4. La convergence du mode d'attribution du minimum  garanti dans la fonction publique et du minimum contributif du régime général (article 24)
a) Un mode d'attribution du minimum garanti plus favorable par rapport à celui du minimum contributif

La loi précitée du 21 août 2003 portant réforme des retraites a posé l'objectif d'un taux de remplacement de 85 % du SMIC net pour un assuré ayant accompli une carrière complète, cotisée au SMIC et à temps plein . Ce principe s'applique aussi bien aux salariés du secteur privé qu'aux fonctionnaires. Cependant, les mécanismes devant permettre de remplir cet objectif - le « minimum contributif » dans le secteur privé et le « minimum garanti » dans le secteur public - diffèrent tant dans leur mode d'attribution que dans leur montant .

(1) Le minimum contributif

L'article L. 351-10 du code de la sécurité sociale dispose ainsi que la pension de vieillesse au taux plein est assortie , le cas échéant, d'une majoration permettant de porter cette prestation, lors de sa liquidation, à un montant minimum tenant compte de la durée d'assurance accomplie par l'assuré dans le régime général, le cas échéant rapportée à la durée d'assurance accomplie tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, lorsque la carrière a été complète.

Il est précisé que ce montant minimum est majoré au titre des seules périodes ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré (durée cotisée et non uniquement validée). Ce complément apporté au minimum contributif « de base » s'intègre dans l'objectif d'un taux de remplacement de 85 % du SMIC net en cas de carrière complète, posé par l'article 26 de la loi précitée portant réforme des retraites, et est proportionnel au nombre de trimestres effectivement travaillés.

La majoration pour enfants, la majoration pour conjoint à charge et la rente des retraites ouvrières et paysannes s'ajoutent à ce montant minimum.

A la suite des critiques émises par la Cour des comptes 30 ( * ) sur le manque de ciblage du minimum contributif, l'article 80 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 en a durci les conditions d'octroi :

- en instaurant, à compter du 1 er janvier 2009, une limite à la majoration au titre des périodes ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré : elle ne s'applique plus que lorsque la durée d'assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré, accomplie tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, est au moins égale à une limite fixée par décret, soit 30 annuités ;

- en mettant sous condition de revenu la majoration de minimum contributif, à compter du 1 er juillet 2010 : celui-ci est versé sous réserve que le montant mensuel total des pensions personnelles de retraite attribuées à l'assuré n'excède pas un montant fixé par décret. Cette mesure se heurte à des difficultés techniques de telle sorte que le décret n'est pas encore paru. Ce montant devrait être fixé à 990 euros par mois.

Si le montant du minimum contributif de base est indexé, comme les pensions vieillesse, sur l'évolution des prix, le montant de la majoration du minimum contributif a fait l'objet de plusieurs revalorisations aux 1 er janvier 2004, 2006 et 2008.

Au 1 er avril 2010, le montant du minimum contributif était de 595,64 euros et de 650,87 pour le minimum majoré.

(2) Le minimum garanti

Comme le souligne le rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2010, l'objectif d'une pension minimale de 85 % du SMIC net pour une carrière complète posé par la loi du 21 aout 2003 « est atteint par essence » pour les fonctionnaires , compte tenu du barème spécifique du minimum garanti. Le montant du minimum garanti à taux plein représente en effet environ 100 % du SMIC net . Par ailleurs, cette estimation renvoie en fait à un cas théorique car la liquidation sur la base de l'indice terminal pour une carrière complète accomplie au sein du grade le moins élevé de la fonction publique aboutit à une pension supérieure au minimum garanti et ce dernier bénéficie de fait à de agents ayant eu une carrière incomplète dans la fonction publique.

Le principe du minimum garanti est simple : lors de la liquidation d'une pension, le service gestionnaire compare le montant de la pension calculée selon les règles de droit commun avec celui issu du calcul du minimum garanti . Le montant le plus favorable est retenu. Si, comme dans le secteur privé, le minimum garanti est réduit en proportion de la durée de cotisation validée, les fonctionnaires bénéficient de ce dispositif dès qu'ils atteignent l'âge d'ouverture des droits, sans condition de taux plein .

Le montant du minimum garanti est calculé en proportion d'un indice de référence , dont la valeur en euros a été constatée au 1 er janvier 2004 puis revalorisée chaque année conformément à l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac. Cet indice de référence, qui était l'indice majoré 216 pour les pensions liquidées en 2003, sera progressivement porté à l'indice majoré 227 pour les pensions liquidées en 2013, conformément aux dispositions de l'article 51 de la loi du 21 août 2003.

En contrepartie, la loi précitée prévoit que le taux plein du minimum garanti sera acquis pour une durée de service plus longue, passant progressivement de 25 à 40 ans entre 2007 et 2013.

