N° 148

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025,

TOME II

TRANSPORTS

Par MM. Stéphane DEMILLY, Olivier JACQUIN
et Philippe TABAROT,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Philippe Tabarot, premier vice-président ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Hervé Gillé, Rémy Pointereau, Mme Nadège Havet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Yves Roux, Cédric Chevalier, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Audrey Bélim, MM. Pascal Martin, Jean-Claude Anglars, secrétaires ; Mme Jocelyne Antoine, MM. Jean Bacci, Alexandre Basquin, Jean-Pierre Corbisez, Stéphane Demilly, Gilbert-Luc Devinaz, Franck Dhersin, Alain Duffourg, Sébastien Fagnen, Jacques Fernique, Fabien Genet, Éric Gold, Daniel Gueret, Mme Christine Herzog, MM. Joshua Hochart, Olivier Jacquin, Didier Mandelli, Damien Michallet, Louis-Jean de Nicolaÿ, Saïd Omar Oili, Alexandre Ouizille, Clément Pernot, Mme Marie-Laure Phinera-Horth, M. Bernard Pillefer, Mme Kristina Pluchet, MM. Pierre Jean Rochette, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, M. Simon Uzenat, Mme Sylvie Valente Le Hir, MM. Paul Vidal, Michaël Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

CHAPITRE IER
LES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX TRANSPORTS AÉRIENS

Réunie le 27 novembre 2024, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant son rapporteur, Stéphane Demilly, a émis un avis favorable aux crédits relatifs aux transports aériens inscrits au projet de loi de finances pour 2025, sous le bénéfice de l'adoption de trois amendements en faveur de la décarbonation du secteur.

Pour la commission, la trajectoire de modernisation des outils du contrôle aérien français et de ses méthodes de travail est salutaire. Toutefois, les mesures catégorielles prises en faveur des contrôleurs aériens, qui devraient coûter 100 millions d'euros par an financés directement par le secteur, sont particulièrement élevées.

Elles interviennent dans un contexte d'intensification de la pression fiscale sur le transport aérien, notamment à travers la hausse du tarif de solidarité sur les billets d'avion envisagée par le Gouvernement. Pour la commission, cet effort fiscal est excessif et pourrait grever la trajectoire de décarbonation du secteur. De surcroît, le soutien de l'État à destination de la filière aéronautique diminue, contrairement aux promesses du Président de la République en juin 2023.

La commission estime dans ces conditions indispensable de contrecarrer cet effet de ciseau et propose donc d'inciter davantage les compagnies aériennes à acheter des carburants d'aviation durables et de relever les crédits budgétaires destinés à la décarbonation de la filière à la hauteur de la trajectoire définie en 2023 par le Président de la République.

I. UNE MODERNISATION DU CONTRÔLE AÉRIEN FRANÇAIS PAYÉE AU PRIX FORT PAR LE SECTEUR

A. DANS UN CONTEXTE DE DYNAMISME DU TRAFIC, LE CONTRÔLE AÉRIEN FRANÇAIS POURSUIT SA MODERNISATION

Source : DGAC

Passagers France en rapport à 2019

Le rattrapage du trafic aérien à la suite de sa diminution lors de la crise sanitaire se poursuit. En juin 2024, il a atteint 97 % de son niveau de 2019. Toutefois, sa structure s'est transformée : si le trafic international a dépassé de 2 % son niveau de 2019 en juin 2024, le trafic intérieur s'est stabilisé à environ 80 % de son niveau d'avant-crise.

Cette augmentation des circulations engendre une hausse des recettes perçues par l'administration chargée du contrôle aérien, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC). Celle-ci est en effet financée par les taxes et redevances versées par le secteur aérien, qui dépendent du niveau de trafic.

Source : DNSA

Le contrôle aérien français souffre cependant depuis plusieurs années d'un niveau de performance insuffisant. Selon le dernier rapport d'activité du service chargé de la navigation aérienne, « La France est le pays qui génère le plus de retards en Europe » : 7,4 millions de minutes de retard en 2023 au total, ce qui équivaut à 2,31 minutes de retard moyen par vol.

Les principales causes de ces retards sont les mouvements sociaux à l'échelle nationale (réforme des retraites...) au cours du premier semestre 2023 (40 %), le manque d'ouverture de secteurs lors des pics de trafic (20 %), les réductions de capacité de contrôle (17 %) et les mauvaises conditions météorologiques (16 %).

Ces performances décevantes sont dues à deux facteurs :

- d'une part, les technologies utilisées par les contrôleurs aériens sont obsolètes ;

- d'autre part, l'organisation du travail des contrôleurs aériens est inefficiente.

L'administration a donc entamé depuis plusieurs années un programme de modernisation de ses programmes de gestion du trafic. Après une décennie de dérapages des coûts et de retards que le Sénat avait dénoncés, le déploiement opérationnel des nouveaux systèmes « 4 Flight » et « Coflight » a commencé et devrait se poursuivre jusqu'en 2026. Pour la commission, l'achèvement de l'installation trop tardive de ces systèmes est salutaire, mais il est d'ores et déjà nécessaire d'investir dans les nouvelles technologies appelées à les remplacer dès la décennie 2030.

En outre, l'administration chargée du contrôle aérien a entrepris de moderniser ses méthodes de travail. En effet, à l'heure actuelle, son organisation trop rigide a pour effet un déficit de contrôleurs lors des pics de trafic, ce qui engendre des retards. En outre, les contrôleurs aériens ont recours à une pratique opaque : les « clearances ». Ce sont des réductions d'effectifs par rapport à ceux prévus sur le tableau de service décidées par le chef de service visant à une réduction du temps de présence au travail des contrôleurs par rapport à leur service théorique. Au-delà des problèmes de performance qu'elle engendre, cette pratique a été mise en cause dans un rapport du bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile (BEA). L'insuffisance des effectifs de contrôleurs liée aux clearances a en effet contribué à la survenue d'un incident grave de sécurité le 31 décembre 2022 à l'aéroport de Bordeaux-Mérignac.

L'administration a donc prévu de déployer des systèmes de « badgeage » et de vérification biométrique de la présence sur site des contrôleurs entre l'hiver 2025 et la fin de l'été 2026. La commission accueille favorablement cette évolution qui devrait mettre fin à une situation inacceptable.

Le contrôle aérien français projette également de réorganiser son emprise géographique, sur le modèle de ses homologues européens, en réduisant le nombre de tours de contrôles et de centres d'approche afin de reconcentrer ses moyens humains et avoir une gestion plus active des effectifs en fonction du niveau de trafic. Ce processus exige néanmoins de mener une concertation avec les territoires concernés.

B. EN CONTREPARTIE, UN COÛTEUX PROTOCOLE SOCIAL A ÉTÉ SIGNÉ AU SEIN DE L'ADMINISTRATION CHARGÉE DU CONTRÔLE AÉRIEN

Ces évolutions ont lieu dans le cadre du protocole social 2023-2027 signé entre les syndicats et l'administration de l'aviation civile en avril 2024. En contrepartie de la modernisation du fonctionnement de l'administration, le personnel bénéficiera de mesures catégorielles coûteuses, estimées à environ 100 millions d'euros par an par Vincent Capo-Canellas. Or, ce montant sera répercuté sur les taxes et redevances versées par les compagnies aériennes.

Par conséquent, la Commission sera particulièrement vigilante à ce que l'effort de modernisation, l'optimisation de l'organisation du travail et la révision des implantations territoriales du contrôle aérien permettront réellement d'améliorer la qualité du service rendu aux compagnies aériennes.

La loi « Organisation de la navigation aérienne en cas de mouvement social » : une avancée législative d'origine sénatoriale efficace

La loi du 28 décembre 2023 relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic, issue d'une initiative sénatoriale, a permis de limiter l'impact sur le trafic aérien des mouvements sociaux de faible ampleur.

Ce texte crée pour tout agent des services de la navigation aérienne dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols une obligation de se déclarer gréviste au plus tard à midi l'avant-veille de chaque journée de grève, sur le modèle du régime en vigueur pour les transports terrestres. Sur la base de cette déclaration, l'autorité administrative peut alors, le même jour, décider de la mise en place d'un service minimum. Elle peut aussi informer les compagnies aériennes, et donc in fine les passagers, du nombre de vols annulés.

Jusqu'alors, faute de disposer d'une information fiable, l'administration annulait préventivement un nombre élevé de vols, et était, dans certains cas, conduite à mener des annulations de dernière minute.

Ainsi en 2023, 40 % des retards liés au contrôle aérien étaient dus à des mouvements sociaux nationaux. Plus largement, de 2004 à 2016, 67 % des jours de grève du contrôle aérien en Europe ont eu lieu en France. Ils ont été à l'origine de 96 % des retards enregistrés sur cette période pour ce motif.

Selon les informations communiquées par l'administration au rapporteur pour avis, le dispositif voté par le Parlement a permis dès 2024 d'améliorer considérablement cette situation.

II. UN EFFORT FISCAL INÉDIT QUI LIMITE LA CAPACITÉ DU TRANSPORT AÉRIEN À INVESTIR POUR SA DÉCARBONATION

A. AFIN DE LE FAIRE CONTRIBUER AU REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES, LE SECTEUR AÉRIEN SUBIT UNE HAUSSE FISCALE MASSIVE

Le secteur aérien a déjà subi une hausse marquée de la fiscalité mise en oeuvre par la loi de finances pour 2024, dont l'article 100 a institué une taxe sur les infrastructures de transport de longue distance, dont sont redevables les plus grands aéroports français. Le rapporteur pour avis avait souligné que le transport aérien était la victime collatérale de la volonté gouvernementale de taxer les sociétés concessionnaires d'autoroute. En 2024, le groupe ADP et les aéroports de Nice, Marseille et Toulouse sont concernés pour un montant total qui devrait être compris entre 120 et 150 millions d'euros. À partir de 2025, l'aéroport de Lyon pourrait également être redevable de cette taxe.

Or, le Gouvernement envisage d'accentuer fortement l'alourdissement de la pression fiscale en augmentant de 1 milliard d'euros le rendement du tarif de solidarité sur les billets d'avion. 850 millions d'euros seraient versés par l'aviation de ligne et 150 millions d'euros par l'aviation d'affaires commerciale. Pour le rapporteur pour avis, dans le contexte budgétaire contraint actuel, chaque secteur doit prendre sa part au redressement des finances publiques. La hausse de la taxe de solidarité sur les billets d'avion est de surcroît la « moins mauvaise » des solutions. Elle est en effet fondée sur la destination finale du passager, ce qui limite les effets de distorsion de concurrence au profit de vols avec des escales hors de la France.

Cependant, l'ampleur de la taxation envisagée par le Gouvernement est trop massive. Elle pourrait notamment mener à la fermeture de lignes qui desservent les aéroports régionaux, notamment des liaisons transversales qui ne peuvent pas être réalisées actuellement en train. Elle porterait ainsi atteinte à la connectivité des territoires. Les lignes d'aménagement du territoire, dont l'équilibre financier est actuellement assuré par le versement d'une subvention pour charge de service public, pourraient voir leur modèle économique se dégrader. Les collectivités territoriales seraient contraintes de les abonder davantage pour combler le coût d'une taxe affectée au budget général de l'État. Les vols pour les outre-mer seraient également touchés, ce qui menace la continuité du territoire.

Par ailleurs, le niveau de taxation sur l'aviation d'affaires commerciale, qui pourrait atteindre 3 000 € par passager sur certains vols est particulièrement élevé et pourrait menacer la pérennité de la filière en France.

La commission a adopté un sous-amendement du rapporteur pour avis afin de contenir cette hausse du tarif de solidarité pour les vols intraeuropéens en classe économique et l'aviation d'affaires.

En outre, l'article 39 du projet de loi de finances prévoit d'augmenter la part des dépenses de sûreté et de sécurité (contrôle des bagages et des voyageurs, sécurité incendie, lutte contre le péril animalier...) laissées à la charge des aéroports. En effet, actuellement, le tarif de sûreté-sécurité (dit T2S), taxe payée par les usagers à l'achat d'un billet d'avion, assure le financement de ces dépenses. Dans les plus grands aéroports, un « ticket modérateur » est prévu : le produit du T2S ne couvre que 94 % des dépenses de sûreté-sécurité, 6 % étant donc à la charge des exploitants.

Pendant la crise sanitaire, les recettes de T2S ont fortement diminué tandis que les dépenses de sûreté-sécurité sont restées stables. Par conséquent, l'État a consenti des avances aux aéroports pour un total de 700 millions d'euros. Afin de favoriser un remboursement de ces avances sans pour autant augmenter trop fortement le montant du T2S, qui serait répercuté sur le prix du billet, le Gouvernement prévoit d'augmenter le « ticket modérateur » de T2S, en le faisant passer de 6 % à 10 %.

Or, les exploitants d'aéroport font actuellement face à une hausse soutenue de la pression fiscale (taxe sur les infrastructures de longue distance, contribution exceptionnelle sur le bénéfice des grandes entreprises, effets indirects de la hausse de tarif de solidarité sur les billets d'avion). Ils doivent également mener des investissements pour moderniser leurs équipements de sécurité, avec notamment le déploiement de nouveaux systèmes, les « EDS cabine » aux postes d'inspection-filtrage des bagages.

Dans ce contexte, la commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis pour revenir sur la moitié de cette hausse du « ticket modérateur » de T2S, en le limitant à 8 % du montant des dépenses de sûreté-sécurité.

B. UNE TELLE HAUSSE NE DOIT PAS EMPÊCHER LE SECTEUR DE MENER LES INVESTISSEMENTS NÉCESSAIRES À SA DÉCARBONATION

La hausse de la pression fiscale sur le secteur aérien se heurte au « mur d'investissements » qui se dresse devant la filière en matière de décarbonation. Outre la modération du trafic, deux vecteurs principaux pour la mener à bien d'ici 2050 ont été identifiés :

- l'utilisation d'aéronefs plus frugaux en énergie ;

- l'utilisation de carburants d'aviation durables (CAD) à la place du kérosène, conformément aux objectifs fixés par le règlement européen ReFuelEU Aviation du 18 octobre 2023.

La filière aéronautique française s'est fixé pour objectif de produire à partir de 2035 un avion ultrafrugal, qui utilisera 20 % à 25 % d'énergie en moins que la génération actuelle d'aéronefs. Le Président de la République s'est engagé en juin 2023 à ce que l'État abonde le Conseil pour la Recherche aéronautique civile (CORAC) de 300 millions d'euros par an d'ici 2027. Cependant, le projet de budget actuel prévoit d'abonder le CORAC de 230 millions d'euros seulement en 2025. Comme Airbus l'a indiqué au rapporteur pour avis, la filière subit « un effet ciseau avec une hausse des taxes (TSBA et IS notamment) et une baisse des crédits (baisse du budget CORAC et risque de baisse voire de suppression du CIR) qui ne nous permettrait pas de poursuivre nos objectifs de décarbonation ». Selon les représentants de la filière, il y aurait ainsi un risque de retard dans la mise en oeuvre des étapes du programme et d'impréparation des acteurs fournisseurs à répondre aux besoins des donneurs d'ordre, alors que les entreprises françaises et européennes font face à une concurrence mondiale particulièrement intense.

La commission a donc fait sienne la proposition du rapporteur pour avis de prévoir 70 millions d'euros supplémentaires de soutien public au CORAC (amendement n°  II-252).

Les aéronefs de nouvelle génération, également moins bruyants, permettent de réduire les nuisances sonores aériennes, qui fragilisent l'acceptabilité sociale du transport aérien. La commission accueille donc favorablement la hausse du plafond de prise en charge des travaux d'insonorisation des logements situés à proximité des aéroports entreprise en décembre 2023 par le Gouvernement. Elle sera vigilante sur les effets de cette augmentation sur l'attractivité des dispositifs de prise en charge. Le reste à charge consécutif au niveau insuffisant du précédent plafond était en effet si élevé que les riverains des aéroports n'avaient pas les moyens de lancer les travaux d'insonorisation de leur logement.

Enfin, pour la commission, inciter les compagnies aériennes à acheter des carburants d'aviation durables (CAD) est un impératif. Leur usage est en effet la seule solution pour décarboner les vols de long-courrier. C'est pourquoi le règlement européen ReFuel EU aviation prévoit un usage croissant des CAD entre 2025 et 2050, échéance au-delà de laquelle ils devront représenter 70 % du carburant utilisé par les aéronefs.

Pour répondre à cet objectif ambitieux, la filière des CAD doit se structurer. Ces carburants sont, en outre, actuellement particulièrement onéreux. Ils coûtent en effet entre trois et quatre fois le prix du kérosène. Or, les efforts financiers demandés au secteur pourraient ralentir la trajectoire d'achats de CAD des compagnies alors que la filière de production peine encore à se constituer et a besoin de s'appuyer sur des perspectives garanties.

La commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis proposant de créer un crédit d'impôt incitatif à l'achat de CAD.

CHAPITRE II
LES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX TRANSPORTS ROUTIERS

Réunie le 27 novembre 2024, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant son rapporteur Olivier Jacquin, a émis un avis favorable aux crédits relatifs aux transports routiers inscrits au projet de loi de finances (PLF) pour 2025, sous le bénéfice de l'adoption de 8 amendements.

Face aux coupes budgétaires inédites proposées par le PLF pour 2025, il est urgent que le modèle de financement des transports soit repensé comme le réclame la commission depuis plusieurs années. La conférence nationale sur le financement des mobilités, annoncée par le Gouvernement pour le début d'année 2025, devra concrétiser cette ambition et prendre en compte les chantiers de taille auxquels est confronté le secteur, à commencer par la dégradation des infrastructures, la transition écologique et la fin prochaine des concessions autoroutières.

Afin de ne pas fragiliser gravement la trajectoire de financement de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), la commission propose d'atténuer de moitié, par rapport aux prévisions figurant dans le PLF initial, la diminution des recettes fiscales affectées à l'agence via la TICPE. En parallèle, un renforcement des moyens est nécessaire afin d'aider les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à franchir le mur d'investissements auquel elles font face pour réaliser l'indispensable choc d'offre de transports collectifs. La commission propose notamment :

- de relever le taux plafond de versement mobilité (VM) pour les AOM locales hors Île-de-France qui ont obtenu la labellisation d'un projet de Serm ;

- de créer un versement mobilité régional (VMR), afin que les régions, cheffes de file des mobilités, disposent enfin d'une ressource dédiée pour financer cette compétence ;

- d'assouplir les conditions pour lever le VM, afin de permettre aux AOM en zone peu dense d'y recourir plus facilement pour financer des projets de mobilité partagée et active.

S'agissant des aides au verdissement du parc automobile, la commission appelle à la vigilance pour maintenir la trajectoire d'électrification, dans la perspective de l'interdiction de la vente des véhicules thermiques neufs au sein de l'Union européenne en 2035.

I. LE SECTEUR DES TRANSPORTS FACE À LA CRISE BUDGÉTAIRE : DES FINANCEMENTS À REPENSER, UN RÉGULATEUR À CONFORTER

A. L'URGENCE D'UNE REMISE À PLAT DU MODÈLE DE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT, EN VUE DE LA CONFÉRENCE DE FINANCEMENT DE 2025

1. Infrastructures de transport : un contexte budgétaire qui pèse lourdement sur les capacités de financement de l'Afit France

· Le PLF pour 2025 marque un retournement s'agissant des recettes de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) : alors qu'elles avaient significativement augmenté en LFI pour 2024 pour atteindre près de 4,6 Mds€ (un montant qui sera toutefois revu à la baisse d'environ 300 M€ en budget rectificatif de fin d'année), le PLF pour 2025 prévoit 3,7 Mds€ de recettes, soit un affaissement significatif par rapport aux prévisions initiales pour 2024.

Cette baisse provient en grande partie d'une diminution de la part de TICPE allouée à l'agence, qui passera de 2 Mds€ (prévisions initiales 2024) à près d'1,3 Md€ en 2025 (- 700 M€).

Si ce niveau de recettes traduit malgré tout une tendance à la hausse par rapport à celui prévu en LFI pour 2023 (+ 500 M€), il s'agit bien d'une rupture brutale par rapport à la dynamique impulsée à la suite de la remise du rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) et du lancement du plan d'avenir pour les transports en février 2023, prévoyant notamment un investissement de 100 Mds€ dans le ferroviaire à horizon 2040.

· À cette situation s'ajoute une incertitude structurelle pesant sur le financement de l'agence, contre laquelle la commission met en garde depuis plusieurs années et que l'instauration en 2024 de la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance (TEITLD), dont le produit (estimé à 600 M€ par an et reversé intégralement à l'Afit France) n'a pas résorbée.

· Dans ce contexte, les dépenses de l'Afit France en 2025 seront immanquablement revues à la baisse. Le rapporteur pour avis n'a toutefois pu disposer d'aucunes prévisions quant à la ventilation de cette baisse, l'Afit France indiquant simplement que « le financement des restes à payer correspondant aux dépenses nées, en 2025, d'engagements antérieurs à 2025 » sera assuré et que l'agence contribuera à la régénération et à la modernisation des réseaux1(*).

Certains programmes seront vraisemblablement « sacrifiés », comme le plan vélo et marche 2023-2027 qui devait permettre un doublement du nombre de kilomètres d'aménagements cyclables sécurisés en France à horizon 2030 (pour atteindre 100 000 km), qui ne bénéficiera d'aucune autorisation d'engagement en 2025.

Interrogés sur une possible remise en cause des projets de mobilités actives portés par les collectivités territoriales, la Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) et Vélo & territoires indiquent que ce risque est présent, « à l'évidence », et précise : « Le département de la Haute-Savoie va également geler l'attribution de ses financements vélo aux territoires infra-départementaux pour prioriser sur ses dépenses incompressibles. La région Pays-de-Loire ne pourra pas développer de services vélo dans ses 40 gares comme annoncé, ce sont deux exemples parmi d'autres. Les annonces tombent au fur et à mesure, mais la baisse des dotations aux collectivités pour éponger la dette, combinée à l'arrêt du Plan vélo, est un mandat de retard en bout de chaîne sur les réalisations. Une forme de “ruissellement inversé”. Les collectivités vont devoir arbitrer entre la rénovation du toit de l'école, chauffer la piscine municipale et réaliser la piste cyclable. Les départements, étranglés par les dépenses obligatoires, ne savent pas comment ils vont pouvoir maintenir en état leur réseau routier, et ne parlons pas d'adapter leur voirie à la circulation à vélo. »2(*)

Pour rappel, le septième appel à projets « Aménagements cyclables » (105 M€, à travers le fonds « mobilités actives »), lancé en fin 2023 avec une annonce des résultats prévue avant l'été 2024, a en outre été gelé ; le Gouvernement a confirmé que les lauréats ne seraient pas désignés. Or, comme l'ont souligné la FUB et Vélo & territoires, en évoquant la mission sur la prévention des violences routières annoncée par le Gouvernement : « comment imaginer sécuriser la pratique sans s'attaquer à la sécurisation de la voirie via les aménagements ? »3(*).

Pour ces raisons, le rapporteur pour avis préconise que soient prévus en 2025 les crédits nécessaires pour mener à bien le dernier AAP « Aménagements cyclables », afin de ne pas laisser au milieu du gué les 400 collectivités territoriales ayant candidaté - en mobilisant le plus souvent d'importants moyens humains et techniques.

Enfin, la diminution des moyens de l'Afit France fait craindre une contraction des engagements financiers de l'État à travers les contrats de plan État-Régions (CPER), dont les volets « mobilités » sont en cours de signature.

Le rapporteur pour avis appelle à la vigilance : s'il est légitime que les collectivités territoriales participent à l'effort collectif de redressement des finances publiques, un retournement financier trop brutal pourrait gravement fragiliser leurs trajectoires d'investissement en matière d'infrastructures de transport, lesquelles nécessitent une visibilité sur le long terme.

Face à ce constat, la commission a adopté un amendement, sur la proposition du rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, visant à réduire de moitié la baisse des recettes affectées à l'Afit France prévue par le PLF en 2025 au titre de la TICPE.

2. Conférence nationale sur le financement des mobilités : une réflexion à anticiper, à la croisée de multiples défis

La commission, qui tire la sonnette d'alarme sur les fragilités du modèle de financement des transports depuis de nombreuses années, considère que le PLF pour 2025 achève de démontrer les limites d'un pilotage budgétaire annuel (voire infra-annuel) pour financer des dépenses qui s'inscrivent, par nature, dans le temps long.

Dans ce contexte, elle salue la tenue d'une conférence nationale sur le financement des mobilités début 2025, comme annoncé par le Gouvernement. En parallèle, la conférence sur le financement des Services express régionaux métropolitains (Serm), attendue depuis juin 2024 et dont le Sénat avait introduit le principe lors de l'examen de la loi relative au déploiement des Serm en 20234(*), doit également être organisée dans les meilleurs délais.

Néanmoins, elle sera vigilante à ce que l'annonce de ces deux conférences de financement ne constituent pas un simple élément de langage du Gouvernement pour reporter encore l'indispensable remise à plat du financement des infrastructures et services de transports, que la commission appelle de ses voeux depuis des années.

