, le groupe écologiste défend des mesures plus justes socialement. Pour n'en citer que deux, il propose de faire davantage contribuer les plus hauts revenus et de réduire le plus possible les niches sociales et les dispositifs d'exonération de cotisations sociales.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Par ces amendements, vous proposez de supprimer l'article 14. Celui-ci, pourtant, doit figurer obligatoirement dans les lois de financement de la sécurité sociale. Si vous n'êtes pas d'accord avec le tableau d'équilibre qui vous est soumis, je respecte ce choix, mais une suppression vouerait l'ensemble du texte à une censure.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Il est défavorable. J'aurai l'occasion de revenir sur l'actualisation des tableaux.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1188 et 1569.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1873, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

(en milliards d'euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

254,7

268,6

-13,9

Accidents du travail et maladies professionnelles

17,2

18,1

-0,9

Vieillesse

308,7

310,5

-1,8

Famille

60,4

59,7

0,7

Autonomie

42,0

43,5

-1,5

Toutes branches (hors transferts entre branches)

663,9

681,4

-17,5

La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Cet amendement vise à assurer une première coordination des votes intervenus depuis le début de l'examen de ce PLFSS par la Haute Assemblée.

Le déficit résultant du texte transmis au Sénat, tenant compte des débats à l'Assemblée nationale, était de 23,5 milliards d'euros. Le solde tel qu'il résulte des amendements que vous avez adoptés serait proche de 17,5 milliards d'euros, soit un niveau qui ne serait pas éloigné du chiffre initial. Je tiens notamment compte du rétablissement de l'article 6, pour 300 millions d'euros, de l'article 7, avec un taux revu, pour un rendement de 1 milliard d'euros, et d'une partie des mesures de rationalisation sur les exonérations spécifiques, ainsi que de la suppression de l'article visant à rehausser le taux de la CSG sur les revenus du capital, chiffré à 2,8 milliards d'euros, et de plusieurs niches nouvelles, introduites par l'Assemblée nationale.

En toute transparence, j'indique que ce solde intègre également de manière forfaitaire la hausse du temps de travail que vous avez adoptée ce matin, soit environ 2 milliards d'euros d'« effet Robss ». Les répercussions, notamment macroéconomiques, d'une telle évolution n'ont pu faire l'objet d'une estimation fine en quelques heures ; nous essaierons d'améliorer l'évaluation d'ici à la fin des débats.

Toujours dans un souci de transparence, je précise que ce solde ne tient pas compte des votes qui interviendront ultérieurement, dans la troisième partie : le Gouvernement ne peut, par définition, anticiper. Il nous reviendra donc d'ajuster encore ces articles dédiés au chiffrage d'ici à la fin de l'examen du texte, mais je souhaitais vous donner l'état des soldes à ce stade.

M. le président. L'amendement n° 1760, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2, tableau

I. – Deuxième colonne

1° Cinquième ligne

Remplacer le nombre :

60,1

par le nombre :

60,5

2° Dernière ligne

Remplacer le nombre :

659,5

par le nombre :

659,9

II. – Dernière colonne

1° Cinquième ligne

Remplacer le nombre :

0,7

par le nombre :

1,1

2° Dernière ligne

Remplacer le nombre :

– 17,5

par le nombre :

 – 17,1

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Sans revenir sur le tableau d'équilibre ni sur le rejet de nos propositions induisant des recettes, je souhaite attirer l'attention, au travers de cet amendement, sur le niveau du fonds national d'action sociale (Fnas) de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), en supprimant le ralentissement de 0,4 milliard d'euros prévu pour 2026.

Ce ralentissement, qui découle de la contraction des crédits d'action sociale de la branche famille, fragilise directement les politiques menées par les communes et les intercommunalités. Je pense tout particulièrement à la petite enfance, à l'accompagnement des familles, à l'inclusion sociale ou encore au soutien à l'autonomie. Ce sont des politiques de proximité essentielles, des services concrets que les caisses d'allocations familiales (CAF) financent via le Fnas et dont les territoires dépendent fortement.

Les constats sont clairs. Le rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) Revue des dépenses du Fnas montre que ce fonds est un levier majeur de l'action sociale locale. Une grande partie de ces crédits est consacrée à la petite enfance, mais aussi aux centres sociaux, à la parentalité, à l'aide à domicile et à l'animation de la vie sociale, domaines d'intervention où l'on rencontre des difficultés à trouver des financements. Le Fnas soutient toute une architecture de solidarité sur laquelle reposent les communes et les intercommunalités.

Ce rôle essentiel est d'ailleurs pleinement reconnu à l'échelle nationale. Selon les rapports du Sénat et de l'Assemblée nationale, le Fnas doit être fortement renforcé dans les années à venir. À l'horizon de 2027, plusieurs milliards d'euros supplémentaires devront être mobilisés afin de garantir un service public de qualité pour les jeunes enfants et d'accroître le soutien aux structures locales.

Le ralentissement prévu irait donc, dès 2026, à contre-courant de cette trajectoire. Il affaiblirait des politiques publiques déjà en tension et mettrait en difficulté des services essentiels alors même que les besoins augmentent. Les communes ont besoin d'ouvrir de nouvelles places en crèche et des centres sociaux, pour accueillir toujours plus de familles en situation de précarité. Accompagner la parentalité est devenu un enjeu central de cohésion sociale.

Par conséquent, l'objet de notre amendement est simple : ajuster le tableau d'équilibre de la branche famille en rétablissant les ressources nécessaires au Fnas, sans modifier l'équilibre global des régimes pour respecter l'article 40 de la Constitution.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L'amendement n° 1873 du Gouvernement est un amendement classique d'actualisation du tableau d'équilibre. Il tend à montrer où nous en sommes au terme de l'examen de la deuxième partie du PLFSS en ce qui concerne le solde pour 2026.

Comme je vous l'ai indiqué, les propositions de la commission correspondent à un déficit de 15 milliards d'euros en 2026. Toutefois, ce chiffre implique la modification de l'article 40 du projet de loi de finances (PLF) pour annuler le transfert de la sécurité sociale vers l'État de 3 milliards d'euros, qui est une conséquence de la réforme des allégements généraux.

Compte tenu de leur nature très aléatoire, ces 3 milliards d'euros ne peuvent pas être pris en compte dans le tableau d'équilibre du PLFSS. Les propositions de la commission correspondent donc, en réalité, à un déficit d'environ 18 milliards d'euros. Les trois quarts d'entre elles portent sur la partie recettes.

Aussi, au terme de l'examen de ces dernières, les seules propositions de la commission devraient ramener le déficit à environ 20 milliards d'euros. Cet amendement indique pourtant un chiffre inférieur : 17,5 milliards. Ce résultat s'explique par deux amendements importants que nous avons adoptés.

En premier lieu, l'amendement n° 1678 d'Annie Le Houerou vise à abaisser à 6 000 euros le plafond d'exemption des compléments de salaire ; selon les informations dont nous disposons à ce stade, son rendement pourrait être de 400 millions d'euros pour la sécurité sociale et de 700 millions d'euros pour l'ensemble des administrations publiques.

En second lieu, l'amendement n° 572 rectifié septies d'Olivier Henno tend à hausser le temps de travail annuel de douze heures et donc à augmenter les recettes de la sécurité sociale d'environ 2 milliards d'euros, 5 milliards d'euros pour l'ensemble des administrations publiques.

Au compteur, le chiffre est donc un peu moins dégradé que ce que nous anticipions. Il s'agit maintenant de ne pas relâcher l'effort. Si nous faisons ce que nous avons prévu de faire dans la partie dépenses, nous pourrions parvenir à un déficit d'environ 16 milliards d'euros. Ce serait toujours beaucoup trop élevé, bien sûr, mais un peu inférieur aux 17,5 milliards d'euros du texte dans sa rédaction initiale et beaucoup mieux que ce qu'a proposé l'Assemblée nationale.

La commission émet donc un avis favorable sur l'amendement n° 1873.

L'amendement n° 1760 a pour objet de modifier l'article du tableau d'équilibre pour majorer les recettes de la branche famille de 400 millions d'euros. Il n'a pas d'effet juridique et fausse la prévision.

C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1760 ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Mme la rapporteure générale a déjà mentionné l'argument juridique. Le Gouvernement connaît évidemment le rôle central du Fnas, sur lequel vous voulez mettre l'accent, madame Le Houerou. C'est la raison pour laquelle ce fonds a été abondé de façon importante en 2025 et le sera en 2026.

Le financement des crèches est en deçà des attentes : on observe une atonie en matière de création de places. De fait, nous n'en sommes qu'au début du déploiement du service public de la petite enfance. Je précise que les collectivités, depuis le 1er juin dernier, doivent s'investir de plus en plus dans l'exercice de cette compétence. Il est donc normal que la montée en charge n'en soit qu'à ses prémices. La haute-commissaire à l'enfance et moi-même sommes bien décidées à accroître, en lien avec les collectivités, le nombre de places.

Le Fnas reflète l'activité constatée : si celle-ci était plus importante, son niveau le serait aussi. Consciente des difficultés que rencontrent les collectivités à augmenter le nombre de places, j'ai annoncé la semaine dernière l'augmentation de 2 % du plafond de la prestation de service unique (PSU) pour 2025. Cette bonne nouvelle était attendue des collectivités.

Pour ces raisons, je vous demande, madame la sénatrice, de retirer cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1873.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 1760 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 14, modifié.

(L'article 14 est adopté.)

M. le président. Nous reprenons le cours normal de la discussion des articles.

Article 17

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements et de neuf sous-amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 634, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Est approuvé le rapport figurant en annexe à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2026 à 2029), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

ANNEXE

RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES PAR BRANCHE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE DE SÉCURITÉ SOCIALE, AINSI QUE L'OBJECTIF NATIONAL DES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE POUR LES ANNÉES 2026 A 2029

Le solde des régimes obligatoires de base de sécurité sociale a connu une dégradation sans précédent en 2020 et a atteint le niveau de - 39,7 milliards d'euros sous l'effet des dépenses occasionnées par la crise sanitaire et de la récession qui l'a suivie. Il s'est redressé en 2021 à - 24,3 milliards d'euros en raison de la reprise progressive de l'activité. L'amélioration s'est poursuivie en 2022, le solde atteignant alors - 19,7 milliards d'euros, à la faveur d'un recul important des dépenses liées à la Covid19 mais dans un contexte marqué par le début d'une forte reprise de l'inflation, puis de nouveau en 2023, année au titre de laquelle le déficit s'est réduit à 10,8 milliards d'euros, avec notamment l'extinction des dépenses liées à la crise sanitaire. Le déficit s'est ensuite de nouveau accru en 2024 (15,3 milliards d'euros) en raison des effets asymétriques de l'inflation : les prestations légales ont ainsi été revalorisées en lien avec l'inflation encore élevée de l'année précédente (4,8 % en 2023 au sens de l'indice des prix à la consommation hors tabac en moyenne annuelle), les dépenses nettes relevant du champ de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ayant pour leur part progressé de 3,5 %, tandis que les recettes répondaient de manière contemporaine à l'inflation, qui a reflué à 1,8 % en 2024.

Le déficit s'accroîtra de nouveau en 2025 (-23,0 milliards d'euros selon les prévisions actualisées figurant dans la présente loi), en raison de la poursuite de la diminution de l'inflation, qui pourrait s'établir à 1,0 % en 2025, contribuant au ralentissement de la masse salariale du secteur privé (+ 1,8 %), déterminant macroéconomique majeur de l'évolution des recettes, tandis que les dépenses devraient être encore tirées vers le haut par les effets de l'inflation passée de 2024 via les revalorisations légales des prestations sociales, principalement en ce qui concerne les pensions de retraite (+ 2,2 %), et des dépenses relevant du champ de l'ONDAM dynamiques.

D'ici 2029, en tenant compte de l'ensemble des mesures d'économie de la présente loi, le déficit atteindrait 17,9 milliards d'euros : la progression des dépenses resterait tendanciellement forte malgré la montée en charge des mesures d'économies passées tandis que celle des recettes suffirait à peine à stabiliser le déficit. La branche maladie concentrerait l'essentiel du déficit à moyen terme, notamment du fait de la progression structurelle de ses dépenses.

I. – La loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 s'inscrit dans un contexte macro-économique de faible croissance et de faible inflation

L'hypothèse de croissance du produit intérieur brut (PIB) retenue pour 2026 est de 1,0 %, après une évolution de 0,7 % en 2025. À moyen terme, la croissance réelle du PIB atteindrait 1,3 % par an en 2028 et 2029. L'inflation serait faible en 2025 (1,0 % au sens de l'indice des prix à la consommation hors tabac en moyenne annuelle) et augmenterait légèrement en 2026 (1,3 %) pour se stabiliser à 1,75 % à compter de 2027. La masse salariale du secteur privé progresserait de 1,8 % en 2025 et de 2,3 % en 2026, puis continuerait d'accélérer pour atteindre 3,2 % en 2029.

Le tableau ci-dessous détaille les principales hypothèses d'évolutions retenues pour l'élaboration des prévisions de recettes et des objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe :

 

 

2024

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

PIB en volume

1,1 %

0,7 %

1,0 %

1,2 %

1,3 %

1,3 %

Masse salariale du secteur privé *

3,3 %

1,8 %

2,3 %

3,0 %

3,1 %

3,2 %

Inflation hors tabac

1,8 %

1,0 %

1,3 %

1,75 %

1,75 %

1,75 %

Revalorisations au 1er janvier en moyenne annuelle**

5,3 %

2,2 %

0,0 %

0,9 %

1,3 %

1,4 %

Revalorisations au 1er avril en moyenne annuelle **

3,9 %

2,4 %

0,4 %

1,1 %

1,7 %

1,8 %

ONDAM ***

3,3 %

3,6 %

1,6 %

2,9 %

2,9 %

2,9 %

* Masse salariale du secteur privé hors prime exceptionnelle de pouvoir d'achat et prime de partage de la valeur ajoutée. En incluant ces éléments de rémunération, la progression de la masse salariale s'est élevée à 2,8 % en 2024. En 2025, la prime de partage de la valeur ajoutée se stabiliserait à un niveau proche de son niveau de 2024, malgré son assujettissement à certains prélèvements sociaux, si bien qu'il n'y a pas de déformation attendue à ce titre.

** Évolutions incluant, pour l'année 2026, les effets en moyenne annuelle du gel de l'ensemble des prestations sociales. À partir de 2027, les évolutions incluent la sous-indexation des pensions de retraite de base de 0,4 %.

*** Évolution de l'ONDAM, y compris dépenses de crise sanitaire. Sans prise en compte de ces dépenses, l'évolution de l'ONDAM est de 3,5 % en 2024.

Par rapport au niveau prévu pour 2025, qui est maintenu au même niveau que celui fixé par la loi de financement initiale (265,9 milliards d'euros), notamment par la décision de mobiliser l'ensemble des crédits mis en réserve, suite à l'alerte pour risque sérieux de dépassement déclenchée par le comité d'alerte en juin dernier, l'ONDAM fixé pour 2026 évolue de +1,6 %. Il tient compte de mesures d'économie portant à la fois sur les dépenses au titre des soins de ville, des produits de santé et des établissements sanitaires et médico-sociaux, ainsi que des mesures nouvelles.

La trajectoire financière de la branche vieillesse des régimes de retraite de base intègre, pour l'année 2026, les effets de la mesure de gel de l'ensemble des prestations de retraite de base puis, à partir de 2027, l'effet d'une sous-indexation chaque année de 0,4 point de la revalorisation légale de ces mêmes prestations, en accord avec la piste évoquée entre les partenaires sociaux dans le cadre de la délégation paritaire permanente pour redresser le solde du système de retraites. La trajectoire retient également plusieurs mesures discutées au printemps dernier dans le cadre de cette délégation. Outre la réforme du dispositif de cumul emploi-retraite (représentant une économie de 0,2 milliard d'euros en 2027 et qui sera croissante au-delà) et la prise en compte jusqu'à deux trimestres de majorations de durée d'assurance pour enfant pour faciliter le départ anticipé des parents (pour un coût de 0,2 milliard d'euros en 2027), une mesure sera prise par voie réglementaire conformément à l'intention dont il a été fait part aux partenaires sociaux : la réduction du nombre d'années retenues dans le calcul du salaire annuel moyen qui sert de base aux calculs des pensions pour les parents bénéficiant de majorations de durée d'assurance pour enfant (pour un coût annuel de 0,1 milliard d'euros à compter de 2028). La trajectoire intègre, par ailleurs, les effets des mesures de la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 prévoyant le relèvement progressif de l'âge d'ouverture des droits de 62 ans à 64 ans, au rythme d'un trimestre par génération à compter du 1er septembre 2023, et une accélération du rythme de montée en charge de la durée d'assurance requise pour le bénéfice d'une pension à taux plein, au rythme d'un trimestre par génération. Les économies réalisées du fait de la réforme des retraites sur le régime des fonctionnaires de l'État sont par ailleurs attribuées chaque année au régime général de l'assurance vieillesse via la modification de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale. La trajectoire de la branche vieillesse intègre également les effets des mesures d'accompagnement de la réforme et des hausses des taux des cotisations d'assurance vieillesse dues par les employeurs privés et par les employeurs territoriaux et hospitaliers (à hauteur, pour ces derniers, de 3 points par an de 2025 à 2028, soit l'équivalent 1,8 milliard d'euros sur chacune de ces années).

La trajectoire financière de la branche famille tient notamment compte, pour 2026, de l'effet du gel des prestations familiales. Cette trajectoire est également améliorée dès 2026 par l'effet du décalage de 14 à 18 ans de la majoration pour âge des allocations familiales (pour une économie de 0,2 milliard d'euros en 2026 et croissante jusqu'en 2029). Elle intègre aussi, sur un horizon pluriannuel, la mise en place en 2027 d'un congé supplémentaire de naissance ainsi que les effets de la réforme du service public de la petite enfance et de celle du complément de libre choix du mode de garde adoptée dans la loi du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023. En outre, cette trajectoire prévoit, dès 2026, la réaffectation d'une partie de la CSG prélevée sur les revenus de remplacement et affectée jusqu'ici à la branche famille vers la branche maladie et, à compter de 2027 et de façon conventionnelle, vers la branche autonomie. Ces réaffectations, qui n'empêcheront pas que l'excédent de la branche famille continue de progresser sur la période, visent, notamment, à tenir compte de la déformation du solde de ces branches en raison du dynamisme de leurs dépenses et de la structure de l'assiette de leurs financements respectifs.

