B. DE NOMBREUSES INTERROGATIONS SUR L'EXTENSION DE CETTE EXPÉRIMENTATION

Pour votre rapporteur pour avis, de nombreuses questions se posent sur l'extension de cette expérimentation. La première concerne les moyens . En effet, 30 millions d'euros sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 2020 pour accueillir selon les documents budgétaires 20 000 jeunes , soit la généralisation de la préfiguration du SNU à l'ensemble des départements, mais toujours sur la base du volontariat et dans un nombre limité de places . Or à plusieurs reprises, M. Gabriel Attal, secrétaire d'État, a déclaré que ce nombre serait de 30 000. Face à cette différence de chiffrage, votre rapporteur pour avis l'a interrogé lors de son audition le 13 novembre dernier devant votre commission sur le nombre de jeunes en SNU l'année prochaine. En effet, le budget a été construit sur la base d'un coût par jeune de 1 500 euros. Dès lors, si 30 000 jeunes sont accueillis l'année prochaine, le coût passerait de 30 millions d'euros à 45 millions d'euros, soit une augmentation de 50 % du budget de cette action . Selon les propos du secrétaire d'État, le nombre de participants serait certainement compris entre 20 000 et 30 000 jeunes, « en fonction des résultats de la cartographie en cours des places d'accueil disponibles ». Votre rapporteur pour avis appelle à la vigilance sur l'exécution budgétaire de cette action , afin qu'elle ne se réalise pas au détriment d'autres actions de ce programme. Il demande en outre au Gouvernement une information complète et régulière sur le suivi de cette exécution .

Par ailleurs, l'extension du nombre de participants interroge sur la capacité d'accueillir ces jeunes et de les encadrer . Votre rapporteur pour avis se demande si la mise en place du SNU pour l'ensemble d'une classe d'âge - soit 750 000 à 800 000 jeunes -, ne nécessitera pas la construction de bâtiments dédiés à cette opération. Ainsi, en Guyane, votre rapporteur pour avis note que les jeunes ont dormi en partie à l'hôtel, en raison d'absence d'internats ou de centres de vacances disponibles. De manière générale, les jeunes ont été logés en internat, dans les locaux du CROUS (Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires) ou encore dans des bâtiments de l'IGESA (Institution de gestion sociale des armées). Lors de son audition, M. Dujol est revenu sur la question des locaux. Les premiers retours semblent indiquer que la solution du recours aux internats des lycées a un bilan mitigé . En effet, ce type d'hébergement, où sont présents d'autres élèves, atténue l'effet de corps et de cohésion qu'ont pu connaître d'autres groupes de jeunes. Votre rapporteur pour avis s'interroge également sur la pérennité du recours à ces places d'internat au moment où le ministère de l'éducation nationale évoque la nécessité d'une « reconquête du mois de juin » comme mois de cours pour les élèves de seconde.

Interrogé sur ce point logistique lors de son audition devant votre commission le 13 novembre dernier, M. Gabriel Attal a indiqué avoir demandé à chaque préfet de procéder au recensement des places disponibles en juin dans les internats de lycées et collèges, dans les centres de vacances ou encore les bâtiments de l'armée. Votre rapporteur pour avis souligne que cette capacité d'accueil, selon les propos mêmes du secrétaire d'État, est une condition sine qua non de l'extension du dispositif : « au regard des places disponibles, nous pourrons déterminer le nombre de volontaires que nous pourrons accueillir à cette période de l'année. Il faut une place pour chaque jeune retenu, afin de ne pas créer de déception » 25 ( * ) . Il semble ainsi à votre rapporteur pour avis que le Gouvernement peine déjà à trouver des places pour accueillir 20 000 à 30 000 jeunes , alors que ce nombre ne représente même pas 4 % d'une classe d'âge.

La solution des « petites vacances scolaires » pour effectuer cette première phase du SNU, notamment en utilisant les locaux de tels ou tels centres de vacances moins fréquentés en fonction des saisons, pose également des questions d'organisation pratique pour le jeune : déplacement lors de jours de grand départ en vacances, devoirs à rendre au retour de son stage de cohésion, ....

En outre, votre rapporteur pour avis souligne les besoins importants de recrutement pour encadrer ces jeunes et prendre en charge l'animation de ce séjour de cohésion. Dans le cadre de cette préfiguration, 450 personnes ont été formées, sur le camp de Coëtquidan à Saint-Cyr. Le profil de ces encadrants se décline comme suit :

- 33 % sont d'anciens militaires ;

- 33 % sont des personnels actuels ou des retraités de l'éducation nationale ;

- 33 % sont membres de l'éducation populaire (associations,...).

Le taux d'encadrement est particulièrement élevé : un adulte pour cinq jeunes . Ainsi, il faudrait en 2020 4 500 encadrants pour 20 000 jeunes - 6 000 pour 30 000 jeunes . Le défi pour le ministère est de réussir à fidéliser un vivier d'encadrement, mobilisable toute l'année. De l'aveu même du secrétaire d'État lors de son audition du 13 novembre dernier, « le vrai enjeu est moins l'hébergement que celui de l'encadrement. Il est nécessaire de prendre de l'avance pour recruter et former en nombre suffisant les encadrants pour maintenir le haut niveau d'exigence en matière de sécurité que nous avons fixé ».


* 25 Audition plénière du 13 novembre 2019.

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