La commission souhaite que le Parlement soit étroitement associé à la réflexion de la future conférence nationale sur le financement des mobilités. Pour amorcer son travail, elle identifie plusieurs pistes de financement possibles :

- l'instauration d'un versement mobilité (VM) au bénéfice de la région et le rehaussement du VM dans les agglomérations de province, dans un souci d'équité territoriale par rapport à l'Île-de-France et afin, notamment, de favoriser le financement des Serm. Sur la proposition du rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, la commission a d'ailleurs adopté plusieurs amendements (cf. infra) en ce sens ;

- l'assouplissement des conditions pour lever le VM en zone peu dense. Sur la proposition du rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, la commission a d'ailleurs adopté un amendement (cf. infra) en ce sens ;

- l'identification d'une ressource pérenne pour les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) qui ne disposent pas de bases fiscales suffisantes pour lever le VM, comme le Sénat l'avait proposé lors de l'examen de la LOM5(*) ;

- le fléchage d'une part du produit issu des ventes aux enchères des quotas carbone (ETS) vers les transports. Le Sénat avait d'ailleurs proposé lors de l'examen du PLF pour 2024 d'allouer une part du produit de ces ventes au financement des AOM, une piste dont l'Union des transports publics et ferroviaires (UTPF) a rappelé la pertinence au rapporteur pour avis. La commission des finances du Sénat a à nouveau porté cette proposition lors de l'examen du PLF pour 2025 ;

- l'instauration d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 5,5 % pour les transports collectifs, ainsi que la commission le porte depuis de nombreuses années ;

Le rapporteur pour avis, à titre personnel, plaide également pour que la piste d'une généralisation de la possibilité pour les régions de lever une écocontribution sur le transport de marchandises (dite « écotaxe poids lourds ») puisse être examinée. Ce dispositif revêt en effet un potentiel intéressant pour dégager de nouvelles ressources en faveur du financement des transports, à l'instar de la région Grand Est qui a prévu de la mettre en place à horizon 2027, avec une estimation de recettes de l'ordre de 1 Md€ sur dix ans.

En outre, il juge essentiel que cette conférence de financement intègre la question de la fin des concessions autoroutières, qui s'étalera de 2031 à 2036, à deux titres.

D'une part, pour évaluer l'ampleur des investissements dits de seconde génération (opérations d'investissement prévues par les contrats et déjà financées par les recettes tarifaires, mais non encore réalisées) des SCA, identifier ceux qui doivent encore être mis en oeuvre par les SCA et, pour ceux qui ne seraient plus pertinents, prévoir la réalisation d'investissements de remplacement en faveur de la transition écologique. La commission a adopté un amendement en ce sens (cf.  infra).

D'autre part, à titre personnel, il juge essentiel d'y aborder l'avenir des autoroutes et les différentes options en débat (maintien du modèle concessif, le cas échéant en en faisant évoluer les paramètres, partenariat public privé, régie, etc.) et leurs implications pour le financement des infrastructures.

B. À L'AUBE D'UNE DÉCENNIE CHARNIÈRE, CONFORTER LES MISSIONS ET MOYENS DU RÉGULATEUR DES TRANSPORTS

· Depuis 2015, l'Autorité de régulation des transports (ART) a vu l'étendue de ses missions s'étendre progressivement : véritable régulateur multimodal, elle intervient désormais dans six secteurs (ferroviaire, transport routier de voyageurs, autoroutes, aéroportuaire, transports publics urbains en Île-de-France, données et services numériques de mobilité).

Pour autant, cette extension de son champ de compétences ne s'est pas traduite par un renforcement, à due concurrence, de ses moyens financiers, alors même que ses effectifs ont connu une hausse plus dynamique, ce qui place l'ART dans une situation singulière par rapport à ses homologues européens. En pratique, le régulateur est donc conduit à assécher son fonds de roulement, ce qui menace sa capacité à faire face, le cas échéant, à d'éventuelles décisions contentieuses défavorables et, partant, à exercer ses missions en toute indépendance.

· Le rapporteur pour avis estime d'autant plus indispensable de soutenir les moyens de l'ART que cette autorité aura un rôle central à jouer dans de nombreux chantiers stratégiques dans les prochaines années, comme l'arrivée à échéance des concessions autoroutières entre 2031 et 2036. Il est essentiel que l'ART contribue à la réflexion sur la définition du « bon état » des biens restitués, à l'identification des investissements de seconde génération, comme cela est prévu à travers la troisième édition de son rapport sur l'économie générale des concessions, attendu pour la fin d'année, ainsi que sur le paramétrage des futurs contrats concessifs, si ce modèle devait être reconduit.

La commission appelle à la vigilance s'agissant de l'adéquation des moyens de l'ART, en particulier dans la perspective de l'examen prochain par le Sénat du projet de loi Ddadue qui propose de lui confier de nouvelles missions en matière de contrôle des données routières numériques.

Afin de mettre ce régulateur à l'abri des aléas budgétaires, il estime urgent d'envisager le fléchage d'une ressource dédiée, par exemple à travers la fiscalité affectée, comme c'était le cas lors de la création de cet organisme.

II. ENTRETIEN DES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES : DE LOURDS BESOINS EN PERSPECTIVE, DE NOUVELLES RECETTES À DÉGAGER

A. ROUTES : INVERSER LA SPIRALE DE DÉGRADATION DU RÉSEAU ET S'ADAPTER AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

· Le PLF pour 2025 prévoit d'allouer plus d'1 Md€ à l'entretien du réseau routier national non concédé (RRNNC) l'année prochaine, soit un montant stable par rapport à 2024, dans un objectif de « renverser la tendance de dégradation des routes d'ici 2030 »6(*).

Pourtant, et malgré la hausse des moyens alloués à cette infrastructure depuis 2017, la tendance à la dégradation du RRNNC est loin d'être enrayée, comme en témoigne le graphique ci-dessous.

Évolution de l'indicateur relatif à l'état des chaussées

Source : PLF pour 2025 - annexe budgétaire

Par ailleurs, le rapporteur pour avis alerte sur le fait que le changement climatique ne fera qu'aggraver encore et accélérer la spirale de dégradation des infrastructures routières et, en conséquence, amplifier les coûts liés à leur entretien.

La méthode consistant à demander chaque année une enveloppe budgétaire supplémentaire pour assurer l'entretien du RRNNC manque d'efficacité et de soutenabilité, au regard des besoins identifiés. La commission appelle donc à réaliser un travail de fond sur ce sujet lors de la conférence nationale sur le financement des mobilités en 2025.

Ces éléments sont d'autant plus inquiétants dans la perspective de la mise à disposition des régions de portions du réseau routier national non concédé, prévu par la loi dite « 3DS ». Au 1er janvier 2025, 1 650 km de sections d'autoroutes et de routes nationales seront en effet mis à la disposition - à titre expérimental - de 3 régions volontaires (Auvergne Rhône-Alpes, Grand Est et Occitanie), via des conventions signées avec l'État. Pour rappel, au 1er janvier 2024, 14 départements7(*) et 2 métropoles se sont en outre vus transférer 920 km de ce réseau.

Dans le prolongement de cette question, le rapporteur pour avis, à titre personnel, s'alarme de la durée prévue pour l'expérimentation de la mise à disposition de parties du RRNNC aux régions par la loi « 3DS », qui est de huit ans à compter de la promulgation de la loi en 2022. Ainsi que le souligne Régions de France, cette durée s'avère en particulier trop faible pour la région Grand Est et « il aurait été préférable de prévoir huit ans à partir de la date réelle de mise à disposition, notamment pour mener à bien certaines opérations d'ampleur (aménagement de l'A31, mise à deux fois deux voies de la RN4, modernisation d'aires de repos, etc.) »

Le rapporteur pour avis appelle le Gouvernement à revenir sur la durée de ces expérimentations, le cas échéant de manière souple pour permettre la mise en place d'un modèle économique adapté à chaque région ayant pris part au dispositif, comme il l'a proposé à travers une proposition de loi.

Au total, il dresse un bilan très mitigé de la décentralisation du RRNNC permise par la loi « 3DS » : ces transferts à « géométrie variable » conduisent, de fait, à une fragmentation de la gestion de ce réseau, alors même qu'une stratégie nationale lisible sur cette question serait indispensable.

· Si l'entretien du réseau des SCA ne soulève pas les mêmes inquiétudes, compte tenu de son financement via les recettes tarifaires, le rapporteur pour avis formule néanmoins deux points de vigilance.

Premièrement, à courte échéance, le rapporteur pour avis alerte sur les difficultés rencontrées par les SCA pour collecter le produit des péages dans le cadre du dispositif de péages à flux libres mis en place depuis 2022 sur certaines portions du réseau. Les SCA font en effet état d'un niveau de fraude non négligeable, notamment de la part de conducteurs étrangers, susceptible de fragiliser leurs recettes tarifaires : le rapporteur pour avis appelle l'Union européenne (UE) à avancer sur cette question, en facilitant le recouvrement des péages et des amendes dans l'ensemble des États membres de l'UE. Il s'agit d'un préalable à une généralisation de ce dispositif qui peut induire de réels gains environnementaux (à travers la diminution de la congestion) une fois les utilisateurs familiarisés avec son fonctionnement.

Deuxièmement, s'agissant de la définition du « bon état » des biens restitués par les SCA à la fin des concessions autoroutières, les travaux de l'État semblent bien avancés. Ainsi que l'a indiqué l'ART, « un référentiel technique de mesure a été mis en place pour définir clairement les contours de la notion de « bon état d'entretien » (telle que prévue par les contrats) dans lequel les biens de retour doivent être restitués en fin de concession. Il permettra d'objectiver l'état du réseau et de fixer les objectifs d'entretien des concessionnaires et d'en déduire les programmes de travaux qu'ils devront mener ». Le régulateur rappelle toutefois que des paramètres cruciaux restent à définir, notamment pour fixer les critères déterminant les ouvrages d'art nécessitant des travaux de réhabilitation. Il indique que « les prochains mois seront donc critiques dans le processus de définition du bon état d'entretien : selon le degré d'exigence du concédant, des dépenses importantes d'entretien et de renouvellement, qui devraient être à la charge des concessionnaires, pourraient être reportées au-delà de l'échéance des concessions historiques »8(*).

· S'agissant de l'entretien du réseau routier des départements et des communes, il y a fort à craindre que ces collectivités territoriales se trouvent confrontées à un effet ciseau entre une hausse de dépenses incompressibles et une baisse de leurs ressources dans le contexte budgétaire actuel. Départements de France souligne que les recettes dont bénéficient les départements au titre des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) poursuivent leur diminution, alors que leurs dépenses en matière sociale pourraient encore augmenter en 2025. Dans ce contexte, cette association rappelle qu'« il est évident que cette situation va impacter fortement prioritairement les budgets routiers, qui sont des variables d'ajustement budgétaire facilement mobilisables »9(*).

Or, les dépenses d'entretien du réseau routier représentent des montants considérables pour les collectivités territoriales. Selon le rapport de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales publié en 2024, en 2023, les départements ont ainsi consacré plus 4,7 milliards d'euros à leur voirie, soit une augmentation d'environ 3 % en un an. En parallèle, les communes de plus de 3 500 habitants ont dépensé 3,8 milliards d'euros pour leur voirie, soit une hausse de 6 % par rapport à 2022.

Le rapporteur pour avis juge opportun de mettre en avant le coût consolidé, tous acteurs confondus (État, communes et départements, mais également SCA), que représente l'entretien annuel du réseau routier : en 2023, les dépenses d'entretien du RRNNC, d'une part, et du réseau routier des communes de moins de 3 500 habitants et des départements, d'autre part, avoisinaient les 9,5 Mds€. En y ajoutant le coût que représente annuellement l'entretien des infrastructures autoroutières pour les SCA selon l'ART10(*), le coût total dépasse les 10 Mds€ par an (cf. schéma ci-après).

Coût consolidé de l'entretien de la route pour l'État,
les sociétés concessionnaires d'autoroutes les départements
et les communes de plus de 3 500 habitants

La commission a adopté un amendement, sur la proposition du rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, visant à maintenir l'attribution d'un douzième (soit 50 M€ d'euros) du produit de la taxe sur l'exploitation des infrastructures de longue distance, respectivement, aux communes et à leurs groupements exerçant la compétence voirie ainsi qu'aux départements. Cette mesure (qui prévoyait également l'attribution d'une part de recettes équivalentes aux départements) avait été portée par le Sénat lors de l'examen de la LFI pour 2024 et maintenue dans le texte définitivement adopté. Le PLF pour 2025 (article 21) en propose toutefois la suppression.

Afin de ne pas réduire les recettes prévisionnelles de l'Afit France en 2025, la commission a adopté un autre amendement, également sur la proposition du rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, visant à rehausser en conséquence de 100 M€ le plafond de TICPE qui lui sera affecté l'année prochaine.

B. ENTRETIEN DES OUVRAGES D'ART : NE PAS RELÂCHER LES EFFORTS

Pour ce qui concerne les ouvrages d'art relevant des communes, alors que le Programme national ponts (PNP 1) lancé en 2021 est désormais achevé et qu'une enveloppe supplémentaire de 50 M€ a été prévue en loi de finances rectificative pour 2022 (dont 10 M€ pour le PNP 2 et 35 M€ pour le PNP Travaux), la commission salue l'ouverture supplémentaire de 20 M€ au bénéfice du PNP Travaux en loi de finances de fin de gestion pour 2023. Selon le Cerema, les PNP 1 et 2 ont permis de recenser et remettre un carnet de santé aux communes pour 40 523 ponts.

Néanmoins, cet opérateur est confronté à une baisse de sa SCSP dans le cadre du PLF pour 2025 (de l'ordre de 4,3 M€), à laquelle il faut ajouter de nouvelles dépenses de l'ordre de 4 M€. Ainsi, si les besoins de financement pour 2025 sont en principe couverts à la fois pour le recensement des ouvrages et le subventionnement des travaux de réparation des ouvrages, il est possible qu'il soit nécessaire, en fin d'année 2025, de réallouer des moyens supplémentaires à ce programme lors de l'examen de la loi de finances de fin de gestion de 2025. La commission suivra ce point avec attention.

Au-delà de 2025, un redimensionnement du PNP sera en outre nécessaire.

S'agissant du volet « recensement et évaluation des ouvrages », le Cerema indique que les PNP 1 et 2 ont permis de couvrir la quasi-totalité des petites communes comptant moins de 10 000 habitants disposant et d'un potentiel fiscal inférieur à 3 M€, et que « au-delà de cette taille, les communes (ou leurs groupements) disposent généralement de services techniques bien structurées et connaissant la consistance de leur patrimoine dans l'ensemble »11(*). Il n'apparaît donc pas nécessaire, selon cet opérateur, de lancer un nouveau programme de recensement et d'évaluation des ouvrages des communes.

En revanche, concernant les travaux de réparation, les besoins s'avèrent colossaux. En effet, sur la base des données issues des PNP 1 et 2, en octobre 2024, le Cerema estime le coût de remise en état des ouvrages (ponts et murs) des 31 500 communes de moins de 10 000 habitants à 3,3 Mds€. Le Cerema estime à 1,3 Md€ les besoins concernant les ouvrages les plus dégradés, classés 412(*). Sur ces 1,3 milliard d'euros, le coût de remise en état des ouvrages qui nécessitent une mise en sécurité immédiate liée à un problème de structure s'élève à 730 M€ environ13(*).

Le PNP Travaux, qui permet de subventionner les travaux de réparation sur les ouvrages d'art de la catégorie 4, dispose d'une enveloppe de 55 M€ jusqu'à fin 2025, soit 8 % à peine des 730 M€ nécessaires.

Au-delà de 2025, le Cerema estime à 40 M€ par an l'enveloppe nécessaire pour traiter les ouvrages les plus dégradés dans les dix prochaines années14(*).

Enfin, le rapporteur pour avis alerte sur les ouvrages d'art de rétablissement, c'est-à-dire sur les ponts construits pour rétablir une voie de communication appartenant à une collectivité territoriale interrompue par une infrastructure de transport de l'État ou de ses établissements publics (réseau routier, ferroviaire et fluvial de l'État, de SNCF Réseau ou de Voies Navigables de France). Si ces ouvrages appartiennent en principe, sauf convention contraire, au propriétaire de la voie portée, afin de faciliter la gestion de ces ouvrages et de prévenir leur détérioration, la loi dite « Loi Didier » de 2014 a prévu la conclusion de conventions entre les propriétaires ou gestionnaires des voies portées et franchies. Elles précisent en principe la répartition des responsabilités quant à la gestion des ouvrages et à la charge financière liée à la surveillance, à l'entretien, à la réparation et au renouvellement de ces ouvrages. Il est prévu que pour les collectivités territoriales dont le potentiel fiscal (PF) est inférieur à 10 M€, soit appliqué le principe de référence (soit la prise en charge par le gestionnaire de la nouvelle infrastructure de l'ensemble des charges relatives à la structure de l'ouvrage d'art), sauf accord contraire des parties.

Un arrêté ministériel du 22 juillet 2020 a procédé au recensement des ouvrages de rétablissement des voies des collectivités territoriales interrompues par une voie du réseau, routier, ferroviaire ou navigable de l'État ou de ses opérateurs et ne faisant pas l'objet d'une convention préexistante. Au total, tous réseaux confondus, 9 480 ouvrages ont été identifiés (hors réseau routier national concédé) : 4 168 surplombent une voie du réseau ferré national, 2 895 surplombent une voie navigable du domaine public fluvial de l'État et 2 417 surplombent une voie du réseau routier national non concédé.

Avancement de la conclusion de conventions pour les ouvrages d'art de rétablissement en application de la loi « Didier » (fin de l'année 2023)

Pour le réseau routier national concédé :

- 7 287 ouvrages doivent être conventionnés ;

- 5 986 ouvrages sont conventionnés, soit un taux de conventionnement de 73 %.

Pour le réseau routier national non concédé, sur les 2 417 ponts à conventionner :

- 3 conventions sont signées et des dizaines de projet de convention sont en cours de négociation ;

- quelques travaux et quelques inspections conjointes réalisés pour estimer l'état des ouvrages avant signature des conventions ;

Pour le réseau ferré national, on recense 2 915 ouvrages (sur 4 168 ouvrages recensés) de rétablissement relevant de la propriété d'une collectivité au potentiel fiscal (PF) inférieur à 10 M€. Environ une centaine de conventions ont été établies entre SNCF Réseau et les collectivités territoriales.

Pour le réseau fluvial confié à VNF, on recense 1 392 ouvrages (sur 2 895 ouvrages recensés) de rétablissement relevant de la propriété d'une collectivité au PF inférieur à 10 M€. Fin septembre 2024, 75 sollicitations de collectivités territoriales ayant un PF inférieur à 10 M€ ont été reçues, 43 inspections détaillées ont été réalisées et 3 conventions ont été signées. En l'absence de données techniques sur presque tous les ouvrages recensés, la phase d'instruction des demandes est assez longue pour déterminer les travaux à mettre en oeuvre.

Source : DGITM

La DGITM indique qu'une actualisation de l'arrêté du 22 juillet 2020 est en cours à la suite de l'instruction de nouvelles demandes des collectivités. De nouveaux ouvrages seront ajoutés à la liste initiale et pourront permettre aux collectivités de conventionner avec l'État ou ses opérateurs.

Le rapporteur pour avis s'étonne du très faible nombre de conventions signées à ce jour. Il suivra avec attention la progression de leur signature, pour assurer l'entretien et la surveillance de ces ouvrages d'art.

Le rapporteur pour avis appelle, dans le cadre du prolongement du PNP Travaux au-delà de 2025, à prévoir une enveloppe annuelle pour ce dispositif à hauteur de 40 M€ par an.

Le programme pourrait également être élargi aux ouvrages d'art classés 3 (ouvrages dont la structure est altérée par un défaut significatif), afin d'éviter qu'ils ne se dégradent jusqu'à l'apparition de défauts majeurs. Ces travaux nécessiteraient néanmoins une enveloppe supplémentaire évaluée par le Cerema à 60 M€ par an.

Il importe également de veiller à la prise en compte des besoins liés à la remise en état des 9 480 ponts de rétablissement des collectivités territoriales qui doivent faire l'objet de conventions de gestion avec l'État ou ses opérateurs (SNCF Réseau et Voies navigables de France) en application de la loi « Didier » de 2014.

Ces trois points devront être abordés lors de la conférence nationale sur le financement des mobilités.

C. INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES : FACE À DES BESOINS MASSIFS, DE NOUVELLES PISTES DE FINANCEMENT À EXPLORER

Face aux besoins de financement massifs liés à la gestion des infrastructures routières, le rapporteur pour avis met en avant plusieurs pistes de réflexion pour les prochaines années.

· L'écocontribution sur le transport de marchandises dite « écotaxe poids lourds », instituée en application de la loi relative à la Collectivité européenne d'Alsace (2019) puis intégrée à un dispositif juridique commun en application de la loi « Climat et résilience » (2021), constitue pour le rapporteur pour avis un outil pertinent pour sécuriser le financement du réseau routier national non concédé.

Ce dispositif repose en outre sur un principe « utilisateur-payeur » vertueux d'un point de vue environnemental qui permet de prendre en compte les externalités négatives liées à la circulation de poids lourds, y compris en termes de dégradation des infrastructures. Ainsi que l'a indiqué le Cerema : « Les chaussées françaises à fort trafic sont dimensionnées en fonction du trafic poids lourds, leur dégradation structurelle est liée aux sollicitations provoquées par la répétition de charges lourdes (on parle alors de « fatigue » d'une chaussée). »

Pour l'heure, outre le dispositif spécifique applicable à la CEA, seules les régions volontaires qui se sont vues mettre à disposition des parties du RRNNC peuvent la mettre en place, dès lors qu'elles subissent un report de trafic de poids lourds lié à l'instauration d'une taxe similaire sur un territoire limitrophe.

Selon Régions de France, alors que plusieurs régions françaises rempliraient les critères pour pouvoir lever l'écotaxe du fait de l'instauration d'un dispositif similaire dans un pays frontalier, seule la région Grand Est a manifesté sa volonté de la mettre en place, à horizon 2027. Cette taxe pourrait permettre 1 Md€ de recettes pour cette région en dix ans selon les estimations.

Convaincu de l'intérêt de cet outil pour sécuriser le financement des infrastructures routières dans la durée et amplifier les transferts de parties du RRNNC prévus par la loi « 3DS » - pour l'heure peu sollicités - le rapporteur pour avis estime que le moment est venu d'envisager la généralisation de la possibilité pour les régions de mettre en place l'écotaxe, en supprimant la condition liée au fait de subir un report de trafic.

· La fin des concessions autoroutières, qui s'échelonnera de 2031 à 2036, offre des perspectives de nouvelles recettes pour le financement des transports.

Le rapporteur pour avis met notamment l'accent sur la question des investissements dits de « seconde génération », qui soulèvent de forts enjeux financiers pour l'État. Il s'agit d'opérations d'investissements qui, bien que prévues par les contrats et financées par les recettes tarifaires, n'ont pas encore été réalisés par les SCA.

Le rapport d'information n° 65 (2024-2025)15(*) de la commission des finances du Sénat sur la préparation de l'échéance des contrats de concessions autoroutières, publié le 23 octobre 2024, recommande d'approfondir le travail de recensement de ces investissements - qui a été entamé par l'ART16(*) - et d'évaluer le montant global que représentent ces investissements, qui sont exigibles sans compensation puisqu'ils ont déjà été compris dans l'équilibre financier des contrats.

Un travail doit être réalisé par l'État pour identifier, au cas par cas, les investissements qui demeurent pertinents. S'agissant des investissements dont la réalisation ne s'avérerait plus pertinente, du fait de l'évolution des conditions de circulation ou des habitudes de mobilités, ce rapport souligne qu'ils constituent un avantage financier injustifié pour les SCA et demande qu'une réflexion soit engagée d'ici la fin des contrats pour les remplacer par d'autres investissements en lien avec la transition écologique du secteur autoroutier.

La commission a adopté un amendement, sur la proposition du rapporteur pour avis, visant à solliciter la réalisation d'une étude par les services de l'État pour approfondir cette question.

III. FINANCEMENT DES AOM : DES MESURES À PRENDRE POUR PERMETTRE L'INDISPENSABLE CHOC D'OFFRE DANS LES TRANSPORTS

A. DÉVELOPPEMENT DE L'OFFRE DE TRANSPORTS COLLECTIFS : LES AOM CONFRONTÉES À UN MUR D'INVESTISSEMENTS

· La décarbonation du secteur des transports - qui représente 30 % des émissions de CO2 de la France à lui seul - de même que le déploiement progressif des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) rendent nécessaire un véritable choc d'offre en matière de transports collectifs.

Le déploiement des Serm, prévu par la loi de décembre 202317(*) qui a défini un cadre juridique dédié, répond à cet objectif. Son financement ne fait toutefois l'objet d'aucune garantie à ce jour, tant s'agissant des investissements que du fonctionnement, ce qui avait conduit la commission à introduire dans la loi le principe de l'organisation d'une conférence de financement avant le 30 juin 2024. Cette conférence n'a toujours pas eu lieu et il est nécessaire qu'elle se tienne au plus vite (cf. supra). Le Gouvernement a annoncé son organisation en début d'année 2025, en lien avec la conférence nationale sur le financement des mobilités.