La trajectoire financière de la branche autonomie repose, outre ce qui est indiqué ci-dessus pour ses recettes, à compter de 2027, s'agissant de la CSG sur les revenus de remplacement, sur une progression de ses dépenses de 3,5 % en 2026, dont 2,4 % à champ constant pour la part relevant, au titre des frais de fonctionnement des établissements et services sociaux et médico-sociaux, de l'objectif global des dépenses (OGD) (dont 2,4 % dans le champ des personnes âgées et 2,5 % dans le champ du handicap), permettant notamment de financer l'accroissement de l'offre médico-sociale face aux besoins démographiques.

S'agissant des dépenses hors du champ de l'OGD (d'un montant de 9,3 milliards d'euros, en progression de 3 % par rapport à l'année précédente) la trajectoire tire les conséquences financières des réformes de fusion des concours de la branche aux départements d'une part et de fusion des sections « soins » et « dépendance » des établissements médico-sociaux conduite à titre d'expérimentation dans 23 départements d'autre part. Les concours versés par la branche aux départements atteindraient ainsi 6,2 milliards d'euros en 2026 après 6,0 milliards d'euros en 2025. La réforme des concours aux départements en modifie en effet le mode de calcul et contribue à en augmenter les montants à hauteur de 0,3 milliard d'euros en 2026, l'effet en année pleine de la fusion des sections jouant en sens inverse, à hauteur de 100 millions d'euros nets en 2026 (125 millions d'euros pour les départements expérimentateurs et - 25 millions pour les autres départements au titre des dépenses liées aux résidents originaires d'un département non-expérimentateur et accueillis dans un établissement situé dans un département expérimentateur). Au total, les concours aux départements atteindraient 6,2 milliards d'euros en 2026, marquant plus qu'un doublement par rapport à 2019 à périmètre courant.

II. – Les mesures adoptées conduiraient à contenir la progression des déficits des régimes de base

A. En ce qui concerne la situation globale des régimes de base

Le solde global pour l'année 2026 atteindrait - 17,4 milliards d'euros, en amélioration de 5,6 milliards d'euros par rapport à 2025 sous l'effet de la légère augmentation attendue de l'inflation (+ 1,3 % après + 1,0 % en 2025), dont l'impact serait positif sur la dynamique de la masse salariale (+ 2,3 % après + 1,8 % en 2025) et des recettes. Celles-ci croîtraient de 2,5 %, soutenues par la hausse de la masse salariale du secteur privé et par les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale et de la loi de finances : une rationalisation des niches sociales applicables aux compléments de salaires pour un rendement de 1 milliard d'euros nets, une participation des organismes complémentaires de 1,0 milliard d'euros et le transfert par l'État à la sécurité sociale du rendement de la fiscalisation des indemnités journalières versées en cas de maladie au titre des affections de longue durée, auxquelles s'ajoute la nouvelle hausse de 3 points du taux des cotisations dues par les employeurs à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales (CNRACL). En regard, les dépenses globales progresseraient à un rythme modéré (évolution de + 1,6 %) sous l'effet notamment de la mesure de gel de l'ensemble des prestations et des pensions de retraite prévue par la présente de loi et de la modération de la progression des dépenses d'assurance maladie puisque l'ONDAM progresserait de 1,6 %, après 3,6 % en 2025. La hausse des dépenses des régimes obligatoires en 2026 représenterait toutefois 10,8 milliards d'euros, dont 5,2 milliards au titre des dépenses maladie.

À l'horizon 2029, la progression du déficit serait contenue sous l'effet d'une progression de l'ONDAM inférieure à 3 %, selon la même hypothèse que celle sous-jacente, pour les années 2026 et 2027, à la dernière loi de programmation des finances publiques, et de la montée en charge des mesures prévues par la présente loi, notamment la sous-indexation de 0,4 point chaque année des pensions de retraite de base, la montée en charge progressive du décalage de 14 à 18 ans de la majoration pour âge des allocations familiales et la réforme du dispositif du cumul emploi-retraite (CER). Cette trajectoire intègre également la poursuite de la montée en charge des effets de mesures décidées précédemment, notamment celles de la réforme des retraites, deux nouvelles hausses de trois points du taux de cotisation à la CNRACL pour les années 2027 et 2028 et enfin l'impact favorable de l'extinction progressive de la déduction forfaitaire spécifique de l'assiette des cotisations dues au titre de l'emploi des salariés dans certains secteurs. Elle intègre aussi l'impact défavorable pour les régimes de base (de la réforme de l'assiette de prélèvements des travailleurs indépendants (contrepartie d'un effet en sens contraire et donc favorable pour les régimes complémentaires, conformément à l'objectif d'accroître les droits contributifs des travailleurs indépendants, étant précisé que ces effets sont doublés en 2026 en raison de la comptabilisation de la régularisation des cotisations au titre de 2025 et de la prise en compte de la mesure dans les cotisations provisionnelles de l'année en cours) et la progression du coût du congé supplémentaire de naissance. Elle prend enfin en compte une hausse du rendement des efforts de lutte contre la fraude, qui dépasserait 1 milliard d'euros à l'horizon 2029. Dans ces conditions, le déficit des régimes de base de sécurité sociale atteindrait 18,3 milliards d'euros à l'horizon 2029.

B. En ce qui concerne la situation par branches

En 2026, le déficit de la branche maladie, maternité, invalidité et décès serait en amélioration, s'établissant à 12,5 milliards d'euros (après 13,8 milliards d'euros en 2024 et 17,2 milliards d'euros en 2025) sous l'effet des mesures d'économies portant sur l'ONDAM et de la réaffectation de la CSG assise sur les revenus de remplacement en provenance de la branche famille. À l'horizon 2029, le déficit se recreuserait progressivement pour atteindre 16,1 milliards d'euros. Les charges financières liées à l'accumulation des déficits augmenteraient de 0,5 milliard en 2025 à 2,3 milliards d'euros en 2029.

Le solde de la branche autonomie, qui avait connu un excédent ponctuel de 1,3 milliard d'euros en 2024 puis une dégradation devant la conduire à un déficit de 0,3 milliard d'euros en 2025, se creuserait fortement pour atteindre - 1,7 milliard d'euros en 2026 en raison du dynamisme des dépenses – et notamment des transferts vers les départements – et des effets de la réforme de l'assiette des travailleurs indépendants sur les prélèvements non contributifs qu'ils acquittent, dont la CSG affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Son déficit se stabiliserait les années suivantes en raison de l'affectation, à titre conventionnel, d'une fraction supplémentaire de CSG prélevée sur les revenus de remplacement en provenance de la branche famille. Cette trajectoire tient par ailleurs compte de la création de 50 000 postes en EHPAD à l'horizon 2030, de la mise en place, à ce même horizon, de 50 000 solutions nouvelles pour les personnes en situation de handicap et leurs proches ainsi que de la mise en œuvre des réformes de fusion des concours aux départements et, dans 23 départements, de fusion des sections « soins » et « dépendance » des Ehpad.

Le déficit de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), qui devrait devenir déficitaire en 2025 du fait du dynamisme des prestations, notamment d'indemnités journalières, relevant du champ de l'ONDAM, atteindrait 1 milliard d'euros en 2026 du fait notamment de la baisse du taux de cotisations prévu par la réforme des retraites en contrepartie de la hausse de celles de la branche vieillesse, pour 0,7 milliard d'euros, et d'une progression toujours dynamique du coût des indemnités journalières. La branche AT-MP ayant vocation plus directe à l'équilibre, cette tendance dégradée pourrait cependant être corrigée en partie par un effort de retour à l'équilibre, avec des leviers à identifier. Par ailleurs, en 2027, la branche devra financer la réévaluation à la hausse du coût de la sous déclaration en application du rapport remis au Parlement à l'été 2024, portant le transfert de 1,2 milliard d'euros en 2024 à 2,0 milliards d'euros d'ici 2027. Le déficit de la branche atteindrait ainsi 1,4 milliard d'euros sur cette dernière année.

En 2026, la branche vieillesse, dont le solde est d'une part directement affecté par l'augmentation de la taille des générations qui partent à la retraite mais bénéficiera de la hausse progressive de l'âge effectif de départ prévue par la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 et s'avère d'autre part particulièrement sensible aux évolutions de l'inflation, connaitrait une première étape dans sa trajectoire de retour à l'équilibre avec une amélioration de son solde (- 3,0 milliards d'euros en 2026 après - 4,5 milliards d'euros en 2024 et -5,8 milliards d'euros en 2025), sous l'effet du gel, poursuivi les années suivantes par une sous-indexation, de l'ensemble des pensions de retraites de base et de l'apport de recettes lié à la hausse, renouvelée ensuite encore pour deux années supplémentaires, du taux de cotisations dues par les employeurs à la CNRACL en 2027 et 2028. À l'horizon 2029, le déficit de la branche se creuserait à nouveau légèrement, pour atteindre -1,6 milliard d'euros.

Le solde de la branche famille serait en excédent de 0,7 milliard d'euros en 2026, à un niveau comparable à celui de l'année précédente (0,8 milliard d'euros), puis augmenterait pour atteindre 2,4 milliards d'euros en 2029, sous l'effet du faible dynamisme des dépenses de la branche dans un contexte de faible natalité réduisant durablement les dépenses de prestations. La trajectoire présentée ici limite la croissance de cet excédent en réaffectant une part des recettes de CSG assise sur les revenus de remplacement de la branche famille à la branche maladie, conformément aux dispositions de la présente loi, puis de façon conventionnelle en faveur de la branche autonomie à compter de 2027. La trajectoire inclut aussi la montée en charge progressive du décalage de 14 à 18 ans de la majoration pour âge des allocations familiales, ainsi que l'effet de la création, à partir de 2027, d'un congé supplémentaire de naissance et la montée en charge des objectifs poursuivis en matière de petite enfance.

Prévisions des recettes, dépenses et soldes des régimes de base et du FSV

 

Recettes, dépenses et soldes de l'ensemble des régimes obligatoires de base

(En milliards d'euros)

 

2024

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

Maladie

Recettes

239,2

245,1

255,0

261,5

268,2

275,3

Dépenses

253,0

262,3

267,5

275,3

283,2

291,3

Solde

- 13,8

-17,2

-12,5

-13,8

-15,0

-16,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

Recettes

16,9

16,9

17,1

17,6

18,1

18,6

Dépenses

16,3

17,5

18,0

19,0

19,3

19,6

Solde

0,7

-0,5

-1,0

-1,4

-1,3

-0,9

Famille

Recettes

58,9

60,2

60,1

61,8

62,9

64,1

Dépenses

57,8

59,3

59,4

59,9

60,7

61,6

Solde

1,1

0,8

0,7

1,9

2,2

2,4

Vieillesse

Recettes

288,2

297,0

304,4

311,7

320,3

327,3

Dépenses

293,8

303,4

307,4

313,8

321,5

329,3

Solde

- 5,6

-6,3

-3,1

-2,1

-1,2

-2,0

Autonomie

Recettes

41,2

41,7

41,8

43,5

45,3

47,2

Dépenses

39,9

42,0

43,5

45,2

47,0

48,8

Solde

1,3

-0,3

-1,7

-1,7

-1,7

-1,7

Régimes obligatoires de base de sécurité sociale consolidés

Recettes

626,4

642,3

659,4

676,4

694,7

711,8

Dépenses

642,8

665,8

676,9

693,5

711,6

730,1

Solde

- 16,4

-23,5

-17,5

-17,1

-16,9

-18,3

 

 

Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse

(En milliards d'euros)

 

2024

2025

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

Recettes

21,6

22,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Dépenses

20,5

21,5

0,0

0,0

0,0

0,0

Solde

1,1

0,5

0,0

0,0

0,0

0,0

 

 

Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse

(En milliards d'euros)

 

2024

2025

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

Recettes

627,8

643,1

659,4

676,4

694,7

711,8

Dépenses

643,1

666,1

676,9

693,5

711,6

730,1

Solde

- 15,3

-23,0

-17,5

-17,1

-16,9

-18,3

 

III. – D'ici 2029, des efforts supplémentaires conséquents seront à mettre en œuvre pour revenir à l'équilibre.

Les comptes de la Sécurité sociale devront être ramenés à l'équilibre d'ici 2029 afin de garantir sa pérennité. Il conviendra également de prévoir le remboursement de la dette supplémentaire constituée dans l'intervalle, à un horizon suffisamment rapproché pour ne pas peser sur les générations suivantes.

Le retour à l'équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale à cet horizon requiert un effort supplémentaire de 17,9 milliards d'euros sur quatre ans, soit environ 4,5 milliards d'euros par an, par rapport à la trajectoire résultant de la présente loi et décrite ci-dessus.

En tenant compte des économies nécessaires pour respecter la trajectoire de l'Ondam prévue par le présent rapport, les économies annuelles nécessaires sont de près de 10 milliards d'euros.

IV. – Écarts à la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027

Les écarts entre les prévisions de dépenses des régimes de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement pour les années 2023 à 2027 figurant dans la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2023 à 2027 et celles décrites dans la présente annexe sont retracés dans le tableau suivant :

 

(en milliards d'euros)

Révisions des dépenses, régimes de base de sécurité sociale + FSV

2023

2024

2025

2026

2027

Dépenses prévues dans la LPFP 2023-2027* (1)

610,9

641,8

665,2

685,8

705,4

Dépenses prévues dans le présent rapport (2)

610,8

643,1

666,1

676,9

693,5

Écarts (2)-(1)

-0,1

1,3

0,9

-8,9

-12,0

* Au sens du I de l'article 18 de la LPFP. Le IV du même article prévoyait par ailleurs que des économies issues du dispositif de revue de dépenses, réparties entre les dépenses des administrations de sécurité sociale, représentent 6 milliards d'euros par an pour les années 2025 à 2027 venant, pour la part relevant des régimes de base de sécurité sociale, en minoration de la trajectoire de dépenses. Ces 6 milliards d'euros n'ont toutefois pas fait l'objet d'une ventilation précise entre régimes de base de sécurité sociale et autres sous-secteurs du champ des administrations de sécurité sociale au sens de la comptabilité nationale.

En 2025, l'essentiel de l'écart reflète le relèvement projeté des dépenses relevant de l'ONDAM (qui évoluerait de 3,6 % contre 2,9 % prévu par la LPFP avant ventilation des 6 milliards d'euros d'économies attendues du fait des revues de dépenses), qui s'élèvent à 3,4 milliards d'euros au-dessus du niveau prévu par la LPFP (hors recettes atténuatives, non prises en compte dans ces chiffrages).

Pour 2026, l'effet en base de cette hausse des dépenses serait atténué par un taux d'évolution de l'ONDAM pour 2026 fixé à + 1,6 %, auquel s'ajouterait un effet de périmètre de + 0,3 milliard d'euros (au titre principalement de l'expérimentation de la réforme du financement des EHPAD qui est entrée en vigueur au 1er juillet 2025). Au total, les dépenses sous ONDAM seraient supérieures de l'ordre de 1 milliard d'euros à celles sous-jacentes à la LPFP, hors-économies supplémentaires attendues des revues de dépenses. En revanche, le ralentissement de l'inflation observé en 2024 (+ 1,8 % observé en 2024 contre + 2,5 % prévu en LPFP) se poursuivrait les années suivantes (+ 1,0 % et + 1,3 % en 2025 et 2026 contre + 2,0 % et + 1,8 % respectivement dans la LPFP), soit en cumul une révision de -2,1 % de l'inflation sur la période 2024-2026, réduisant, via une revalorisation légale moindre des prestations, le niveau des dépenses de près de 8 milliards d'euros en 2027 par rapport à la LPFP. À cet effet s'ajouterait l'impact de la mesure de gel de l'ensemble des prestations en 2026, puis de la sous-indexation de 0,4 point des pensions de retraite pendant quatre ans à partir de 2027, réduisant les dépenses de 4,6 milliards d'euros supplémentaires en 2027. Les révisions des prestations « en volume » expliquent le reste des écarts.

En cumul, les écarts entre les prévisions de dépenses des régimes de base de sécurité sociale de la LPFP, avant ventilation des 6 milliards d'euros d'économies devant être réalisées du fait du dispositif de revues de dépenses, et celles décrites dans la présente annexe, s'élèvent à 2,0 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en 2025. Toutefois, cette tendance s'inverserait dès 2026, avec un écart cumulé de - 6,8 milliards d'euros sur cette année et de près de 20 milliards d'euros en 2027. En ventilant les 6 milliards d'euros d'économies attendues dans le champ des régimes de base de sécurité sociale au prorata de la part de chaque sous-secteur, l'écart serait de l'ordre de 7 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en 2015 par rapport à la LPFP, puis, en sens inverse, 1 milliard d'euros en 2026 et 15 milliards d'euros en 2027.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission souhaite rétablir l'article qui approuve le rapport annexé.

Nous tenions à inscrire la pluriannualité des données dans le rapport. En outre, nous indiquons bien les efforts que nous voulons faire sur la trajectoire du déficit de la sécurité sociale, pour le ramener à un montant plus raisonnable, même si nous désespérons de voir un jour des comptes positifs…

Le solde des régimes obligatoires de base de sécurité sociale a connu une dégradation sans précédent en 2020 – je ne vous apprendrai pas les chiffres – : la France en était à près de 40 milliards d'euros de déficit sous l'effet des dépenses occasionnées par la crise sanitaire et de la récession qui l'a suivie. Le solde s'est redressé ensuite. En 2021, le déficit était presque au niveau que nous connaissons actuellement, à plus de 24 milliards d'euros. En 2022, le solde atteignait –19 milliards d'euros à la faveur d'un recul important des dépenses liées à la covid-19, mais dans un contexte marqué par le début d'une forte reprise de l'inflation. Le recul s'est poursuivi en 2023, année au titre de laquelle le déficit s'est réduit à 10,8 milliards d'euros, notamment du fait de l'extinction des dépenses liées à la crise sanitaire.

