F. UN OBJECTIF DES 0,7 % DU RNB CONSACRÉ À L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT ENCORE LOIN D'ÊTRE ATTEINT PAR LA FRANCE
Le tableau ci-dessous présente la série statistique de l'APD cumulée des pays du comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE et celle de la France, en valeur absolue et en pourcentage du RNB depuis 1981 2 ( * ) (versements, en millions de dollars).
Année |
APD nette totale
|
APD nette
|
Ratio APD en % RNB de la France |
1981 |
24 610 |
2 964 |
0,52 |
1982 |
27 040 |
3 050 |
0,56 |
1983 |
26 772 |
2 909 |
0,56 |
1984 |
28 134 |
3 026 |
0,62 |
1985 |
28 774 |
3 134 |
0,61 |
1986 |
35 853 |
4 042 |
0,56 |
1987 |
40 641 |
5 250 |
0,60 |
1988 |
47 108 |
5 463 |
0,57 |
1989 |
45 775 |
5 802 |
0,61 |
1990 |
54 329 |
7 163 |
0,60 |
1991 |
58 368 |
7 386 |
0,62 |
1992 |
62 440 |
8 270 |
0,63 |
1993 |
56 286 |
7 915 |
0,63 |
1994 |
58 991 |
8 466 |
0,62 |
1995 |
58 896 |
8 443 |
0,55 |
1996 |
55 751 |
7 451 |
0,48 |
1997 |
48 658 |
6 307 |
0,44 |
1998 |
52 312 |
5 742 |
0,38 |
1999 |
53 601 |
5 639 |
0,38 |
2000 |
54 021 |
4 105 |
0,31 |
2001 |
52 767 |
4 198 |
0,31 |
2002 |
58 654 |
5 486 |
0,38 |
2003 |
69 583 |
7 253 |
0,40 |
2004 |
80 130 |
8 473 |
|
108 296 |
10 026 |
0,47 |
|
2006 |
105 415 |
10 601 |
0,47 |
2007 |
104 917 |
9 884 |
0,38 |
2008 |
122 784 |
10 908 |
0,39 |
2009 |
120 558 |
12 602 |
0,47 |
2010 |
129 066 |
12 915 |
0,50 |
2011 |
134 670 |
12 997 |
0,46 |
2012 |
126 946 |
12 028 |
0,45 |
2013 |
135 072 |
11 339 |
0,41 |
2014* |
135 164 |
10 371 |
0,36 |
Source: OCDE, CAD 2a |
En 2014, selon les données préliminaires, les dix principaux pays contributeurs en volume à l'aide publique au développement (APD) ont été, par ordre décroissant : les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la France, le Japon, la Suède, les Pays-Bas, la Norvège, l'Australie et le Canada.
Pour cette même année, le volume d'APD versé par les membres du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE s'est chiffré à plus de 135 milliards de dollars, ce qui représente 0,29% de leur revenu national brut (RNB) cumulé (contre 0,3% en 2013). Entre 2013 et 2014, l'APD nette versée par les donateurs du CAD a stagné.
1. Des évolutions internationales contrastées
Dans la période récente, les pays développés ont cependant connu des évolutions contrastées de leur effort en faveur du développement.
Ainsi, les pays du nord de l'Europe, qui se sont fixé pour objectif d'atteindre un ratio d'APD/RNB de 1 %, confirment leur détermination à maintenir leurs efforts . En 2014, la Suède et la Norvège font partie des premiers donateurs du CAD en part du RNB (respectivement 1 er et 3 ème , le Luxembourg étant 2 ème ). Depuis 2009, ces deux pays ont toujours consacré plus de 0,9 % de leur RNB à l'APD avec des ratios proches, voire supérieurs à 1 %. Les deux pays devraient maintenir ce ratio dans les prochaines années. Cet objectif fait l'objet d'un large consensus politique et sert de cadrage à la programmation budgétaire. Les débats publics se concentrent surtout sur l'amélioration de l'efficacité de l'aide et de la « redevabilité ».
Les Pays-Bas semblent, quant à eux, remettre en cause l'objectif de consacrer 1% de leur RNB en APD. Dans un contexte de réductions budgétaires importantes, l'APD a diminué de plus de 900 millions de dollars entre 2011 et 2013. Alors que le ratio d'APD en part du RNB était supérieur à 0,7 % depuis de nombreuses années, il est passé à 0,67 % en 2013 et à 0,64 % en 2014.
Par ailleurs, l'exception britannique mérite d'être soulignée . Le Royaume-Uni, deuxième donateur du CAD en volume (près de 19,4 milliards de dollars en 2014) s'est distingué en atteignant la cible de 0,7% en 2013 (soit deux ans plus tôt que la date initialement fixée). Cet objectif avait été consacré dans une loi de programmation. L'APD constitue ainsi une exception au sein d'un budget soumis à de sévères coupes dans tous les autres domaines. Cette situation fait toutefois l'objet de contestations régulières au Royaume-Uni.
Allemagne, États-Unis, Japon et Canada se caractérisent par une stabilité des volumes d'APD qui se traduira toutefois par des variations de ratios sensibles.
L'Allemagne , troisième donateur du CAD en volume (plus de 16 milliards de dollars en 2014), dont le ratio d'aide se situait autour de 0,38 % jusque 2013, dépasse les 0,4 % pour la dernière année connue (0,41 % en 2014). Elle n'a pas tenu son engagement de consacrer 0,51 % de son RNB en APD en 2010. Bien que le gouvernement ait maintenu son engagement de respecter la cible des 0,7 % en APD en 2015, celui-ci apparaît difficilement atteignable, malgré la nette augmentation de 2014. Toutefois, l'annonce de 8,3 milliards d'euros de budget supplémentaires dédiés au développement sur la période allant de 2016 à 2019 pourrait modifier le ratio d'APD sur le RNB du pays dès 2016.