· Les régions seront fortement impliquées dans le déploiement des Serm, qui nécessiteront d'importantes dépenses en investissement et en exploitation, ainsi que dans celui du plan national de déploiement de cars express annoncé par le Gouvernement, qui impliquera également des investissements en matériel, une adaptation du réseau interurbain et des dépenses de fonctionnement.

Or, et alors même que leur rôle de chef de file des mobilités a été consacré par la LOM, elles ne disposent toujours d'aucune ressource dédiée pour mener à bien cette compétence qui s'exerce, de fait, sur leur dotation générale de fonctionnement. En particulier, elles ne peuvent pas lever le versement mobilité (VM), qui constitue pourtant la seule ressource financière à l'heure actuelle sur laquelle les AOM peuvent pleinement avoir la main.

· Si les AOM locales ont la possibilité de lever le VM, en province, les plafonds qui leur sont applicables réduisent de fait grandement leurs marges de manoeuvre. À ce titre, le groupement des autorités responsables de transport (GART) souligne que 35 % des AOM hors Île-de-France ne disposent plus d'aucune marge pour augmenter le taux de VM applicable sur leur territoire, dont 90 % des AOM de plus de 200 000 habitants18(*).

Aussi, et dans un souci d'équité territoriale, la commission estime nécessaire de rehausser le plafond de VM de ces AOM, au même titre que la hausse intervenue en LFI pour 2024 au bénéfice de certains territoires d'Île-de-France19(*).

Le GART défend cette idée, en rappelant que si Île-de-France Mobilités a bénéficié de multiples évolutions de son taux plafond de VM depuis 2012, les taux plafonds applicables dans le reste de la France n'ont que très peu évolué depuis les années 1990. En particulier, si l'évolution du VM en province s'avère étroitement corrélée à celle de la masse salariale, il n'en a pas été de même en Île-de-France (IDF), comme le montre le graphique ci-après.

Évolution du produit du VM et de la masse salariale qui y est assujettie en IDF et hors IDF

Source : GART d'après les données de l'URSSAF

Sur la proposition de son rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, la commission a adopté deux amendements visant à :

- créer un VM régional, à hauteur de 0,2 %, pour permettre aux régions de disposer d'une ressource dédiée pour financer l'exercice de sa compétence mobilité et contribuer, notamment, au financement des Serm ;

- augmenter de 0,2 point le plafond de VM pour les AOM locales hors Île-de-France ayant obtenu la labellisation d'un projet de Serm.

B. ASSURER LE FINANCEMENT DES MOBILITÉS EN ZONE PEU DENSE

En 2019, la LOM avait fixé l'objectif de mettre fin aux zones blanches de la mobilité. Pour ce faire, les communautés de communes ont été invitées à se prononcer sur le transfert de la compétence d'organisation des mobilités. Au total, 53 % d'entre elles sont désormais AOM locales.

Prise de la compétence d'organisation des mobilités par les communautés de communes (au 1er avril 2022)

Source : site internet du Cerema

Parmi elles, selon la Caisse nationale des URSSAF, 54 communautés de communes ont instauré le versement mobilité au 31 octobre 2024 depuis leur prise de compétence en 2021, en dehors de celles dont la commune centre levait déjà le VM avant la LOM. 

Ce chiffre peu élevé découle vraisemblablement de critères trop restrictifs fixés par la loi pour permettre aux AOM de lever le VM. En effet, l'article L2333-36 du code général des collectivités territoriales conditionne cette possibilité à l'organisation de services réguliers de transport public de personnes. Or, la mise en place de tels services est rarement pertinente en zone peu dense, le nombre de voyageurs n'y étant généralement pas suffisant pour assurer la rentabilité de l'offre.

D'autres solutions de mobilité apparaissent plus adaptées à ces territoires, comme le transport à la demande, l'autopartage, le covoiturage, et les mobilités actives.

S'agissant des mobilités actives, Intercommunalités de France indique « d'après l'enquête menée par Intercommunalités de France en 2024, les mobilités actives sont parmi les politiques de mobilité les plus répandues. Si les communautés d'agglomération sont largement engagées dans ces politiques, les communautés de communes sont plutôt sur une phase de développement. [...] C'est le bon moment pour soutenir le développement des mobilités actives dans les espaces peu denses »20(*).

Or, les critères actuels pour lever le VM placent de nombreuses AOM en zone rurale dans l'impossibilité de disposer de ressources pérennes pour financer des projets de mobilité adaptés à leur territoire. En conséquence, la dépendance de la population à l'autosolisme demeure forte en zone peu dense.

Ainsi que l'a également souligné Ecov, organisme qui déploie des lignes de covoiturage dans les territoires peu denses, « il est urgent de déployer un système de financement pérenne pour les mobilités décarbonées hors des zones denses ».

Face à ce constat, sur la proposition de son rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, la commission a adopté un amendement visant à permettre aux AOM de prélever le VM pour l'organisation d'un panel de services de transport plus large que les transports collectifs réguliers, prenant en compte le transport à la demande et les mobilités partagées et actives.

Le rapporteur pour avis considère en outre cette évolution comme une condition préalable pour que le plan national de déploiement de lignes de cars express, annoncé par le Gouvernement, et le déploiement des Serm, bénéficie à tous les territoires. Il importera en effet que ces projets s'articulent avec les services et réseaux de mobilités actives et partagées mis en oeuvre en zone périurbaine et rurale, le cas échéant à travers des aménagements spécifiques (PEM, parkings relais, etc.).

S'agissant des cars express, l'UTPF l'a rappelé : « Pour assurer la réussite de ce plan, il convient de travailler avec finesse sur les parkings relais et plus globalement sur l'intermodalité avec les vélos, les lignes de transport public urbain, etc. »21(*). De même, la Fédération nationale du transport de voyageurs (FNTV) indique que « les cars express ont toute leur place dans un système reposant sur la multimodalité et l'intermodalité, notamment pour relier efficacement les pôles ruraux avec les agglomérations, les périphéries entre elles ou les pôles d'échanges » et que « l'accès à ces lignes doit être anticipé afin qu'elles soient connectées à l'ensemble du bouquet de mobilités »22(*).

Par ailleurs, de nombreuses communautés de communes ayant pris la compétence mobilité ne peuvent, en pratique, assurer le financement de leurs projets de mobilité grâce au VM, du fait d'un tissu économique trop limité. Conscient de cette difficulté, le Sénat avait soutenu dans la LOM l'attribution d'une part de TICPE aux communautés de communes dans lesquelles le rendement du VM, rapporté à la population, est inférieur au rendement par habitant constaté pour les AOM dont le ressort territorial est essentiellement urbain. Malheureusement, cette proposition n'a pas survécu à la navette parlementaire. Le rapporteur pour avis estime urgent de remettre cette question à l'ordre du jour, afin de soutenir les communautés de communes ne disposant pas de bases fiscales suffisantes pour financer une offre de transports.

Enfin, aucun financement n'est prévu pour les régions qui sont devenues AOM locales de substitution en lieu et place des communautés de communes n'ayant pas souhaité prendre la compétence mobilité. Or, ce cas de figure couvre une large partie du territoire (cf. graphique ci-contre). Il est indispensable que ces régions puissent également bénéficier d'une ressource financière dédiée - au même titre que les autres AOM - pour développer l'offre de transports dans les zones peu denses.

Cartographie du VM en 2024

Afin de répondre à cette problématique, l' amendement du rapporteur pour avis et de Philippe Tabarot, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, visant à permettre aux AOM régionales de lever le VM pour financer leurs offres de mobilités, adopté par la commission (cf. supra), prévoit également l'attribution d'une part de ce produit aux AOM en zone peu denses (10 %), qu'il s'agisse de communautés de communes AOM ou de la région agissant en tant qu'AOM de substitution.

IV. POURSUIVRE LES EFFORTS EN FAVEUR DU VERDISSEMENT DU PARC AUTOMOBILE

A. INCITER À UNE PLUS GRANDE SOBRIÉTÉ ENVIRONNEMENTALE DU PARC AUTOMOBILE, AU PROFIT DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DU SECTEUR

1. Le renforcement du malus automobile : une évolution nécessaire face à l'accroissement tendanciel du poids des véhicules

L'article 8 du PLF pour 2025 vise à renforcer le caractère incitatif d'un point de vue environnemental du malus automobile, qui constitue une taxe à payer lors de l'immatriculation de certains véhicules particulièrement polluants. Il renforce les barèmes applicables aux deux volets de ce dispositif : le malus CO2 et le malus « poids ».

Le seuil de déclenchement du malus CO2 serait abaissé de 5g de CO2/km en 2025 puis de 7g de CO2/km en 2026 et 2027, pour s'établir à cette date à 99g de CO2/km émis. En outre, le tarif maximal du malus, aujourd'hui fixé à 60 000 €, serait rehaussé de 10 000 € par an pour atteindre 90 000 € en 2027.

S'agissant du malus au poids, il est proposé d'abaisser à compter de 202623(*) de 100 kg son seuil de déclenchement, actuellement fixé à 1 600 kg. En outre, l'abattement dont bénéficient actuellement les véhicules hybrides non rechargeables serait limité aux seuls véhicules performants sur le plan environnemental, c'est-à-dire ceux dotés d'un moteur électrique dont la puissance est supérieure ou égale à 30 kilowatts.

Le rapporteur pour avis salue ces évolutions, qui vont dans le sens d'une plus grande sobriété environnementale du parc automobile. S'agissant de l'idée, formulée ces dernières semaines, selon laquelle le renforcement du malus automobile reviendrait à taxer 80 % du parc automobile d'ici 2027, il souligne qu'une telle projection semble en réalité fragile, car elle ne prend pas en compte le verdissement du parc qui continuera à progresser d'ici cette échéance.

En particulier, le renforcement du malus au poids constitue une avancée pour orienter les consommateurs - et donc les constructeurs - vers des modèles de véhicules plus légers, lesquels présentent de nombreux avantages pour l'environnement, à commencer par des économies de matériaux et, le plus souvent, une plus grande efficacité énergétique.

Selon un article de la revue « Transports urbains » de septembre 2022 écrit par les chercheurs Frédéric Héran et Arnaud Sivert24(*), si l'efficacité énergétique des véhicules a progressé depuis les années 1960, en réalité, elle demeure faible car les véhicules « transportent essentiellement leur propre masse et non des personnes et des charges ». Dès lors, cet article souligne que le potentiel de réduction de l'énergie dépensée par kilomètre par les véhicules demeure important, à condition d'agir notamment sur leur masse et leur vitesse.

L'article précité rappelle que, si dans les années 1960 le poids moyen d'une voiture était de 800 kg, ce poids a sensiblement augmenté au fil des décennies pour atteindre 1 293 kg en moyenne en 200725(*). Depuis lors, bien que des efforts aient été réalisés pour alléger les véhicules, ils ont été largement compensés par certaines évolutions, comme le rehaussement des exigences de sécurité dans les véhicules et d'habitabilité (pour transporter un plus grand nombre de personnes), l'ajout de nouveaux équipements de confort (climatisation, volant réglable, caméra de recul, amortissement surdimensionné, etc.) et d'éléments de design, ou encore le renforcement de certaines normes européennes ou réglementaires. Or, comme le souligne l'article précité, « toute augmentation du poids conduit à un cercle vicieux, car il faut en conséquence renforcer la motorisation, la chaîne de traction, les pneus, l'insonorisation, la sécurité active et passive... On a pu ainsi démontrer que l'ajout de 100 kg d'équipements conduit en fait à un accroissement du poids de 200 kg ».

L'illustration ci-après démontre la différence de taille entre une Peugeot 205 (mise en production dans les années 1990) et une Renault Mégane 4.

Comparaison à la même échelle d'une voiture des années 1990 (780 kg) et d'une voiture familiale des années 2020 (1370 kg)

Source : site internet Carsized

Pour toutes ces raisons, le rapporteur pour avis estime que les efforts consentis jusqu'à présent par les industriels pour renforcer la sobriété du parc automobile sont encore insuffisants et, dès lors, que le renforcement du malus automobile va dans le bon sens.

2. Verdissement du parc automobile : des incitations à renforcer pour promouvoir les véhicules les plus sobres

Considérant que l'électrification du parc de véhicules constitue également un facteur d'augmentation du poids moyen des véhicules compte tenu du poids des batteries, le rapporteur pour avis estime indispensable que les dispositifs de bonus/malus permettent également d'orienter le marché de l'électrique vers des véhicules plus légers, mais aussi moins puissants. Le rapport poids/puissance des véhicules doit en effet être interrogé pour aller vers un parc plus sobre.

Il considère, comme le souligne l'article précité, qu'« il ne faut pas se contenter d'envisager une évolution des caractéristiques de la voiture individuelle qui n'affecterait que marginalement ses performances et son confort, mais aborder des modes de déplacement très différents : beaucoup moins lourds, bien moins rapides et certes au confort moindre tout en restant suffisant ».

À titre d'illustration, le schéma ci-après montre ce que représente la consommation énergétique d'un véhicule électrique doté d'une batterie de 100 kWh par rapport à la consommation énergétique de véhicules plus sobres.

Source : Revue « Transports urbains », n° 141 de septembre 2022 consacré à l'avenir des véhicules intermédiaires

Dès lors, le rapporteur pour avis préconise d'encourager le développement des véhicules intermédiaires (ou VELI), qui constituent une catégorie de véhicules routiers légers situés entre les deux véhicules de référence que sont le vélo et la voiture (véhicules à assistance électrique, vélos cargos, tandems, mini-voitures, etc.) et qui présentent de réels avantages environnementaux, à travers une empreinte écologique plus faible qu'un véhicule classique (ne serait-ce qu'en termes d' utilisation de ressources) et une efficacité énergétique accrue.

Ils constituent en outre une solution de déplacement peu onéreuse (coût d'achat inférieur à 10 000 €) pour les trajets du quotidien, notamment en zone peu ou moyennement dense, ce qui en fait un levier potentiellement efficace pour lutter contre la précarité mobilité dans ces territoires. Ils peuvent s'avérer particulièrement adaptés aux besoins des ménages de taille modeste (une ou deux personnes) et au remplacement du second véhicule de nombreux ménages.

Quelques exemples de véhicules intermédiaires

Source : Revue « Transports urbains », numéro 141 de septembre 2022 consacré à l'avenir des véhicules intermédiaires.

Ces véhicules présentent en outre un impact carbone réduit sur l'ensemble du cycle de vie (cf. graphiques ci-après).

Impact carbone sur l'ensemble du cycle de vie en valeur absolue (tCO2e)

Source : Revue « Transports urbains », numéro 141 de septembre 2022 consacré à l'avenir des véhicules intermédiaires.

Note : Hypothèses concernant la durée de vie : 150 000 km pour la Clio, la Zoé et la Twizy, 80 000 km pour le vélomobile, 30 000 km pour le VAE et le vélo. Mix électrique : 346 g/kWh pour l'UE, 60 g pour la France. La variation du mix électrique ne concerne que la phase d'usage. Les lieux de fabrication sont donc considérés comme fixes bien que leurs émissions propres puissent être réduites grâce à une relocalisation de tout ou partie de la chaîne de valeur dans des pays au mix électrique moins carboné.

Impact carbone sur l'ensemble du cycle de vie exprimé par kilomètre (gCO2e/km)

Source : Revue « Transports urbains », numéro 141 de septembre 2022 consacré à l'avenir des véhicules intermédiaires.

Note : Hypothèses concernant la durée de vie : 150 000 km pour la Clio, la Zoé (modif. 300 000 km) et la Twizy (modif. 75 000), 80 000 km pour le vélomobile (modif. 40 000), 30 000 km pour le VAE en France et le vélo (modif. 60 000). Mix électrique : 346 g pour l'UE, 60 g pour la France. Les calculs d'impact n'intègrent pas d'affectation d'émission liée au potentiel remplacement de la batterie. Les durées de vie mentionnées sont conformes au champ des possibles en l'état actuel des savoir-faire.

Une étude du Shift Project de 201726(*) décrit ces véhicules comme un chaînon manquant à développer entre les vélos et les petites voitures électriques, à l'instar de la Renault Twizy (cf. graphique ci-après), capables de transporter deux personnes avec une masse inférieure à 400 kg et une motorisation de l'ordre de 20 kW.

Représentation de l'écart de poids/puissance entre un vélo électrique (s-pedelec) (jaune) et une petite voiture électrique (vert)

Source : The Shift Projet, Décarboner les mobilités dans les zones de moyenne densité, 2017.

Pour encourager le développement de ces véhicules, il recommande de les intégrer systématiquement aux dispositifs d'aides au verdissement du parc automobile.

Entendu par le rapporteur pour avis, le chercheur Aurélien Bigo indique : « je souscris au constat et au fait qu'il faut intégrer ces véhicules dans l'ensemble des politiques publiques de mobilité, et en particulier celles qui concernent l'évolution des flottes de véhicules (bonus-malus, leasing, aides à l'achat, verdissement des flottes, etc.). Pour l'instant, ces politiques encouragent l'électrification, mais très peu la sobriété des véhicules, alors qu'il est indispensable de faire les deux en même temps »27(*). L'association AVELI, qui rassemble des fabricants, des industriels, des associations et des particuliers réunis autour de la volonté de développer les VELI, indique quant à elle que « si on instaure un malus sur les véhicules les plus lourds, il convient d'élargir le spectre de la mesure et d'inclure un bonus pour les véhicules les plus légers »28(*).

La commission, sur la proposition du rapporteur pour avis, a adopté un amendement visant à rendre les véhicules intermédiaires éligibles à l'ensemble des aides à l'acquisition de véhicules propres (bonus écologique, prime à la conversion et leasing social).

Dans le même esprit de sobriété énergétique, il a proposé de barémiser le dispositif de score environnemental du véhicule (ou « écoscore ») élaboré par l'Ademe et mis en place en 2024 pour conditionner l'éligibilité des véhicules aux aides à l'acquisition29(*), en prenant en compte le poids des véhicules et ce, de manière à subventionner plus fortement les véhicules légers que les véhicules électriques lourds.

De telles mesures incitatives permettraient de développer les VELI, dont le marché est pour l'heure assez marginal en volumes. Ainsi que le souligne le chercheur Aurélien Bigo, « la principale raison tient sûrement au fait que les constructeurs automobiles n'ont pas vraiment d'intérêt financier aujourd'hui à les développer, tel que le marché est organisé, régulé, ou telles que les incitations fiscales sont faites. Ils ont en effet bien plus de marge sur des véhicules plus gros, lourds, haut de gamme, de type SUV, que ne serait-ce que sur des petites voitures électriques ».

Il ajoute « craignant probablement une concurrence aux voitures (c'est la condition de leur intérêt environnemental que de se faire en remplacement de la voiture et non en addition) sur lesquelles ils ont plus de marges, les constructeurs n'ont pas forcément d'intérêt à initier ce mouvement vers ces véhicules plus sobres. Cela veut dire que les politiques publiques doivent modifier ce système d'incitations et de contraintes envers les constructeurs historiques s'il est souhaité qu'ils se mettent à produire des véhicules intermédiaires entre vélo et voiture. De la même manière que les constructeurs n'auraient pas été vers l'électrique sans incitations et contraintes importantes, ils n'iront pas vers des véhicules bien plus sobres si ce n'est pas piloté de manière ambitieuse par la puissance publique »30(*).

Dès lors, outre les évolutions proposées s'agissant des aides à l'acquisition, le rapporteur pour avis appelle à poursuivre les efforts réalisés dans le cadre de l'appel à projets eXtreme Défi lancé par l'Ademe en 2022 pour soutenir la structuration d'une filière industrielle de production de VELI. Selon l'Ademe, ce programme, qui s'achèvera en 2025, a permis la réalisation de 65 concepts de véhicules sur trois ans, la réalisation de près de 200 véhicules prototypes et un début d'industrialisation pour quatre premiers projets. Le rapporteur appelle à poursuivre ce programme d'accompagnement de la filière industrielle du VELI en devenir. L'Ademe estime à 150 M€ les besoins supplémentaires sur trois ans pour atteindre un objectif de commercialisation de 600 000 véhicules d'ici 2027.

B. AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES : ÉVITER UN COUP DE FREIN DRAMATIQUE POUR LE VERDISSEMENT DU PARC

1. 2025 : un effondrement de l'enveloppe dédiée aux aides à l'acquisition de véhicules propres

· Le PLF pour 2025 prévoit une forte baisse de moyens dédiés aux aides à l'acquisition de véhicules propres (bonus écologique, prime à la conversion et leasing social) l'année prochaine, qui passera de 1,5 Md€ en LFI pour 2024 à 970 M€ (- 530M€). En outre, si l'on prend en compte la sur-exécution des crédits intervenue en 2024 - du fait du succès inespéré du leasing social (qui a représenté 650 M€ de dépenses en 2024) et de la forte dynamique du bonus écologique - cette baisse pourrait même atteindre 876 M€.

À cet égard, Mobilians indique : « il est indispensable de tirer les enseignements de l'année 2024, marquée par des glissements budgétaires conséquents sur l'enveloppe dédiée au verdissement des véhicules. Rappelons que le budget alloué au leasing social, fixé à l'origine à 50 millions d'euros, a atteint 650 millions entre le 1er janvier et le 15 février 2024 (dont 275 millions sur l'abondement leasing - le bonus et l'apport leasing s'élevant à 13 000 euros par véhicule) sur une enveloppe de 1,5 milliards d'euros, impactant considérablement l'ensemble des autres dispositifs, avec des effets de bord donnant lieu à la suppression du bonus pour les personnes morales et à la baisse du bonus aux particuliers, dispositifs ayant pourtant largement fait leur preuve. »31(*)

Cette diminution brutale des financements risque de fragiliser l'atteinte des objectifs de verdissement du parc automobile et ce, alors que le marché doit se préparer à l'échéance de l'interdiction de la vente de véhicules thermiques en 2035 au sein de l'Union européenne.

La cible de 2035 nécessite que la part de marché des véhicules électriques en France atteigne 50 % en 2030 et 26 % dès l'année prochaine, alors qu'elle s'établit seulement, en 2024, à un peu plus de 17 %.

La Plateforme automobile (PFA) rappelle en effet que la trajectoire de verdissement du parc s'appuie sur la trajectoire du Contrat Stratégique de la filière automobile co-signé avec l'État, qui est elle-même basée sur celle du secrétariat général à la planification écologique (SGPE), conformément aux graphiques ci-après :

Source : retour de la PFA au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

Note : le second graphique (droite) représente la part des véhicules électriques (VE) et des véhicules hybrides rechargeables (VHR) dans les immatriculations de voitures neuves de personnes physiques et morales.

Cet acteur précise « cette trajectoire, élaborée en concertation avec l'État, repose sur des engagements réciproques. D'une part, les constructeurs se sont engagés à proposer une offre de véhicules électriques, aujourd'hui largement disponible. D'autre part, l'État devait mettre en place des conditions favorables à leur adoption, notamment par le biais d'aides à l'achat et d'incitations fiscales. Or, au vu des orientations du PLF pour 2025, il apparaît presque certain que cette trajectoire ne pourra pas être respectée pour l'échéance de 2025 »32(*).

· En outre, le Gouvernement a annoncé le 14 novembre dernier la mise à l'arrêt de la prime à la conversion (PAC) l'année prochaine, un dispositif qui permet de soutenir l'achat d'un véhicule neuf ou d'occasion peu polluant en échange de la mise au rebut d'un ancien véhicule.

Or, les bénéficies environnementaux de la PAC ont été démontrés : selon le bilan économique et environnemental réalisé par le Commissariat général au développement durable en décembre 2023, en 2022, 35 tonnes d'émissions de particules fines et 120 000 tonnes d'émissions de CO2 ont pu être évitées grâce à ce dispositif (ce qui représente respectivement 43 et 19 M€ en termes monétaires) sur la base des données 2022.

Sa suppression viderait en outre de sa substance la loi d'avril 202433(*) visant à favoriser le réemploi des véhicules destinés à la PAC au profit de services de mobilité solidaire, issue d'une initiative sénatoriale, qui répond à une demande très forte des territoires, notamment pour soutenir les ménages touchés par la précarité mobilité en zone rurale. Son entrée en vigueur n'était pas encore intervenue, faute de publication du décret d'application.

Le rapporteur pour avis estime indispensable de maintenir les aides au verdissement du parc de véhicules à un niveau ambitieux. Il met en garde contre scénario similaire à celui rencontré récemment en Allemagne, où l'extinction brutale des aides au verdissement du parc de véhicules a conduit à une nette baisse des ventes de véhicules électriques et à une hausse, en conséquence, des ventes de véhicules diesel.

Outre le maintien des efforts en faveur du verdissement du parc de véhicules légers, il rappelle la nécessité de soutenir l'acquisition de véhicules lourds peu polluants. La Fédération nationale du transport routier (FNTR) indique qu'un poids lourd électrique demeure trois fois plus onéreux que son équivalent diesel. De même, l'UTPF alerte sur la nécessité de soutenir les AOM dans le verdissement de leurs flottes d'autobus, estimant que « le surcoût d'un bus diesel est de l'ordre de 200 000 euros »34(*) par rapport à un autobus électrique.

