EXPOSÉ GÉNÉRAL
Le présent projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques a pour principal objectif de permettre à la France de remplir les objectifs fixés par la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, et en particulier de parvenir d'ici 2015 au bon état écologique des eaux.
La politique de l'eau : une législation communautaire importante La politique de l'eau est largement encadrée par la législation communautaire. Le rapport de notre collègue député Jean-Claude Flory sur les redevances des agences de l'eau 5 ( * ) dénombrait ainsi 18 directives importantes dans le domaine de l'eau, depuis 1975 jusqu'à la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Cette directive, dite « directive cadre sur l'eau », constitue la pièce législative centrale dans laquelle sont regroupées les principales obligations concernant la gestion de l'eau dans l'Union européenne. Comme l'avait indiqué, devant le groupe d'études sur l'eau du Sénat, M. Helmut Blöch, directeur de l'unité « protection des eaux, conservation des sols et agriculture » à la direction de l'environnement de la Commission européenne 6 ( * ) , les objectifs essentiels de la directive sont les suivants : - axer la politique communautaire de l'eau sur une logique de bassin hydrographique et établir un plan de gestion pour chaque district, ce modèle étant notamment appliqué en France ; - protéger toutes les eaux et faire en sorte qu'elles atteignent un bon état à l'horizon 2015 ; - recenser toutes les zones nécessitant une protection spéciale (zones visées par les législations communautaire, nationale ou régionale mais aussi zones de captage des eaux potables...) ; - adopter une approche combinée entre, d'une part, les normes de qualité et, d'autre part, les valeurs limites d'émission basées sur les meilleures techniques disponibles ; - concrétiser immédiatement cette approche combinée pour les substances déclarées dangereuses ; - prendre en compte le principe de récupération des coûts des services liés à l'eau, en s'appuyant sur une analyse économique ; - accroître la participation du public en l'informant davantage et en l'associant à la prise de décision. |
A cette fin, le présent projet de loi, qui comprend 50 articles répartis en quatre titres, repose sur sept grands axes :
- la rénovation de l'organisation institutionnelle ;
- la lutte contre les pollutions diffuses ;
- la reconquête de la qualité écologique des cours d'eau ;
- le renforcement de la gestion locale et concertée des ressources en eau ;
- la simplification et le renforcement de la police de l'eau ;
- le renforcement des outils à la disposition des maires pour gérer les services publics de l'eau et de l'assainissement dans la transparence ;
- la réforme de l'organisation de la pêche.
Votre commission des finances s'est principalement intéressée à trois aspects ayant une incidence financière : le fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues urbaines et industrielles, certaines dispositions relatives aux collectivités territoriales et la réforme de la gouvernance et du financement de la politique de l'eau.
I. LE FONDS DE GARANTIE DES RISQUES LIÉS À L'ÉPANDAGE AGRICOLE DES BOUES URBAINES ET INDUSTRIELLES
L'article 21 du présent projet de loi prévoit l'institution d'un Fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues urbaines et industrielles.
Ce fonds serait chargé d'indemniser les préjudices subis par les exploitants agricoles et les propriétaires des terres agricoles et forestières ayant reçu des épandages de boues d'épuration urbaines ou industrielles, au cas où ces terres deviendraient totalement ou partiellement impropres à la culture en raison de la réalisation d'un risque sanitaire ou de la survenance d'un dommage écologique liés à l'épandage. L'indemnisation ne serait possible que si ce risque ou ce dommage ne pouvaient être connus au moment de l'épandage.
La création de ce fonds soulève quelques questions qui mériteront d'être précisées au cours de l'examen du présent projet de loi :
- d'abord sur l'opportunité de créer ce fonds : l'étude d'impact du présent projet de loi indique expressément que « la création d'un tel fonds n'est pas indispensable sur un strict plan rationnel ». Il semble toutefois, suivant la logique développée par le ministère de l'écologie et du développement durable, que ce fonds permette de créer un « climat plus serein » autour de la démarche de l'épandage, considérée par le ministère comme la moins coûteuse et la plus écologique ;
- sur un plan technique, la principale question posée est celle de savoir s'il est nécessaire de prévoir un dispositif complémentaire aux assurances existantes et quelle est l'articulation avec les assurances existantes. Votre commission des finances présentera un amendement tendant à mieux définir cette articulation ;
- enfin, une interrogation légitime porte sur le risque de dérive budgétaire pour l'Etat qu'impliquerait la création de ce fonds. En effet, d'un côté, il est prévu que ce fonds n'intervient que dans la limite de ses ressources, mais de l'autre, il est prévu qu'il peut recevoir des avances de l'Etat.
* 5 Jean-Claude Flory, Les redevances des agences de l'eau - Enjeux, objectifs et propositions d'évolution dans la perspective de la réforme de la politique de l'eau, rapport au Premier ministre et à la ministre de l'écologie et du développement durable, octobre 2003.
* 6 Se reporter au rapport d'information n° 146 (2000-2001) de nos collègues Jean François-Poncet et Jacques Oudin, La réforme de la loi sur l'eau : enjeux environnementaux et financiers.