En 2024, le déficit s'est à nouveau accru, à 15,3 milliards d'euros, en raison des effets asymétriques de l'inflation. Il augmentera encore en 2025 puisqu'il est prévu à 23 milliards d'euros, en raison de la poursuite de la diminution de l'inflation. En effet, celle-ci pourrait s'établir à 1 % cette année. Cette baisse contribuera au ralentissement de la masse salariale du secteur privé, déterminant macroéconomique majeur de l'évolution des recettes ; en parallèle, les dépenses devraient être encore tirées vers le haut par les effets de l'inflation de 2024, via les revalorisations légales des prestations sociales – les pensions de retraite sont principalement concernées, à +2,2 % – et les dépenses relevant du champ de l'Ondam, dynamiques. D'ici à 2029, en tenant compte de l'ensemble des mesures d'économies de la présente loi, le déficit atteindrait 17,9 milliards d'euros.

La commission souhaite que les efforts demandés soient indiqués explicitement. Je propose donc de tenir compte des mesures adoptées, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, au cours de la discussion parlementaire relative aux recettes et à l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'exercice 2026, sans anticiper les débats sur la troisième partie. Ceux-ci donneront lieu à une nouvelle actualisation.

En somme, le présent amendement vise à documenter les mesures qui sous-tendent la trajectoire de retour à l'équilibre en 2029 et à actualiser le montant du déficit prévisionnel pour cette même année.

M. le président. Le sous-amendement n° 1800 rectifié, présenté par M. Delcros, Mmes Antoine et Saint-Pé, M. Duffourg, Mmes Sollogoub et Billon, MM. P. Martin et Levi et Mme Gacquerre, est ainsi libellé :

Amendement 634

1° Alinéa 13, dernière phrase

Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :

La trajectoire de la branche vieillesse intègre également les effets des mesures d'accompagnement de la réforme et des hausses des taux des cotisations d'assurance vieillesse dues par les employeurs privés et par les employeurs territoriaux et hospitaliers (à hauteur, pour ces derniers, de 3 points par an en 2025, 2027 et 2028, soit l'équivalent 1,8 milliard d'euros sur chacune de ces années) ainsi que de l'affiliation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) de l'ensemble des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers à temps non complet à compter de 2026. De même, la trajectoire de la branche intègre les effets de la prise en charge par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), à compter de 2026, des dépenses correspondant à la majoration de pension pour enfants versée par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), ainsi que la compensation par la CNAV à la CNRACL, à compter de 2026, du coût lié à la mise en œuvre de la garantie de pension minimale d'invalidité, et la prise en charge par la CNAV, à compter de 2026, des trimestres partiellement cotisés au titre du congé maladie, congé de longue maladie ou de longue durée des affiliés à la CNRACL.

2° Alinéa 19

Rédiger ainsi cet alinéa :

Le solde global pour l'année 2026 atteindrait - 17,4 milliards d'euros, en amélioration de 5,6 milliards d'euros par rapport à 2025 sous l'effet de la légère augmentation attendue de l'inflation (+ 1,3 % après + 1,0 % en 2025), dont l'impact serait positif sur la dynamique de la masse salariale (+ 2,3 % après + 1,8 % en 2025) et des recettes. Celles-ci croîtraient de 2,5 %, soutenues par la hausse de la masse salariale du secteur privé et par les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale et de la loi de finances : une rationalisation des niches sociales applicables aux compléments de salaires pour un rendement de 1 milliard d'euros nets, une participation des organismes complémentaires de 1,0 milliard d'euros et le transfert par l'État à la sécurité sociale du rendement de la fiscalisation des indemnités journalières versées en cas de maladie au titre des affections de longue durée. De même, dès 2026, devraient être pris en compte l'affiliation à la CNRACL de l'ensemble des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers à temps non complet, la prise en charge par la CNAF des dépenses correspondant à la majoration de pension pour enfants versée par la CNRACL ainsi que la compensation par la CNAV à la CNRACL du coût lié à la mise en œuvre de la garantie de pension minimale d'invalidité et de la prise en charge des trimestres partiellement cotisés au titre du congé maladie, congé de longue maladie ou de longue durée des affiliés à la CNRACL). En regard, les dépenses globales progresseraient à un rythme modéré (évolution de + 1,6 %) sous l'effet notamment de la mesure de gel de l'ensemble des prestations et des pensions de retraite prévue par la présente de loi et de la modération de la progression des dépenses d'assurance maladie puisque l'ONDAM progresserait de 1,6 %, après 3,6 % en 2025. La hausse des dépenses des régimes obligatoires en 2026 représenterait toutefois 10,8 milliards d'euros, dont 5,2 milliards au titre des dépenses maladie.

3° Alinéa 25

Rédiger ainsi cet alinéa :

En 2026, le solde de la branche vieillesse est directement affecté par l'augmentation de la taille des générations qui partent à la retraite. De même, elle est affectée par l'affiliation à la CNRACL, à compter de 2026, de l'ensemble des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers à temps non complet, par la prise en charge par la CNAF en 2026 des dépenses correspondant à la majoration de pension pour enfants versée par la CNRACL, par la compensation par la CNAV à la CNRACL, à compter de 2026, du coût lié à la mise en œuvre de la garantie de pension minimale d'invalidité, et par la prise en charge par la CNAV, à compter de 2026, des trimestres partiellement cotisés au titre du congé maladie, congé de longue maladie ou de longue durée des affiliés à la CNRACL. Le solde de la branche vieillesse bénéficiera en revanche de la hausse progressive de l'âge effectif de départ prévue dans la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 et s'avère d'autre part particulièrement sensible aux évolutions de l'inflation, connaitrait une première étape dans sa trajectoire de retour à l'équilibre avec une amélioration de son solde (- 3,0 milliards d'euros en 2026 après – 4,5 milliards d'euros en 2024 et 5,8 milliards d'euros en 2025), sous l'effet du gel, poursuivi les années suivantes par une sous indexation, de l'ensemble des pensions de retraites de base.

La parole est à Mme Nadia Sollogoub.

Mme Nadia Sollogoub. Ce sous-amendement d'appel de notre collègue Bernard Delcros vise à inciter le Gouvernement à mettre en œuvre quatre recommandations du rapport d'information de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale sur le financement de la CNRACL.

Premièrement, il s'agirait de transférer à la Cnaf la charge financière que représente pour la CNRACL le financement d'un avantage non contributif : la majoration pour enfants.

Deuxièmement, le sous-amendement a pour objet l'affiliation à la CNRACL de l'ensemble des agents territoriaux, y compris ceux dont le contrat comporte moins de vingt-huit heures de travail hebdomadaires et qui sont affiliés actuellement au régime général d'assurance vieillesse et à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (Ircantec).

Troisièmement, la Cnav prendrait en charge le financement de l'avantage non contributif qu'est le financement direct des prestations légales d'invalidité.

Quatrièmement, l'augmentation de trois points de cotisation à la charge des employeurs territoriaux et hospitaliers, prévue pour 2026, serait reportée en 2027. En effet, elle mettrait en péril leur équilibre financier.

De portée non contraignante, le présent sous-amendement ne crée ni n'aggrave aucune charge publique.

M. le président. Le sous-amendement n° 1124 rectifié bis, présenté par MM. Montaugé et Jomier, Mme Féret, M. Ros, Mme Espagnac, MM. Redon-Sarrazy, Pla et Bourgi, Mmes Poumirol et Artigalas, M. Omar Oili, Mme Conway-Mouret, MM. Michau, Bouad, Tissot et Mérillou et Mmes Bélim et Monier, est ainsi libellé :

Amendement n° 634, alinéa 15

Après le mot : 

financer

insérer les mots : 

la mise en œuvre de prestations de suppléance à domicile du proche aidant dans le cadre de séjours dits de répit aidant-aidé et

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Ce sous-amendement déposé par notre collègue Franck Montaugé a pour objet les séjours de répit aidants-aidés.

Nous savons l'importance des aidants dans les familles qui comprennent des personnes soit en situation de handicap, soit en perte d'autonomie, et le rôle majeur qu'ils jouent au quotidien, souvent vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Nous avons tout à fait conscience de la nécessité de mettre en place des solutions de répit leur permettant de « souffler », car c'est une condition extrêmement exténuante tout au long de l'année.

Ces solutions restent insuffisantes, en particulier dans les territoires ruraux où les familles ont peu de relais. La loi du 15 novembre 2024 a permis de poser un cadre, mais sa mise en œuvre dépend de la visibilité financière donnée aux dispositifs de suppléance à domicile. En effet, ceux-ci permettent les séjours aidants-aidés, car ils assurent un accueil des deux personnes en même temps.

Il est précisé dans l'objet de ce sous-amendement que ces prestations doivent être intégrées explicitement à la programmation de la branche autonomie. Cela permettra aux opérateurs et aux départements de mettre en place des solutions de répit de façon pérenne. Franck Montaugé tenait à citer l'établissement de répit partagé de Saint-Blancard dans le Gers, qu'il salue. J'ajoute qu'un projet verra bientôt le jour dans les Landes et un autre dans le Calvados.

L'objet de ce sous-amendement est donc de rendre effectif un droit qui répond à un besoin très concret et d'éviter que ces dispositifs ne soient fragilisés, faute d'inscription explicite dans la trajectoire financière.

M. le président. Les deux sous-amendements suivants sont identiques.

Le sous-amendement n° 1551 rectifié est présenté par Mmes Paoli-Gagin et Bourcier, MM. Brault, Capus, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, V. Louault et Wattebled.

Le sous-amendement n° 1803 rectifié bis est présenté par Mmes Perrot, Antoine, Jacquemet, Sollogoub et Saint-Pé et M. Pillefer.

Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :

Amendement n° 634, alinéa 16, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Bien qu'ils aient augmenté, les concours aux départements ne couvrent pas la moitié des dépenses engagées par ces collectivités au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie et de la prestation de compensation du handicap, qui sont très dynamiques ; le reste à charge des départements est d'environ 3,76 milliards pour l'allocation personnalisée d'autonomie et d'environ 2 milliards pour la prestation de compensation du handicap.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter le sous-amendement n° 1551 rectifié.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement de Mme Paoli-Gagin a pour objet les concours de la CNSA en direction des départements. Ils sont en hausse, mais les dépenses consacrées à l'APA et à la PCH ont augmenté plus encore, de telle sorte que le reste à charge de ces collectivités reste très élevé.

Dans le détail, le taux de compensation de la PCH est passé de 39 % à 30 % entre 2012 et 2023 ; pour l'APA, il est passé de 31 % à 40 %, mais pour des dépenses beaucoup plus importantes du fait du vieillissement de la population.

C'est pourquoi le présent amendement vise à rappeler que la politique d'autonomie doit reposer sur un partage entre la branche concernée et les départements. L'objectif est d'arriver à des concours homogénéisés de la CNSA à 50 %, soit une répartition par moitié des dépenses entre, d'une part, l'État et la sécurité sociale, d'autre part, les départements, sur les concours historiques APA-PCH. L'avenir de ces dépenses de solidarité suscite l'inquiétude en l'absence d'une trajectoire de financement partagé.

M. le président. La parole est à M. Bernard Pillefer, pour présenter le sous-amendement n° 1803 rectifié bis.

M. Bernard Pillefer. Ce sous-amendement de Mme Perrot vient d'être remarquablement défendu par M. Chasseing, les termes étant les mêmes.

M. le président. Les deux sous-amendements suivants sont identiques.

Le sous-amendement n° 1552 rectifié est présenté par Mmes Paoli-Gagin et Bourcier, MM. Brault, Capus, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, V. Louault et Wattebled.

Le sous-amendement n° 1804 rectifié ter est présenté par Mmes Perrot, Antoine et Jacquemet, M. Pillefer et Mmes Sollogoub, Saint-Pé et Bourguignon.

Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :

Amendement n° 634, alinéa 16

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La trajectoire de la branche intègre également, à hauteur de 100 millions d'euros, le soutien financier annuel à la mobilité des aides à domicile prévu par la loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l'autonomie.

La parole est à M. Jean-Luc Brault, pour présenter le sous-amendement n° 1552 rectifié.

M. Jean-Luc Brault. Conformément à l'article 20 de la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l'autonomie, dite loi Bien Vieillir, cet amendement vise à mentionner explicitement, dans le rapport annexé, l'aide financière de la CNSA à destination des départements pour soutenir la mobilité des professionnels de l'aide à domicile.

L'enveloppe de 100 millions d'euros prévue en 2025 doit être reconduite, s'agissant d'une aide financière qu'il convient de renouveler annuellement, selon la volonté du législateur.

M. le président. La parole est à M. Bernard Pillefer, pour présenter le sous-amendement n° 1804 rectifié ter.

M. le président. Les trois sous-amendements suivants sont identiques.

Le sous-amendement n° 801 rectifié bis est présenté par Mmes M. Carrère et Pantel, MM. Roux, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset et Mme Girardin.

Le sous-amendement n° 1123 rectifié bis est présenté par M. Montaugé, Mme Espagnac, MM. Redon-Sarrazy, Pla et Bourgi, Mmes Poumirol et Artigalas, M. Omar Oili, Mme Conway-Mouret, MM. Michau, Bouad, Tissot et Mérillou et Mmes Bélim et Monier.

Le sous-amendement n° 1810 rectifié bis est présenté par M. J.M. Boyer, Mmes Ventalon et Imbert, MM. Malhuret et Anglars, Mmes Puissat et Borchio Fontimp, MM. Rietmann et C. Vial, Mmes Chain-Larché et N. Goulet, MM. Sautarel, Chaize et Sol, Mme Schalck, M. Médevielle, Mme P. Martin, MM. A. Marc, Michallet et Sido, Mme M. Mercier, M. Kern, Mme Sollogoub, MM. Rojouan, Genet, Séné et Grosperrin, Mmes Gosselin, Bellamy et Dumont, MM. Bitz et Houpert, Mmes Berthet et Belrhiti, M. Belin, Mme Valente Le Hir, M. Brisson, Mme Joseph et MM. D. Laurent, Hingray et Levi.

Ces trois sous-amendements sont ainsi libellés :

Amendement n° 634, après l'alinéa 22

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Ainsi, face au vieillissement de la population et à la progression des maladies chroniques, le recours à des approches non pharmacologiques, telles que les cures thermales, apparaît comme un levier complémentaire d'action en santé publique. Encadré par le code de la santé publique, le thermalisme propose une prise en charge pluridisciplinaire s'inscrivant dans une logique de prévention et d'autonomisation du patient. Documentée par de nombreuses études cliniques, son efficacité se traduit par une meilleure gestion des maladies chroniques, une réduction du recours aux soins de ville et hospitaliers et une contribution à la maîtrise des dépenses de santé.

La parole est à M. Michel Masset, pour présenter le sous-amendement n° 801 rectifié bis.

M. Michel Masset. Ce sous-amendement est très cher à la présidente de mon groupe, Maryse Carrère.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Pas seulement !

M. Michel Masset. Face au vieillissement de notre population et à la progression des maladies chroniques, la médecine thermale constitue un levier complémentaire efficace de prévention et de soins.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Tout à fait !

M. Michel Masset. En 2023, la consommation de soins et de biens médicaux liée aux cures s'est élevée à 350 millions d'euros. La sécurité sociale n'a consacré que 233 millions d'euros à leur remboursement, soit seulement 0,1 % de ses dépenses.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. En plus, ça rapporte !

M. Michel Masset. Pour un coût très limité, ce dispositif pluridisciplinaire améliore la gestion des maladies chroniques, réduit le recours aux soins et responsabilise les patients, dont le reste à charge est significatif. En effet, le remboursement couvre 70 % de la surveillance médicale et 65 % des soins thermaux.

Reconnu dans de nombreux pays européens, le thermalisme bénéficie chaque année à près de 500 000 patients et soutient les territoires ruraux, où se trouvent 70 % des stations. Ce sous-amendement vise donc à garantir le maintien du taux de prise en charge de la médecine thermale.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter le sous-amendement n° 1123 rectifié bis.

Mme Frédérique Espagnac. Le thermalisme apporte des bénéfices documentés aux patients atteints de pathologies chroniques et contribue, dans plusieurs départements ruraux, à l'attractivité de l'offre de soins. La baisse du remboursement des cures enverrait un signal de retrait alors que ces soins représentent dans les faits un levier reconnu de prévention.

Ce sous-amendement vise à inscrire ce secteur dans la programmation pluriannuelle. Nous ne créons aucune charge, mais clarifions l'orientation et donnons de la visibilité aux acteurs du thermalisme et aux collectivités qui les soutiennent. En somme, c'est une mise en cohérence entre les besoins de santé publique et la trajectoire affichée dans le PLFSS.

M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour présenter le sous-amendement n° 1810 rectifié bis.

M. Jean Sol. Je m'associe à ce que viennent d'exprimer mes collègues et compléterai leurs propos sur le déremboursement prévu pour le thermalisme.

Si des pistes d'amélioration du modèle économique des cures peuvent être trouvées et mises en discussion, réduire ou supprimer le remboursement serait une décision lourde de conséquences, économiquement inefficace, socialement injuste et politiquement risquée. Le déremboursement, comme vous le savez, fragiliserait de nombreux équilibres territoriaux dans bon nombre de nos départements.

Faut-il rappeler que l'établissement thermal constitue l'un des premiers employeurs locaux et assure la vitalité du tissu économique, en particulier dans nos territoires ruraux ? Bon nombre de ces structures se trouvent dans des communes de moins de 10 000 habitants.

M. le président. L'amendement n° 1874, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Est approuvé le rapport figurant en annexe à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2026 à 2029), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

 

ANNEXE

 

RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES PAR BRANCHE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE DE SÉCURITÉ SOCIALE, AINSI QUE L'OBJECTIF NATIONAL DES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE POUR LES ANNÉES 2026 A 2029

Le solde des régimes obligatoires de base de sécurité sociale a connu une dégradation sans précédent en 2020 et a atteint le niveau de – 39,7 milliards d'euros sous l'effet des dépenses occasionnées par la crise sanitaire et de la récession qui l'a suivie. Il s'est redressé en 2021 à – 24,3 milliards d'euros en raison de la reprise progressive de l'activité. L'amélioration s'est poursuivie en 2022, le solde atteignant alors – 19,7 milliards d'euros, à la faveur d'un recul important des dépenses liées à la Covid19 mais dans un contexte marqué par le début d'une forte reprise de l'inflation, puis de nouveau en 2023, année au titre de laquelle le déficit s'est réduit à 10,8 milliards d'euros, avec notamment l'extinction des dépenses liées à la crise sanitaire. Le déficit s'est ensuite de nouveau accru en 2024 (15,3 milliards d'euros) en raison des effets asymétriques de l'inflation : les prestations légales ont ainsi été revalorisées en lien avec l'inflation encore élevée de l'année précédente (4,8 % en 2023 au sens de l'indice des prix à la consommation hors tabac en moyenne annuelle), les dépenses nettes relevant du champ de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ayant pour leur part progressé de 3,5 %, tandis que les recettes répondaient de manière contemporaine à l'inflation, qui a reflué à 1,8 % en 2024.