En outre, dans un esprit d'efficacité budgétaire et environnementale, il préconise de renforcer l'écoscore des véhicules propres mis au point par l'Ademe, à deux titres : d'une part, permettre une modulation des aides à l'acquisition de véhicules propres sur la base de cet écoscore - afin de subventionner plus fortement les véhicules les plus vertueux, ainsi que le propose Transport & Environnement35(*) - et, d'autre part, d'en étendre l'application aux aides à l'acquisition concernant les véhicules lourds, à commencer par le secteur des autobus et autocars propres qui sont soumis à une forte concurrence des pays asiatiques. En 2024, l'écoscore a en effet produit des effets vertueux tant au plan environnemental - qui doivent encore être évalués - qu'au plan industriel. Mobilians indique à ce titre « l'instauration du score environnemental a largement contribué à favoriser les véhicules produits en Europe et à réduire drastiquement la part des véhicules produits en Asie. »36(*)

2. Une ambition sociale des aides au verdissement des véhicules à renforcer via un ciblage plus efficace des publics

· La baisse des moyens alloués aux aides à l'acquisition de véhicules propres survient alors que les ménages auraient besoin d'un soutien volontariste pour aller vers la motorisation électrique, alors que le coût d'acquisition des véhicules électriques demeure prohibitif pour la majorité d'entre eux : pour rappel, le surcoût lié à l'achat d'un véhicule électrique est de l'ordre de 40 % à 50 % par rapport à un véhicule thermique.

La première édition du leasing social en 2024 - dispositif de soutien à la location de longue durée de véhicules électriques pour les ménages modestes - a d'ailleurs fait face à une forte demande : 50 000 commandes ont afflué dès les premiers jours du lancement du dispositif, si bien qu'il a dû être suspendu après seulement quelques semaines.

Pour poursuivre cette dynamique, le rapporteur pour avis jugerait pertinent d'augmenter de manière significative les moyens alloués au leasing social en 2025, afin de doubler la cible par rapport aux 50 000 véhicules mis en location en 2024. Pour permettre cette montée en charge, il conviendrait que la subvention par véhicule (qui était de l'ordre de 13 000 euros en 2024) soit revue à la baisse. Selon une note de Transport & Environnement, le Réseau action climat, l'UFC Que choisir et le Secours catholique, « ce montant semblait en effet élevé et peu justifié au regard des prix affichés, plus bas que ceux qui avait été annoncés : le montant des mensualités affichées démarrait à 49 euros contre une annonce initiale à 100 euros ».

Ce dispositif a néanmoins révélé certaines limites. Tout d'abord, selon la DGEC, sur les 50 000 bénéficiaires du leasing social en 2024, 60 % étaient issus des déciles de revenus 4 et 5, alors que la cible annoncée par le Gouvernement concernait des ménages plus modestes. Ensuite, il n'était pas ouvert aux personnes dépourvues d'emploi, qui sont pourtant parmi les plus touchées par les phénomènes de précarité mobilité. Enfin, la durée de la location, établie à trois ans, apparaît trop faible pour assurer l'efficacité du dispositif, comme le soulignent Transport & Environnement, le Réseau action climat, l'UFC Que choisir et le Secours catholique dans la note précitée.

Aussi, le rapporteur pour avis préconise d'apporter plusieurs évolutions de paramètres au leasing social dès l'année prochaine :

- rendre le dispositif accessible aux personnes sans emploi (notamment aux chômeurs, retraités et aux personnes éloignées de l'emploi) ;

- allonger la durée de location, par exemple à six ans.

- cibler plus efficacement les ménages modestes et les personnes résidant en zone rurale, compte tenu de l'importance de la dépendance à la voiture dans ces territoires où l'offre de transports collectifs est souvent lacunaire.

· Les véhicules électriques d'occasion constituent une piste intéressante de démocratisation de l'accès à la mobilité électrique. En outre, ainsi que l'a souligné l'Avere, quasiment 6 véhicules sur 7 en France sont achetés en occasion.

Cet acteur indique dans son baromètre du marché du véhicule électrique d'occasion publié en juin 2024 avec Mobilians que les voitures électriques d'occasion occupent encore une part marginale des ventes : « au premier semestre 2024, elles ont représenté 2 % des transactions totales sur le marché des voitures d'occasion, soit 28 682 unités sur un total de 1,335 million de transactions ». Dès lors, le rapporteur pour avis regrette la suppression, en 2024, de la possibilité pour les entreprises de bénéficier du bonus écologique pour l'achat d'une voiture électrique : le renouvellement des flottes des entreprises étant plus rapide que pour les ménages, le verdissement de leur parc constitue un important levier de développement du marché des véhicules électriques d'occasion.

Ce marché affiche néanmoins une dynamique positive en 2024 : 36 384 véhicules ont été vendus au troisième trimestre, soit une augmentation de 22 % par rapport au trimestre précédent.

Le rapporteur pour avis estime donc opportun de soutenir, via les aides à l'acquisition, l'achat de véhicules propres d'occasion. À cet égard, l'exclusion en 2024 des véhicules électriques d'occasion du champ du bonus écologique apparaît particulièrement préjudiciable.

La commission a adopté un amendement n°  II-283, sur la proposition du rapporteur pour avis, visant à rétablir l'éligibilité des véhicules électriques d'occasion au bonus écologique, dans un objectif de démocratisation de l'accès aux véhicules électriques, au bénéfice des ménages les plus modestes.

CHAPITRE III
LES CRÉDITS CONSACRÉS AUX TRANSPORTS
FERROVIAIRES, FLUVIAUX ET MARITIMES

Réunie le 20 novembre 2024, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant son rapporteur, Philippe Tabarot, a émis un avis favorable aux crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes inscrits au projet de loi de finances pour 2025, sous le bénéfice de l'adoption de six amendements en faveur du financement des infrastructures de transports et de l'offre de transports périurbaine et régionale.

La commission s'inquiète de la conjugaison, dans le PLF pour 2025, d'une baisse marquée des moyens alloués à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), et de la hausse de la pression fiscale sur les transports. Consciente de la situation dégradée des finances publiques, elle propose d'atténuer de moitié, par rapport aux prévisions figurant dans le PLF initial, la diminution des recettes fiscales affectées à l'Afit France via la TICPE. C'est en effet la seule solution pour éviter d'entrer dans une spirale de paupérisation du réseau ferroviaire et pour mener à bien sa régénération et sa modernisation.

Les collectivités territoriales font face à un mur d'investissements afin de déployer les services express régionaux métropolitains (Serm). La commission propose donc de relever le taux plafond de versement mobilité pour les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) qui ont obtenu la labellisation d'un projet de Serm. Ces chantiers, qui seront structurés autour d'une armature ferroviaire devront également être soutenus par les régions, qui subissent une hausse marquée des péages ferroviaires. La commission juge donc indispensable de créer un versement mobilité régional (VMR) afin qu'elles puissent mener de front leurs efforts en faveur des transports ferroviaires régionaux et leur implication dans les Serm.

La commission alerte par ailleurs sur la nécessité de consolider la trajectoire d'investissement de VNF en faveur du réseau fluvial et de respecter les engagements pris dans le COP s'agissant de la stabilisation de ses ETP. Elle estime impératif de soutenir la transition écologique des ports maritimes, conformément aux ambitions inscrites dans la Stratégie nationale portuaire (SNP). Enfin, si elle ne conteste pas la nécessité d'associer les armateurs français à l'effort de redressement des finances publiques, elle veillera à ce que cela ne fragilise pas gravement leur compétitivité.

I. FINANCEMENTS DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT : METTRE UN TERME À LA FUITE DES RECETTES

A. LES TRANSPORTS SONT PRIS DANS LE CISEAU DE LA HAUSSE DE LA PRESSION FISCALE ET DE LA BAISSE DE L'AFFECTATION DES RECETTES

Le financement par l'État des investissements en faveur des infrastructures de transport a lieu par l'intermédiaire de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). Cet acteur est lui-même financé par l'affectation de recettes fiscales et des crédits issus du plan de relance. Or, ses recettes sont en baisse. L'agence a en effet subi une diminution de près de 400 millions d'euros de fiscalité affectée en cours d'année par rapport à ce qui était prévu en loi de finances pour 2024. Ses ressources totales s'estiment donc, pour 2024, à près de 4,3 milliards d'euros, alors que leur montant initialement prévu était de plus de 4,6 milliards d'euros.

Pour 2025, les montants de recettes affectées à l'Afit France et des crédits budgétaires de l'agence sont évalués à 3,7 milliards d'euros. Certaines de ces recettes sont en outre incertaines, l'Afit France étant en effet la dernière attributaire des amendes radars. Cet affaissement des moyens de l'Afit France s'explique principalement par une chute d'un ordre de grandeur de 700 millions d'euros du montant de TICPE affecté à l'agence pour 2025 par rapport à 2024. Or, cette recette est assise en grande partie sur le secteur des transports. Cette désaffectation constitue donc une fuite des impôts payés par ce secteur vers le budget général de l'État.

La commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis visant à limiter la diminution du montant de TICPE affecté à l'Afit France en 2025 prévue par le projet de loi de finances, en divisant par deux cette baisse, par rapport au niveau qui figurait en loi de finances initiale pour 202437(*).

Or, dans le même temps, le secteur des transports devrait subir une hausse marquée de la fiscalité, notamment à travers la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, mais également la contribution exceptionnelle sur le résultat d'exploitation des grandes entreprises de transport maritime ainsi que la hausse souhaitée par le Gouvernement du tarif de solidarité sur les billets d'avion.

Ces nouvelles taxes ne seront malheureusement pas affectées au financement des transports, alors qu'elles sont directement assises sur ce dernier. Ainsi, alors qu'une fraction de tarif de solidarité est aujourd'hui affectée à l'Afit France, il est prévu que le produit de sa hausse éventuelle bénéficie uniquement au budget général de l'État.

Pour la commission, ce mouvement de ciseau, entre hausse de la pression fiscale et désaffectation des recettes, est, à long terme, contradictoire avec la nécessité d'assurer le report modal et la décarbonation des mobilités. Si on peut admettre que 2025 puisse faire figure « d'année blanche » compte tenu du contexte budgétaire contraint, elle doit rester une exception. La trajectoire de financement actuelle de l'Afit France s'inscrit en effet pour l'instant dans le scénario de « cadrage budgétaire » décrit par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI)38(*), et non dans le scénario de « planification écologique », qui est pourtant la feuille de route du Gouvernement en la matière.

Source : Conseil d'orientation des infrastructures (COI)

La conférence nationale sur le financement des mobilités annoncée par le ministre chargé des transports pour 2025 doit permettre de dégager de nouvelles recettes affectées en faveur des infrastructures de transport. Les recettes issues du marché carbone européen (SEQE-UE) assises notamment sur le secteur des transports et, à plus long terme, une part du produit des péages autoroutiers à la fin des concessions d'autoroutes en cours, pourraient ainsi être fléchées pour les transports.

Cette conférence devra permettre de préciser l'origine, la ventilation et le rythme d'engagement des 100 milliards d'euros de crédits du « Plan de nouvelle donne ferroviaire » présenté par Élisabeth Borne, alors Première ministre, en février 2023.

B. LES AUTORITÉS ORGANISATRICES DE LA MOBILITÉ (AOM), AUX FINANCES EXSANGUES, N'ONT PAS LES MOYENS DE DÉPLOYER LES SERVICES EXPRESS RÉGIONAUX MÉTROPOLITAINS

Les AOM, qui assurent le financement des transports du quotidien et des transports régionaux, n'ont actuellement pas les moyens de faire face au mur d'investissements nécessaires pour déployer les services express régionaux métropolitains (Serm). La loi relative aux Serm39(*), adoptée définitivement en décembre 2023, a en effet créé un cadre juridique pour assurer le développement des transports du quotidien en région.

D'ailleurs, au cours de son examen, la commission n'avait pas manqué de s'inquiéter de l'absence de garantie sur le financement de leurs dépenses d'investissement et de fonctionnement. C'est la raison pour laquelle elle a introduit dans le texte le principe de l'organisation d'une conférence nationale de financement sur les Serm, qui se fait attendre. La commission estime donc impératif de tenir au plus vite cette conférence, qui aurait dû avoir lieu avant le 30 juin 2024.

Les régions, qui sont AOM pour les transports ferroviaires régionaux conventionnés, seront particulièrement impliquées dans ces projets. Or, comme l'a rappelé Régions de France au rapporteur, elles ne disposent d'aucune ressource dédiée pour exercer leur compétence mobilité, réalisée sur leur dotation générale de fonctionnement.

Face à ce constat, la commission a adopté deux amendements du rapporteur pour avis afin :

- d'augmenter le taux plafond de versement mobilité (VM) de 0,2 point à destination des AOM qui ont obtenu la labellisation d'un projet de Serm ;

- de créer une part régionale de VM à hauteur de 0,2 point pour permettre aux régions de participer au financement des Serm et faire face à la hausse des péages ferroviaires.

Ces deux évolutions seront conditionnées à une implication plus étroite des organisations des employeurs dans la politique des mobilités des AOM. Elles ne seront applicables qu'aux entreprises de plus de 50 salariés40(*).

Pour le rapporteur, ces évolutions participent également d'une logique d'équité territoriale, puisque les AOM d'Île-de-France ont obtenu de pouvoir augmenter le taux de VM perçu afin d'assurer le financement du Grand-Paris-Express.

Suivant la proposition de son rapporteur pour avis, la commission a également adopté un amendement afin de prolonger la possibilité pour les employeurs de financer jusqu'à 75 % au lieu de 50 % les abonnements de transport de leurs salariés.

II. TRANSPORT FERROVIAIRE : NE PAS TOMBER DANS LE PIÈGE DE LA PAUPÉRISATION DU RÉSEAU

A. RÉSEAU FERROVIAIRE : MAINTENIR L'EFFORT DEVANT L'AMPLEUR DE LA TÂCHE

Les investissements en faveur du réseau ferroviaire ont pour objectif d'assurer sa régénération, sa modernisation et son développement.

Or, après un effort de 3,201 milliards d'euros en 2024, le réseau devrait bénéficier de financements pour sa régénération et sa modernisation à hauteur de 3,323 milliards d'euros en 2025. Ces montants sont assurés pour moitié (1,561 milliard d'euros) par le fonds de concours versé par SNCF Voyageurs à SNCF Réseau.

Il existe aujourd'hui un consensus sur le fait qu'environ 1,5 milliard d'euros supplémentaires sont nécessaires a minima pour régénérer et moderniser le réseau. L'insuffisance des financements destinés au réseau devrait mener au report de projets nouveaux de régénération et de modernisation qui auraient pu favoriser une hausse de la part modale du transport ferroviaire. Les investissements en faveur de la régénération du réseau ne permettront pas, en effet, de renverser le processus de vieillissement du réseau.

Le niveau actuel des investissements en faveur de la modernisation du réseau, notamment pour déployer le système de gestion du trafic européen (dit ERTMS) et de la commande centralisée du réseau (CCR), est en particulier inquiétant. Sans financements nouveaux, SNCF Réseau n'achèvera la mise en place de la CCR qu'en 2070, alors qu'elle dispose de capacités industrielles pour accélérer le rythme de déploiement en cas d'abondement financier suffisant.

L'Autorité de régulation des transports (ART) a partagé ce constat avec le rapporteur pour avis que « les moyens actuellement envisagés dans le PLF pour 2025 restent insuffisants pour mettre un terme au vieillissement et à la baisse de performance du réseau en comparaison de nos voisins européens ». La révision du contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État pourrait être l'occasion de définir une nouvelle trajectoire d'investissements en faveur du réseau, rompant avec le scénario actuel qui, en l'état, va conduire à un vieillissement du réseau entraînant une baisse de performance et une chute du trafic incompatibles avec l'objectif d'augmentation de la part modale du transport ferroviaire. Dans le cas contraire, comme l'a mis en avant le régulateur, le gestionnaire d'infrastructure entrerait dans une spirale négative de paupérisation, liée à la diminution du trafic et donc de ses recettes.

Alors que les péages ferroviaires, déjà les plus élevés d'Europe, ne pourront représenter qu'une partie des moyens du gestionnaire d'infrastructure, dégager de nouvelles recettes en faveur du réseau est un impératif.

B. SERVICES DE TRANSPORT DE VOYAGEURS ET DE MARCHANDISES : NE PAS RATER LE VIRAGE DU REPORT MODAL

1. Transport ferroviaire de voyageurs : la hausse des péages poursuit inlassablement son emballement

Le trafic ferroviaire de voyageurs poursuit sa croissance. Selon les données transmises par SNCF Voyageurs au rapporteur pour avis, à la fin du mois de septembre 2024, par rapport à la même époque de l'année 2023, on observe une hausse de 5 % du trafic TGV et de 11 % du trafic TER (+9,3 % en neutralisant les effets des mouvements sociaux de 2023).

Source : ART

Cependant, la programmation des travaux ralentit ce mouvement. En effet, comme l'a indiqué l'ART41(*), entre 2015 et 2023, le nombre d'heures dédiées aux travaux sur une année sur le réseau ferré national a augmenté de 31 % alors que les moyens consacrés à la régénération du réseau ont diminué en euros constants sur cette même période. SNCF Réseau a en effet tendance à programmer ses travaux au meilleur coût pour le gestionnaire d'infrastructure, et n'est pas incité à prendre en compte les effets sur les entreprises ferroviaires.

Les entreprises de transport ferroviaire subissent une augmentation des péages ferroviaires versés au gestionnaire d'infrastructure. Les redevances versées à SNCF Réseau devraient ainsi augmenter de 6 % (+1,7 % correspondant à l'inflation prévisionnelle pour 2025, +4,3 % correspondant au terme fixe visant à accélérer la couverture des coûts de SNCF Réseau) entre 2024 et 2025 pour le transport ferroviaire conventionné. Pour le TGV, cette hausse est de 2,5 %.

Ces hausses prévues en 2025 s'inscrivent dans une dynamique durable, de plus d'une décennie, qui devrait, en l'état actuel du droit, se poursuivre. La France est ainsi le pays avec le niveau de péages ferroviaires le plus élevé d'Europe. Aujourd'hui, les péages représentent près de 40 % d'exploitation du TGV. Régions de France a même estimé que ces péages représentaient environ 86 % du prix payé par un voyageur pour un billet de TER en 2022.

Part des péages dans les coûts d'exploitation d'un TGV
exploité par SNCF Voyageur

Source : SNCF Voyageurs

Cette augmentation du niveau des péages ralentit le processus de report modal vers le transport ferré, limite la capacité des régions à augmenter leur offre de service et fragilise l'ouverture à la concurrence du secteur alors que la demande, en hausse, n'est pas pleinement satisfaite par l'offre ferroviaire actuelle. La commission réitère donc son constat sur la nécessité d'affecter de nouveaux moyens de financement du réseau, qui ne peut être porté uniquement par les opérateurs ferroviaires.

Comme l'a indiqué l'Association française du rail au rapporteur pour avis, « cette tarification élevée représente un frein réel au développement de nouveaux services et plus généralement au développement du ferroviaire. L'augmentation des coûts d'accès impacte directement la rentabilité et la compétitivité des services, rendant l'ouverture à la concurrence plus difficile ».

En outre, plusieurs régions ont lancé concomitamment des appels d'offres pour exploiter des lignes de transport express régional (TER). Si ce mouvement devrait permettre de favoriser l'intensité concurrentielle du secteur, les nouveaux entrants risquent de ne pas être capables de répondre simultanément à un grand nombre d'appels d'offres.

Selon SNCF Voyageurs, ce processus d'ouverture à la concurrence « remet en cause la péréquation économique entre dessertes rentables et déficitaires qui permettait jusqu'à présent à TGV d'irriguer le territoire », car les nouveaux entrants se positionnent sur les marchés à haut potentiel.

Pour la commission, les moyens qui permettraient d'éviter une dégradation du service sur les lignes les moins rentables doivent être étudiés :

- une modulation des péages ferroviaires en fonction de la rentabilité des sillons  ;

- l'attribution de sillons par lots comprenant des dessertes plus ou moins rentables.

Enfin, l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire est supervisée par un régulateur indépendant, l'Autorité de régulation des transports (ART). Or, l'insuffisance de sa dotation de fonctionnement, qui est de 15 millions d'euros, pourrait l'empêcher d'assumer convenablement l'ensemble de ses missions. Le rapporteur pour avis alerte le Gouvernement sur cette situation regrettable.

2. Fret ferroviaire : relancer une filière marquée une conjoncture difficile

L'année 2023 a été marquée par des difficultés conjoncturelles prononcées (grèves liées à la réforme des retraites, effondrement du tunnel de la Maurienne), une chute de 17 % du trafic (en tonnes par km) et une forme de report modal inversé vers le transport routier. L'année 2024 devrait cependant amorcer un début de retour à la normale pour le fret ferroviaire, qui pourrait retrouver en 2025 son niveau de 2022. L'atteinte de l'objectif d'un doublement de la part modale du fret ferroviaire introduit par la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 d'ici 2030 n'est cependant pas encore en vue.

Toutefois, la filière doit faire face à des problèmes structurels, notamment la qualité et la fiabilité du réseau et la hausse du coût de l'énergie. Le rapporteur pour avis appelle donc à la vigilance sur l'impact des interruptions de trafic consécutives aux travaux sur le réseau, qui doit être limité pour les trains de fret.

La commission accueille avec satisfaction le passage de l'aide à l'exploitation des services de wagons isolés de 70 millions d'euros en 2024 à 100 millions d'euros en 2025. Cependant, elle regrette que cette hausse ait été pour partie faite au détriment de l'aide au démarrage de nouveaux services, dont le montant diminue de 16 millions d'euros en 2025.

La commission ne peut que prendre acte du déploiement du plan de discontinuité de fret SNCF, qui a amené, d'une part, le transfert de certains flux de Fret SNCF vers d'autres entreprises ferroviaires et, d'autre part, à la scission de l'entreprise en deux entités, Hexafret pour le transport de marchandises, et Technis pour la maintenance des locomotives. Cette solution était la « moins mauvaise » sur ce dossier, compte tenu du risque de faillite de l'entreprise dans l'hypothèse d'une absence d'accord avec la Commission européenne.

III. TRANSPORT FLUVIAL ET MARITIME : LES DÉFIS DE LA CONTRAINTE BUDGÉTAIRE POUR DES SECTEURS CONFRONTÉS À DES BESOINS SIGNIFICATIFS

A. LE TRANSPORT FLUVIAL FACE AUX EXIGENCES DU VERDISSEMENT ET DE LA MODERNISATION DU RÉSEAU

1. Une année marquée par la mise en lumière, lors des Jeux olympiques et paralympiques, du fort potentiel environnemental du transport fluvial

La participation de bateaux hybrides ou convertis à l'électrique à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris en juillet 2024 a souligné le fort potentiel environnemental du transport fluvial, également mis en valeur par la contribution décisive de ce secteur à la construction du village des athlètes. Le recours au transport fluvial a permis d'éviter la circulation de près de 50 000 camions sur les routes durant les chantiers olympiques.

De manière générale, le tonnage disponible des 1 042 unités fluviales composant les cales françaises équivaut à 25 000 camions, et 500 000 tonnes de CO2 sont évitées chaque année grâce au transport fluvial, soit l'équivalent de 3 millions de camions en moins sur les routes.

Si la transition écologique de la flotte fluviale s'appuie sur une démarche volontaire de la profession, s'agissant notamment du recours aux nouveaux carburants et du déploiement de bornes électriques à quai, cette dynamique nécessite d'importants moyens, comme l'a déjà fait observer le rapporteur :

- selon Voies navigables de France (VNF), le coût d'un bateau « zéro émission » représente un facteur 2 à 7 par rapport à une motorisation thermique ;

- le coût du déploiement de bornes électriques est estimé par VNF à 15-25 M€ pour les 150 à 200 bornes du réseau européen RTE-T, et à 10 M€ pour les 260 bornes devant équiper les itinéraires touristiques.

Les moyens déployés par le Plan d'aide à la modernisation et à l'innovation (PAMI) fluviale 2023-2029 (60 M€), guichet unique de subvention pour le transport fluvial, sont fléchés pour moitié vers le verdissement de la flotte, mais les besoins excèdent cette enveloppe.

En effet, pour atteindre les objectifs de 2035 (réduction de 35 % des émissions polluantes par rapport à 2015), VNF estime le montant des investissements nécessaires à 300 M€ : compte tenu de l'effet de levier des aides publiques (un million d'euros d'aide publique au verdissement générant deux à trois millions d'euros d'investissements privés), l'effort public devrait s'élever en principe à 100-150 M€, destinés au seul verdissement.

De plus, les investissements destinés au verdissement de la flotte fluviale se heurtent à une contrainte liée à la durée d'utilisation des unités fluviales, particulièrement longue (30 à 40 ans ; 5 à 10 ans dans le secteur routier) : ces projets ne peuvent donc pas bénéficier d'effets de série.

