IV. LES CRÉDITS RELATIFS AUX TÉLÉCOMMUNICATIONS, AUX POSTES ET À L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE (RAPPORTEURE POUR AVIS : MME ANNE-CATHERINE LOISIER)
A. LA RÉUSSITE DU PLAN FRANCE TRÈS HAUT DÉBIT À L'ÉPREUVE DE LA QUALITÉ DU DÉPLOIEMENT DES RÉSEAUX DE FIBRE OPTIQUE
1. Les risques d'un déploiement trop rapide au détriment de la qualité de service des usagers et de la résilience des réseaux
L'objectif de garantir à tous un accès au très haut débit (>30 Mbits/sec) d'ici la fin de l'année 2022 est en passe d'être atteint : au 30 juin 2022, 82 % des locaux, soit 35,2 millions d'entre eux, étaient éligibles au très haut débit par le biais d'une technologie filaire (Ftth, câble, DSL).
Couverture de la France en Ftth au T2 2022, toutes zones confondues
Cette dynamique est soutenue par la vitesse de déploiement de la fibre optique jusqu'à l'abonné (Ftth) à laquelle 75 % des locaux sont éligibles. Avec en moyenne plus d'un million de nouvelles lignes déployées par trimestre, l'objectif de généraliser la fibre optique jusqu'à l'abonné (>100 Mbits/sec) à horizon 2025 semble également pouvoir être atteint.
Premier pays européen en termes de déploiement de la fibre, la France semble toutefois confondre vitesse et précipitation, au détriment de la qualité de service et de la résilience des réseaux de télécommunications . La rapporteure appelle ainsi à :
• se référer à l'indicateur de foyer abonnés à la fibre optique , estimés à 16,3 millions au deuxième trimestre 2022, plutôt qu'à l'indicateur du nombre de locaux raccordables afin de mieux apprécier le taux de pénétration du marché ;
• privilégier l'enfouissement des réseaux de fibre optique (500 000 km), plutôt que leur déploiement aérien dans un contexte de multiplication des tempêtes, des incendies et de dégradation de l'entretien des lignes téléphoniques aériennes ;
• sanctionner davantage les actes de malveillance contre les infrastructures ;
• encadrer de façon plus stricte la sous-traitance et les interventions sur les réseaux en exploitation afin de limiter les malfaçons et les non-conformités.
2. La finalisation du plan France très haut débit est indispensable à la réussite de la fermeture progressive du « réseau cuivre »
Dans la perspective de l'extinction du « réseau cuivre » par Orange, la fermeture commerciale étant prévue d'ici 2026 et la fermeture technique d'ici 2030, le déploiement de la fibre optique s'accélère. Les deux dynamiques sont d'autant plus liées que l'Arcep a fixé un critère selon lequel la fermeture commerciale ne peut intervenir que si 100 % des locaux de la commune sont raccordables à la fibre optique.
Or, en 2025, il est estimé qu'environ 670 000 foyers ne seront pas raccordables à la fibre optique . Ces foyers sont les plus susceptibles d'être raccordés, de façon transitoire, à une technologie non filaire (4G fixe, HD ou THD radio, satellite).
La rapporteure juge ainsi favorable le renforcement du dispositif « Cohésion Numérique des Territoires » , le plafond de l'aide ayant été augmenté à 300 € et jusqu'à 600 € pour les bénéficiaires de minima sociaux.
3. Le budget dédié aux raccordements complexes devrait augmenter pour permettre un accompagnement jusqu'au « dernier mètre » et jusqu'au « dernier abonné »
L'objectif de généraliser la fibre optique sur l'ensemble du territoire d'ici 2025 se heurte aux difficultés liées aux raccordements complexes, dont le coût unitaire moyen est évalué à environ 5 000 € pour les 670 000 foyers concernés, soit un coût total estimé à 3,3 Mds€ pour les trois prochaines années .
Par le truchement du plan de relance, une enveloppe de 150 M€ a été mobilisée sur deux ans, permettant d'engager environ 89 M€ d'autorisations d'engagement (AE) en 2022 et 61 M€ d'AE pour 2023 dans le cadre de l'appel à projet « Création d'Infrastructures de génie civil nécessaires aux raccordements finals ».
Si cet appel à projet est toujours en cours et n'a pas fait l'objet de publication de la part de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), la rapporteure considère qu'il est critique d'augmenter, dans les prochaines années, le budget alloué au financement des raccordements complexes : c'est la condition sine qua non à la finalisation du plan France très haut débit et à la réussite de la fermeture du réseau cuivre .