Le déficit s'accroitra de nouveau en 2025 (23,0 milliards d'euros selon les prévisions actualisées figurant dans la présente loi), en raison de la poursuite de la diminution de l'inflation, qui pourrait s'établir à 1,0 % en 2025, contribuant au ralentissement de la masse salariale du secteur privé (+ 1,8 %), déterminant macroéconomique majeur de l'évolution des recettes, tandis que les dépenses devraient être encore tirées vers le haut par les effets de l'inflation passée de 2024 via les revalorisations légales des prestations sociales, principalement en ce qui concerne les pensions de retraite (+ 2,2 %), et des dépenses relevant du champ de l'ONDAM dynamiques.

L'Ondam pour 2026 est augmenté d'un milliard d'euros par rapport à l'objectif du PLFSS initial, se traduisant par une évolution de 2,0 % par rapport à 2025.

Le déficit s'établirait à 17,5 milliards d'euros en 2026, en tenant compte de l'effet du transfert à l'État de la charge de la compensation de 2,5 Md € d'exonérations dont le coût reposait jusqu'en 2025 sur la sécurité sociale.

D'ici 2029, le déficit atteindrait 21,7 milliards d'euros : la progression des dépenses resterait tendanciellement forte malgré la montée en charge des mesures d'économies passées tandis que celle des recettes ne suffirait pas à stabiliser le déficit. La branche maladie concentrerait l'essentiel du déficit à moyen terme, notamment du fait de la progression structurelle de ses dépenses.

I.– La loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 s'inscrit dans un contexte macroéconomique de faible croissance et de faible inflation

L'hypothèse de croissance du produit intérieur brut (PIB) retenue pour 2026 est de 1,0 %, après une évolution de 0,7 % en 2025. À moyen terme, la croissance réelle du PIB atteindrait 1,3 % par an en 2028 et 2029. L'inflation serait faible en 2025 (1,0 % au sens de l'indice des prix à la consommation hors tabac en moyenne annuelle) et augmenterait légèrement en 2026 (1,3 %) pour se stabiliser à 1,75 % à compter de 2027. La masse salariale du secteur privé progresserait de 1,8 % en 2025 et de 2,3 % en 2026, puis continuerait d'accélérer pour atteindre 3,2 % en 2029.

Le tableau ci-dessous détaille les principales hypothèses d'évolutions retenues pour l'élaboration des prévisions de recettes et des objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe :

 

 

2024

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

PIB en volume

1,1 %

0,7 %

1,0 %

1,2 %

1,3 %

1,3 %

Masse salariale du secteur privé *

3,3 %

1,8 %

2,3 %

3,0 %

3,1 %

3,2 %

Inflation hors tabac

1,8 %

1,0 %

1,3 %

1,75 %

1,75 %

1,75 %

ONDAM**

3,3 %

3,6 %

2,0 %

2,9 %

2,9 %

2,9 %

* Masse salariale du secteur privé hors prime exceptionnelle de pouvoir d'achat et prime de partage de la valeur ajoutée. En incluant ces éléments de rémunération, la progression de la masse salariale s'est élevée à 2,8 % en 2024. En 2025, la prime de partage de la valeur ajoutée se stabiliserait à un niveau proche de son niveau de 2024, malgré son assujettissement à certains prélèvements sociaux, si bien qu'il n'y a pas de déformation attendue à ce titre.

** Evolution de l'ONDAM, y compris dépenses de crise sanitaire. Sans prise en compte de ces dépenses, l'évolution de l'ONDAM est de 3,5 % en 2024.

 

II.– Prévisions des recettes, dépenses et soldes des régimes de base et du FSV

Recettes, dépenses et soldes de l'ensemble des régimes obligatoires de base (en milliards d'euros)

(en milliards d'euros)

 

2024

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

Maladie

Recettes

239,2

245,1

254,7

261,2

268,0

275,0

Dépenses

253,0

262,3

268,6

276,4

284,5

292,7

Solde

- 13,8

-17,2

-13,9

-15,2

-16,5

-17,7

Accidents du travail et maladies professionnelles

Recettes

16,9

16,9

17,2

17,7

18,1

18,7

Dépenses

16,3

17,5

18,1

19,0

19,4

19,6

Solde

0,7

-0,5

-0,9

-1,4

-1,2

-0,9

Famille

Recettes

58,9

60,2

60,4

62,1

63,2

64,3

Dépenses

57,8

59,3

59,7

60,3

61,1

62,0

Solde

1,1

0,8

0,7

1,8

2,1

2,3

Vieillesse

Recettes

288,2

297,0

308,7

316,3

325,1

332,5

Dépenses

293,8

303,4

310,5

318,8

327,6

336,5

Solde

- 5,6

-6,3

-1,8

-2,5

-2,5

-4,0

Autonomie

Recettes

41,2

41,7

42,0

43,7

45,6

47,5

Dépenses

39,9

42,0

43,5

45,2

47,0

48,8

Solde

1,3

-0,3

-1,5

-1,5

-1,5

-1,4

Régimes obligatoires de base de sécurité sociale consolidés

Recettes

626,4

642,3

663,9

681,2

699,9

717,4

Dépenses

642,8

665,8

681,4

700,1

719,5

739,1

Solde

- 16,4

-23,5

-17,5

-18,9

-19,6

-21,7

 

Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse

(en milliards d'euros)

 

2024

2025

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

Recettes

21,6

22,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Dépenses

20,5

21,5

0,0

0,0

0,0

0,0

Solde

1,1

0,5

0,0

0,0

0,0

0,0

 

Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse

(en milliards d'euros)

 

2024

2025

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

2029 (p)

Recettes

627,8

643,1

663,9

681,2

699,9

717,4

Dépenses

643,1

666,1

681,4

700,1

719,5

739,1

Solde

- 15,3

-23,0

-17,5

-18,9

-19,6

-21,7

 

III.– D'ici 2029, des efforts supplémentaires conséquents seront à mettre en œuvre pour revenir à l'équilibre.

Les comptes de la Sécurité sociale devront être ramenés à l'équilibre d'ici 2029 afin de garantir sa pérennité. Il conviendra également de prévoir le remboursement de la dette supplémentaire constituée dans l'intervalle, à un horizon suffisamment rapproché pour ne pas peser sur les générations suivantes.

Le retour à l'équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale à cet horizon requiert un effort supplémentaire de 24,2 milliards d'euros sur trois ans, soit environ 8 milliards d'euros par an, par rapport à la trajectoire résultant de la présente loi et décrite ci-dessus.

En tenant compte des économies nécessaires pour respecter la trajectoire de l'Ondam prévue par le présent rapport, les économies nécessaires sont de 37 milliards d'euros à horizon 2029.

IV.– Écarts à la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027

Les écarts entre les prévisions de dépenses des régimes de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement pour les années 2023 à 2027 figurant dans la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2023 à 2027 et celles décrites dans la présente annexe sont retracés dans le tableau suivant :

 

(En euros)

 Révisions des dépenses, régimes de base de sécurité sociale + FSV

2023

2024

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

Dépenses prévues dans la LPFP 2023-2027* (1)

610,9

641,8

665,2

685,8

705,4

Dépenses prévues dans le présent rapport (2)

610,8

643,1

666,1

681,4

700,1

Écarts (2)-(1)

-0,1

1,3

0,9

-4,4

-5,3

 

* Au sens du I de l'article 18 de la LPFP. Le IV du même article prévoyait par ailleurs que des économies issues du dispositif de revue de dépenses, réparties entre les dépenses des administrations de sécurité sociale, représentent 6 milliards d'euros par an pour les années 2025 à 2027 venant, pour la part relevant des régimes de base de sécurité sociale, en minoration de la trajectoire de dépenses. Ces 6 milliards d'euros n'ont toutefois pas fait l'objet d'une ventilation précise entre régimes de base de sécurité sociale et autres sous-secteurs du champ des administrations de sécurité sociale au sens de la comptabilité nationale.

 

En 2025, l'essentiel de l'écart reflète le relèvement projeté des dépenses relevant de l'ONDAM (qui évoluerait de 3,6 % contre 2,9 % prévu par la LPFP avant ventilation des 6 milliards d'euros d'économies attendues du fait des revues de dépenses), qui s'élèvent à 3,4 milliards d'euros au-dessus du niveau prévu par la LPFP (hors recettes atténuatives, non prises en compte dans ces chiffrages).

Pour 2026, l'effet en base de cette hausse des dépenses serait atténué par un taux d'évolution de l'ONDAM pour 2026 fixé à + 2,0 %, auquel s'ajouterait un effet de périmètre de + 0,3 milliard d'euros (au titre principalement de l'expérimentation de la réforme du financement des EHPAD qui est entrée en vigueur au 1er juillet 2025). En revanche, le ralentissement de l'inflation observé en 2024 (+ 1,8 % observé en 2024 contre + 2,5 % prévu en LPFP) se poursuivrait les années suivantes (+ 1,0 % et + 1,3 % en 2025 et 2026 contre + 2,0 % et + 1,8 % respectivement dans la LPFP), soit en cumul une révision de 2,1 % de l'inflation sur la période 2024-2026, réduisant, via une revalorisation légale moindre des prestations, le niveau des dépenses de près de 8 milliards d'euros en 2027 par rapport à la LPFP. La suspension de la réforme des retraites de 2023 et les révisions des prestations « en volume » expliquent le reste des écarts.

En cumul, les écarts entre les prévisions de dépenses des régimes de base de sécurité sociale de la LPFP, avant ventilation des 6 milliards d'euros d'économies devant être réalisées du fait du dispositif de revues de dépenses, et celles décrites dans la présente annexe, s'élèvent à 2,0 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en 2025. Toutefois, cette tendance s'inverserait dès 2026, avec un écart cumulé de -2,3 milliards d'euros sur cette année et de -7,6 milliards d'euros en 2027. En ventilant les 6 milliards d'euros d'économies attendues dans le champ des régimes de base de sécurité sociale au prorata de la part de chaque sous-secteur, l'écart serait de l'ordre de 8 milliards d'euros en 2026 et 14 milliards d'euros en 2027.

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Cet amendement vise, comme celui du Gouvernement à l'article 14, à assurer une première coordination des votes intervenus depuis le début de l'examen du PLFSS par la Haute Assemblée.

Je ne reviens pas sur le déficit pour 2026 puisque la modification des chiffres a été présentée à l'occasion de l'examen de l'article 14. La méthode et les mesures intégrées sont ici les mêmes.

En revanche, je me permets de vous signaler que, pour 2029, le solde initialement prévu était de 18,3 milliards d'euros. Le solde issu des travaux à l'Assemblée nationale était dégradé d'environ 10 milliards d'euros, pour s'établir à 28 milliards d'euros. Celui qui est issu des travaux du Sénat, à ce stade, est de 21,7 milliards d'euros, soit une dégradation de 3,4 milliards d'euros par rapport à la trajectoire initiale.

Comme pour l'amendement adopté à l'article 14, il s'agit d'un ajustement provisoire. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette trajectoire pluriannuelle du financement de la sécurité sociale, qui pourra être détaillée de nouveau à la fin de l'examen du projet de loi.

Sur un plan technique, comptable, et compte tenu de cette actualisation, je demande à Mme la rapporteure générale de bien vouloir retirer l'amendement de la commission n° 634 : les chiffres qui y sont présentés ne prennent pas en compte les derniers amendements adoptés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Comme je le disais tout à l'heure, le rapport annexé est un texte important : il s'agit, en l'espèce, du tableau retraçant les prévisions d'évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale.

Nous souhaitions avant tout y inscrire notre intention de ramener les prévisions de déficit sur une meilleure trajectoire de réduction. Ce que vous proposez, mes chers collègues, dans différents domaines, par vos sous-amendements, ce sont des insertions particulières de dispositions et de références.

Le sous-amendement n° 1800 rectifié vise à inclure dans le rapport annexé diverses recommandations du rapport d'information de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale sur le financement de la CNRACL. Il s'agit, de l'aveu même de ses auteurs, d'un « sous-amendement d'appel » dont l'objet est d'« inciter le Gouvernement » à mettre en œuvre ces recommandations. Nous attendons donc les commentaires de Mme la ministre à cet égard.

Toutefois, il résulte de l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale que le rapport annexé ne doit pas être une liste de souhaits ; nous le redisons tous les ans, car tous les ans la tentation de chacun est d'inscrire toutes ses préoccupations dans ce rapport. Bien que nous adhérions à ces préoccupations – là n'est pas le sujet –, l'avis de la commission est défavorable sur ce sous-amendement.

Le sous-amendement n° 1124 rectifié bis vise à inclure dans le rapport annexé une référence à la mise en œuvre de prestations de suppléance à domicile du proche aidant dans le cadre de séjours dits de « répit aidant-aidé ». Selon les auteurs de l'amendement, il s'agit d'une simple précision sans effet sur la trajectoire de solde. Toutefois, derechef, il résulte de l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale que le rapport annexé doit être non pas une liste de souhaits, mais une prévision à moyen terme, c'est-à-dire un ensemble de tableaux assortis de leurs commentaires explicatifs. Si un amendement ne modifie pas la trajectoire ou ne précise pas les hypothèses retenues pour la déterminer, il n'a pas sa place dans le rapport annexé : avis défavorable.

Sur les sous-amendements identiques nos 1551 rectifié et 1803 rectifié bis, là encore, l'avis de la commission est défavorable. Il est proposé d'inclure dans le rapport annexé, cette fois, l'indication factuelle selon laquelle les concours aux départements ne couvrent pas la moitié des dépenses engagées par ces collectivités au titre de l'APA et de la PCH. L'argument est toujours le même : une telle indication n'a pas vocation à figurer dans le rapport annexé, car elle est sans effet sur la trajectoire financière pluriannuelle.

Sur les sous-amendements identiques nos 1552 rectifié et 1804 rectifié ter, nous sollicitons l'avis du Gouvernement. Leurs auteurs proposent de préciser que la trajectoire de la branche autonomie – on voit qu'il s'agit bien, cette fois, d'une précision sur la trajectoire – intègre, à hauteur de 100 millions d'euros, le soutien financier annuel à la mobilité des aides à domicile. Il ne me semble pas évident que le Gouvernement ait construit sa projection en incluant cette hypothèse ; nous allons par conséquent écouter sa réponse.

Les sous-amendements identiques nos 801 rectifié bis, 1123 rectifié bis et 1810 rectifié bis traitent du thermalisme – nous aurons sans doute l'occasion de débattre de ce sujet dans les prochains jours. Je comprends bien la préoccupation de nos collègues ; toutefois, là encore, l'alinéa qu'il est proposé d'insérer dans le rapport annexé n'a pas d'effet direct sur les trajectoires financières de la sécurité sociale : avis défavorable.

Sur l'amendement n° 1874 du Gouvernement, enfin, l'avis de la commission est favorable. Monsieur le ministre, vous me demandez de bien vouloir retirer mon amendement : j'y consens, car nous avons eu la confirmation que vous vous inscriviez dans une démarche de retour progressif à l'équilibre budgétaire, et en tout cas dans une trajectoire faite de déficits un peu moins élevés que ceux que nous avons enregistrés ces dernières années.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je demande le retrait de ces différents sous-amendements ; à défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable : ces propositions n'ont pas leur place, me semble-t-il, dans le rapport annexé.

Les débats soulevés méritent toutefois quelques mots de réponse.

M. Delcros propose, par son sous-amendement n° 1800 rectifié, d'inclure dans la trajectoire financière pluriannuelle de la sécurité sociale la mise en œuvre des recommandations de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur le financement de la CNRACL.

Or le Gouvernement n'avait pas jugé opportun de mettre en œuvre ces recommandations, pour diverses raisons.

Le déficit de la CNRACL s'établira en 2026, vous le savez, à 1,8 milliard d'euros ; en montant cumulé, il s'élèvera à 13,9 milliards d'euros. Les recettes supplémentaires espérées de la prise en charge par d'autres caisses du financement des avantages non contributifs que sont la majoration pour enfants et les prestations légales d'invalidité sont insuffisantes pour avoir un réel effet sur la réduction de ce déficit. Ces transferts auraient par ailleurs pour conséquence de dégrader les soldes de la Cnaf et de la Cnav, donc le déficit du régime général, qui est porté par l'Acoss. Or la CNRACL finance également son déficit via l'emprunt auprès de l'Acoss. Ainsi, ce que l'Acoss n'aurait pas à prêter à la CNRACL, elle devrait l'emprunter pour financer les déficits de la Cnaf et de la Cnav.

En ce qui concerne l'affiliation à la CNRACL de l'ensemble des agents territoriaux, autre mesure inscrite dans ce sous-amendement, elle aurait pour effet de renchérir les cotisations dues par les employeurs sur les traitements de cette population et d'affilier au régime des agents non titulaires qui n'ont pas vocation à cotiser toute leur carrière au régime spécial.

Enfin, le sous-amendement de M. Delcros a pour objet d'intégrer dans la trajectoire financière de la branche vieillesse un report d'une année de la hausse du taux de cotisation employeur vieillesse. Or cette augmentation du taux des cotisations patronales est nécessaire pour maintenir la soutenabilité du régime de retraite et garantir le versement des pensions.

Le sous-amendement n° 1124 rectifié bis traite du baluchonnage, c'est-à-dire des prestations de suppléance à domicile des proches aidants. Comme vous, madame Poumirol, je suis convaincue de l'intérêt de ce dispositif. Un financement est prévu, à hauteur de 75 millions d'euros. Je rappelle que le baluchonnage relève principalement de prestations individuelles à domicile qui sont d'ores et déjà financées par les départements via la prestation de compensation du handicap ou l'APA. Pour cette raison, l'inscription de ce financement dans la trajectoire de la branche n'apparaît pas opportune.