La commission sera donc particulièrement attentive à la stratégie nationale fluviale, lancée par le précédent gouvernement en février 2024 et attendue pour le début de 2025, et veillera à réalisation des ambitions qu'elle porte : « Nous avons cinq ans pour construire le transport fluvial du XXIème siècle, consolider la filière fluviale et notre pavillon national, opérer la bascule de la décarbonation des transports et appuyer la réindustrialisation verte du pays », comme l'a indiqué François Durovray, ministre délégué en charge des transports en octobre dernier, lors de l'assemblée générale de E2F (Entreprises fluviales de France).

2. Les enjeux de la modernisation du réseau de Voies navigables de France

L'entretien du réseau navigable souffre aujourd'hui, selon VNF, d'un « sous-investissement historique », à l'origine d'« incidents à répétition sur certains ouvrages ». En dépit des efforts réalisés sous l'effet du Plan de relance, qui a permis une augmentation significative des crédits d'investissement en 2021 et 2022 (plus de 200 M€ par an au lieu de 90 M€ en 2020) et le lancement de projets sur des ouvrages sensibles (écluses de Méricourt, de Gambsheim, barrage de Meaux...), la dégradation du réseau a été soulignée par le rapport du Conseil d'orientation des infrastructures publié en 2023.

Le contrat d'objectifs et de performance (COP) conclu entre l'État et VNF pour la période 2020-2029 et révisé en décembre 2023 a prévu une trajectoire financière ambitieuse pour 2023-2029, qu'il s'agisse du développement du réseau (4,3 Mds € y seraient consacrés, notamment dans le cadre du projet Seine-Escaut dont les dépenses sont estimées à 1,5 Md€) ou de la régénération et de la modernisation de celui-ci (2,5 Md€). À cet égard, VNF est engagé dans un programme d'automatisation de ses ouvrages, de télé-conduite et de digitalisation des services : cette dynamique, porteuse de gains de productivité, amplifiera la modernisation en cours du réseau.

Parallèlement à cette démarche, la stabilisation du plafond d'emplois de VNF jusqu'en 2026 était inscrite dans le COP révisé en 2023, après plusieurs années de réduction d'effectifs particulièrement sévères (- 15 % en dix ans).

Cette pause bienvenue - et nécessaire pour le climat social de l'opérateur - serait compromise par une diminution du nombre d'ETP dans le cadre de la discussion du PLF42(*).

Le rapporteur souhaite vivement que l'accord conclu il y a un an entre l'opérateur et l'État ne soit pas remis en cause, à un moment où VNF a besoin que son engagement sur la voie de la modernisation soit soutenu et encouragé.

De plus, alors que VNF se trouve à un moment charnière qui implique des efforts importants, la question du financement de ses investissements est un autre point de vigilance du rapporteur, alors-même que :

- selon l'opérateur, les cofinancements obtenus dans le cadre des CP(i)ER, inférieurs dans plusieurs cas aux attentes définies par la trajectoire financière du COP, pourraient fragiliser sa capacité à réaliser les opérations de régénération, de modernisation et de développement du réseau fluvial prévus par le COP ;

- si la subvention pour charges de service public de VNF43(*) (253,7 M€), en légère hausse par rapport au précédent exercice (253,2 M€), est conforme au COP de l'établissement, et si le montant de la redevance hydraulique qu'il est prévu de lui affecter en 2025 augmente (+6,6 par rapport à 2024), on observe une baisse significative des fonds de concours versés par l'Afit France pour l'entretien et le développement des infrastructures fluviales : 2 M€ sont prévus par le PLF pour 2025 au lieu de 10 M€ en 2024.

Le ministre délégué aux transports est convenu de cette difficulté lors de son audition par la commission : « Les crédits inscrits aujourd'hui pour l'Afit France permettent d'assurer le programme de cet organisme. Néanmoins, les besoins sont supérieurs ».

La commission sera donc attentive au financement de VNF, que devra aborder la conférence nationale sur le financement des mobilités, annoncée pour 2025.

L'opérateur fait par ailleurs état, dans le contexte des importantes crues de l'hiver 2023-2024 qui ont particulièrement touché les Hauts-de-France, des sollicitations qui lui sont adressées pour prendre en charge des actions de prévention des inondations. Cette évolution supposerait de permettre à VNF de percevoir des moyens spécifiques, destinés à la maîtrise d'ouvrage de travaux relevant de la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi).

Le rapporteur souscrit aux recommandations qu'avait formulées sur ce point la mission conjointe de contrôle relative aux inondations dont étaient rapporteurs nos collègues Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux44(*) : les moyens impartis à VNF pour assurer l'entretien et la régénération de ses ouvrages hydrauliques doivent tenir compte des risques d'inondation, et l'opérateur doit être doté de moyens humains et financiers dédiés et inscrits dans le COP pour appuyer les collectivités dans leurs missions de protection des populations face à ces risques.

Le rapporteur se félicite donc que le ministre chargé des transports se soit déclaré ouvert, lors de son audition par la commission, à une révision du contrat d'objectifs et de performance (COP) de VNF, que la commission suivra avec attention.

B. DEUX ENJEUX MAJEURS POUR L'AVENIR DES PORTS : LA RECONQUÊTE DE PARTS DE MARCHÉ ET LA DÉCARBONATION

1. La reconquête des parts de marché : quelles perspectives pour l'attractivité des ports maritimes français ?

La stratégie nationale portuaire de 2021 prévoit, à l'horizon 2050, de porter à 80 % la part de fret conteneurisé manutentionnée dans les ports français (60 % actuellement) et de doubler le nombre d'emplois directs et induits par l'activité portuaire.

Or comme l'a fait observer le rapporteur lors de l'audition du ministre délégué chargé des transports, « de grands armateurs ont récemment décidé de ne plus desservir ceux du Havre et de Marseille-Fos avec leurs porte-conteneurs géants à partir de février 2025 : quelles conclusions faut-il en tirer pour l'attractivité des grands ports maritimes français ? ». En effet, le port du Havre figurait parmi les six ports européens (Rotterdam, Anvers, Le Havre, Valence, Barcelone et Gênes) qui accueillaient, avant cette décision, les trois grandes alliances maritimes regroupant les huit principaux transporteurs de conteneurs dans le monde.

La commission, qui a consacré en 2020 un rapport d'information à la compétitivité des ports45(*), et qui avait formulé des réserves, en 2021, sur la stratégie nationale portuaire46(*), sera attentive au bilan de la mise en oeuvre de celle-ci.

La commission veillera donc à la prise en compte, à l'occasion de la Conférence sur le financement des mobilités, programmée au début de 2025, des enjeux de compétitivité portuaire et de fiabilité de leurs infrastructures. En outre, le renforcement des ports dans leur dimension logistique et intermodale devra être abordée, l'interconnexion des ports avec l'arrière-pays et le recours aux modes massifiés dans les acheminements portuaires constituant des éléments d'attractivité essentiels pour les ports français.

2. Décarbonation des ports maritimes et contrainte budgétaire

L'accélération de la transition écologique et énergétique des ports de commerce est l'une des quatre ambitions définies à l'échéance de 2050 par la stratégie nationale portuaire (« les ports, accélérateurs de la transition écologique »).

Dans cet esprit, les priorités d'investissement portent notamment sur l'aménagement de nouvelles plateformes logistiques et sur le développement du report modal dans les acheminements portuaires, ainsi que sur l'installation de bornes électriques pour les navires à quai.

Objectifs fixés par le règlement européen sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs (AFIR) pour 2030 et 2035

42 branchements à quai sont ainsi nécessaires pour satisfaire les obligations définies par l'AFIR à l'échéance de 2030.

Ces obligations concernent cinq des grands ports maritimes français (Marseille, Haropa, Dunkerque, Bordeaux et Nantes Saint Nazaire, les branchements étant destinés aux ferries, aux navires de croisière et aux porte-conteneurs :

Selon les informations transmises au rapporteur :

- 19 branchements ont été financés à ce jour, à partir du Plan de relance, de soutiens de l'État et du Fonds vert ;

- 34 branchements devraient être réalisés d'ici 2027 (financement de 15 branchements dans le cadre des CP(i)ER) 2023-2027.

Pour respecter l'AFIR, 8 branchements devront donc être financés entre 2028 et 2030.

Parallèlement aux crédits budgétaires inscrits au programme 203 (action 43), inchangés par rapport à 2024 (92,5 M€ en AP et CP), 175 M€ ont été consacrés depuis 2021, dans le cadre du Plan de relance, à la transition écologique de la place portuaire française. Les projets ainsi cofinancés avec des collectivités territoriales, l'Union européenne ainsi que des ports visent également la création de points de ravitaillement en GNL et hydrogène. Si aucune ouverture de crédit n'est prévue pour 2025 au titre de l'action 06 « Mer » de la mission « Plan de relance », les projets continueront en principe à être déployés en 2025.

Comme le rapporteur l'avait déjà relevé lors de l'examen du PLF pour 2024, la transition écologique des ports exige des financements particulièrement ambitieux. La commission veillera donc à l'intégration des questions relatives à la transition écologique des ports maritimes lors de la conférence nationale sur le financement des mobilités.

C. TRANSPORTS MARITIMES : L'INDISPENSABLE PROTECTION DU PAVILLON FRANÇAIS

1. Des mécanismes de soutien à l'emploi maritime revus à la baisse

La situation actuelle des finances publiques conduit à restreindre les dispositifs d'allégement de cotisations sociales destinés à tirer les conséquences, sur l'emploi, de l'exposition des entreprises de transport maritime à une concurrence internationale particulièrement vive.

Sur le plan social, les entreprises de transport maritime bénéficient à ce jour :

- de l'exonération des charges patronales, réservée jusqu'en 2016 aux entreprises de transport de passagers battant pavillon français et soumises à la concurrence internationale, puis étendue par la loi du 20 juin 2016 pour l'économie bleue47(*) (loi « Leroy ») à toutes les entreprises du secteur en situation de concurrence internationale ;

- et du soutien aux entreprises d'armement maritime (SEAM), mis en place en 2022 pour trois ans (soit jusqu'à la fin de 2024) pour soutenir l'emploi du secteur (versement direct, chaque semestre, aux entreprises éligibles, du montant des cotisations salariales dont elles doivent s'acquitter (part ENIM, CSG-CRDS).

Parallèlement à l'extinction du SEAM, dont le PLF pour 2025 tire les conséquences sur les crédits du programme 205 (affaires maritimes, pêche et aquaculture), l'article 7 du PLFSS pour 2025 revient à la situation antérieure à la loi de 2016 en recentrant sur le seul transport de passagers les exonérations de cotisations patronales prévues par l'article L5553-11 du code des transports.

Traduction par le PLF pour 2025 (programme 205 - affaires maritimes, pêche et aquaculture) des dispositions relatives aux cotisations sociales des entreprises de transport maritime

Au sein du programme 205, la baisse des crédits de l'action 03 - Innovation et flotte de commerce (80,7 M€ en AE et CP soit -23,3 % par rapport à 2024) traduit deux évolutions combinées :

- d'une part, les mesures inscrites à l'article 7 du PLFSS ;

- d'autre part, l'extinction du SEAM.

Les crédits destinés en 2025 à l'exonération des cotisations patronales (dispositif d'aide à la flotte de commerce) représenteront 59,86 M€ en AE et CP, soit :

- l'exonération complète des cotisations patronales dont continueront à bénéficier les entreprises de transport de passagers ;

- l'exonération des seules cotisations « vieillesse et prévoyance » pour les autres entreprises (situation antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue).

Malgré l'extinction du soutien à l'emploi maritime (SEAM), des crédits sont inscrits à cet effet au PLF pour 2025 (13,83 M€ en AE et CP) pour couvrir le second semestre de l'année 2024. Ils représentent donc de manière logique la moitié des crédits de 2024.

Ces mesures interviennent alors que le transport maritime est confronté à d'importantes pressions sur les coûts :

- en raison d'une situation internationale instable, qui a contraint les armateurs à modifier les itinéraires pour éviter le canal de Suez (10 à 12 jours de navigation supplémentaire entre l'Asie et l'Europe), avec des conséquences évidentes en termes de surcoûts (carburant, primes d'assurance contre les risques de guerre...) ;

- du fait du poids financier de la transition écologique du secteur : selon Armateurs de France, 90 % de la flotte devra être renouvelée du fait des règlementations européennes et internationales sur les émissions de GES des navires. Les besoins de financement en vue du renouvellement des navires de la flotte de commerce sous pavillon français s'élèveraient, dans les dix prochaines années, à 1,5 à 2 Mds€ par an (l'équipement d'un navire de croisière ou d'un ferry en dispositif de raccordement électrique coûterait par ailleurs 1 M€ à 1,5 M€).

Tout en comprenant la logique de ces dispositions compte tenu de la situation des finances publiques, le rapporteur observe que le développement du pavillon français suppose de soutenir l'emploi des marins français et implique une stabilité du cadre juridique qui l'encadre.

Le rapporteur alerte en outre contre les risques plus particulièrement induits par ces mesures sur la compétitivité :

- des navires câbliers, qui doivent répondre à une très forte demande et dont l'importance est majeure pour notre souveraineté ;

- et des navires dédiés aux énergies marines renouvelables (« EMR »), marché émergent et prometteur où le recours à des pavillons tiers aurait des conséquences regrettables.

2. La taxe au tonnage, condition de la compétitivité des armateurs français

Sur le plan fiscal, les armateurs peuvent choisir (option décennale) le mécanisme d'imposition forfaitaire selon le tonnage des navires, prévu par l'article 209-0 B du code général des impôts (entreprises dont le chiffre d'affaires provient pour 75 % au moins de l'exploitation de navires armés au commerce), en lieu et place de l'impôt sur les sociétés, indexé quant à lui sur les bénéfices.

L'objectif de la « taxe au tonnage », instaurée en 2003, est de protéger la compétitivité des armateurs français : de fait, un dispositif comparable s'applique à 86 % de la flotte maritime mondiale et à la plupart des États membres de l'Union européenne48(*).

Dans le cadre des mesures de redressement des comptes publics mises en oeuvre par le projet de loi de finances, l'article 12 du PLF pour 2025 institue pour les deux prochaines années une taxation exceptionnelle sur le résultat d'exploitation des grandes entreprises de transport maritime (taux fixé à 9 % pour 2025 ; à 5,5 % pour 2026). L'article 12, qui ne remet pas en cause le mécanisme de la taxe au tonnage, vise donc à appliquer aux armateurs l'équivalent de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises prévue par l'article 11, pour un rendement attendu de 500 M€ en 2025 et 300 M€ en 2026.

La contribution exceptionnelle créée par l'article 12 définit un seuil élevé (chiffre d'affaires supérieur à 1 Md€) qui « flèche » de facto le groupe CGA-CGM (Compagnie maritime d'affrètement - Compagnie générale maritime), fleuron français du secteur, troisième entreprise mondiale de transport maritime.

L'article 12 du PLF conduit le rapporteur à exprimer deux convictions fortes :

- d'une part, si la participation des entreprises françaises de transport maritime à l'effort de redressement des finances publiques auquel l'article 11 du PLF soumet les entreprises assujetties à l'IS n'est pas contestable, cette contribution doit rester exceptionnelle ;

- d'autre part, alors que ce régime fiscal, considéré par certains de manière erronée comme une niche coûteuse et injustifiée, s'est inscrit dans le débat politique des derniers mois, qu'il s'agisse de la campagne électorale de juin 2024 ou du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, la taxe au tonnage doit absolument être préservée, car elle contribue à la compétitivité du pavillon français.

TRAVAUX EN COMMISSION

Audition de M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports
(Mercredi 30 octobre 2024)

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, nous ouvrons ce matin le cycle traditionnel des auditions budgétaires avec M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports.

Monsieur le ministre, il s'agit de votre première audition devant notre commission depuis votre prise de fonctions, le 21 septembre dernier. Outre l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, dans un cadre budgétaire très contraint, cette réunion est l'occasion de nous présenter les priorités de votre ministère, ainsi que votre feuille de route pour les transports. Vous vous êtes déjà plié à cet exercice la semaine dernière devant nos homologues de l'Assemblée nationale et je ne doute pas que mes collègues auront de nombreuses questions à vous poser sur la manière dont vous entendez mener votre plan d'action, tout en résolvant l'équation budgétaire à laquelle vous êtes soumis.

Alors que l'année 2024 entérinait une dynamique positive en faveur des transports, à la suite de la remise du rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) et de l'annonce du plan d'avenir pour les transports en 2023, le PLF pour 2025 marque un certain retour en arrière, en prévoyant une baisse des crédits, notamment pour l'entretien et la modernisation des infrastructures de transport massifié, les aides au verdissement du parc automobile, ou encore les crédits alloués aux mobilités durables par le fonds vert. Cette situation soulève de vives inquiétudes auprès des élus locaux et de nos concitoyens, car le secteur des transports est essentiel pour le développement des territoires et les mobilités quotidiennes des Français, tout en étant un levier primordial pour atteindre nos objectifs climatiques.

Avant de céder la parole à nos trois rapporteurs budgétaires pour détailler les dispositions et crédits prévus dans le PLF pour 2025, je souhaite aborder trois sujets d'actualité qui ont directement trait au modèle de financement des infrastructures de transport.

Premièrement, comme vous le savez, Élisabeth Borne avait annoncé en février 2023 vouloir dégager 100 milliards d'euros d'ici à 2040 afin de financer une « Nouvelle donne ferroviaire ». Ce montant devait être destiné aux opérations de régénération, de modernisation, mais aussi de développement du réseau, notamment pour permettre la réalisation des services express régionaux métropolitains (Serm), à un moment où un choc d'offre de transports collectifs est plus que jamais nécessaire dans les territoires. Néanmoins, les sources de financement, la part de chacun des acteurs - État, SNCF, collectivités territoriales et Union européenne - dans cet effort collectif et la ventilation précise des dépenses restent floues.

Vos récentes annonces ont laissé planer le doute quant à votre volonté de reprendre à votre compte cette promesse du précédent gouvernement. Le 3 octobre dernier, vous avez déclaré souhaiter, pour les infrastructures les plus lourdes, une feuille de route qui « n'impacte pas le budget de l'État comme il l'a fait auparavant ». L'annonce du lancement prochain d'un plan national dédié au déploiement de cars express a accentué la crainte d'une renonciation à l'objectif d'investir 100 milliards d'euros dans les infrastructures ferroviaires. Pourtant, vous avez également indiqué que cette ambition resterait bien la feuille de route du Gouvernement.

Monsieur le ministre, allez-vous réellement acter l'engagement de consacrer 100 milliards d'euros d'investissements au transport ferroviaire dans les quinze prochaines années ? Si oui, quelles pistes envisagez-vous pour consolider le financement de ce plan et le mettre à l'abri des contraintes budgétaires qui pèsent aujourd'hui sur l'État ? Faudrait-il mettre davantage à contribution les modes polluants, selon vous ?

Dans le prolongement de cette question, le financement des infrastructures de transport repose à l'heure actuelle pour l'essentiel sur les fonds de concours de l'Agence de financement des infrastructures de transport (Afit France), dont les ressources, comme vous le savez, sont marquées par une forte incertitude.

Le PLF pour 2025 ne remédie pas à cette situation, puisqu'il prévoit une baisse de 900 millions d'euros des ressources de l'Afit France en 2025 par rapport à 2024, notamment due à une nette baisse des recettes affectées au titre de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Monsieur le ministre, quels seront les principaux postes de dépense et les modes de transport touchés par cette évolution ? Allez-vous revoir à la baisse le financement de certains grands projets d'infrastructures déjà en cours, comme celui du tunnel ferroviaire sur la ligne Lyon-Turin ?

Je souhaite également faire un point sur les récents contentieux rencontrés avec les sociétés concessionnaires d'autoroute (SCA) sur les recettes de l'Afit France. D'une part, les SCA refusent de s'acquitter depuis 2021 de la contribution volontaire exceptionnelle, ce qui représente un manque à gagner de l'ordre de 60 millions d'euros par an. En mars dernier, le juge administratif a rejeté la requête des SCA qui contestaient les titres de perception émis par l'Afit France : où en est-on de ce dossier et à quelle échéance les SCA régleront-elles les sommes réclamées ?

Par ailleurs, afin de sécuriser les ressources de l'Afit France, nous avons voté en loi de finances initiale pour 2024 l'instauration d'une taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance. Pourriez-vous faire un point sur la première année de recouvrement de cette nouvelle taxe ? En particulier, j'aimerais savoir si les 600 millions d'euros de recettes prévus ont bien été perçus et si, outre les SCA et les grands aérodromes, d'autres gestionnaires d'infrastructures de transport, dans les secteurs ferroviaire, fluvial et maritime, ont été touchés.

Enfin, je souhaite aborder les critiques formulées par la Cour des comptes au sujet de l'Afit France depuis de nombreuses années, réitérées dans un rapport de décembre 2023.

La Cour fustige le caractère fluctuant et incertain des recettes de l'agence, à rebours de la prévisibilité nécessaire aux investissements en matière d'infrastructures de transport, et le manque de lisibilité de la politique d'investissement de l'État sur ce sujet. Surtout, elle critique le fait que l'Afit constitue un outil permettant chaque année au Gouvernement de s'affranchir du contrôle parlementaire pour plus de la moitié de ses dépenses relatives aux transports. Certes, le Parlement peut se prononcer sur les montants de fonds de concours attribués à chaque programme budgétaire, mais l'absence de visibilité sur le budget prévisionnel de l'Afit France au moment de l'examen du PLF ne facilite pas cet exercice. La Cour déplore également la pratique récurrente des reports de crédits d'une année sur l'autre, sur laquelle les parlementaires n'ont aucune prise.

Monsieur le ministre, il me semble que le contexte d'incertitude budgétaire que nous connaissons doit aussi conduire à une réflexion sur le contrôle exercé par le Parlement en matière d'investissement dans les infrastructures de transport. A minima, un renforcement des informations mises à disposition du Parlement sur ce sujet lors de l'examen du budget serait opportun.

Aussi, j'aimerais savoir comment vous appréhendez cette question. Quel regard portez-vous sur les recommandations de la Cour des comptes s'agissant de l'Afit France, notamment la proposition de compléter le projet annuel de performance de la mission « Écologie » d'un état des concours financiers de l'État en faveur de l'investissement dans les transports ? Cette proposition permettrait à tout le moins d'avoir une vision consolidée des financements prévus chaque année, qu'ils proviennent de crédits budgétaires, de fonds de concours de l'Afit ou encore d'autres fonds ou sources de financement.

Monsieur le ministre, je ne serai pas plus long et vous cède la parole pour répondre à ces questions liminaires. Je laisserai ensuite intervenir nos trois rapporteurs pour avis sur les crédits relatifs aux transports : Philippe Tabarot, sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes ; Olivier Jacquin, pour ceux relatifs au transport routier ; enfin, Stéphane Demilly, sur les crédits relatifs au transport aérien.

M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. - Je vous remercie de me donner l'occasion d'échanger avec vous sur les enjeux budgétaires de 2025, mais aussi sur les projets que je souhaite mener en priorité à la tête de ce ministère.

Je suis avant tout un élu local. Je suis d'ailleurs toujours à la tête d'un conseil départemental, institution d'échange et de compromis. Je crois savoir que votre commission a également cette culture du compromis sur les sujets essentiels qui sont de sa compétence, qui concernent la vie quotidienne de nos concitoyens. Cela nécessite d'avoir une vision de long terme qui dépasse bien souvent les mandats que nous ont confiés les électeurs.

Le secteur des transports est essentiel à plus d'un titre. Il représente une part importante du budget de nos concitoyens. Par ailleurs, il est au coeur de l'enjeu écologique, les mobilités constituant 32 % des émissions de gaz à effet de serre (GES), un taux constant depuis plus de vingt ans : c'est à la fois un tiers des problèmes, mais aussi un tiers des solutions, sachant que nous arrivons à un moment où la technologie va permettre, je l'espère, de réduire l'empreinte carbone des mobilités.

Ensuite, il ne faut pas oublier que les mobilités rassemblent les femmes et les hommes et contribuent à une meilleure connaissance de l'autre et à la paix entre les peuples. Elles participent donc du mieux vivre ensemble.

J'ai beaucoup insisté depuis ma nomination sur l'enjeu que représentent les transports pour ceux qui n'en ont pas. Il s'agit de ma première priorité. Mes propos sur les cars express ont été parfois caricaturés. Je ne veux bien évidemment pas abandonner le train. Je considère que l'on doit développer tous les modes de transport, mais force est de constater qu'au cours des dernières années, dans notre pays, on a bien équipé les villes avec des tramways et des réseaux de transports publics qui sont efficaces et sur lesquels on doit évidemment continuer à progresser. On a par ailleurs relié les grandes villes françaises avec des réseaux de longue distance. En revanche, on ne s'est pas beaucoup occupé des transports entre les centres et leurs périphéries. Résultat : 15 millions de Français sont en précarité de mobilité. En outre, 10 millions d'entre eux effectuent chaque jour plus de 50 kilomètres pour aller travailler, pour un coût moyen de 500 euros par mois, sans solution alternative à la voiture.