Ainsi, au 1 er janvier 2013, le taux de liquidation obtenu après 15 ans de services correspondra à 57,5 % du montant maximum du minimum garanti. Il progressera ensuite de 2,5 points par an entre 15 et 30 ans de services et de 0,5 point par année supplémentaire au-delà et jusqu'à quarante années pour atteindre 100 %.

Minimum garanti et durée d'assurance

Source : COR, « Le minimum garanti dans les régimes de retraite de la fonction publique », juin 2006

Selon les données du rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, sur le flux des départs en retraite de 2008 dans la fonction publique d'Etat, 10,7 % des pensions civiles et 28,6 % des pensions militaires ont été portées au minimum garanti. Dans la fonction publique hospitalière, cette proportion s'est élevée à 27,4 % et à 46,3 % dans la fonction publique territoriale.

Comme le soulignent les travaux du COR  de juin 2006 31 ( * ) , le minimum garanti concerne principalement des agents ayant effectué des carrières courtes, les agents radiés des cadres de la fonction publique pour invalidité et les femmes qui présentent en moyenne des carrières plus courtes et des indices plus faibles (64 % du flux en 2005).

b) La modification des critères d'éligibilité au minimum garanti

Le I de l' article 24 procède à un rapprochement des règles applicables dans le secteur privé et la fonction publique en modifiant l'article L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite afin de subordonner le versement du minimum garanti à plusieurs conditions alternatives :

- disposer de la durée d'assurance nécessaire pour atteindre le taux plein ;

- avoir atteint la limite d'âge qui annule la décote ;

- liquider sa pension pour l'un des motifs suivants : mise à la retraite pour invalidité, départ anticipé pour les parents de trois enfants ou d'un enfant handicapé, infirmité ou maladie incurable du fonctionnaire ou de son conjoint ayant effectué 15 ans de services, retraite anticipée pour les fonctionnaires handicapés, mise à la retraite pour invalidité des militaires.

Le II et le III de l' article 24 fixent les modalités de transition de cette mesure :

- le II abaisse, de manière transitoire, et uniquement pour l'application du dispositif du minimum garanti, l'âge d'annulation de la décote afin que les agents qui ne remplissent aucune des nouvelles conditions posées par le I, compte tenu de la montée en charge de la durée d'assurance ou de l'âge d'annulation de la décote, puissent néanmoins bénéficier du minimum garanti à compter d'un âge inférieur à l'âge d'annulation de la décote ;

- le III décrit les conditions d'application dans le temps du nouveau dispositif. Il s'appliquera aux pensions liquidées à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. Une exception est cependant prévue pour les fonctionnaires civils et les magistrats qui auraient atteint, avant cette date, l'âge de liquidation qui leur est applicable en l'état actuel du droit.

Selon l'étude d'impact annexée au présent projet de loi, cette mesure devrait permettre une économie en 2015 d'environ 500 millions d'euros , à hauteur de 140 millions d'euros pour l'Etat et de 350 millions d'euros pour la CNRACL.

Rendement de la mesure

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Rendement total

0

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,8

0,9

Source : ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique

c) Un calcul du minimum garanti qui demeure non linéaire et un montant toujours plus élevé

Votre rapporteur pour avis accueille favorablement la subordination, comme dans le secteur privé, de l'attribution du minimum garanti à l'obtention d'une pension à taux plein .

Cependant, l'alignement sur le secteur privé n'est pas achevé ; d'autres particularités du minimum garanti mériteraient encore à terme d'être réexaminées :

- d'une part, le montant du minimum garanti est plus élevé - 1 067 euros - que celui du minimum contributif - 650,87 euros pour le minimum majoré au 1 er avril 2010 pour un objectif visé de 85 % du SMIC net soit 897 euros ;

- d'autre part, le calcul du minimum garanti n'est pas linéaire en fonction de la durée de cotisation ce qui peut avoir un caractère désincitatif . En effet, comme le souligne le COR 32 ( * ) : « Alors qu'un barème linéaire conduirait à accorder 2,5 % du minimum garanti pour chaque année de service (soit 100 % pour 40 ans), le dispositif mis en place par la loi de 2003 conduit à accorder un pourcentage plus élevé du minimum garanti pour chacune des premières années de service et, à l'inverse, un pourcentage plus faible pour les dernières années de la carrière (à partir de la 30 ème année dans le dispositif prévu à terme en 2013, il ne sera que de 0,5 %). Ce barème favorise les personnes, généralement polypensionnées, ayant eu une faible durée de cotisation dans un régime de la fonction publique. Il n'incite pas ceux qui ont validé une durée plus longue à prolonger leur activité dans la fonction publique au-delà de l'âge minimum de liquidation, compte tenu de sa faible progressivité . »


* 30 Cour des comptes, rapport sur la sécurité sociale - septembre 2008.

* 31 COR, « Le minimum garanti dans les régimes de retraite de la fonction publique » - juin 2006.

* 32 Source : COR, « Le minimum garanti dans les régimes de retraite de la fonction publique », juin 2006

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