Les sous-amendements nos 1551 rectifié et 1803 rectifié bis concernent les dépenses des départements couvertes par les concours de la CNSA. Ces dépenses sont dynamiques, ce qui induit un reste à charge : les auteurs de ces amendements souhaitent le préciser dans l'annexe ; cela ne me semble pas opportun. Nous avons déjà eu ce débat sur le taux de compensation, qui, pour 2026, sera en moyenne de 43 % pour les dépenses de PCH et d'APA et atteindra même 49 % pour la seule PCH.

Les sous-amendements identiques nos 1552 rectifié et 1804 rectifié ter traitent du soutien financier annuel de 100 millions d'euros à la mobilité des aides à domicile. Le fonds dédié est doté de 75 millions d'euros en 2025 et nous accompagnons les départements de manière pérenne pour qu'ils puissent l'utiliser davantage : il reste une marge non consommée. Par conséquent, il ne nous semble pas logique de porter ce fonds à 100 millions d'euros, alors que 75 millions suffisent à ce stade. Nous verrons si les collectivités s'en saisissent davantage en 2026, donc s'il y a lieu d'accroître ce soutien financier dans le PLFSS pour 2027.

J'en viens enfin aux sous-amendements relatifs au thermalisme.

Vous le savez, dans ce projet de budget de la sécurité sociale figure la possibilité pour le Gouvernement, qui en a la volonté, de procéder à une baisse réglementaire du taux de remboursement des cures thermales. Il ne s'agit pas là de dérembourser ces prestations, mais de diminuer la part prise en charge par l'assurance maladie dans leur remboursement. Cette mesure est notamment issue de rapports du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) et de la Cour des comptes qui évaluent ces dépenses à 270 millions d'euros pour l'assurance maladie en 2023.

Nous sommes l'un des derniers pays à rembourser les cures thermales ; et je ne doute pas que nous aurons ce débat. Comme j'ai pu l'indiquer à plusieurs reprises, cette mesure, qui induirait une amélioration du solde de l'ordre de 200 millions d'euros, sera examinée à l'issue de chaque lecture du PLFSS. Alors nous verrons, en fonction de la baisse du déficit de la sécurité sociale qui aura été obtenue, ce que nous pouvons faire.

En attendant, et en raison notamment de ces rapports, le Gouvernement est très attaché à la possibilité de diminuer le taux de remboursement des cures thermales.

M. le président. Madame la rapporteure générale, confirmez-vous le retrait de votre amendement n° 634 ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Oui, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 634 est retiré.

En conséquence, les sous-amendements nos 1800 rectifié et 1124 rectifié bis, les sous-amendements identiques nos 1551 rectifié et 1803 rectifié bis, les sous-amendements identiques nos 1552 rectifié et 1804 rectifié ter et les sous-amendements identiques nos 801 rectifié bis, 1123 rectifié bis et 1810 rectifié bis n'ont plus d'objet.

La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote sur l'amendement n° 1874.

Mme Marion Canalès. Je veux d'ores et déjà dire un mot du thermalisme, même si notre groupe a également déposé un amendement à l'article 49 et que nous aurons l'occasion, comme l'a dit Mme Doineau, d'en rediscuter.

L'hypothèse de la baisse du remboursement, madame la ministre, a ému bien au-delà des parlementaires : elle a ému non seulement une profession entière, non seulement des maires, mais aussi des patients. J'entends bien quelles sont les conclusions du rapport de la Cour des comptes : nous l'avons tous lu. Cela étant, nous avons également lu les publications de l'Association française pour la recherche thermale, qui a financé depuis 2004 plus de soixante études cliniques, dont trente-cinq publiées dans des revues internationales. À la lecture de ces études, on peut tout de même considérer que la médecine thermale est rigoureusement évaluée et encadrée et que le service médical rendu est avéré.

Vous dites, madame la ministre, que nous verrons en fonction des débats comment nous pourrons ou non adoucir cette proposition de moindre remboursement. Or, je veux le rappeler, le coût des cures thermales – Frédérique Espagnac l'a dit avant moi – représente moins de 0,13 % des dépenses de l'assurance maladie. Le diable serait vraiment dans les détails si nous nous attardions sur ces prestations… Nous allons étudier l'article 19, nous allons parler de prévention ; les cures permettent de prévenir les hospitalisations et de limiter les prescriptions médicamenteuses.

Je conclurai en citant Jean-Louis Murat, qui est de mon département et qui chantait :

« Aux Thermes de Choussy,

Allez soigner à l'arsenic,

Vos souffles affaiblis. »

L'accès aux soins de près de 500 000 patients accueillis en 2024 serait menacé, et nous aurons l'occasion de défendre de nouveau le thermalisme lors de l'examen de l'article 49.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je n'en doute pas !…

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Les sous-amendements ayant disparu, je me permets d'intervenir : je suis moi aussi l'élue d'un département éminemment thermal, les Landes.

Je ne répéterai pas tout ce que vient de dire ma collègue sur les vertus du thermalisme, mais il faut parler très clairement : le thermalisme est une filière économique extrêmement importante dans nos départements.

Je sais bien que nous sommes en PLFSS et que la sécurité sociale n'a peut-être pas à supporter certaines dépenses… En tout état de cause, décréter du jour au lendemain que le taux de remboursement des cures thermales passerait de 65 % à 15 % – si l'on fait 200 millions d'euros d'économies, c'est ce qui va se passer –, c'est brutal. Dans mon département, une telle décision équivaut à la perte de milliers d'emplois : soyons tout à fait clairs.

Nous avions décidé d'évoquer ce sujet et de faire des propositions à l'article 49. Je vous ai entendue, madame la ministre : pour l'instant, nous en restons à ce qui est prévu…

Mme Stéphanie Rist, ministre. Oui.

Mme Monique Lubin. … et nous verrons à la fin de l'examen du texte.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Absolument.

Mme Monique Lubin. Cela veut-il dire que nous pouvons avoir un peu d'espoir ? Au bout du compte, la majorité sénatoriale sabrant allègrement les dépenses, on devrait pouvoir s'en sortir…

Madame la ministre, vous ne nous répondrez pas aujourd'hui : vous nous répondrez lorsque nous aborderons l'article 49, c'est-à-dire la toute fin du texte. Vous le savez – je sais que vous avez été saisie du sujet et interpellée par de nombreux acteurs de la filière thermale –, nous comptons vraiment sur vous pour nous aider dans notre soutien à cette filière.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Il n'existe pas de cures thermales dans le Calvados, mais on y trouve un projet de résidence de répit partagé.

Madame la ministre, bien que cette discussion soit un peu bouleversée par le fait que les sous-amendements déposés à l'article 17 soient tombés, je tiens à souligner que les résidences de répit partagé n'ont rien à voir avec le baluchonnage : je le dis très clairement.

Je profite de cette occasion pour vous interroger au sujet des cinq projets qui avaient été retenus et validés, en quelque sorte, par la ministre de l'époque, lorsque avait été discuté ici même, en 2023, un amendement déposé par ma collègue Monique Lubin sur le projet de loi de finances pour 2024, et validés, d'une certaine façon, par la ministre des solidarités et des familles de l'époque.

Deux de ces projets de résidence sont déjà très bien avancés, dont un dans le département de ma collègue. Pour ce qui concerne les trois autres, et notamment celle qui devait ouvrir dans le Calvados, nous sommes toujours dans l'attente d'une confirmation écrite ferme. Si une circulaire a bien été publiée sur ce sujet au mois de mai 2024, il y est question globalement des résidences de répit partagé, et non de ces trois projets en attente.

Lorsque j'ai interpellé la ministre – c'était au début de l'année 2025, à la reprise des discussions budgétaires –, elle m'a répondu que ce sujet relevait non pas d'un PLF, mais d'un PLFSS ; soit. Nous voici en train de discuter du PLFSS pour 2026 ; je dépose un amendement, qui est déclaré irrecevable en application de l'article 40 de la Constitution – soit. L'article 17 semble m'offrir la possibilité d'en parler, et l'on me dit, derechef, que ce sujet ne relève pas du rapport annexé. Dites-moi simplement où placer cette question dans le PLFSS : j'aimerais enfin obtenir un engagement de la part du Gouvernement !

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Nous avons débattu de plusieurs sous-amendements à l'amendement de la commission, de portée plus ou moins normative et touchant plus ou moins à la trajectoire budgétaire. L'un d'eux, déposé par notre collègue Vanina Paoli-Gagin, avait pour objet la compensation aux départements des charges dues au versement de l'APA et de la PCH.

Ce sous-amendement important a naturellement un impact sur la trajectoire. Nous avons précédemment débattu, à l'article 12 bis, d'une mesure forte : l'attribution aux départements d'une fraction de la CSG. Il nous a été répondu, alors, qu'il n'était pas possible de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Nous en venons maintenant à des sous-amendements dont l'objet est qu'il soit fait mention, dans le rapport annexé, de ce flux financier qui concerne particulièrement les départements et qui peut avoir un impact sur la trajectoire de la branche autonomie. Émettre un avis défavorable sur un tel sous-amendement, c'est aller un peu vite en besogne, me semble-t-il, car, je le répète, l'impact sur la trajectoire est réel.

L'amendement de la commission ayant été retiré, mon groupe serait fondé à demander une suspension de séance afin de déposer de nouveau ce sous-amendement en l'attachant, cette fois, à l'amendement du Gouvernement. Nous ne le ferons pas : nous souhaitons que les débats avancent.

Néanmoins, j'aimerais que le Gouvernement nous éclaire, madame la ministre, sur la méthode qu'il compte mettre en œuvre pour parvenir enfin à une meilleure compensation de ces charges d'APA et de PCH. Le Premier ministre s'est exprimé devant Départements de France et des mots forts ont été prononcés sur l'attribution d'une fraction de CSG. Quel est donc le calendrier ? Des réunions vont-elles se tenir prochainement, dans les jours et les semaines à venir, en vue de trouver enfin les bonnes mesures de compensation et le vecteur adéquat ?

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.

Mme Frédérique Puissat. Je ne suis pas rhumatologue – il y en a au moins une dans la salle, n'est-ce pas, madame la ministre ? (Sourires.) –, et je ne connais pas bien le sujet du thermalisme. Je vais néanmoins m'exprimer au nom de notre collègue Jean-Marc Boyer, qui s'est énormément investi sur cette question, accueillant notamment au Sénat les journées parlementaires du thermalisme – nombre d'entre vous y ont participé, mes chers collègues.

Je tiens simplement à préciser, pour la clarté du débat, que nous ne sommes pas sous le joug des lobbys du thermalisme. En revanche, nous recevons des alertes de nos territoires et nous avons bel et bien travaillé sur l'impact des cures thermales en matière de santé.

En l'espèce, pour ce qui est de ces sous-amendements, la technique légistique a son importance. Sauf votre respect, madame la ministre, nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est impératif de ne pas attendre une réglementation en provenance du Gouvernement pour savoir de combien va baisser le remboursement des soins thermaux. Nous souhaiterions donc que la disposition dont il est question soit inscrite « en dur » dans la loi.

Je vois deux solutions : soit nous pouvons sous-amender l'amendement du Gouvernement en lieu et place de celui du rapporteur général, auquel cas nous « raccrocherons » nos sous-amendements à l'amendement n° 1874 de M. le ministre – c'est exactement ce que vient de suggérer notre collègue Lemoyne –, ce qui suppose peut-être une petite suspension de séance ; soit nous traitons ce sujet à l'article 49.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Nous pouvons aussi faire les deux ! (Sourires.)

Mme Frédérique Puissat. Je vous donne mon sentiment : si nous pouvons l'inscrire ici, alors faisons-le et n'en parlons plus ; la disposition figurera dans le texte et nous aviserons dans la suite de la navette.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je me permets de revenir à l'objet de cet article 17, qui est la trajectoire.

Du calcul qui nous est présenté, je comprends que l'adoption de l'amendement de notre collègue Le Houerou sur la niche relative à la participation aux bénéfices des entreprises rapporterait 400 millions d'euros de recettes à la sécurité sociale. Quant à l'allongement du temps de travail annuel de douze heures, c'est-à-dire l'effort demandé aux travailleurs, il rapporterait 2 milliards d'euros. Autrement dit, entre ces deux contributions, le rapport va de 1 à 5.

Monsieur le ministre, comment ces chiffres – 400 millions d'euros d'un côté, 2 milliards de l'autre – ont-ils été calculés ? Estimez-vous que ces douze heures supplémentaires travaillées donneront lieu à une augmentation des salaires à due proportion ? Cela m'étonnerait : les salaires étant mensualisés, il n'y a en la matière aucune automaticité – je l'ai déjà dit. En revanche, le volume d'heures supplémentaires payées va baisser, c'est certain. Le Smic, lui, est un salaire horaire ; cette mesure d'allongement du temps de travail va donc bien modifier son montant hebdomadaire, ce qui va induire une augmentation des exonérations générales.

Monsieur le ministre, j'aimerais donc qu'avant que nous votions – c'est le minimum – vous nous disiez ce que sont ces 2 milliards : comment les avez-vous calculés ?

Entre 2 milliards et 400 millions, il y a 1,6 milliard d'euros de différence. Vous avez dit que le déficit de la sécurité sociale atteindrait 21,7 milliards d'euros à l'horizon 2029. Si l'effort de recettes s'appuyait autant sur le patrimoine et le capital que sur le travail, on gagnerait 1,6 milliard d'euros – c'est l'écart entre les deux contributions demandées –, et l'on pourrait revenir en deçà de la barre « fétiche » des 20 milliards d'euros dont vous avez fait une ligne rouge.

Je vous remercie de nous éclairer avant le vote !

M. le président. Mes chers collègues, je précise qu'il n'est plus possible de déposer des sous-amendements dès lors que les explications de vote ont débuté.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. La rapporteure générale ayant retiré son amendement, faisant tomber l'ensemble des sous-amendements, j'allais faire la même proposition que notre collègue Puissat.

Le sous-amendement de notre collègue Boyer a été cosigné par de nombreux collègues, notamment par Olivier Bitz, Nadia Sollogoub et moi-même. Nous portons tous le plus grand intérêt à ce sujet des cures thermales, qui sont une activité très importante de nos territoires, y compris ruraux. Il est tout de même très frustrant de ne pas pouvoir sous-amender l'amendement restant en discussion, celui du Gouvernement.

Nous remettrons l'ouvrage sur le métier à l'article 49…

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Alinéa 3 ! (Sourires.)

Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, nous comptons sur vous ! Je vois que vous êtes enthousiaste… (Nouveaux sourires.)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le sujet va revenir dans le débat !

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Cette discussion me paraît pour le moins surprenante, à l'heure où, nous dit-on, il faut redonner le pouvoir au Parlement.

Au jeu de bonneteau, à la foire, on suit la bille sans jamais la retrouver ; de même, ici, un amendement est déposé, les groupes présentent des sous-amendements, mais voici qu'en un tour de passe-passe le retrait du premier fait disparaître les seconds. Nous nous proposons de sous-amender plutôt l'amendement suivant ? Hélas ! les explications de vote étant déjà ouvertes, cela n'est plus possible… Je le dis avec un peu d'ironie, parce que nous sommes samedi soir, mais c'est tout de même un vrai sujet : au sein même du Parlement, on fausse les règles du débat.

Le débat, en l'occurrence, n'est pas anecdotique : ni la question du thermalisme ni le rétablissement de l'article 17, qui décrit les trajectoires pluriannuelles de recettes et de dépenses, ne sont anecdotiques. Quelle vision de la médecine et des soins souhaitons-nous faire prévaloir pour les années à venir ? (M. Jean-Baptiste Lemoyne acquiesce.)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas l'objet du rapport annexé !

Mme Cécile Cukierman. Qu'est-ce qui coûte et qu'est-ce qui rapporte ? Considérons-nous seulement les coûts immédiats ou donnons-nous toute sa place à la prévention, donc à des soins qui peuvent n'être pas purement curatifs et dont certains, dans leur diversité, ne répondent pas toujours exactement aux critères de l'Académie de médecine tels qu'on pouvait les imaginer il y a plusieurs siècles ? Cela mérite à tout le moins que nous y réfléchissions.

Comme l'ont dit mes collègues, il n'y a aucun problème : nous y reviendrons de toute façon à l'article 49…

Mme Frédérique Puissat. Il sera supprimé !

Mme Cécile Cukierman. Dans ce cas, monsieur le président, je vous demande de nous accorder une interruption de séance de cinq minutes pour que nous puissions trouver une solution.

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Je suis sénateur du Nord, département où l'on trouve une station de cure thermale, et pas n'importe laquelle, madame la ministre : celle de Saint-Amand-les-Eaux. Savez-vous qui est le maire de cette commune ? Fabien Roussel. Vous n'allez quand même pas nous fâcher avec Fabien Roussel, surtout en cette période ! (Sourires.)

Je connais bien ce lieu de cure historique, actif depuis la période romaine. Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, ce sont des personnes très modestes qui vont s'y soigner, y compris à titre préventif, dans un département très touché par les maladies respiratoires. Les thermes de Saint-Amand-les-Eaux sont un élément majeur du bien-être de très nombreux Nordistes.

Comme le savent tous mes collègues élus de départements disposant de tels équipements, il s'agit également, dans des zones souvent sinistrées, d'un outil d'aménagement du territoire et de création d'emplois. Et je puis vous dire qu'un déremboursement de la prise en charge, même partiel, aurait assurément des conséquences économiques.

Même si nous ne tranchons pas aujourd'hui cette question sur le fond – j'ai bien noté que nous pourrions y revenir à l'article 49 –, je souhaitais vous sensibiliser, madame la ministre, à la situation d'un département qui a besoin de conserver cet outil social de prévention sanitaire, dont l'importance se mesure aussi sur le plan économique.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Je suis un peu embêtée, monsieur le président : une suspension de séance a été demandée pour régler cette question du thermalisme ; est-il possible d'y procéder avant d'en revenir aux explications de vote sur l'article 17 ? Ou devons-nous tout faire en même temps ?

M. le président. Mes chers collègues, il appartient au président de fixer les règles de déroulement du débat : nous en sommes aux explications de vote sur l'amendement déposé par le Gouvernement pour rétablir l'article 17. Mme la rapporteure générale et Mme la ministre vont intervenir ; ensuite, éventuellement, j'accorderai une suspension de séance.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Je vous remercie, monsieur le président.