Nous devons donc offrir des solutions de mobilité à ceux qui n'en ont pas, des solutions s'appuyant sur des techniques connues, de transport ferroviaire ou routier. Aujourd'hui, la route est pleine de voitures ! Il faut mettre plus de monde sur la route, mais dans moins de véhicules, qui pourraient en outre être motorisés différemment. Cela nous permettrait de traiter la question écologique, en réduisant fortement les émissions de GES grâce au covoiturage, aux bus ou aux trains, mais également la question du pouvoir d'achat, les collectivités développant des abonnements pris en charge pour moitié par les employeurs, ce qui peut permettre de diviser par dix le coût de la mobilité. C'est enfin une question de démocratie et d'égalité entre les citoyens.

Ma deuxième priorité, c'est la décarbonation des transports. À ce sujet, nous devons nous appuyer sur toutes les solutions existantes - plan vélo, place du piéton, électrification du parc de véhicules -, sans exclusive aucune. Les objectifs que nous assigne l'Union européenne d'ici à 2035 nous obligent à réfléchir rapidement à la question des poids lourds et des transports publics : il y a encore des interrogations sur leur électrification, et je n'ai pas d'opinion arrêtée sur ce sujet. Peut-être devons-nous remettre l'ouvrage sur le métier à cet égard.

J'étais récemment à Toulouse, où j'ai pu évoquer la décarbonation de l'aviation. Sachant que la France produit aujourd'hui plus de 50 % des avions dans le monde et que le secteur représente 3 % des émissions de GES au plan international, nous avons un rôle fondamental à jouer à l'avenir si nous parvenons à accompagner efficacement l'évolution de cette filière, à travers notamment le développement de l'électrique et, un jour, de l'hydrogène ainsi que des carburants aériens durables, notamment les carburants de synthèse.

Ma troisième priorité concerne les infrastructures existantes. Nous avons devant nous un énorme travail de régénération de l'ensemble des réseaux - routiers, ferroviaires, fluviaux, ou même aéronautiques. Le COI a établi un diagnostic très précis, même s'il a un peu laissé de côté la question de l'adaptation au changement climatique. Nous avons ainsi récemment assisté à des phénomènes climatiques extrêmes qui sont venus mettre nos infrastructures à rude épreuve, particulièrement dans les départements du Rhône et de la Loire. Ce sujet mériterait d'être mieux expertisé par le COI.

J'en viens au budget 2025. Les crédits de l'Afit France sont en baisse par rapport à 2024, mais en hausse par rapport à 2023. Ils nous permettront de réaliser l'an prochain la totalité des engagements de l'État, mais ils n'autoriseront pas d'ouvrir de nouveaux chantiers.

Nous avons la responsabilité de faire en sorte que 2026 ne ressemble pas à 2025. Aussi, je vous propose d'organiser, au début de l'année prochaine, une conférence nationale sur le financement des mobilités. Matignon m'a donné son accord pour l'organisation de cette conférence, qui doit aboutir à une feuille de route de nature à nous éviter les affres de l'annualité budgétaire qui sévit aujourd'hui, « yo-yo » particulièrement mortifère pour le financement des infrastructures : les acteurs du secteur ont besoin de visibilité et de lisibilité sur plusieurs années.

Manifestement, la trajectoire retenue requiert plus de financements, mais l'argent public se raréfie. Aussi, nous devons nous interroger sur les outils juridiques et financiers qui nous permettront de mobiliser davantage de crédits affectés pour faire face à ce mur d'investissements, sachant que la ressource de la TICPE va baisser à mesure de l'électrification du parc automobile, baisse estimée par l'État à 13 milliards d'euros à l'horizon 2030. C'est un risque pour le financement de nos infrastructures, pour le budget de l'État et pour celui des collectivités : rien ne serait pire que de fermer les yeux sur cette évolution prévisible. Toutefois, plusieurs solutions alternatives existent ; je veux en citer trois.

Il y a tout d'abord l'affectation à la mobilité des certificats d'économies d'énergie (C2E). Aujourd'hui les obligés sont, pour moitié, des acteurs liés à la mobilité, comme TotalEnergies ou Engie. Or la mobilité ne récupère que 6 % des C2E, parce qu'il est plus compliqué de réduire la consommation dans ce secteur que, par exemple, dans le bâtiment. Avec Catherine Vautrin et Agnès Pannier-Runacher, nous souhaitons explorer cette voie.

Ensuite, une partie des quotas carbone pourrait être affectée à la mobilité. L'Union des transports publics et ferroviaires (UTPF) et le Medef n'y sont pas hostiles.

Enfin, nous devrons être attentifs à la fin des concessions autoroutières, entre 2031 et 2036. L'Autorité de régulation des transports (ART), ainsi que le sénateur Hervé Maurey, qui a beaucoup travaillé sur cette question, préconisent de s'assurer que ces concessions seront rendues aux Français en bon état et de préparer l'avenir du réseau autoroutier. C'est une opportunité pour le financement de nos infrastructures, puisque nous pourrons flécher une partie des péages payés par les Français vers des objets de mobilité, routiers ou ferroviaires.

J'ai également l'intention de réunir la conférence sur le financement des Serm, initialement prévue au mois de juin dernier. J'espère que les débats budgétaires qui s'ouvrent permettront d'éclairer le sujet et que nous aurons l'occasion, lors de cette conférence de financement, de tracer une voie avec les collectivités pour lancer les 24 Serm d'ores et déjà labellisés, en fonction d'un calendrier qui ne sera évidemment pas le même pour tous.

Je souhaite également que voie le jour la stratégie nationale fluviale amorcée par mon prédécesseur. C'est un bel enjeu, puisque nous avons la chance d'avoir un réseau dense et sous-utilisé. La capacité des fleuves est trois à quatre fois supérieure à leur utilisation actuelle. Nous mettons en valeur l'axe Seine, structuré autour du port du Havre. J'espère que la stratégie nationale fluviale nous permettra d'enclencher une dynamique similaire pour l'axe Rhône-Saône, depuis Marseille jusqu'à Lyon. Il y a enfin l'axe Rhin, ou Est, depuis les ports étrangers jusqu'à Strasbourg - je souhaite m'emparer de ce sujet -, ainsi que l'axe Seine-Nord, cher à Franck Dhersin, qui doit faire l'objet de travaux, les crédits étant sécurisés dans le budget 2025.

Il ne vous a pas échappé que mon ministère est désormais rattaché à celui de la décentralisation et du partenariat avec les territoires. Le Premier ministre a ainsi voulu montrer que les infrastructures relient avant tout des territoires et des hommes, au-delà des enjeux écologiques, sociaux ou financiers.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Monsieur le ministre, je voudrais avant tout apporter deux précisions. Tout d'abord, Hervé Maurey et la commission des finances ne sont pas seuls à avoir travaillé sur les concessions autoroutières : notre commission a également des propositions à vous faire. Ensuite, je me réjouis de l'organisation en février de cette conférence sur le financement des Serm, puisque son principe même résulte d'une initiative du Sénat.

Dans un contexte budgétaire dégradé, il est légitime que le Gouvernement cherche à réduire le déficit public. Nous abordons ce PLF, comme d'habitude, dans un esprit de responsabilité.

Le Gouvernement a entrepris de lever de nouvelles recettes, notamment la contribution exceptionnelle sur le bénéfice des grandes entreprises ; il serait bon de savoir si la SNCF sera affectée par cette contribution. Ce serait d'autant plus inquiétant que ses bénéfices sont actuellement fléchés vers un fonds de concours visant à financer le réseau ferroviaire, en se substituant au moins partiellement à l'État. N'oublions pas non plus la contribution demandée aux grandes entreprises du transport maritime. Je ne vous cache pas que nous sommes inquiets pour la SNCF, dont la situation n'est pas des plus florissantes. Le Gouvernement propose aussi, par amendement, d'augmenter le tarif de solidarité sur les billets d'avion, pour 1 milliard d'euros - mon collègue rapporteur Stéphane Demilly l'évoquera également. Le PLF prévoit en outre de réduire l'affectation de TICPE à l'Afit France d'environ 900 millions d'euros.

En clair, il y aura plus d'impôts sur les transports et moins de recettes fléchées vers leur financement ! L'esprit de responsabilité qui nous guide exige que je vous mette en garde : attention à ne pas trop charger la barque, sinon elle coulera, et les recettes avec. Nous ne pourrons de toute façon pas nous permettre une nouvelle année blanche en 2026.

L'ART m'a indiqué qu'il manquait environ 700 millions d'euros cette année pour régénérer et moderniser le réseau ferroviaire. Réduire les dépenses d'investissement, en diminuant les moyens de l'Afit France et de SNCF Réseau, est un raisonnement à courte vue, qui mènera à une paupérisation du réseau et à une chute des recettes fiscales que les circulations ferroviaires engendrent.

Nos collectivités territoriales, que vous connaissez bien, sont soumises à une règle d'or budgétaire : elles ne peuvent emprunter que pour financer des dépenses d'investissement, et non des dépenses de fonctionnement. Il me paraît discutable que l'État choisisse le chemin inverse : financer son train de vie en réduisant ses investissements pour la décarbonation des mobilités.

Pour éviter cet écueil, ne pourriez-vous pas, monsieur le ministre, flécher davantage les contributions fiscales assises sur les transports vers le financement du report modal ? Ne serait-il pas pertinent d'affecter certaines recettes à l'Afit France, notamment une part des produits de la TICPE et du tarif de solidarité sur les billets d'avion ? Il me semble que c'est une question de justice.

Par ailleurs, les collectivités territoriales, auxquelles vous demandez de nombreux efforts, doivent financer les Serm. On leur demande souvent beaucoup, mais tout de même, les élus locaux ne sont pas des magiciens. Il me paraît nécessaire de leur permettre d'augmenter le plafond du versement mobilité (VM) et de débloquer des possibilités de VM additionnel si ces recettes sont fléchées vers les Serm. Le Gouvernement donnera-t-il un avis favorable à d'éventuels amendements allant dans ce sens ?

J'en arrive aux transports fluviaux et aux ports, sur lesquels j'aurai quelques questions à vous poser.

Tout d'abord, pourriez-vous nous dire un mot de la stratégie nationale fluviale en cours d'élaboration ? Quels en seront les principaux axes ? Prévoyez-vous des évolutions pour inciter davantage les chargeurs à recourir au mode fluvial, notamment à travers l'« aide à la pince » ? Il était question que ce dispositif, qui bénéficie au transport multimodal, soit maintenu à hauteur de 47 millions d'euros par an jusqu'en 2030 : le projet annuel de performance annexé au PLF pour 2025 ne comporte cependant pas d'information précise quant à son maintien ou non. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?

Ensuite, l'actualisation du contrat d'objectifs et de performance de Voies navigables de France (VNF), voilà un peu moins d'un an, a conduit à définir une ambitieuse trajectoire d'investissements dans le réseau pour la période 2023-2032, établie à plus de 4 milliards d'euros. La diminution des ressources de l'Afit France, proposée dans ce PLF, aura-t-elle une incidence sur cette trajectoire ?

Concernant les ports maritimes, de grands armateurs ont récemment décidé de ne plus desservir ceux du Havre et de Marseille-Fos avec leurs porte-conteneurs géants à partir de février 2025 : quelles conclusions faut-il en tirer pour l'attractivité des grands ports maritimes français ? La stratégie nationale portuaire, publiée en 2021, avait fixé d'ambitieux objectifs de hausse de parts de marché de nos grands ports maritimes pour le fret : où en est-on de cet objectif et ne faudrait-il pas, trois ans après, dresser un premier bilan de cette stratégie ?

M. François Durovray, ministre délégué. - D'emblée, je précise que j'ai bien eu connaissance des excellents travaux menés par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur les concessions autoroutières. En ce qui concerne les conférences de que j'ai évoquées, je confirme qu'il y en aura deux : la conférence de financement sur les Serm, prévue à l'initiative du Sénat dans la loi n° 2023-1269 du 27 décembre 2023 relative aux services express régionaux métropolitains, et une conférence plus large sur le financement des mobilités et des infrastructures.

Dans le cadre du PLF pour 2025, et dans des conditions encore à déterminer, la question du VM sera sans doute posée par les assemblées et regardée avec intérêt par le Gouvernement. Nous savons que les régions doivent faire face à des enjeux financiers lourds, qui concernent d'abord le financement de l'offre ferroviaire qu'elles assurent. Pour ce qui est des Serm, l'État s'est engagé à hauteur de 700 millions d'euros. L'engagement des collectivités et le véhicule le plus adapté devront être abordés lors de la conférence de financement. Des discussions se tiennent aujourd'hui avec Régions de France sur le sujet. Il faudra voir de quelle façon ce débat peut prospérer dans le cadre du PLF.

Sur l'évolution du VM pour les autorités organisatrices de la mobilité (AOM), je me permets de resituer ce débat dans le cadre d'un bilan plus large de la loi d'orientation des mobilités (LOM), qui reste à faire. La LOM avait déterminé des autorités organisatrices de premier rang, communautés de communes ou communautés d'agglomération ; à défaut, les régions pouvaient prendre la compétence. Cinq ans après, on constate une prise en main assez différenciée de cette compétence d'un territoire à l'autre, avec notamment de grandes disparités entre le sud et le nord de la Loire.

J'ai le sentiment que les communautés de communes ou d'agglomération qui se sont saisies de cette compétence n'ont pas la capacité, financière ou d'ingénierie, de proposer une offre à la hauteur des aspirations de nos concitoyens. Je souhaite donc que l'on travaille à une évolution du VM qui prenne en compte une association des territoires. Des modèles juridiques permettent d'associer les métropoles avec les agglomérations périphériques, les régions avec les métropoles et les agglomérations. Des syndicats mixtes ont commencé à se développer à Bordeaux, en Bretagne ou à Strasbourg, et je sens un intérêt grandissant de nombreux territoires. L'avantage est de pouvoir lever un VM additionnel ; le Gouvernement étudie la possibilité pour le syndicat de percevoir ce VM additionnel sur l'ensemble de son périmètre, alors que ce n'est possible actuellement que dans les communes de moins de 100 000 habitants. J'espère que le Sénat se saisira de cette question.

Vous m'interrogez sur la SNCF. Mes services m'ont indiqué que, vraisemblablement, l'entreprise publique ferroviaire ne serait pas concernée par le prélèvement sur les sociétés dont le chiffre d'affaires est supérieur à un milliard d'euros, au motif que la SNCF a des déficits fiscaux importants. Je vous invite néanmoins à être vigilants lors des débats du PLF, car il pourrait y avoir des incidences sur son contrat de performance.

J'en profite pour répondre à une question du président Longeot sur la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de longue distance. La loi de finances initiale pour 2024 avait fixé un rendement de 600 millions d'euros et l'on s'attend à récolter finalement 575 millions d'euros, 125 millions versés par Aéroports de Paris, et le reste par les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Ce montant estimatif est donc très proche des prévisions.

Je termine sur les enjeux de stratégie fluviale et de financement de VNF. Les crédits inscrits aujourd'hui pour l'Afit France permettent d'assurer le programme de cet organisme. Néanmoins, les besoins sont supérieurs et j'attends que la conférence de financement aborde cette question. Le président par intérim de VNF souhaite d'ailleurs une révision du contrat d'objectifs et de performance (COP), signé avec l'État.

Je suis pour ma part ouvert à cette révision, compte tenu des enjeux. La stratégie nationale fluviale, qui sera dévoilée au début de l'année prochaine, permettra, je l'espère, de traiter à la fois la régénération et la maintenance d'un réseau qui, je le répète, est très dense. Vous n'êtes pas sans savoir que VNF est engagé dans un programme ambitieux de modernisation de ses écluses, de nature à optimiser la gestion et à améliorer la qualité du service dû aux usagers. La gestion du réseau fluvial recouvre également des enjeux de préservation de la biodiversité. Les fleuves relient aussi les territoires et les hommes, ce qui justifie une association des collectivités territoriales via une contractualisation avec VNF.

Il y a enfin le défi du transport de marchandises. J'ai observé comme vous le positionnement de certains armateurs, qui regardent plus vers le nord que vers l'Hexagone. C'est évidemment une source de préoccupation pour le ministre que je suis, alors même que nous disposons d'une situation géographique exceptionnelle et qu'à mes yeux, le port du Havre devrait être le port de Prague. Il ne faut pas que les marchandises venant de toutes les parties du monde arrivent dans les ports d'Anvers ou de Rotterdam, pour ensuite essaimer dans toute l'Europe par la route ou, mieux, par le fer. À partir de Marseille et du Havre, nous pourrions irriguer tout le continent en connectant mieux les ports au fer.

Nous constatons une orientation plutôt positive sur les flux de marchandises, mais la dynamique de croissance observée à l'étranger est encore plus forte. Plutôt que de rattraper notre retard, nous le creusons. La stratégie nationale fluviale doit mettre un coup d'arrêt à cette tendance.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers. - Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur cinq points relatifs au volet du PLF pour 2025 consacré aux transports routiers et, plus généralement, à votre feuille de route sur cette thématique.

Mes premières questions portent sur le plan national de cars express que vous avez annoncé pour le premier semestre 2025. Lors de votre audition à l'Assemblée nationale la semaine dernière, vous avez rappelé que la route demeurerait, de loin - même en doublant la part modale du ferroviaire -, le mode de transport majoritaire ; le développement de services de cars express constitue donc un levier intéressant pour massifier le trafic routier et en réduire le coût environnemental.

Le déploiement de lignes de cars express, le plus souvent via des voies dédiées, devra s'accompagner d'une réflexion approfondie sur la conciliation des usages et le partage de la route, en intégrant la montée en puissance des mobilités douces. Surtout, il importe de réfléchir à l'articulation de ces services de cars express avec l'offre de transport ferroviaire et les réseaux cyclables à haut niveau de service, afin d'éviter toute concurrence néfaste avec ces modes de transport plus durables. Comment envisagez-vous cette articulation et le champ de pertinence de l'offre de cars express ?

À compter du 1er janvier 2025, la totalité des autobus et autocars renouvelés par les collectivités territoriales dotées d'une flotte de plus de vingt véhicules devra être à faible émission. Comment allez-vous accompagner les AOM qui souhaiteront mettre en place des lignes de cars express dans l'acquisition de matériels peu polluants ? L'idée d'un prêt à taux zéro vous semble-t-elle pertinente ?

Ma deuxième interrogation concerne les aides à l'acquisition de véhicules propres, dont les crédits baissent de plus de 500 millions d'euros dans le PLF 2025 par rapport à 2024 ; le Gouvernement vient d'annoncer que cette diminution serait portée à 700 millions d'euros par amendement. Ne craignez-vous pas d'envoyer un très mauvais signal au secteur et de donner un coup de frein à la transition vers l'électrique ?

Le Gouvernement souhaite cibler davantage les ménages modestes : allez-vous revoir les paramètres du leasing social afin de toucher les ménages les plus précaires et les plus dépendants de la voiture, notamment en zone rurale ?

Le développement du marché de l'occasion faciliterait l'accès de nombreux Français aux véhicules électriques. Or l'électrification des flottes d'entreprises, levier significatif pour alimenter ce marché, peine encore à se déployer. En outre, depuis cette année, les personnes morales ne peuvent plus bénéficier du bonus écologique pour acquérir un véhicule électrique. Là encore, n'y a-t-il pas un problème de cohérence et de temporalité ? Envisagez-vous des évolutions ?

Sur un tout autre sujet : le véhicule intermédiaire a-t-il un avenir selon vous ?

Le Gouvernement s'était engagé à mobiliser 250 millions d'euros chaque année dans le cadre du plan vélo et marche 2023-2027, avec l'objectif de disposer de 100 000 kilomètres d'aménagements cyclables sécurisés d'ici à 2030. Pourtant, en 2024, le fonds mobilités actives, qui soutient les collectivités territoriales dans leurs projets de création d'itinéraires cyclables, a été gelé : alors que les lauréats du septième appel à projets « aménagements cyclables » auraient dû être annoncés au printemps dernier, les collectivités territoriales, qui sont plus de 400 à avoir candidaté, sont sans réponse de l'État. L'avenir n'est guère plus rassurant, puisque, si j'en crois les annexes du PLF, aucune autorisation d'engagement n'est prévue pour le plan vélo en 2025. Faut-il y voir une volonté du Gouvernement d'éteindre progressivement le plan vélo ?

Cela serait d'autant plus étonnant que vous avez annoncé le lancement d'une mission sur la lutte contre les violences routières à la suite du dramatique accident qui a coûté la vie à un jeune cycliste il y a quinze jours : si on ne peut que saluer cette initiative, comment pourrions-nous protéger plus efficacement les cyclistes tout en mettant un coup d'arrêt à la réalisation d'aménagements cyclables par les collectivités ?

Mon troisième point concerne le financement des services de transport par les AOM situées en espace peu dense. La loi conditionne la possibilité de lever le VM pour les AOM locales au fait d'organiser des services réguliers de transport public de personnes. En pratique, de nombreuses AOM de petite taille ne disposent pas de bases fiscales suffisantes pour lever le VM, quand bien même elles rempliraient les critères pour le faire.

Monsieur le ministre, je m'adresse au président de département que vous êtes, qui plus est d'un département comportant de nombreuses communes rurales : êtes-vous prêt à avancer sur la question du VM en zone peu dense, par exemple en élargissant la définition du « transport régulier de personnes » aux lignes de covoiturage ou de transport à la demande ? Ne faudrait-il pas évaluer précisément le nombre d'AOM ne disposant pas de bases fiscales suffisantes pour lever le VM et prévoir pour elles une ressource dédiée leur permettant de mettre en place des services de mobilité ?

Mon quatrième point concerne l'écotaxe sur les poids lourds, mise en place par une ordonnance de 2023, en application de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience. Depuis le 1er janvier 2024, les régions susceptibles de subir un report significatif de trafic de poids lourds du fait de l'instauration d'une écocontribution sur un territoire limitrophe peuvent mettre en place une écotaxe sur les poids lourds. Néanmoins, à ce stade, seule ma région, Grand Est, a manifesté son souhait de recourir à cet outil, sur les portions de réseau routier national qui vont être mises à sa disposition en application de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi 3DS.

Monsieur le ministre, vous avez souligné ces dernières semaines la nécessité de dégager de nouvelles recettes pérennes pour financer les infrastructures de transport. Quel regard portez-vous sur l'idée d'ouvrir à l'ensemble des régions volontaires la possibilité de mettre en place une écotaxe sur les poids lourds ?

Mon cinquième point a trait à la préparation de la fin des concessions autoroutières, qui s'étalera de 2031 à 2036 principalement. Où en sont les travaux sur la définition du bon état des biens restitués ? Allez-vous enfin lancer les assises des autoroutes, promises depuis plusieurs années par le Gouvernement, pour réfléchir collectivement à l'avenir du modèle concessif et à ses futurs paramètres ?

Hervé Maurey vient de rappeler dans un récent rapport d'information sur l'avenir des concessions autoroutières certaines conclusions de la commission d'enquête sénatoriale de 2020. Avez-vous identifié des recommandations dont vous pourriez vous inspirer ?

Enfin, le président Longeot vous a interrogé sur le contentieux en cours avec les concessionnaires et les fameux 60 millions d'euros annuels qu'ils refusent de payer. Où en sommes-nous ?

M. François Durovray, ministre délégué. - J'ai déjà répondu sur certains points dans mon propos liminaire.

Les cars express visent à réduire le nombre d'usagers de la voiture et non du train. Il s'agit d'une offre de mobilité à développer là où le ferroviaire n'est pas adapté. Le Mass Transit n'est plus le même qu'il y a quelques années. Certaines offres ferroviaires, comme la Draisy, permettent une desserte fine du territoire et de mettre du train là où l'on ne pensait plus en mettre. Mais le car est aussi une solution de mobilité rapide, peu coûteuse et écologique.

Il n'appartient pas au ministre de déterminer les lignes. Dans mon rapport à la présidente d'Île-de-France Mobilités (IDFM), j'ai considéré que la mise en place de cars express était intéressante à partir de 400 trajets quotidiens et que les voies réservées étaient nécessaires sur 10 % des parcours : on peut donc créer les lignes avant d'aménager les voies et de construire les gares routières.

En revanche, il appartient au ministre de mettre en place le cadre juridique et économique adapté. Les deux volets du VM permettent aux collectivités d'amorcer la pompe. À mon sens, un rehaussement du VM devrait servir à financer de l'offre supplémentaire et non la gratuité, et permettre de travailler sur la problématique des déplacements domicile-travail, qui n'est pas suffisamment traitée sur certains territoires. En outre, le VM étant un impôt de production payé par les entreprises, un dialogue est nécessaire pour prendre en compte les demandes des acteurs économiques locaux.

Pour soutenir l'acquisition de véhicules peu polluants, trois dispositifs existent : le bonus-malus, la prime à la conversion et le leasing social. Ce dernier a rencontré un grand succès l'an dernier, mais présente quelques effets de bord qu'il convient de limiter pour conserver sa vocation sociale. Je travaille donc avec mes collègues Agnès Pannier-Runacher et Olga Givernet pour reformater le dispositif en 2025. Les crédits budgétaires sont en baisse, mais nous allons mobiliser les certificats d'économies d'énergie. Je considère qu'il faudra tenir compte du type de véhicule concerné - notamment de son poids - et des avancées technologiques des constructeurs automobiles. Par ailleurs, l'État n'a pas vocation à subventionner les foyers qui ont les moyens de financer leur passage à l'électrique.