Premier donateur en volume (32,7 Mds de dollars en 2014), les États-Unis se caractérisent par un ratio d'aide faible (0,19 % du RNB en 2014), qui ne devrait pas s'accroître au cours des prochaines années malgré les demandes d'augmentation du budget consacré à l'action extérieure pour 2013 (+2,3 %), provenant du Département d'Etat et d'USAID en particulier. Les États-Unis n'ont jamais adhéré à l'engagement international des 0,7 % et ne se considèrent donc pas comme liés par cet objectif.
Dixième donateur mondial en volume en 2014 (4,2 milliards de dollars), le Canada a vu son ratio APD/RNB fortement diminuer entre 2012 et 2014 (passant de 0,32 à 0,24 %). Le ratio devrait continuer à diminuer dans les prochaines années. Lors de sa revue par les Pairs du CAD de l'OCDE, le 15 mai 2012, le Canada a formellement démenti s'être engagé à respecter l'objectif international de 0,7 % d'APD.
Après avoir légèrement diminué entre 2010 et 2011, l'APD du Japon a fortement augmenté entre 2012 et 2013. L'effort en termes de RNB s'est élevé à 0,23% en 2013, niveau historiquement haut. En 2014 cependant, l'APD a baissé de près de 2,4 milliards de dollars, ramenant le ratio à 0,19%. Ces fluctuations importantes des flux nets d'APD peuvent s'expliquer par la structure de l'aide du Japon, constituée à 60% de prêts, et dont les importants remboursements perçus certaines années se déduisent des flux d'APD brute. Enfin, compte tenu des difficultés économiques et budgétaires actuelles, ainsi que des dépenses de reconstruction imposées par les catastrophes de 2011, il est de plus en plus difficile pour les pouvoirs publics d'assurer une progression durable du budget de l'APD.
Enfin, l'Espagne et les autres pays d'Europe du sud compriment fortement leur APD.
L'Espagne avait entrepris ces dernières années un effort important d'augmentation de son APD qui avait atteint 0,43% du RNB en 2010 (5,9 milliards de dollars). La politique de rigueur budgétaire a conduit à de fortes réductions dans le budget de la coopération dès 2011 et à sa sortie du classement des dix premiers donateurs en volume. Alors que son APD avait chuté de 50% entre 2011 et 2012, elle a sensiblement augmenté en 2013 pour atteindre près de 2,4 milliards de dollars. L'année 2014 marque une nouvelle baisse, l'APD atteignant 1,9 milliard de dollars, soit 0,14% du RNB.
On observe une baisse similaire dans les autres pays d'Europe du sud frappés par la crise. La Grèce, dont le ratio d'APD était déjà faible avant la crise économique et financière, a vu son aide chuter de 50% entre 2010 et 2014, passant sous la barre des 0,11% du RNB. Le Portugal est également passé d'un taux d'APD en part de RNB de 0,29% en 2010 à 0,19% en 2014. L'Italie reste depuis cinq ans sous le taux de 0,20% d'APD en part de RNB.
2. Le cas de la France
L'APD française s'est établie à 0,36% du RNB en 2014, faisant perdre à la France sa deuxième place de bailleur en point de RNB parmi les bailleurs du G7 (au profit de l'Allemagne) . La France a rappelé que l'objectif d'atteindre d'ici 2015 le taux de 0,7% du RNB consacré à l'aide publique au développement constituait un engagement particulièrement exigeant dans le contexte budgétaire et économique actuel, qui n'a pas permis l'élaboration de la feuille de route souhaitée par le CAD. Le Président de la République avait réaffirmé en clôture des « Assises du développement et de la solidarité internationale » en mars 2013 l'engagement de la France de replacer l'aide publique dans une trajectoire compatible avec les objectifs internationaux dès que le retour durable de la croissance le permettra.
Il convient de rappeler à cet égard qu'au niveau communautaire, dans le projet de conclusions du Conseil, adopté le 26 mai 2015, les pays entrés dans l'Union européenne avant 2002 réaffirment l'objectif d'atteindre 0,7% dans l'horizon temporel de l'agenda post-2015 (soit en 2030). Les circonstances budgétaires exceptionnelles auxquelles sont confrontés certains pays, dont la France, sont explicitement mentionnées.
L'atteinte des objectifs d'aide passera par la promotion d'une approche globale du développement et de son financement, que la France défend dans les enceintes internationales, ainsi que par le développement d'approches innovantes complémentaires aux outils traditionnels de l'aide. La France continue par exemple de plaider pour une taxe sur les transactions financières européenne, dont une partie serait également affectée au développement, à l'instar de la taxe française (cf. partie II B).
Cette approche large du financement du développement, mobilisant toutes les ressources disponibles (domestiques et internationales, publiques et privées) a été réaffirmée dans le programme d'action d'Addis-Abeba adopté à l'issue de la troisième conférence internationale sur le financement du développement le 16 juillet 2015.
* 2 Pour 2014, le tableau présente les données préliminaires publiées en avril 2015 par le CAD. Le chiffre définitif d'APD 2014 de la France transmis au Secrétariat du CAD est de 10,6 Md$ (le ratio définitif d'APD de la France pour 2014 en % du RNB s'élèverait donc à 0,37%). Ce chiffre est en cours de vérification par les services de l'OCDE et sera publié d'ici la fin de l'année 2015.