Au moment de voter le volet recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, le bilan du « coup de Kärcher » de la majorité sénatoriale vient de nous être communiqué.

Vous avez supprimé la mise en place d'élections professionnelles pour les artistes auteurs. Vous avez supprimé le léger relèvement du taux de la CSG sur le capital. Vous avez supprimé la transparence du prix des médicaments.

En revanche, vous avez rétabli la contribution sur les contrats de complémentaires santé. Vous avez rétabli la suppression de l'exonération de cotisations sociales pour les apprentis. Vous avez modifié la réforme de la clause de sauvegarde pour satisfaire les industriels du médicament.

En résumé, vous avez supprimé les maigres mesures de justice sociale et vous avez rétabli les mesures injustes supprimées par l'Assemblée nationale.

Vous avez pourtant affirmé durant nos débats que notre objectif commun était de réduire le déficit de la sécurité sociale, que c'était notre moteur. Permettez-moi d'introduire deux nuances à cette déclaration. Pour notre part, nous siégeons ici pour améliorer la prise en charge des aléas de la vie et, pour y parvenir, nous avançons des mesures de recettes nouvelles que vous avez toutes balayées !

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour un rappel au règlement.

Mme Cécile Cukierman. Mon rappel au règlement est de droit et se fonde sur l'article 36, alinéa 3, de notre règlement.

Je vous demande de nouveau, monsieur le président, une interruption de séance de cinq minutes afin que nous puissions examiner, avec l'ensemble des groupes, si une solution peut être trouvée, éventuellement par le dépôt en urgence d'un nouvel amendement de la commission, qui pourrait être sous-amendé.

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Je découvre qu'un amendement ne peut être sous-amendé une fois les explications de vote engagées.

Je souhaitais simplement rassurer mes collègues : à l'article 49, l'amendement n° 1758 vous permettra de vous prononcer sur le thermalisme.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

Les groupes pourront se retrouver et nous verrons ensuite si un consensus se dégage autour d'un amendement ou d'un sous-amendement.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente, est reprise à vingt-deux heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. À la suite d'échanges consensuels avec l'ensemble des groupes politiques – lesquels, pour une fois, sont d'accord –, je demande une suspension de séance de vingt minutes pour réunir la commission.

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-trois heures vingt.)

La séance est reprise.

M. le président. La séance est reprise.

Article 17 (supprimé)(suite)

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. La commission est parvenue à un texte particulièrement intéressant et très construit. (Sourires.)

M. le président. Le sous-amendement n° 1875, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Amendement n° 1874, après l'alinéa 22

Le thermalisme propose une prise en charge pluridisciplinaire s'inscrivant dans une logique de prévention et de bien-être.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ce sous-amendement à l'amendement n° 1874 du Gouvernement se justifie par son texte même.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Permettez-moi de répondre également, monsieur le président, aux questions posées avant la suspension.

S'agissant du relayage à domicile, madame Féret, les textes ont été publiés. Vous soulignez à juste titre que certains points restent encore à régler. Je reste disponible pour en discuter avec vous, mais nous travaillons déjà à leur résolution.

Les maisons de répit sont en cours de déploiement, dont une dans le Calvados. Nous souhaitons les diffuser le plus possible. Nous pourrons également revoir ce point ensemble, si vous le souhaitez.

La question de la compensation aux départements constitue un sujet majeur, notamment après les déclarations du Premier ministre la semaine dernière.

Mon ministère a engagé une mission Igas-IGF rapide afin d'étudier l'ensemble des impacts de cette transformation du financement. Cette réflexion s'inscrit dans le projet de loi sur la décentralisation que le Premier ministre souhaite présenter ; elle sera donc abordée lors de la discussion de ce texte. En parallèle, nous avons anticipé les travaux pour être prêts, puisque le Premier ministre annonce un calendrier législatif rapide.

Votre sous-amendement rappelle que les cures thermales participent à la prévention et au bien-être. Il ne modifie pas la trajectoire financière. Je rappelle qu'un déremboursement serait du domaine réglementaire. Le Gouvernement ne souhaite pas s'engager dans cette voie. Nous verrons à la fin des débats parlementaires si nous devons prendre un décret. Je ne vois donc aucun obstacle à ce sous-amendement et m'en remets à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1875.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1874, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 17 est rétabli dans cette rédaction.

Vote sur l'ensemble de la deuxième partie

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, je rappelle que, en application de l'article 47 bis-1 A, alinéa 2, du règlement, lorsque le Sénat n'adopte pas les dispositions de cette partie, la troisième partie de ce projet de loi est considérée comme rejetée.

Y a-t-il des demandes d'explication de vote ?…

Je mets aux voix, modifié, l'ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 49 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l'adoption 224
Contre 113

Le Sénat a adopté.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Au terme de l'examen de cette deuxième partie, désormais adoptée, et alors que nous entamons la troisième partie, je savourerai le bien-être d'aller « me mettre en cure » dans le haut de cet hémicycle ! (Sourires.)

Je tiens tous à vous remercier pour le travail accompli. Nous avons traité des sujets essentiels. Même si l'issue n'a pas correspondu aux attentes de chacun, il demeure toujours agréable d'analyser, de débattre et de soupeser les arguments.

Je remercie les ministres présents au banc, leurs collaborateurs, ainsi que nos administrateurs, qui ont œuvré dans des délais très courts et dont l'appui m'a été précieux tout au long de cette préparation et de cet examen. (Applaudissements.)

TROISIÈME PARTIE

Dispositions relatives aux dépenses pour l'exercice 2026

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES

Article 18

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1862, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – L'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du II, après le mot : « médecin, », sont insérés les mots : « ou un chirurgien-dentiste, » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) Après le 4°, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° Produits et prestations mentionnés à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, à l'exception de ceux délivrés au cours d'une hospitalisation et d'une liste de dispositifs fixée par arrêté. Un décret prévoit les modalités d'application de la franchise pour les produits et prestations facturés dans le cadre d'une location par un distributeur au détail à l'assuré. » ;

b) Le sixième alinéa est ainsi modifié :

- À la deuxième phrase, les références : « 1°, 2°, 3° et 4° » sont remplacées par les références : « 1° à 5° » ;

- La dernière phrase est complétée par les mots : « à l'exception des prestations mentionnées au 3°, qui font l'objet d'un plafond annuel distinct. »

II. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2027.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Cet amendement vise à rétablir l'article 18 relatif à la participation forfaitaire sur les actes et consultations effectués par les chirurgiens-dentistes, à la franchise sur les dispositifs médicaux et au plafond ad hoc pour les transports de patients.

M. le président. L'amendement n° 1327 rectifié quater, présenté par Mme Bourcier, M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. Capus, Laménie, V. Louault, Chevalier et Grand, Mme L. Darcos, MM. A. Marc et Rochette, Mme Paoli-Gagin, MM. Wattebled et Brault, Mme Sollogoub et M. Levi, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le sixième alinéa du III de l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce plafond annuel ne s'applique pas aux prestations mentionnées au 3° du III ».

La parole est à M. Jean-Luc Brault.

M. Jean-Luc Brault. Cet amendement concerne le déplafonnement des franchises médicales sur le transport sanitaire.

D'après la Drees, la consommation de transports sanitaires en ambulatoire s'élevait à 6 milliards d'euros en 2022. Après une baisse de 6,3 % en 2020 du fait de la crise sanitaire, elle a augmenté de 17,7 % en 2021 et de 7 % en 2022. En moyenne, depuis 2016, la hausse est de 4,4 % par an.

Les dépenses de transport sanitaire sont prises en charge par l'assurance maladie à plus de 90 %, bien au-dessus des médicaments, à 72 %, ou des soins de ville, à 65 %. Qu'est-ce qui justifie cet écart ?

Pour la Cour des comptes, il y a une forte corrélation entre le recours au transport de malades et le niveau de prise en charge de la dépense correspondante par l'assurance maladie.

Cet amendement vise donc à déplafonner les franchises médicales sur le transport sanitaire afin de lutter contre la forte hausse des dépenses en la matière et de sensibiliser à un usage raisonné.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l'assurance maladie. Le Gouvernement souhaite rétablir l'article 18, supprimé à l'Assemblée nationale, en deux parties distinctes : d'une part, avec cet amendement, qui concerne le champ des franchises ; d'autre part, avec un autre que nous examinerons plus tard et qui concernera le paiement de ces franchises. La commission n'ayant pas examiné ces amendements, je m'exprimerai à titre personnel.

Tout d'abord, cette mesure est particulièrement malvenue. Je ne suis pas, sur le principe, fermée à toute évolution des modalités de participation financière du patient à notre système de santé. Vous savez que les franchises avaient été instaurées comme un « outil » de responsabilisation du patient. Or, en l'occurrence, cela devient un outil de rendement, disons-le clairement.

Toutefois, procéder la même année au doublement du montant des participations, au doublement de celui des franchises, au doublement de leurs plafonds respectifs, à l'extension de leurs champs et à la création d'un nouveau plafond, cela fait beaucoup. Les conséquences seront sensibles pour les assurés. L'ensemble de ces mesures coûterait près de 100 euros par an aux assurés en ALD, sans prise en charge possible par une complémentaire santé.

Dans ce contexte, il est particulièrement maladroit de vouloir mettre en place un plafond de franchise spécifique au transport sanitaire qui pèsera, dans les faits, presque exclusivement sur les assurés en ALD exonérante. Rappelons que ces derniers représentent plus de 90 % de la dépense de transport sanitaire remboursable. J'émets donc un avis défavorable.

Pour la même raison, la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 1327 rectifié quater, qui vise à supprimer tout plafonnement sur le transport.

Parler comme vous le faites de « forfait de responsabilité », madame la ministre, ne saurait suffire à masquer la réalité. La participation forfaitaire sur les soins dentaires en dit long. Je ne connais pas beaucoup de patients qui se rendent de gaieté de cœur chez le chirurgien-dentiste. Certains y vont peut-être en prévention, pour s'assurer qu'ils ne souffrent pas de caries, mais – pour le coup – ils sont déjà parfaitement responsabilisés !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1327 rectifié quater ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement considère qu'il faut maintenir un plafond, car il y aurait un risque de renoncement aux soins sans celui-ci pour les patients très malades qui ont besoin d'effectuer de nombreux transports. L'objectif n'est pas d'empêcher les soins des patients. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Le secteur dentaire est parmi les secteurs médicaux les plus touchés par le non-recours aux soins. Environ une personne sur dix a dû renoncer à des soins dentaires pour des raisons financières. Étendre le domaine des forfaits et franchises au secteur dentaire ne pourra donc qu'accentuer les inégalités.

Mme Imbert en parlait : les gens sont déjà responsabilisés en arrivant chez le dentiste. Aller chez le dentiste ne fait plaisir à personne – pardon aux dentistes, mais c'est une réalité.

Les disparités territoriales jouent également un rôle dans ces inégalités d'accès aux soins. Les 10 % des territoires les mieux dotés ont une accessibilité 7,8 fois plus importante que les 10 % les moins bien dotés.

De manière plus globale, le reste à charge est socialement injuste : les ménages modestes consacrent une part plus élevée de leurs revenus à la santé que les ménages aisés.

En prévoyant d'étendre les franchises à l'ensemble des dispositifs médicaux, l'amendement n° 1862 ne fera qu'accentuer les inégalités d'accès aux soins. Nous voterons donc contre, et appelons le Gouvernement à abandonner le doublement des franchises et forfaits par voie réglementaire.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Nous examinons une proposition du Gouvernement visant à rétablir un article supprimé par l'Assemblée nationale. Elle confirme, comme nous le répétons depuis trois jours, que nos visions de l'avenir de notre système de santé et de protection sociale divergent.

Comme je l'indiquais lors de votre audition, madame la ministre, l'année 2025 marque les 80 ans de la sécurité sociale. Avec une telle mesure, vous remettez en cause les fondements de l'organisation instaurée en 1945, qui repose sur la solidarité.

Le doublement des franchises médicales pèsera sur la vie quotidienne de nombreux patients et des Français ayant le plus besoin d'accompagnement en matière de santé. Faire porter l'effort de redressement des comptes publics sur les ménages modestes et les classes moyennes demeure, pour nous, inaudible et inacceptable. Cela accentuera le non-recours aux soins, car le reste à charge peut devenir lourd : vous avez cité des montants pouvant atteindre 350 euros lorsque l'on additionne le doublement des franchises et divers forfaits.

L'extension de ces franchises aux soins dentaires pénalisera également de nombreuses personnes en situation de handicap, pour lesquelles ces prises en charge particulières demeurent essentielles.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Cet article n'obère pas la capacité du Gouvernement à agir par voie réglementaire. Nous échangeons, mais chacun sait que leur portée reste limitée, puisque le Gouvernement agira par décret.

Derrière cette novlangue, madame la ministre, se cache un déremboursement. Il faut nommer clairement les choses : votre « forfait de responsabilité » est une réduction du périmètre de remboursement afin de diminuer les dépenses de la sécurité sociale. Cette réduction est-elle légitime ? Il ne s'agit plus ici de dépenses de bien-être : nous parlons de dépenses de santé et nous entrons dans le dur du sujet.

Je prendrai l'exemple des médicaments. L'amoxicilline, antibiotique essentiel que les patients ne prennent pas par irresponsabilité, mais parce que le médecin le leur a prescrit, coûte 3,01 euros la boîte. Les conditionnements abaissés à six comprimés, soit six grammes, imposent l'achat d'au moins deux boîtes pour un traitement, parfois trois ou quatre. L'assurance maladie rembourse 65 %, soit 1,96 euro. Et vous demanderez 2 euros par boîte : cherchez l'erreur…

Ce n'est pas un cas isolé. De nombreux médicaments matures seront complètement déremboursés : antihypertenseurs, antidépresseurs, antibiotiques. Ce sont pourtant des traitements fondamentaux pour la santé. C'est cela que vous proposez et c'est cela qui demeure inacceptable.

En sachant que la portée de mon propos restera limitée, puisque le Gouvernement nous a prévenus qu'il fera ce qu'il voudra par voie réglementaire, nous voterons contre le rétablissement de cet article, qui porte cette philosophie.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. J'ai redéposé ces amendements précisément pour que le débat sur les franchises puisse avoir lieu. Leur rendement atteindra 600 millions d'euros en 2027 – avec un plafond fixé à 250 euros et non à 350 euros. Les mesures chiffrées pour 2026 sont évaluées à 2,3 milliards d'euros.

Pourquoi parler de « forfait de responsabilité » ? La responsabilité n'est pas forcément individuelle, elle peut être collective. Je l'emploie dans cette acception : responsabilité collective pour ramener la sécurité sociale vers sa trajectoire. Il ne s'agit ni de culpabilité ni de culpabilisation. Lorsque, en tant que parents, nous apprenons à nos enfants à être responsables, nous ne leur apprenons pas à être coupables !

J'accepte sans difficulté de conserver le terme de « franchise », mais souhaitais expliquer l'intérêt du mot « responsabilité », qui renvoie à une démarche collective de réduction du déficit de notre sécurité sociale.

Certes, il s'agit d'un effort demandé aux assurés. Mais je rappelle que les efforts contenus dans ce PLFSS concernent l'ensemble des secteurs, y compris les assurés. (Mme Laurence Rossignol lève les bras au ciel.) Par ailleurs, cet effort ne sera pas supporté par tous les assurés, vous le savez aussi bien que moi : un Français sur trois ne paie pas ces franchises ; 18 millions de personnes en sont exonérées. Peut-être faut-il envisager d'élargir ce nombre. Mais pourquoi balayer d'un revers de main une mesure de responsabilité collective de réduction du trou de la sécurité sociale ?

Enfin, je le rappelle, la France demeure le pays au reste à charge le plus faible au monde. Ce débat ne doit pas non plus devenir un tabou.

En Belgique, pays voisin où les conditions de vie sont similaires aux nôtres, le reste à charge se situe entre 400 et 4 000 euros par an. Lorsqu'un patient est dialysé, il doit, par exemple, fournir et financer ses tubulures de perfusion à chaque séance. Je ne dis pas qu'il faudrait tendre vers un tel système. Je demeure très fière que nous vivions dans un pays où le reste à charge figure parmi les plus faibles.

Toutefois, au moment où le déficit atteint le niveau que nous connaissons, nous pouvons débattre de forfaits de responsabilité collective et nous interroger sur ceux qui pourraient les assumer.

Il faudra ensuite engager une réflexion sur le financement du modèle de la sécurité sociale, car des franchises augmentées chaque année ne permettront jamais de résoudre durablement la situation. Voilà pourquoi je tiens à cette mesure de forfait de responsabilité.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, je veux d'abord évoquer la question de la responsabilité. Au sens moral et philosophique, celle-ci suppose la responsabilité des actes. Elle repose sur le libre arbitre et sur un choix moral fait par l'individu.

Je ne vois pas où se situe le libre arbitre de l'individu dans ce que vous nous proposez en matière de remboursement des médicaments qui lui ont été prescrits et dont il a besoin pour se soigner. Où situez-vous la responsabilité ?

Que veut dire être responsable pour un malade qui s'est vu délivrer une ordonnance ? Être responsable, est-ce ne pas acheter les médicaments prescrits ? Est-ce ne pas les consommer ? Ou est-ce décider de les payer soi-même, alors que l'on cotise par ailleurs à la sécurité sociale ?

Par ailleurs, il ne faut pas nous dire continuellement que la France est le pays qui a le plus fort taux de prélèvements obligatoires et, en même temps, celui qui rembourse le mieux. Il y a un lien entre les deux !

Aujourd'hui, nous assumons ce lien ; nous en sommes plutôt fiers, en général. Quand la France participe à des colloques internationaux sur la santé, elle est assez fière de raconter ce qu'elle est. Il faut avoir la même fierté à l'intérieur du pays, madame la ministre !

Mon collègue Bernard Jomier vous a posé une question. Dès lors que les industries pharmaceutiques ont changé le conditionnement et que votre système de déremboursement s'applique par boîte, si l'on prescrit à l'assuré quatre boîtes d'amoxicilline avec trois comprimés par boîte et qu'une franchise de 2 euros s'applique sur chacune des boîtes, cela signifie qu'aucune de ces boîtes ne lui sera remboursée et qu'il paiera l'intégralité de son traitement antibiotique.