Je serai attentif à quatre sujets : tout d'abord à l'électrification des flottes automobiles, car les entreprises achètent moins de véhicules électriques que les particuliers et leurs flottes constitueront le marché de l'occasion de demain.

Ensuite, les dispositifs d'aide doivent aussi concerner le marché de l'occasion, car 85 % des Français achètent d'occasion.

Le sujet du rétrofit, solution adaptée pour les véhicules utilitaires - mais pas seulement - mérite également d'être consolidé.

Enfin, la prime à la conversion pourrait changer de nom et cibler les personnes qui résident en dehors des zones à faibles émissions (ZFE), mais doivent s'y rendre pour leur travail.

Depuis le 21 septembre, le Gouvernement travaille à la modification de certains éléments des lettres plafonds, dans des délais extrêmement courts. Alors que le VM n'est affecté qu'à des transports réguliers, j'ai proposé qu'on s'appuie sur les syndicats mixtes de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dits syndicats SRU, ce qui répondrait à votre préoccupation et permettrait, dès lors qu'il existe un service régulier, de créer aussi des services non réguliers - c'est en cours d'expertise. Je ne sais pas si nous serons en mesure de traiter ce sujet dans le PLF pour 2025, mais je suis très attentif à cette question : bien entendu, on ne va pas mettre des bus à haut niveau de service en milieu rural, il faut y trouver d'autres solutions de mobilité, notamment à travers le covoiturage.

La Collectivité européenne d'Alsace (CEA) a voté à l'unanimité le principe d'une écotaxe et, en tant que ministre, je suis en appui pour que cela se passe le mieux possible, notamment pour voir comment en exonérer certains acteurs économiques. D'autres collectivités sont intéressées par ce dispositif qui permet de faire contribuer les usagers, d'éviter les phénomènes de déport et de générer des recettes, mais qui pose aussi quelques difficultés que je ne méconnais pas, notamment pour les transporteurs routiers.

Je souhaite que le nouveau modèle des concessions autoroutières soit « encapsulé » dans la conférence nationale sur les mobilités, car c'est une des modalités de financement des mobilités de demain. C'est un sujet très populaire, mais potentiellement inflammable. Nous devons être capables de poser collectivement le bon diagnostic. Des discussions doivent s'engager avec les entreprises concernées, que je recevrai dans dix jours. Le contrat avec Sanef arrivera à échéance en 2031 ; l'État doit d'ici au 31 décembre 2024 indiquer à cette société la liste des travaux à conduire pour assurer le « bon état » des biens à restituer ; mais je ne suis pas prisonnier de cette date. Le plus important est d'établir une doctrine, avec sérieux, car les règles que nous définirons pour la fin de la première concession s'appliqueront aux concessions suivantes. Nous devons nous appuyer sur les travaux du Parlement et de l'ART, ainsi que sur l'expertise de l'administration.

S'agissant du contentieux sur la CVE, sachez que les 180 millions d'euros dus par les SCA au titre des années 2021, 2022 et 2023 ont été payés.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Pour des contentieux qu'ils ont perdus !

M. François Durovray, ministre délégué. - L'État ne se désengagera pas totalement du plan vélo : il reste quelque 300 millions d'euros dans les contrats de plan État-région (CPER) pour développer des infrastructures. Je suis ouvert à des discussions, mais dans un cadre budgétaire contraint, qui nous invite tous à la responsabilité. J'ai entendu des élus locaux indiquer que, bien évidemment, il s'agit d'une manne bienvenue pour les collectivités, mais que l'État est surtout attendu sur la lutte contre la violence routière, la communication et les sanctions. C'est pourquoi, à la suite du décès de Paul Varry, j'ai lancé une mission pour avoir un nouveau regard sur les différents usages de la route.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports aériens. - Monsieur le ministre, recevez tous mes voeux de succès dans vos nouvelles fonctions.

Prenons un peu de hauteur, si je puis dire : le transport aérien est à la croisée des chemins. Le trafic a connu un redémarrage d'ampleur après la crise sanitaire, mais nous ne sommes pas revenus à la situation antérieure. Il y a moins de vols intérieurs : ils plafonnent sous les 80 % de leur niveau de 2019, tandis que les vols internationaux poursuivent leur essor.

Le secteur connaît de multiples transformations : tout d'abord, la modernisation du contrôle aérien français, avec la signature d'un nouveau protocole social au sein de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), qui devrait avoir un coût, supporté par le secteur, d'environ 100 millions d'euros par an.

Ensuite, l'intensification de la charge fiscale. Après un effort de 150 millions d'euros l'an dernier, via la taxe sur les infrastructures de transport de longue distance, un amendement du Gouvernement alourdit de 1 milliard d'euros la TSBA.

L'effort de décarbonation, enfin, avec notamment l'adoption du règlement européen ReFuel EU Aviation.

Sur le contrôle aérien, Vincent Capo-Canellas estime à 100 millions d'euros le coût annuel de l'accord entre les principaux syndicats des contrôleurs aériens et l'administration. En échange d'augmentations salariales, les contrôleurs aériens ont accepté le plan de modernisation réduisant le nombre de centres de contrôle au cours de la prochaine décennie. Confirmez-vous ce montant ? Pouvez-vous revenir sur le contexte particulièrement conflictuel, marqué par de nombreuses grèves, ayant mené à la signature de cet accord ?

La DGAC reconnaît elle-même que le contrôle aérien français est la lanterne rouge des grands pays d'Europe et engendre de nombreux retards, coûteux pour les compagnies aériennes. Prenez-vous l'engagement d'améliorer la situation ? Ce protocole social mettra-t-il fin à cette situation inacceptable ?

La décarbonation du secteur nécessite de très importants investissements. Or le contexte budgétaire est pour le moins contraint : tous les acteurs économiques doivent prendre leur part dans le redressement des finances publiques. Une hausse du tarif de solidarité serait une des moins mauvaises solutions, en se fondant sur la destination finale du passager et en limitant ainsi les effets de distorsion de concurrence au profit de vols avec des escales hors de France.

Mais l'ampleur de cette hausse massive, d'environ 1 milliard d'euros, m'inquiète beaucoup. Vous connaissez peut-être la métaphore du colibri qui transporte une goutte d'eau dans son bec pour éteindre un incendie, démontrant ainsi que l'effort collectif n'est finalement que la conjugaison des efforts individuels. Mais dans le cas présent, notre colibri se transforme en véritable Canadair... Je connais la tentation budgétaire de certains mouvements - même de certains lobbies - qui voient dans l'aérien une poule aux oeufs d'or ; mais comme dans la fable, attention de ne pas tuer la poule ! Le secteur doit en effet mener un coûteux effort de décarbonation : ne pensez-vous pas qu'un tel effort fiscal - 1 milliard d'euros -, combiné à la hausse du coût du contrôle aérien, pourrait briser les ailes de notre économie aéronautique ?

Le secteur aérien risque d'être victime d'une forme d'effet de ciseaux, hausse des taxes et baisse des crédits consacrés à sa décarbonation. Quels montants seront consacrés dans ce PLF au soutien à la recherche aéronautique civile ? Ces moyens sont-ils conformes à la promesse présidentielle d'un soutien de l'État à hauteur de 300 millions d'euros par an ?

Dans son rapport d'information sur la modernisation de l'aéroport de Nantes Atlantique adopté par notre commission l'année dernière, le rapporteur Didier Mandelli a mis en lumière l'insuffisance de la réponse publique aux nuisances sonores aériennes. En début d'année, le plafond de prise en charge des travaux d'insonorisation des logements situés à proximité des aéroports a été relevé de 25 %. Auparavant, il était si faible que les riverains ne pouvaient pas financer leurs travaux : si l'on voulait fragiliser l'acceptabilité sociale de l'aviation, on n'aurait pas pu mieux s'y prendre... Quel bilan peut-on tirer de cette hausse ? Est-elle suffisante ?

Pour conclure, je tiens à vous faire part d'une inquiétante rumeur : le précédent gouvernement aurait acté en début d'année le principe du non-renouvellement des crédits destinés à soutenir les lignes d'aménagement du territoire (LAT) en métropole à compter du PLF pour 2026, aucun appel d'offres n'étant renouvelé cette année. Ces lignes sont pourtant essentielles pour desservir certains territoires enclavés et isolés. Confirmez-vous cette information ou n'est-ce qu'une rumeur infondée ? Le Gouvernement entend-il revenir, le cas échéant, sur cette décision incompréhensible et néfaste pour l'équité territoriale ?

Le projet de barreau Roissy-Picardie est une nouvelle ligne ferroviaire de 6,5 kilomètres qui doit relier la ligne à grande vitesse de Roissy à la ligne classique Paris-Creil-Amiens. Mais le coût du projet a fortement augmenté et l'Union européenne a annoncé le 22 juin 2023 qu'elle ne le financerait pas. C'est un énième bâton dans les roues de ce projet vital pour la Picardie, qui devait initialement voir le jour fin 2025. Les collectivités se trouvent démunies face à un projet dont le coût est passé de 350 millions d'euros en 2017 à 570 millions aujourd'hui. Quelles mesures vont être prises pour mieux soutenir ce grand projet économique et écologique qui permettra à des milliers de voyageurs de se déplacer plus vite, plus propre et moins cher ?

M. François Durovray, ministre délégué. - À ma connaissance - je viens passer en revue de projets avec mes services -, tous les engagements de l'État sont tenus sur le Roissy-Picardie : les 360 millions d'euros de l'État sont bien prévus. Soyez rassuré.

M. Franck Dhersin. - L'Europe a fortement baissé sa dotation, d'où l'effort supplémentaire demandé aux collectivités et à l'État. Si l'État ne contribue pas plus, le projet ne verra pas le jour.

M. François Durovray, ministre délégué. - Sauf erreur de ma part - je vous apporterai des précisions par écrit si je me trompe -, à l'issue du comité de pilotage du 14 mars dernier, l'État a revu sa participation à hauteur de 360 millions d'euros, ce qui représente 67 % du coût du projet. L'État fait donc face au désengagement de l'Union européenne sur ce projet.

Monsieur Demilly, l'État n'a aucune intention de diminuer sa participation au financement des LAT, qui ont toutes été renouvelées - Paris-Brive il y a quelques semaines. Cependant, l'équilibre financier des LAT est compliqué, tant pour l'État que pour les collectivités, en raison d'une diminution du trafic domestique. Les collectivités ont donc du mal à maintenir les liaisons, le modèle est réinterrogé et participe à la transformation du secteur aérien.

La somme que vous mentionnez sur le contrôle aérien est exacte. Je ne peux pas vous garantir qu'il n'y aura pas de conflit social dans le contrôle aérien, mais dès ma prise de fonctions, j'ai rencontré tous les syndicats, qui sont au courant de la très prochaine mise en oeuvre de la réforme. Un protocole d'accord a été signé avec certaines organisations. Des points d'attention demeurent, comme le contrôle biométrique à l'arrivée du contrôleur aérien à son poste, conformément aux préconisations du bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile (BEA) à la suite de l'incident survenu le 31 décembre 2022 à Bordeaux.

Nous avons un enjeu partagé d'amélioration de la performance. Je n'accepte pas le terme de lanterne rouge : le contrôle aérien français a perdu en performance, mais il doit retrouver sa place. Pour cela, il faut mener à bien la réforme en resserrant le nombre de postes territoriaux, dans le cadre du dialogue avec les territoires que mène la DGAC, avec des mesures concernant le personnel - dont des avancées sociales - et un investissement important de l'État sur la technologie.

La réforme du tarif de solidarité sur les billets d'avion figurait dans la lettre plafond que j'ai trouvée en arrivant au ministère. Le Gouvernement propose toutefois aujourd'hui, par amendement, des règles du jeu différentes. L'objectif de rendement reste le même - un milliard d'euros -, mais nous avons écarté de soumettre à la TVA le kérosène sur les vols intérieurs et avons prévu un nouveau dispositif de modulation de la taxe selon les types de vol : en augmentant la taxe sur les vols intérieurs et continentaux, ce qui touchera plus les compagnies à bas coûts, en veillant à ce que les moyens courriers comprennent tout le Moyen-Orient, notamment le Qatar, et en réduisant la taxe sur les longs courriers afin de préserver le modèle économique de notre compagnie nationale. J'ai conscience que cela intervient dans un moment de transformation des compagnies aériennes et que nous devons être particulièrement vigilants.

Nous devons également décider du bon niveau de la taxe payée par les compagnies d'affaires. S'agissant d'un mécanisme déclaratif, nous pouvons probablement conserver le même objectif de rendement en diminuant le montant de la taxe, tout en en améliorant la collecte.

Nous travaillons également à une modulation de la taxation en fonction de l'effort de décarbonation des compagnies - n'oublions pas que les carburants durables ont un coût plus élevé -, mais nous ne serons peut-être pas prêts pour le PLF 2025.

M. Demilly m'a soumis au supplice chinois... L'effort de décarbonation des compagnies aériennes, indispensable pour que l'aéronautique française reste au premier plan, est majeur, mais l'engagement de l'État a été révisé à la baisse à deux reprises : 450 millions d'euros, puis 300, puis 230. Je continue à porter ce sujet. Le monde aéronautique peut comprendre que l'État est dans une situation budgétaire compliquée et que chacun doit contribuer à l'effort. Je participerai demain à une réunion avec le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) pour définir une trajectoire. L'État doit continuer à accompagner les compagnies aériennes dans cet effort de transformation et à donner de la visibilité à ce secteur.

Sur l'insonorisation des logements autour des aéroports, le plafond a été rehaussé de 25 % en début d'année : c'est un vrai progrès. Les recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) avaient considérablement baissé avec la crise du covid, elles sont reparties à la hausse. Je n'ai pas encore de bilan, mais dès que possible, peut-être au début de l'année 2025, nous présenterons un état partagé à votre commission.

M. Bruno Rojouan. - Vous allez entamer le « tour de France », avec les questions relatives à des problématiques locales.

Sénateur de l'Allier, j'attire votre attention sur la nécessaire amélioration de la desserte ferroviaire de Montluçon depuis et vers Paris. Le 7 octobre, des travaux de modernisation et d'amélioration ont été inaugurés - la ligne était très endommagée et la vitesse limitée. Mais, pour aller de Montluçon à Paris, la correspondance est obligatoire à Bourges ou à Vierzon : Montluçon est enclavé ! C'est un handicap considérable pour le bassin montluçonnais, notamment pour la mine de lithium qui ouvre à proximité.

Une liaison directe Montluçon-Paris est un besoin vital pour le territoire. A minima, il faudrait un train direct le matin et un le soir. Allez-vous prendre l'attache du maire de Montluçon et des deux conseils régionaux concernés pour avancer ?

Mme Nicole Bonnefoy. - La route est pleine de voitures, dites-vous, mais elle est aussi pleine de camions ! Voilà cinq ans que j'interviens régulièrement pour dénoncer les poids lourds qui traversent nos départements en empruntant les routes nationales gratuites. Chez moi, en Charente, chaque jour, 15 000 camions empruntent la route nationale pour économiser 50 euros de péage sur l'A10, avec de multiples externalités négatives : pollution, accidents, déchets, travaux, etc. Avec Rémy Pointereau, j'ai rédigé un rapport d'information sur le transport de marchandises face aux impératifs environnementaux en 2021 et nous avons déposé une proposition de loi pour identifier les itinéraires de fuite et expérimenter des interdictions dans certaines zones. Je vous ai écrit à ce sujet en septembre.

En tant que président de département, vous avez limité la vitesse sur la RN 20 à 70 km/heure, afin de dissuader les camions d'emprunter cette route nationale. Cela fonctionne-t-il ? Si oui, pourquoi ne pas faire de même ailleurs ? Le Rassemblement national est en train de s'emparer de ces sujets : il faut apporter des réponses.

Je vous ai également écrit au sujet de la RN 141, en Charente, sur laquelle passent plus de 20 000 véhicules par jour et qui est inscrite au CPER. Voilà vingt ans que nous attendons sa mise à deux fois deux voies - elle se ferait sur 19 kilomètres, mais 1,5 kilomètre ne serait pas réalisé, créant un goulot d'étranglement. Cela n'est pas acceptable.

M. Jacques Fernique. - Les transports pour ceux qui n'en ont pas et la résorption de la précarité en matière de mobilité sont au coeur de votre ambition. Ma première question, que je vous adresse également dans une tribune parue ce jour dans Libération, avec les acteurs de la mobilité solidaire, porte sur la prime à la conversion : elle pourrait disparaître, comme vous l'avez souligné. Or, en supprimant la prime à la conversion, nous ferions aussi disparaître l'opportunité du réemploi de certains véhicules destinés à la casse via ce dispositif, avant même que les dispositions de la loi du 5 avril 2024 visant à favoriser le réemploi des véhicules, au service des mobilités durables et solidaires sur les territoires, dont j'ai été rapporteur, soient mises en oeuvre au profit des garages solidaires, donc des personnes les plus précaires. Nous attendons en effet toujours le décret d'application de cette loi...

Le bénéfice environnemental de cette prime est avéré, ainsi que son bénéfice social, notamment dans les ZFE. Avec la possibilité ouverte par la loi sur le réemploi des véhicules, la prime à la conversion permettrait également un vrai bénéfice en termes de solidarité. Maintenez la prime à la conversion et publiez ce décret !

Assiste-t-on à l'abandon des engagements du plan vélo 2023-2027 ? Les 2 milliards d'euros prévus vont-ils se dégonfler ? En réduisant les crédits de paiement de 33 millions d'euros, vous ne prévoyez plus que 100 millions d'euros pour 2025, soit ce que la ville de Strasbourg consacre à son propre plan vélo... Quelque 400 dossiers de collectivités sont gelés. Les 27 lauréats de l'appel à projets de 2023 seront-ils les premiers et les derniers ? Hier, Bercy nous rétorquait que les millions qui manquaient pour les trains de nuit étaient allés au plan vélo... Finalement, c'est perdu pour tout le monde ! Oui, il y a les CPER, mais un tiens vaut mieux que deux tu l'auras !

M. Damien Michallet. - En janvier 2020, l'État et la région Auvergne-Rhône-Alpes ont conclu un accord crucial permettant de débloquer la demande de subvention européenne pour financer les études du tracé français du Lyon-Turin. Le dossier de financement a été soumis dans les délais. Laurent Wauquiez, alors président de la région Auvergne-Rhône-Alpes et pleinement investi sur ce projet, l'avait souligné : nous sommes passés près de la catastrophe !

En mai dernier, le Premier ministre Gabriel Attal s'est rendu en Maurienne pour suivre les travaux du tunnel de base. L'annonce du lancement, au début de l'année 2025, des études d'avant-projet détaillé de la section française ouvre une nouvelle séquence : les élus locaux prennent conscience de la réalité du projet. Il ne s'agit plus d'être pour ou contre, mais de savoir comment nous allons accompagner les trois départements, les 50 communes et la dizaine d'intercommunalités traversées : accès, abords, ponts, voiries, expropriations, gestion de l'eau, nuisances du chantier, impacts environnementaux, mesures de compensation, etc.

Et quid du ZAN, l'objectif « zéro artificialisation nette » ? Les capacités à bâtir des communes traversées seront-elles affectées ? Avec le président Longeot et notre collègue Philippe Tabarot, nous vous invitons en Isère pour rencontrer les élus locaux et visiter ce chantier pharaonique. Quelle est la position de l'État sur ce projet stratégique pour notre région et pour l'Europe ?

Ce projet nous conduit aussi à nous interroger sur le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise - CFAL Nord et CFAL Sud - qui suscite des inquiétudes. Qu'en est-il de ces deux projets, de leurs études et de leur financement ? Pouvons-nous nous rencontrer localement pour en parler, les pieds dans la terre ?

M. Pierre Barros. - Vous avez réuni hier les organisations syndicales pour confirmer la liquidation de Fret SNCF, comme vos prédécesseurs qui étaient, eux aussi, favorables au plan de discontinuité. Dans ces conditions, comment pourrez-vous respecter leur engagement de doubler la part du fret d'ici à 2030 ? Un rapport de l'Assemblée nationale propose un moratoire afin d'entamer un nouveau cycle de discussions avec la Commission européenne. Des projets alternatifs existent, mais ils nécessitent le maintien d'un opérateur public qui ne se focalisera pas sur les sillons les plus rentables pour répondre aux besoins des chargeurs. C'est stratégique pour réindustrialiser la France, ainsi que le souhaite le Président de la République.

Le projet Roissy-Picardie va longer une partie du RER D - que vous connaissez bien. Une gare est en construction à Fosses, dans le Val-d'Oise : le projet est donc lancé et les moyens devront être mis sur la table pour le terminer.

M. François Durovray, ministre délégué. - Monsieur Rojouan, la demande d'une liaison quotidienne directe entre Paris et Montluçon est légitime, mais l'État n'est pas seul responsable - les lignes Montluçon-Vierzon et Montluçon-Bourges sont de la responsabilité de la région Centre-Val de Loire. Mais le sujet me concerne aussi, dans la mesure où Bourges sera capitale européenne de la culture en 2028. L'État et les deux régions devront travailler ensemble pour améliorer la desserte de Montluçon. Sachez que des crédits d'études sont prévus pour la desserte de la future carrière de lithium dans l'Allier.

Madame Bonnefoy, veuillez m'excuser de ne pas avoir encore répondu à vos courriers. Je suis naturellement favorable à l'idée de travailler sur la question du trafic routier, qui se pose dans de nombreux départements. J'ai donc demandé à mes services d'évaluer les besoins, ce qui n'empêche pas d'expérimenter, et saisir le préfet de Charente pour connaître son avis. J'ai bien en tête le dossier de la RN 141, mais je ne peux pas vous apporter de réponse définitive. Lorsque je me rendrai à Limoges pour évoquer la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt), je ferai également le point sur la RN 141 en Charente.

Mme Nicole Bonnefoy. - Le préfet de Charente est favorable à l'expérimentation d'une limitation de la vitesse à 70 km/h, mais uniquement sur l'agglomération d'Angoulême, ce qui est ridicule : la limitation de la vitesse doit concerner toute la nationale.

M. François Durovray, ministre délégué. - Cela suppose aussi une capacité de contrôle. Je partage votre préoccupation. Voyons comment nous pouvons avancer.

Monsieur Fernique, je suis attaché à maintenir un dispositif de prime à la conversion notamment pour les personnes concernées par les ZFE et pour le rétrofit : les arbitrages sont en cours.

M. Jacques Fernique. - La loi du 5 avril 2024 ne traite pas seulement du rétrofit, mais également du réemploi de véhicules issus de la conversion.

M. François Durovray, ministre délégué. - Je n'avais pas en tête que des décrets d'application devaient être pris : je vous répondrai par écrit.

M. Jacques Fernique. - La direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) n'a pas pris les décrets, craignant que la prime disparaisse.

M. François Durovray, ministre délégué. - Je mettrai ce sujet à l'ordre du jour de la réunion que j'aurai avec la directrice générale de l'énergie et du climat dans une dizaine de jours.

Les 100 millions d'euros du plan vélo de Strasbourg sont sur sept ans, pas sur un an ! L'État maintiendra son effort dans les CPER. J'entends votre remarque, mais vous devez avoir conscience de la situation budgétaire et des choix à opérer.

Il est plus facile de réduire des dépenses d'investissement que des dépenses de fonctionnement - ce n'est pas propre à ce Gouvernement... Mais les dépenses d'investissement méritent d'être préservées, car ce sont des dépenses d'avenir. L'État est plus dans son rôle sur les infrastructures de Mass Transit, et notamment le ferroviaire, que pour le vélo, même s'il a joué un rôle d'accélérateur. Depuis, les collectivités territoriales se sont emparées de ce sujet.

Monsieur Michallet, j'ai rencontré le président de la société du tunnel euralpin Lyon-Turin (Telt) et j'ai promis au président Longeot de me rendre en Maurienne, à la fin de l'hiver, pour la réouverture du trafic ferroviaire et, je l'espère, du trafic routier. Je pourrai alors également visiter le chantier et vous confirmer que les engagements financiers de l'État seront tenus.

J'espère que je pourrai aussi vous annoncer des avancées sur le CFAL, qui est l'un des sujets que j'ai évoqués avec la métropole et la région Auvergne-Rhône-Alpes lorsque je me suis rendu à Lyon. C'est un projet préalable essentiel. Nous devons tous être au rendez-vous. J'espère que, grâce à mon travail de persuasion, nous pourrons inscrire tous les crédits nécessaires dans le CPER qui pourrait être signé avant la fin de l'hiver.

Le chantier du Lyon-Turin sera bien imputé sur l'enveloppe nationale de consommation du ZAN et non sur l'enveloppe locale ; cela sera donc sans impact pour les collectivités territoriales.