Que répondez-vous à cette remarque ?

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, vous rétablissez une nouvelle hausse des franchises médicales et des participations forfaitaires, soit un quadruplement depuis 2024.

Vous faites peser l'effort principalement sur les personnes malades, comme le fait d'ailleurs le décret permettant, sans passer par la loi de financement de la sécurité sociale, de doubler les plafonds annuels et les montants des franchises. Nous trouvons cela tout à fait injuste.

En 2024, la Drees constatait déjà une hausse du reste à charge moyen, passé de 276 euros à 292 euros par patient en 2023. Cette hausse notable résulte directement du doublement des franchises et des participations forfaitaires intervenu en 2024, ainsi que de la hausse du ticket modérateur. Cette augmentation du reste à charge se traduira, pour les assurés sociaux, par une facture qui grimpera de plus de 42 euros par an en moyenne et jusqu'à 75 euros pour les personnes en affection de longue durée.

Selon France Assos Santé, les personnes atteintes de maladies chroniques ou en situation de handicap supportent déjà de l'ordre de 2 000 euros de reste à charge annuel.

Cet argument de responsabilisation avancé par le Gouvernement n'est donc pas audible, et le mot de « forfait de responsabilité » ne correspond pas du tout à la réalité : il s'agit non pas d'éduquer des patients, mais de réduire la part de prise en charge par la sécurité sociale. Nous ne pouvons accepter l'augmentation de la part supportée directement par les malades.

Je pense que l'efficacité de la mesure est aussi contestable sur le plan budgétaire, puisque le renoncement aux soins entraînera ensuite des pathologies plus lourdes et plus coûteuses pour la collectivité. L'économie immédiate est donc illusoire.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Nous parlons beaucoup de responsabilité, madame la ministre, mais vous l'avez vous-même reconnu : le fait générateur de cette mesure est bien la situation des comptes du pays et, en l'occurrence, de la sécurité sociale. Si les comptes étaient parfaitement à l'équilibre, il ne serait pas question de forfait de responsabilité et de franchise.

Qui porte donc la responsabilité de cette dégradation des comptes, madame la ministre ? Depuis maintenant de nombreuses années, nous savons tout comme vous qui est l'auteur des différentes mesures qui l'ont permise…

Ce qui m'interpelle, c'est que vous parlez de comptes, de budget. Or nous parlons bien ici du projet de loi de financement de la sécurité sociale ! L'enjeu est la santé des Français, le fait que chacun puisse vivre en bonne santé, quels que soient ses revenus.

Je voudrais abonder dans le sens de mes collègues sur le risque de non-recours, qui est déjà avéré. Vous parlez de forfait de responsabilité, mais pensons à ces patients, notamment dans les territoires ruraux, dont l'espérance de vie est réduite, qui subissent des pertes de chance supplémentaires parce qu'ils ont eu du mal à trouver un médecin et qui, après avoir finalement réussi à obtenir un rendez-vous et une ordonnance, recevront le message qu'ils devront encore davantage participer à l'effort, alors que le retard de prise en charge a conduit à une dégradation de leur état de santé, donc à un alourdissement des traitements nécessaires. Comment justifier cette situation ? Comment l'assumez-vous en tant que membre du Gouvernement ?

C'est tout l'enjeu de la politique de prévention. On ne peut pas être doublement, triplement pénalisé : tel est le message que nous voulons adresser à nos concitoyens qui sont en difficulté. Nous voulons les protéger de la logique du chacun pour soi que vous dessinez avec ce modèle, qui est une remise en cause fondamentale de la sécurité sociale et qui met dans la plus grande des difficultés encore et toujours les mêmes victimes : les classes moyennes et les malades – je ne parle pas du tiers de nos concitoyens qui seraient épargnés.

Merci, en tout cas, pour la clarté avec laquelle vous avez exposé vos intentions !

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Madame la ministre, vous employez, depuis quelques jours, des éléments de langage qui sont maintenant bien rodés : vous parlez de « forfait de responsabilité », de « partage de l'effort »…

En réalité, comme Bernard Jomier l'a parfaitement démontré, il s'agit pour vous de masquer un déremboursement, avec le risque d'aboutir aux non-recours que vient d'évoquer mon collègue Simon Uzenat.

Je ne comprends pas très bien ce qu'est la responsabilité collective. C'est un terme qu'il va falloir éclaircir, car on voit bien que la mise en place du ticket modérateur, qui date tout de même de quelques années et dont le taux est passé de 20 % à 30 %, puis 35 %, voire plus, au fil des années de l'histoire de la sécurité sociale, n'a jusqu'à présent pas fait baisser, pour autant que je sache, les dépenses de santé. De fait, nous ne cessons de nous plaindre qu'elles n'ont fait qu'augmenter.

Il faut donc nous expliquer ce que vous entendez par « responsabilité collective ».

Quant au partage de l'effort, madame la ministre, nous ne pouvons pas être d'accord avec vous ! Non, tout le monde ne participe pas à l'effort. Nous avons discuté pendant trois jours de mesures de recettes que nous avions proposées et que vous avez balayées d'un revers de main, alors qu'elles portaient sur des personnes, des familles, des entreprises qui ont largement la possibilité de contribuer à la solidarité nationale.

Pour ce qui vous concerne, vous n'avez de cesse de nous proposer des mesures qui pèsent sur les patients.

Les patients ne tombent pas malades exprès ! Ils ne vont pas chez le médecin par plaisir. Vous avez dit, en commission, que quelque 16 000 de nos concitoyens consultaient plus de 25 médecins. Madame la ministre, vous vous doutez bien que ces personnes souffrent probablement d'un problème que l'on pourrait qualifier de psychiatrique !

Ne pénalisons pas 70 millions de Français parce que 16 000 d'entre eux abusent.

Mme Émilienne Poumirol. Votre raisonnement me semble extraordinaire.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je veux rappeler l'existence de plafonds journaliers – certes, pas sur les boîtes de médicaments, mais sur les actes et sur les transports – qui diminuent le coût pour le patient.

Je veux également redire que certains de nos concitoyens considèrent qu'ils pourraient payer un peu plus sur leurs boîtes de médicaments.

Il ne me semble pas que nous puissions éluder ce sujet, notamment la question de savoir qui doit payer ou non. Un sous-amendement pourrait peut-être être déposé pour exempter les patients rencontrant des difficultés d'accès aux soins.

Quoi qu'il en soit, il serait intéressant que nous puissions avoir ce débat plutôt que le balayer du revers de la main.

Vous dites que les efforts ne pèsent que sur les patients.

Il est vrai que cela représenterait un effort de 42 euros par an en moyenne, pour ceux qui doivent payer et qui ne sont pas en ALD, et de 75 euros par an pour ceux qui sont en ALD.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je crois que tout a été dit sur l'hypocrisie, sur la « novlangue », comme on dit, qui consiste à appeler une mesure de déremboursement une mesure de responsabilité.

Pour ma part, je veux souligner que nous sommes d'accord pour agir sur les dépenses : nous ne chercherons pas seulement à amender les recettes ! Nous interviendrons aussi sur les dépenses.

Mais la bonne mesure, en matière de dépenses, c'est celle qui travaille sur l'efficience. L'idée, c'est de dépenser 80 là où l'on en dépensait 100 précédemment. Par exemple, si l'on prend des mesures contre la financiarisation de la santé, on fait baisser les dépenses.

En l'occurrence, vous ne faites pas baisser les dépenses : vous transférez la dépense sur les malades.

Le problème est que, l'année suivante, l'Ondam aura mécaniquement augmenté de 3,8 %. Il faudra donc recommencer ! Cela ne suffit pas.

La preuve est que vous doublez l'effort que vous avez demandé il y a quelques années. Vous doublez les franchises, le plafond…

Et l'année prochaine ? Puisque vous ne savez que transférer, et non pas agir sur de bonnes mesures d'efficience de la dépense, vous demanderez encore un effort, et ainsi de suite.

Ce n'est pas du tout notre voie : pour les écologistes, il faut vraiment baisser les dépenses de façon efficiente. Voilà de bonnes mesures de dépenses !

Pour votre part, tout ce que vous savez faire, c'est soit transférer aux complémentaires santé – mais une mesure à 1 milliard d'euros est un fusil à un seul coup, que vous ne pourrez réutiliser l'année prochaine –, soit augmenter les franchises. Ce n'est pas de la bonne politique de santé.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. De nombreux points ont été abordés.

Nous savons très bien que le taux de couverture, que cela passe par l'instauration de franchises ou par la modification du pourcentage de remboursement, influe sur les comportements. J'en veux pour preuve la suspension de séance que nous venons d'avoir sur le taux de couverture des cures thermales.

Je m'attends désormais à ce que le Sénat, dans une même unanimité, refuse de limiter davantage la couverture de produits aussi essentiels que les médicaments…

Effectivement, comme ma collègue Raymonde Poncet vient de le dire, vous faites porter la charge sur les malades, quels que soient leurs revenus. C'est profondément injuste. Il n'y a plus d'idée de sécurité sociale et de répartition si l'effort est ramené à la boîte.

Surtout, je voudrais vous poser une question. Je voudrais comprendre, car certains points m'échappent.

N'étant pas membre de la commission des affaires sociales, je suis avec intérêt tous vos débats techniques. Mais, sur le plan politique, j'avais cru comprendre que vous cherchiez un accord avec le Parlement ! Un débat assez important a eu lieu à l'Assemblée nationale. Que le Sénat lui-même, en tant qu'assemblée responsable, dépose des amendements pour marquer son désaccord relève du jeu parlementaire normal. Or c'est vous-même qui revenez sur les arbitrages de l'Assemblée nationale ! Au moment où il nous semblait que l'on souhaitait parvenir à un accord au terme du processus, vous envoyez des signaux qui nous amènent à nous demander où vous voulez en venir.

Pourriez-vous donc nous éclairer sur votre stratégie pour parvenir à un accord au bout du bout, au-delà du jeu parlementaire normal qui se déroule dans les deux chambres ? J'avoue que je suis un peu perdu.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Les personnes qui bénéficient de la complémentaire santé solidaire (C2S) ne paient pas les franchises. Donc, non, l'effort ne sera pas supporté « quels que soient les revenus » !

Je répète ce que nous avons dit, mes collègues Amélie de Montchalin et Jean-Pierre Farandou et moi-même, au début de nos débats.

C'est vraiment par souci de transparence que j'ai déposé cet amendement, afin que nous puissions avoir ce débat, dont je considère qu'il doit être mené non pas uniquement avec l'Assemblée nationale, mais aussi avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs.

Les mesures relatives aux franchises sont prises par décret. Le décret est prêt, mais je ne l'ai pas signé. Je dis depuis le début, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, qu'il ne sera pas signé pendant nos débats.

Nous verrons ce qui sortira de ces derniers et, en fonction du déficit notamment, si ce décret doit être signé.

Toutefois, il me semble qu'il est de mon devoir, en tant que membre d'un gouvernement qui a dit vouloir accompagner les débats parlementaires, de faire en sorte que le Sénat puisse aussi s'exprimer sur ces sujets. Cela me paraît logique.

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Ce forfait de responsabilité, qui n'est autre – ma collègue l'a dit – qu'un déremboursement, est une mesure de rationalisation financière. Nous sommes d'accord sur ce point, et mon collègue Simon Uzenat l'a bien exprimé. On est sur du chiffre !

Vous l'avez dit, madame la ministre, cet article a fait débat à l'Assemblée nationale.

Le Conseil économique, social et environnemental, qui conseille le Gouvernement, formule des avis, représente les organisations de la société civile, a lui-même émis un avis dans lequel il dit s'inquiéter de cette disposition, qui risque d'accentuer le non-recours aux soins.

La consécration des droits ne suffit pas ; c'est leur application effective qu'il faut assurer.

Or, même si certains assurés sont exonérés et que vous indiquez que l'on peut éventuellement encore y travailler, la présente mesure comporte, comme l'indique l'étude d'impact, un risque d'accentuation de ce phénomène de non-recours.

C'est donc un report de charge que nous allons constater à terme.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous ne serez évidemment pas étonnée, madame la ministre, que j'aille dans le sens de mes collègues qui siègent sur les travées de gauche de cet hémicycle.

Cette mesure est profondément injuste.

Vous avez dit qu'il y avait eu des débats à l'Assemblée nationale ; vous voyez bien qu'il y en a ici aussi !

Je vous demande de ne pas prendre ce décret.

Je répète ce que plusieurs de mes collègues ont déjà dit : personne ne fait semblant d'être malade ! On ne choisit pas de l'être. Vous le savez, et personne ici ne dit le contraire.

Tout cela casse le système de solidarité et va conduire à des non-recours aux soins, notamment pour les personnes les plus pauvres et les plus précarisées de ce pays, y compris pour les travailleurs et travailleuses qui touchent de petits salaires et sont au Smic, qui vont voir les franchises médicales doubler.

En outre, le non-recours aux soins coûtera beaucoup plus cher à la sécurité sociale : il y a des gens, dans ce pays, qui n'ont même pas les moyens de donner 4 ou 5 euros par semaine pour des médicaments, parce qu'ils n'ont déjà pas assez d'argent pour se nourrir. Vous voyez ce que cela va donner !

Je vous demande donc d'y réfléchir et de ne pas prendre ce décret.

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.

M. Martin Lévrier. Je veux faire trois brèves observations.

Premièrement, je veux remercier Mme la ministre pour ce débat, qui n'est qu'un débat d'orientation. Vous ferez ce que vous voudrez, mais, au moins, vous nous demandez notre avis, vous venez nous écouter, ce qui est très bien. Le fait de permettre au Parlement de débattre du sujet me paraît très positif. Je vous en remercie.

Deuxièmement, j'ai bien entendu qu'un certain nombre de personnes n'étaient pas concernées. Il était très important de l'entendre.

Troisièmement, j'ai entendu qu'il y avait plus de 16 000 personnes qui, visiblement, « surabusaient » des remboursements.

Je veux attirer votre attention sur le cas des chirurgiens-dentistes. Je ne connais personne qui aime aller chez le dentiste ! J'aime beaucoup mon chirurgien-dentiste, mais aller chez lui n'est jamais un plaisir… (Sourires.) J'ai un peu peur de ce que cette mesure pourrait donner, car, dans les campagnes, on voit déjà de plus en plus de gens qui souffrent de problèmes dentaires justement parce qu'ils ont cette « terreur ».

Dans ces conditions, l'ajout de franchises me paraît un danger supplémentaire pour la prévention dentaire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1862.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1327 rectifié quater.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 18 demeure supprimé.

Après l'article 18

M. le président. L'amendement n° 1863, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Les deux premières phrases du dernier alinéa du II sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « Un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles la participation forfaitaire peut être acquittée par l'assuré auprès du professionnel de santé, qui la reverse à l'assurance maladie, ou récupérée par l'organisme d'assurance maladie sur les prestations de toute nature à venir ou directement auprès de l'assuré. » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) La première phrase du huitième alinéa est ainsi rédigée : « Un décret en Conseil d'État fixe les modalités de mise en œuvre du présent III, notamment les conditions dans lesquelles la franchise peut être acquittée par l'assuré auprès du professionnel de santé, qui la reverse à l'assurance maladie, ou récupérée par l'organisme d'assurance maladie sur les prestations de toute nature à venir ou directement auprès de l'assuré. » ;

b) Le dernier alinéa est supprimé.

II. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2027.

La parole est à Mme Stéphanie Rist, ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Il s'agit de permettre aux assurés de payer les participations forfaitaires et les franchises directement auprès des professionnels de santé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je m'exprimerai à titre personnel, puisque l'amendement n'a pas été examiné en commission.

C'est le mode d'encaissement des franchises par les professionnels de santé, tel qu'il est proposé, qui a fait polémique. Tous les professionnels de santé y sont opposés.

Cela poserait aussi, techniquement – dans la « vraie vie », comme on dit –, quelques soucis pour ces professionnels.

À titre personnel, mon avis sera donc très défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Je le répète, nous sommes contre le principe des forfaits et des franchises et contre toute extension de ceux-ci.

En l'occurrence, cet amendement va plus loin, puisqu'il prévoit que le patient peut s'acquitter de ce forfait ou de cette franchise auprès du professionnel de santé, qui reverse les sommes à l'assurance maladie.

Non seulement cette mesure créerait des complexités administratives monstres, alors que, cette semaine encore, le Premier ministre appelait à simplifier – c'est à se demander si la simplification ne concerne que le droit de l'environnement… –, mais elle changerait aussi profondément la relation entre le patient et le soignant. La mission des soignants est de soigner, non de responsabiliser les assurés aux dépenses de l'assurance maladie.

Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste votera contre cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je rejoins Mme la rapporteure. Madame la ministre, franchement, on marche sur la tête ! Je ne peux pas vous le dire autrement.

Depuis des années, l'assurance maladie a fait évoluer les logiciels Vitale. La connexion avec les mutuelles est réalisée. Le flux unique existe désormais, même si cela a pris beaucoup de temps.

Aujourd'hui, en pratique – j'imagine que vous le faites vous aussi –, le professionnel de santé insère la carte Vitale, et le patient qui a une mutuelle, une complémentaire, ne paie rien.

Vous proposez d'introduire le paiement d'une somme de quelques euros, soit par carte bancaire – ce qui réjouira les banques, dont je rappelle qu'elles prélèvent un pourcentage sur les paiements par carte bancaire –, soit en espèces.

Il faut comprendre la levée de boucliers qu'une telle mesure suscite chez l'ensemble des professions de santé ! À raison de 4 euros par patient, ils vont se retrouver avec un sac de pièces à la fin de la journée, qu'ils devront apporter à la caisse d'assurance maladie. (Sourires sur les travées SER et CRCE.) À moins qu'ils ne puissent faire des virements journaliers ou hebdomadaires, ce qui les obligera à faire des comptes…

Franchement, même quand on a une idée aussi géniale que celle-là, tant que la tuyauterie n'est pas prête, on ne saurait en faire une mesure…

Je vois la question que vous essayez de soulever au travers de cet amendement. Si je suis ce que je crois être votre raisonnement, il faudrait que les gens comprennent ce que coûte la santé. C'est une vraie question, alors qu'il n'y a plus de prix sur les boîtes de médicaments, par exemple. Mais on ne peut pas résoudre le problème de cette façon !

Je ne comprends donc pas que vous vous entêtiez à vouloir faire encaisser des sommes de quelques euros par les professionnels de santé.

Mme Pascale Gruny. Bien sûr !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1863.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1251, présenté par Mmes M. Vogel, Ollivier, Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Mellouli et Salmon et Mme Senée, est ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 160-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis du Conseil économique, social et environnemental et de l'Assemblée des Français de l'étranger ou, dans l'intervalle de ses sessions, de son bureau, précise les conditions dans lesquelles les anciens assurés qui ont cessé de bénéficier de la prise en charge de leurs frais de santé au titre de l'article L. 160-1 puisqu'ils ont cessé de remplir les conditions mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 111-1 recouvrent le bénéfice de la prise en charge de leurs frais de santé à leur retour sur le territoire. »

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Mme Mélanie Vogel. Si vous me le permettez, monsieur le président, pour gagner un peu de temps, je présenterai en même temps l'amendement n° 1284, qui concerne le même sujet.

M. le président. J'appelle en discussion l'amendement n° 1284, présenté par Mmes M. Vogel, Ollivier, Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Mellouli et Salmon et Mme Senée, et ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 160-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis du Conseil économique, social et environnemental et de l'Assemblée des Français de l'étranger ou, dans l'intervalle de ses sessions, de son bureau, précise les conditions dans lesquelles les anciens assurés qui ont cessé de bénéficier de la prise en charge de leurs frais de santé au titre de l'article L. 160-1 puisqu'ils ont cessé de remplir les conditions mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 111-1 recouvrent le bénéfice de la prise en charge de leurs frais de santé dans les meilleurs délais après leur retour sur le territoire. »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Mélanie Vogel. Ces deux amendements ont pour objet d'assurer la continuité des droits sociaux pour les Français établis à l'étranger qui rentrent en France et qui, avant leur départ, étaient assurés à la sécurité sociale française.

Il existe aujourd'hui un délai de carence de trois mois après le retour en France pour recouvrer ses droits. Trois mois, c'est très long ! C'est bien au-delà du délai raisonnable que l'on peut considérer comme utile pour éviter les frais médicaux engagés lors de vacances ou de tourisme.

Cela crée des situations très compliquées pour certaines personnes, qui, ayant déjà trouvé un emploi mais ne l'exerçant pas immédiatement à leur retour, n'ont aucune couverture maladie en France du fait d'un vide juridique total.

Comme il n'est pas possible de supprimer ce délai par la loi, nous proposons qu'un décret puisse être pris en Conseil d'État pour préciser les modalités selon lesquelles les Français de l'étranger qui rentrent en France et qui étaient assurés en France avant de partir puissent recouvrer leurs droits.

Le premier amendement vise à ce qu'ils puissent les recouvrer dès leur retour en France. Je veux vous rassurer, mes chers collègues : comme il s'agit d'un décret pris en Conseil d'État, cela laisse la possibilité de clarifier de quelles personnes nous parlons – il s'agit bien des personnes qui rentrent pour s'établir en France de manière stable, non de celles qui rentrent pour Noël.

Le second amendement vise à une plus grande souplesse, puisqu'il tend à donner une plus grande marge de manœuvre au décret, en indiquant que les droits sont recouvrés dans les meilleurs délais après le retour en France.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je vous livre ici l'avis de la commission.

Ce sujet a déjà été abordé lors de l'examen de précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale. Il semble souhaitable d'adapter certaines dispositions au cas particulier des Français qui reviennent de l'étranger et ne peuvent justifier d'une condition de résidence stable et régulière ni d'un emploi sur le territoire national. Il s'agit d'éviter qu'ils ne soient lésés individuellement.

En conséquence, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 1284, dont le dispositif a déjà été adopté par le Sénat lors de l'examen de deux précédents PLFSS.

Elle demande, en revanche, le retrait de l'amendement n° 1251, qui serait globalement satisfait par l'adoption du premier, mais dont la rédaction est moins satisfaisante.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Ces amendements me paraissent satisfaits, raison pour laquelle je sollicite leur retrait ; à défaut, mon avis sera défavorable.

Toutefois, je comprends, d'après vos propos, qu'il puisse rester des trous dans la raquette pour certaines personnes, et je suis tout à fait disposée à ce que nous avancions sur ce point. Comme il s'agit d'une mesure réglementaire, nous pourrons la corriger.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Il s'agit d'un sujet essentiel pour nos compatriotes établis hors de France, pour lesquels ce délai de carence de trois mois peut être pénalisant.

Il est important d'avoir une accroche législative.

Nous avons été amenés à mettre en place ce que propose Mme Mélanie Vogel – et que j'appelle de mes vœux – dans des circonstances exceptionnelles, en l'occurrence pendant la pandémie de covid-19.

J'étais moi-même ministre à ce moment, et le gouvernement auquel j'appartenais avait proposé, au mois de mars 2020, dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, un amendement suspendant le délai de carence de trois mois. Cette mesure a par la suite été reportée jusqu'à la fin de 2021. Le Sénat avait d'ailleurs voté, le 26 mai 2020, la prolongation de la suspension de ce délai de carence de trois mois.

Forts de ce précédent, il serait utile que nous le pérennisions de nouveau.

Les Français de l'étranger forment un public qui peut être amené à revenir, alors que des crises éclatent partout dans le monde et que l'instabilité est de plus en plus forte. Lorsqu'il faut parfois recommencer sa vie à zéro, attendre trois mois pour pouvoir accéder à des soins, c'est très long !

C'est la raison pour laquelle je voterai ces amendements.

Je pense, madame la rapporteure, qu'il vaut mieux voter l'amendement n° 1251, qui tend à ce que la mesure s'applique « au retour sur le territoire », que le n° 1284, qui vise « les meilleurs délais ». Cette expression est vague. Il est préférable de partir du fait générateur qu'est le retour sur le territoire national.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je souhaite préciser les raisons pour lesquelles j'estime ces amendements satisfaits.

Plusieurs exceptions permettent déjà une affiliation immédiate au retour de l'étranger : la reprise d'une activité professionnelle, le rattachement familial ou le retour après un volontariat international.

D'autres dispositifs, comme les allocations chômage d'un État de l'Union européenne ou l'affiliation préalable à la Caisse des Français de l'étranger (CFE), assurent en outre une couverture transitoire.

Je le répète, je suis disposée à étudier les éventuels cas particuliers de non-couverture.

M. le président. Madame Vogel, l'amendement n° 1251 est-il maintenu ?

Mme Mélanie Vogel. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

Comme le remarquait Jean-Baptiste Lemoyne, cet amendement est plus clair et plus efficace : sa rédaction lève toute ambiguïté en précisant que la couverture serait assurée dès le retour en France.

Vous avez raison, madame la ministre, il existe plusieurs exceptions, parmi lesquelles l'affiliation à la CFE – être dispensé du délai de carence fait d'ailleurs partie des avantages d'y être affilié – ou encore le fait de disposer d'un emploi dès le retour.

Nous sommes donc dans une situation où, dans certains cas, la couverture est possible et où dans d'autres elle n'est pas possible.

Bien souvent, les assurances contractées dans le pays de résidence ne sont pas valables en France. Vous pouvez donc avoir cotisé à la sécurité sociale pendant des années, parfois même des décennies, et vous retrouver sans aucune couverture lors de votre retour si, par exemple, vous n'occupez votre nouvel emploi qu'au bout d'un mois et demi.

Le nombre de personnes concernées et les délais à couvrir me paraissent tout à fait raisonnables compte tenu du besoin de santé publique très simple à satisfaire. De plus, le coût de la prise en charge serait tout à fait acceptable. (Mme Cathy Apourceau-Poly acquiesce.)

J'appuie par ailleurs les propos de mon collègue : en raison du contexte géopolitique, de nombreux Français vivant par exemple aux États-Unis – je le constate souvent lors de mes déplacements – se posent désormais la question du retour, qu'ils ne se posaient pas du tout il y a trois ans encore. Ils se demandent avec une certaine angoisse s'ils pourront se faire soigner en France.

Trois mois, c'est très long. En trois mois, bien des choses peuvent se passer. La mesure de solidarité nationale que nous proposons présente un intérêt majeur pour un coût modique. Il est donc raisonnable de voter l'amendement n° 1251.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, comme vous le reconnaissez d'ailleurs vous-même, la demande n'est qu'en partie satisfaite. La preuve en est qu'au moment du covid-19, il a fallu prendre des mesures d'urgence.

La question de la couverture sociale des Français installés à l'étranger qui rentrent en France est récurrente dans cet hémicycle. Elle est ici posée par Mélanie Vogel, mais d'autres collègues, comme Yan Chantrel ou Hélène Conway-Mouret, s'en font souvent l'écho.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Samantha Cazebonne également !

Mme Laurence Rossignol. Samantha Cazebonne, et d'autres collègues encore, siégeant de l'autre côté de cet hémicycle et qui seront peut-être cités.

Il est important d'agir aujourd'hui sur le plan législatif et le Gouvernement s'honorerait à émettre un avis favorable sur l'amendement de Mme Vogel.

Son adoption permettrait de rassurer les Français qui s'apprêtent à rentrer au pays et qui, dans les conditions actuelles, ne bénéficieraient d'aucune couverture sociale.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je souhaite expliciter la raison pour laquelle j'émets un avis favorable sur l'amendement n° 1284 tout en demandant le retrait de l'amendement n° 1251.

L'amendement n° 1251 dispose que les intéressés « recouvrent le bénéfice de la prise en charge de leurs frais de santé à leur retour sur le territoire ». Or cette disposition n'est pas opérationnelle : nous savons bien que le recouvrement de la prise en charge ne peut être immédiat.

L'amendement n° 1284 mentionne quant à lui un rétablissement des droits « dans les meilleurs délais », ce qui me semble plus réaliste.

Je confirme ce qui a été dit. La procédure est beaucoup plus simple pour nos compatriotes qui reviennent en France avec un travail que pour une famille avec deux enfants dont les parents sont sans emploi. J'ai notamment en tête la situation d'un couple et de leur enfant en bas âge en situation de handicap : ces personnes ont quelque peu peiné pour retrouver leurs droits.

Je maintiens donc mes avis : avis favorable sur l'amendement n° 1284 ; demande de retrait, sinon avis défavorable sur l'amendement n° 1251.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L'amendement n° 1251 de Mme Vogel me semble tout à fait pertinent : je suis également favorable au remboursement des soins dès l'arrivée sur le territoire français.

Je m'interroge néanmoins sur la situation des étudiants qui quittent leur domicile pour une année d'études à l'étranger, ce qui est un cas de figure de plus en plus fréquent. Comment cela se passe-t-il pour eux ? Sont-ils concernés par le délai de carence de trois mois ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1251.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1284.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 18.

L'amendement n° 778 rectifié, présenté par Mmes N. Goulet, Romagny et Sollogoub et MM. Canévet et Bitz, est ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 160-8 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La protection sociale contre le risque et les conséquences de la maladie ne comporte pas la couverture des conséquences d'actes de chirurgie esthétique non réparatrice réalisés dans un pays non membre de l'Union européenne. »

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, récurrent, s'appuie sur une proposition de la mission commune d'information sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique menée en 2012, qui abordait déjà à l'époque la question du tourisme en la matière.

Madame la ministre, vous proposez un « forfait de responsabilité ». Je vous propose pour ma part d'exclure de la solidarité nationale les conséquences d'un tourisme à vocation esthétique.

Vous appelez sans cesse à la responsabilité. Je ne vois pas à quel titre la solidarité nationale devrait s'exercer pour réparer les conséquences d'implants capillaires mal réalisés ou de rhinoplasties ratées à l'étranger.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission comprend bien sûr l'intention de l'auteure de cet amendement.

Compte tenu de la situation financière de la branche maladie, le Gouvernement réclame, il est vrai, des efforts accrus aux assurés pour participer à leurs frais de santé.

Dans ce contexte, il est légitime de se demander pourquoi les suites d'opérations de chirurgie esthétique ratées et parfaitement évitables, réalisées par des professionnels peu qualifiés dans certains pays situés en dehors de l'Union européenne, continuent à être prises en charge par la sécurité sociale.

Pour autant, le principe même de l'assurance maladie repose sur une prise en charge de tous les problèmes de santé, y compris ceux dont les assurés sont directement responsables.

Ainsi, il n'est pas question de refuser la prise en charge des soins des assurés qui se blessent en pratiquant un sport dangereux ou qui tombent malades du fait de certaines habitudes alimentaires.

De plus, les opérations de chirurgie esthétique ratées peuvent avoir des conséquences vitales et engendrer des frais que beaucoup ne seront pas en mesure d'assumer.

Ayons donc bien en tête les conséquences qu'aurait l'adoption d'un tel amendement. Pour lutter contre le phénomène, il nous semble préférable de renforcer la prévention, notamment en communiquant largement sur les risques liés à ces pratiques sur les réseaux sociaux.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je partage l'avis de Mme la rapporteure : je suis défavorable à cet amendement, à moins que son auteure ne le retire, ce qui serait préférable.

Dès lors qu'elle en a le droit, toute personne de nationalité française doit être soignée et, le cas échéant, remboursée. Fixer des limites en la matière soulèverait de nombreuses questions, que Mme la rapporteure a d'ailleurs partiellement abordées. Où placerait-on, par exemple, la responsabilité d'un malade par rapport à sa maladie ?

J'ai la conviction qu'il faut privilégier l'éducation à la santé et mieux informer les personnes qui envisagent de se faire opérer à l'étranger.

Par conséquent, je souhaite le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je comprends la préoccupation de notre collègue Nathalie Goulet, dont je reconnais bien là le sens de la rigueur en matière de dépenses publiques et sociales.

En réalité, cet amendement vise à sanctionner la bêtise, celle de ces personnes assez bêtes pour subir des soins esthétiques à l'étranger dans des conditions sanitaires non sécurisées, et qui reviennent en France avec les conséquences de ces opérations.

Puisqu'elles ont été assez bêtes pour agir ainsi, nous n'aurions pas à payer pour elles. L'idée est tentante, mais elle n'est pas juste. Elle est tentante, mais non conforme au principe selon lequel nous soignons tout le monde dans ce pays.

Commencer à ne pas soigner les conséquences de la bêtise pourrait nous mener très loin, bien plus loin que vous ne le souhaitez vous-même, ma chère collègue, et pas seulement pour les soins réalisés à l'étranger. N'entrebâillons pas cette porte ! (Mme Nadia Sollogoub acquiesce.)

Comme l'a dit Mme la ministre, il faut éduquer les gens, les informer, leur expliquer les risques. Les soins esthétiques ne sont d'ailleurs pas les seuls concernés : nombre de soins dentaires se pratiquent désormais dans des pays étrangers, en Europe ou ailleurs. Ils ne se déroulent pas toujours bien, si bien que des dentistes français sont ensuite sollicités pour rattraper ce qui peut l'être. Il n'est pas question non plus de dérembourser ces soins-là.

Je comprends donc l'idée, ma chère collègue, mais l'amendement que vous proposez ne me semble pas la bonne solution.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Je partage tout à fait l'avis de Mme Imbert : il n'est pas possible d'envisager de juger les personnes sur leurs comportements en matière de santé.

Une personne qui fume pourrait être considérée en partie responsable de son cancer. Allons-nous pour autant ne pas la soigner ?

Nous nous posons de telles questions depuis très longtemps et certains pays ont fait ce choix…

Mme Stéphanie Rist, ministre. Ils en sont revenus !

Mme Anne Souyris. Ce n'est pas le nôtre. J'espère que nous continuerons à soigner les gens sans jamais juger leur comportement.

En revanche, s'il y a des mesures à prendre, madame Goulet – vous en conviendrez sans doute –, ce sont des sanctions. Il faut sanctionner les personnes qui promeuvent ce type d'opérations sur les réseaux sociaux ou qui pratiquent illégalement la médecine esthétique. Il faut conclure des accords avec les pays concernés.

Parfois même, des actes illégaux de pseudo-médecine esthétique sont pratiqués en France ou en Europe. Ils occasionnent de véritables catastrophes sanitaires.

Comme cela a été dit, il faut renforcer la prévention et l'information, mais aussi sanctionner, ainsi que le demande l'ordre des médecins.

Cette option est bien plus efficace que de ne pas soigner les gens. Que ferions-nous en cas de complications ? Nous laisserions les gens mourir ? C'est tout de même un problème.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. De prime abord, l'idée de Mme Goulet pourrait paraître tentante. Je rappelle néanmoins qu'en tant que médecins, nous prêtons le serment d'Hippocrate.

Mme Pascale Gruny. Très bien !

Mme Émilienne Poumirol. Nous nous engageons donc à soigner tout le monde, quel que soit le statut du patient ou la cause de sa maladie.

Ma chère collègue, si nous approuvions votre raisonnement, nous créerions une jurisprudence pouvant conduire, comme le soulignait à l'instant notre collègue, à juger de la responsabilité de chaque patient.

Pourquoi rembourser les soins liés au cancer du poumon, puisqu'il est lié au tabagisme ? N'est-ce pas la faute du patient s'il a développé un cancer ? Nous pourrions multiplier les exemples à foison. N'entrons pas dans cette logique.

C'est toute la noblesse du métier de médecin que d'être lié par le serment d'Hippocrate et de soigner tout le monde. Gardons ce principe, même si, en effet, nous pourrions être tentés de ne pas subir les conséquences de certains actes qui, comme l'indiquait Laurence Rossignol, relèvent de la bêtise propre.

Il est préférable d'aller sur le terrain de l'explication et de la prévention en matière de tabagisme, d'alcoolisme ou de sédentarité.

Nous aborderons le volet de la prévention à l'article 19. En attendant, nous ne pouvons pas refuser de rembourser un patient, quel qu'il soit.

Mme Nathalie Goulet. Je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 778 rectifié est retiré.

Mes chers collègues, je vais lever la séance. Nous avons examiné 150 amendements au cours de la journée ; il en reste précisément 619 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

6

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, dimanche 23 novembre 2025 :

À neuf heures trente, quatorze heures trente, le soir et la nuit :

Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, transmis en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (texte n° 122, 2025-2026).

La prochaine séance aura lieu demain, dimanche 23 novembre, à 9 heures 30, pour la suite de l'examen de ce projet de loi.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le dimanche 23 novembre 2025, à zéro heure trente.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

JEAN-CYRIL MASSERON