Monsieur Barros, j'ai reçu les organisations syndicales de Fret SNCF lundi dernier. Nous étions sous le coup d'une demande de la Commission européenne de remboursement de 5 milliards d'euros d'aides dont Fret SNCF a bénéficié dans les années 2010, ce qui a un goût sinon amer, du moins particulier au moment où Fret SNCF s'est redressé. Mais je pense que nous allions vers le remboursement et vers une liquidation totale, avec des conséquences importantes pour l'entreprise nationale. La Commission européenne veut probablement traiter aussi sévèrement la France et l'Allemagne, avec DB Cargo. L'entreprise et ses agents ont fait des efforts très importants depuis un an et demi pour se remettre sur pied, en limitant le nombre de services de fret donnés à la concurrence : 24 services ont été repris par des entreprises ferroviaires, sans basculer sur la route. Nous restons vigilants sur l'emploi, afin que les salariés restent dans le groupe, et sur le plan d'affaires qui, je l'espère, repartira sur une dynamique positive.

Je l'ai dit, il faut mieux concilier le maritime avec le fluvial et le ferroviaire. Seul, le ferroviaire ne pourra pas s'en sortir. Dans le PLF pour 2025, l'État ajoute 30 millions d'euros pour le wagon isolé. Je respecte les positions divergentes, mais je maintiens la position de mes prédécesseurs pour écrire une nouvelle page de l'histoire du fret. Je sais que je ne vous convaincrai pas...

M. Franck Dhersin. - La commission des finances de l'Assemblée nationale a voté la possibilité pour les régions de prélever le VM en lieu et place des intercommunalités quand ces dernières n'exercent pas cette compétence, ce dont je me félicite.

Toutefois, les propos de Mme Vautrin, qui souhaite conditionner la hausse du VM à l'augmentation de l'offre de transports, me semblent aller à l'encontre de la logique de décentralisation. En décembre 2023, vous aviez d'ailleurs signé une tribune intitulée « L'appel des Girondins », dans laquelle vous interpelliez Emmanuel Macron sur le manque d'ambition de la mission confiée à Éric Woerth et exprimiez le souhait de libérer les collectivités territoriales d'une bureaucratie étatique parfois inutile.

Le souhait de toutes les AOM, qu'elles soient régionales ou métropolitaines, est de disposer librement du pouvoir de fixation du taux. Nous partageons tous l'objectif d'une augmentation de l'offre de transports, mais je ne vois pas en quoi l'État devrait donner quitus aux AOM. Pouvez-vous nous rassurer quant aux intentions du Gouvernement dans ce domaine ? Lors de la table ronde du Groupement des autorités responsables de transport (Gart), vous aviez déclaré : « Concernant le financement des mobilités, nous devons donner aux collectivités les moyens d'agir et elles savent faire, ce n'est pas à l'État de dire quelles sont les meilleures solutions à mettre en oeuvre, nous donnons une marche à suivre, une feuille de route ».

Par ailleurs, vous avez indiqué que l'augmentation du VM n'avait pas vocation à financer la gratuité. Or, si Dunkerque, Calais, le bassin minier ou Montpellier ont souhaité adopter cette mesure, je ne vois pas à quel titre l'État s'y opposerait.

Enfin, vous avez fait part de votre souhait de lancer une réflexion sur les dessertes TGV non rentables dans le cadre de l'ouverture à la concurrence du réseau. Vous soulignez, à juste titre, que les entreprises concurrentes de la SNCF n'iront pas exploiter des lignes non rentables - propos accueillis avec enthousiasme par certains de ses dirigeants -, mais l'entreprise publique se serait-elle lancée en Espagne pour exploiter des liaisons non rentables ? Certainement pas ! La solution ne pourrait-elle pas consister à moduler les péages ferroviaires des liaisons déficitaires, afin d'inciter les acteurs à les desservir ?

M. Pierre Jean Rochette. - Le Gouvernement entend développer les poids lourds électriques, mais je n'ai pas connaissance d'enveloppe budgétaire dédiée dans le budget. Les certificats d'économies d'énergie pourraient être retenus, mais pour un montant inférieur à celui de 2024, à savoir 130 millions d'euros.

Par ailleurs, la discussion autour des concessions autoroutières devra englober la question du transport public. Concernant les allotissements ferroviaires, quelle est pour vous la bonne maille afin que les territoires ruraux ne soient pas oubliés ?

M. Sébastien Fagnen. - Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir à quelle échéance le contrat de performance actualisé entre l'État et SNCF Réseau sera présenté. Comment les différents acteurs, au premier rang desquels le Parlement, y seront-ils associés ? Quelle sera l'ambition portée par ce contrat, à la fois sur le plan budgétaire et par rapport à l'enjeu du changement climatique ? Lors du discours de politique générale du Premier ministre, il est apparu que l'ambition portée par Élisabeth Borne et par le plan de 100 milliards d'euros allait faire l'objet non pas d'une révision des priorités au bénéfice des lignes du quotidien, mais d'une attrition de ses moyens dans le contexte budgétaire que nous connaissons.

J'en viens à un projet d'intérêt national, à savoir la ligne nouvelle Paris-Normandie, en associant à mon propos mon collègue Pascal Martin et l'ensemble des parlementaires de la région Normandie, qui se sont exprimés après la volte-face de Mme Valérie Pécresse quant au soutien du conseil régional d'Île-de-France à la concrétisation de cette infrastructure particulièrement stratégique. Vous avez vous-même évoqué la nécessité de connecter notre façade portuaire, qui ne sera qu'un voeu pieux tant que cette situation de blocage perdurera.

Que comptez-vous faire à ce sujet afin de donner corps à ce projet - transpartisan dès sa genèse - et de fixer une échéance concrète pour sa réalisation, qui ne répondra pas seulement aux attentes des habitants de Normandie, mais également aux besoins de la région Île-de-France, quoi qu'en pense sa présidente ?

M. Jean-François Longeot, président. - M. Pascal Martin a dû nous quitter, mais souhaitait vous interroger sur le contournement ouest de Rouen.

M. Didier Mandelli. - Je me satisfais, en tant que rapporteur de la LOM, de vous entendre évoquer des enjeux tels que le VM à taux minoré, qui avait été un point d'achoppement en commission mixte paritaire. Nous avions sans doute eu raison trop tôt, l'offre de transports pouvant se développer sans être nécessairement collective. De la même manière, j'ai apprécié vos déclarations sur le rétrofit, les C2E et le transport maritime, auquel le groupe d'études « Mer et littoral » est très attaché.

Je tiens aussi à formuler une proposition dans le prolongement de la conférence de financement des mobilités que vous avez annoncée : ne serait-il pas judicieux de pérenniser une structure qui rassemblerait l'Afit France et le COI et qui permettrait de tenir une conférence annuelle dédiée aux financements en son sein ?

M. Saïd Omar Oili. - Monsieur le ministre, j'avais interrogé votre prédécesseur au sujet de la gare maritime de Dzaoudzi, à Mayotte, par laquelle transitent chaque année plus de 30 000 personnes. Dépourvu de scanner, ce port est une véritable passoire et les marchandises et personnes passent sans contrôle réel. Deux douaniers viennent d'ailleurs d'être arrêtés pour corruption et contrebande. Quand les travaux démarreront-ils dans cette gare ?

Par ailleurs, la piste d'atterrissage de Mayotte, souvent inondée, ne devrait plus être viable en 2035, mais aucune étude ne semble avoir été effectuée pour identifier la localisation d'une nouvelle piste. Les parlementaires mahorais pourront-ils, à terme, venir ici assister aux réunions du Parlement ?

M. Alain Duffourg. - Monsieur le ministre, je représente un département totalement enclavé, le Gers, qui fait partie des neuf départements dépourvus d'autoroutes. En quarante ans, nous n'avons pu obtenir que 50 kilomètres de routes à deux fois deux voies. Pouvons-nous espérer davantage dans le cadre de la prochaine conférence de financement ?

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers. - Je salue le moratoire que vous avez décrété sur les horaires des lignes secondaires de la desserte Paris-Strasbourg et l'engagement que vous avez pris d'une réflexion sur l'avenir de ces dessertes. Ne devrait-on pas imaginer un nouvel acte législatif pour accompagner le ferroviaire là où les dessertes sont fragiles et mettre en place un contrat de service public, à l'image du contrat passé entre l'État et La Poste ?

Par ailleurs, l'étude commandée par votre prédécesseur sur les péages ferroviaires sera-t-elle rendue publique avant la conférence de financement que vous avez annoncée ?

Enfin, vous avez récemment suggéré que les nouveaux entrants ferroviaires pourraient être contraints de desservir des villes moins rentables que les grandes métropoles. Ne pourrait-on pas imaginer qu'ils contribuent également au fonds de concours de SNCF Réseau, au-delà de la période de trois ans durant laquelle ils bénéficient de péages moins coûteux ? SNCF Voyageurs ne devrait en effet pas être l'unique contributeur.

M. François Durovray, ministre délégué. - Monsieur Dhersin, chaque collectivité est en effet libre de fixer une tarification, même si j'estime que la priorité doit être accordée à l'offre plutôt qu'à la demande. Au risque peut-être de choquer, si le Gouvernement avance sur le sujet du VM, je souhaite que la part correspondante puisse être consacrée à l'offre.

Il faudrait trouver un gentleman's agreement qui permette d'allouer le fruit des efforts de l'État et des entreprises à de nouvelles dessertes plutôt qu'à la politique tarifaire. Mes interlocuteurs n'ont pas exprimé de réticences particulières à ce sujet, des politiques tarifaires distinctes pouvant toujours être menées par les collectivités territoriales au niveau de leur propre budget.

En ce qui concerne les dessertes non rentables de TGV, nous devons intégrer l'arrivée de nouveaux entrants. L'expérience sur la ligne Paris-Lyon montre que cette dernière est synonyme d'une augmentation de l'offre et d'une baisse des tarifs, le processus étant donc plutôt vertueux. Pour autant, ces évolutions ne doivent pas intervenir au détriment des logiques d'aménagement du territoire. J'ai demandé à mes services d'étudier la manière dont un nouvel entrant pourrait se voir imposer des dessertes d'aménagement du territoire : dans le cas des liaisons Paris-Rennes ou Paris-Lyon, nous pourrions ainsi solliciter une desserte occasionnelle de Quimper, Brest ou du Creusot.

Dans le cas contraire, la SNCF fera légitimement valoir qu'elle ne peut pas assumer ces contraintes et qu'un financement de l'État est requis. Si je suis favorable à la concurrence, elle ne saurait se réduire à la privatisation des profits et à la collectivisation des pertes. L'État doit être en mesure de fixer un cadre un peu plus contraignant pour les nouveaux entrants, mes services devant creuser ce point.

S'agissant des poids lourds électriques, un appel à manifestation d'intérêt (AMI) sera retenu, comme en 2024. Les volumes ne permettent certes pas une électrification massive de la flotte, mais il s'agit d'amorcer le mouvement, afin de trouver un modèle économique pour le secteur. Un poids lourd électrique coûte 450 000 euros, soit en effet trois fois plus cher qu'un camion thermique, la massification de l'achat de véhicules électriques devant permettre d'en abaisser le coût.

Par ailleurs, s'agissant du modèle juridique futur des concessions autoroutières, je n'ai pas d'a priori, toutes les pistes sont donc sur la table. Je souhaite que la conférence nationale sur le financement des infrastructures se penche sur l'avenir des sociétés concessionnaires d'autoroutes et soit l'instance pour aborder toutes les questions, juridiques comme financières. Les futurs contrats seront très probablement plus courts, car les autoroutes sont construites et les risques sont plus faibles, mais je ne souhaite pas préempter ce débat.

La présentation du contrat de performance de la SNCF sera quant à elle sans doute décalée à l'été 2025, sachant qu'il faudra la combiner avec la fin du mandat de Jean-Pierre Farandou en mai prochain. Cet exercice doit être l'occasion d'évaluer la contribution de la SNCF à la régénération de son réseau, l'État ayant considérablement contribué au redressement de l'entreprise en reprenant sa dette. L'État souhaite que la SNCF fournisse sa part d'efforts, tout en tenant compte des contraintes qu'elle évoque légitimement. Nous veillerons à ce que les parlementaires soient associés aux échanges à ce sujet.

Quant à la ligne nouvelle Paris-Normandie, il s'agit clairement d'un projet d'intérêt national qui doit dépasser les positionnements de chacune des régions, ce qui ne signifie pas que les régions ne puissent pas porter une série de demandes. J'ai l'intention de nommer un nouveau préfet coordonnateur des actions de l'État pour l'aménagement de la vallée de la Seine afin de convaincre chaque territoire des gains attendus de cette infrastructure : ils sont évidents pour la Normandie, moins pour l'Île-de-France aujourd'hui.

Le processus doit se concrétiser par la signature du contrat de plan interrégional (CPIER) associant l'État et les deux régions. Je m'engage, vis-à-vis de la région Île-de-France, à ce que le préfet puisse prendre en compte ses préoccupations, en particulier la demande de desserte du Mantois et les inquiétudes relatives aux nuisances. Des travaux devront sans doute être réalisés autour des grandes villes et notamment autour de Rouen. Soyez assurés de ma volonté d'aboutir sur ce projet, essentiel pour la Normandie et pour l'Île-de-France en termes de logistique : première région d'Europe, celle-ci a intérêt à ce que les marchandises arrivent par le train et non par la route.

Le contournement ouest de Rouen, ensuite, est un dossier fort complexe que je dois encore expertiser. Je souhaite écouter tous les interlocuteurs avant de prendre une position.

Je vous remercie, monsieur Mandelli, pour votre intervention. Le COI a toute sa place dans la conférence nationale de financement des infrastructures, tandis que l'Afit France a été critiquée par la Cour des comptes. J'ignore si le futur véhicule juridique dont nous aurons besoin pourrait résulter d'une fusion des deux structures, mais je prends note de votre suggestion.

Monsieur Omar Oili, les services de Bruno Retailleau, compétents pour la gare maritime de Dzaoudzi, m'ont indiqué qu'un audit de sûreté conduit en septembre 2023 avait conclu à une nette amélioration de la sûreté portuaire et qu'aucune non-conformité majeure n'avait été relevée, mais je transmettrai votre question à mon collègue. Un projet de réfection totale de cette gare est également à l'étude.

S'agissant de la piste d'atterrissage, le Gouvernement entend construire un nouvel aéroport dans un endroit qui a déjà été identifié, me semble-t-il. J'entends votre requête relative à une meilleure association des élus locaux et demanderai à la DGAC de les tenir informés.

Enfin, monsieur Duffourg, le département du Gers a repris la gestion de toutes les routes nationales dans le cadre de la loi 3DS. Nous nous sommes engagés à apporter une participation dans la mise à deux fois deux voies du tronçon entre Gimont et L'Isle-Jourdain dans le cadre du volet routier du CPER, à hauteur de 31 millions d'euros.

M. Alain Duffourg. - Ce chantier doit effectivement être réalisé pour le 1er trimestre 2027. Rien n'est prévu, en revanche, pour l'ancienne nationale 21.

M. François Durovray, ministre délégué. - Je pense qu'il n'existe aucun autre projet à date et qu'il paraît malaisé d'aller plus loin compte tenu des calendriers et des contraintes de financement. Je vous apporterai une réponse sur une phase ultérieure de travaux, qui pourrait intervenir dans le cadre du prochain CPER.

Monsieur Jacquin, vous avez évoqué l'enjeu des péages ferroviaires. Nous avons une spécificité sur le transport de voyageurs longue distance, avec un coût des péages qui a des répercussions sur le prix des billets. Les acteurs de la conférence de financement pourraient décider d'aborder la légitime question des péages et des dessertes d'aménagement du territoire : une diminution du prix du péage pourrait avoir un effet sur le prix du billet, mais il faudrait aussi évaluer son impact sur le niveau d'investissement. Nous devrons identifier à la fois une enveloppe et un véhicule juridique appropriés.

Quant aux contrats de service public que vous appelez de vos voeux, la question des compensations financières de l'État doit être mise en débat.

Je vous remercie pour cet échange, qui a confirmé que les sénateurs ont une fine connaissance des dossiers dont j'ai désormais la responsabilité. J'espère avoir répondu le plus précisément possible à vos interrogations et espère revenir devant vous avec des avancées sur un certain nombre de sujets.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci pour votre présence, qui a été l'occasion de démontrer que vous connaissez vos dossiers et que vous souhaitez associer les sénateurs à un travail commun, ce dont je me félicite.

Examens en commission
Crédits « Transports aériens »
(Mercredi 27 novembre 2024)

M. Jean-François Longeot, président. - Je salue la présence de notre collègue Vincent Capo-Canellas, membre de la commission des finances, que je remercie d'être présent. Je remercie nos collègues rapporteurs d'avoir accepté de modifier l'ordre du jour, en débutant par l'examen du rapport pour avis sur les transports aériens. Je cède la parole au rapporteur pour avis, Stéphane Demilly sur les crédits pour les transports aériens.

M.  Stéphane Demilly, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports aériens. - Mes chers collègues, je suis heureux de vous présenter cet avis budgétaire sur le transport aérien. Je voudrais remercier nos collègues Gilbert-Luc Devinaz et Alexandre Basquin pour leur présence aux différentes auditions préparatoires à mes travaux.

Je vous ai déjà présenté deux amendements la semaine passée qui résumaient bien l'esprit de cet avis budgétaire et que je pourrais résumer ainsi : la hausse inédite de la fiscalité souhaitée par le gouvernement, alors que le secteur aérien se remet à peine d'une crise sans précédent, ne doit pas se faire au détriment des investissements en faveur de la décarbonation du secteur. Je vous remercie d'ailleurs de les avoir adoptés.

Pour commencer, je souhaite faire état de la situation de l'administration française chargée du secteur aérien et notamment du contrôle aérien, la direction générale de l'aviation civile (DGAC). Le rattrapage du niveau de trafic depuis la crise sanitaire a engendré une hausse des recettes perçues par cette administration. Celle-ci est en effet financée par les taxes et redevances versées par les compagnies aériennes qui dépendent de l'activité du secteur. C'est un cas quasi unique, car c'est un budget qui, en quelque sorte, doit s'autofinancer.

Le contrôle aérien français souffre cependant depuis plusieurs années d'un niveau de performance très insuffisant. Selon le dernier rapport d'activité du service chargé de la navigation aérienne, « la France est le pays qui génère le plus de retards en Europe » : 7,4 millions de minutes de retard en 2023 au total, ce qui équivaut à 2,31 minutes de retard en moyenne par vol.

Ces performances décevantes sont dues à deux facteurs. D'une part, les technologies utilisées par les contrôleurs aériens sont particulièrement obsolètes. D'autre part, l'organisation du travail des contrôleurs aériens est inefficiente. L'administration a donc entamé depuis plusieurs années un plan de modernisation de ses programmes de gestion de trafic. Après une décennie de dérapage des coûts et de retard, le déploiement opérationnel des nouveaux systèmes de technologie devrait s'achever en 2026. Cette évolution à la fois tardive et salutaire, sera bientôt malheureusement déjà dépassée et insuffisante. En effet, il convient d'ores et déjà d'investir l'étape suivante, dans de nouvelles technologies.

En outre, la DGAC a également entrepris de moderniser ses méthodes de travail. En effet, à l'heure actuelle, l'organisation du contrôle aérien est trop rigide, ce qui peut engendrer un déficit de contrôleurs, paradoxalement, lors des pics de trafic, créant ainsi de nombreux retards. Par ailleurs, les contrôleurs aériens ont recours à une pratique pour le moins opaque, les « clearances ». Ce sont des réductions d'effectifs décidées par le chef de service qui se traduisent par un temps de présence des contrôleurs au travail inférieur à leur service théorique. Cette pratique est aussi opaque que surprenante. Au-delà des problèmes de performance qu'il engendre, ce mode de fonctionnement a été mis en cause dans un rapport du bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile (BEA). L'insuffisance des effectifs de contrôleurs liés aux clearances a en effet contribué à la survenance d'un incident grave de sécurité, le 31 décembre 2022 à l'aéroport de Bordeaux-Mérignac.

L'administration a donc prévu de déployer des systèmes de « badgeage » et de vérification biométrique de la présence sur le site des contrôleurs entre l'hiver 2025 et la fin de l'été 2026. J'accueille favorablement cette évolution qui devrait enfin mettre fin à une situation, vous l'avez compris, inacceptable et archaïque.

Le contrôle aérien français projette également de réorganiser son emprise géographique sur le modèle de ses homologues européens, en réduisant le nombre de tours de contrôle et de centres d'approche afin de reconcentrer ses moyens humains et d'avoir une gestion plus active des effectifs en fonction du niveau des trafics. Cette évolution exige de mener en amont une concertation avec les territoires concernés. J'ai cru comprendre d'ailleurs que c'était loin d'être le cas.

En contrepartie de la modernisation du fonctionnement de l'administration, le personnel bénéficiera de mesures catégorielles coûteuses, estimées par notre collègue Vincent Capo-Canellas, que je salue et remercie pour sa présence, à environ 100 millions d'euros par an. Or, ce montant sera par définition répercuté sur les taxes et redevances versées par les compagnies aériennes qui sont donc en droit d'attendre, en contrepartie, une réelle amélioration de la qualité du service rendu.

Je tiens à vous indiquer que les premiers retours sur l'application de la loi n° 2023-1289 « Organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social » du 28 décembre 2023 à l'initiative de notre collègue Vincent Capo-Canellas et examinée par la commission en 2023 sont très positifs.

J'en viens maintenant au deuxième axe de mon avis, l'effort fiscal inédit demandé au secteur aérien qui limite de facto sa capacité à investir en particulier dans la décarbonation.

Mener à bien ce processus est une course de fond dont le calendrier nous mène à 2050 et qui exige des investissements particulièrement massifs. Deux vecteurs principaux pour la mener à bien d'ici cette échéance, ont été identifiés : d'une part, l'utilisation des carburants d'aviation durable (CAD), à la place du kérosène, conformément aux objectifs fixés par le règlement européen sur l'aviation ReFuelEU Aviation, du 18 octobre 2023, et, d'autre part, l'utilisation d'aéronefs plus économes en énergie.

Comme je vous l'ai indiqué il y a une semaine, le coût des carburants aériens durables est très élevé, entre 3 fois et 5 fois le prix du kérosène. C'est pourquoi nous avons adopté la semaine dernière, comme l'année dernière, un amendement visant à créer un crédit d'impôt incitatif à l'achat de CAD. Je tenais à vous informer que j'ai procédé, avec l'accord de notre président Jean-François Longeot, à des modifications rédactionnelles qui n'en ont pas modifié la teneur, afin de le rendre identique à un amendement qui avait reçu un avis favorable de la commission des finances. Enfin, pour en finir avec les CAD, il est clair que nous devons examiner rapidement la question de la constitution d'une véritable filière nationale de CAD, pour ne pas être dépendant de l'étranger.

En outre, la filière aéronautique française s'est fixé pour objectif de produire, à partir de 2035, un avion ultra frugal qui utilisera 20 % à 25 % d'énergie en moins que la génération actuelle d'aéronefs. Un tel programme permettrait de contribuer à la décarbonation de la moitié de la flotte mondiale, produite par Airbus. Le Président de la République s'est engagé en juin 2023 à ce que l'État abonde le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac) de 300 millions d'euros par an d'ici 2027. Depuis cette date, les centres de décision se sont quelque peu déplacés. Le projet de budget actuel prévoit de n'abonder le Corac que de 230 millions d'euros en 2025. Afin d'éviter tout retard dans ce programme, dans un contexte de concurrence mondiale très forte, je vous proposerai un amendement tendant à rehausser le soutien de l'État au Corac pour respecter les engagements initiaux qui étaient de 300 millions d'euros.

Enfin, je tiens maintenant à aborder la question de la hausse du tarif de solidarité sur les billets d'avion (TSBA), proposée par le gouvernement. Je tiens à rappeler que le secteur aérien a déjà subi une hausse marquée de la fiscalité qui lui est applicable à l'occasion de la loi de finances pour 2024, avec la taxe sur les infrastructures de transport de longue distance dont sont redevables les plus grands aéroports français. Son montant devrait être compris entre 120 millions d'euros et 150 millions d'euros en 2024 et concerne, nous l'avions déjà évoqué ici, les aéroports du groupe ADP, Nice, Toulouse, Marseille et demain probablement Lyon.

Néanmoins, dans le contexte budgétaire actuel contraint, chaque secteur doit prendre sa part au redressement des finances publiques. La hausse de la TSBA est probablement « la moins mauvaise » des solutions, car elle est fondée sur la destination finale du passager, ce qui limite les effets de distorsion de concurrence au profit des vols avec des escales hors de France. Cependant, l'ampleur de la taxation envisagée par le gouvernement n'est pas acceptable. Elle est trop massive et pourrait notamment conduire à la fermeture de lignes qui desservent les aéroports régionaux, notamment des liaisons transversales qui ne peuvent pas être réalisées actuellement en train. Elle porterait ainsi atteinte à la connectivité des territoires. Les lignes d'aménagement du territoire, dont l'équilibre financier est actuellement assuré par le versement d'une subvention pour charge de service public, pourraient voir leur modèle économique encore se dégrader. Les collectivités territoriales seraient contraintes de les abonder davantage pour combler le coût d'une taxe affectée au budget général de l'État. Les vols pour les outre-mer seraient également touchés.

Par ailleurs, le niveau de taxation sur l'aviation d'affaires commerciale, qui pourrait atteindre 3 000 euros par passager sur certains vols, est particulièrement élevé et pourrait menacer la pérennité de cette filière en France. Il faut laisser des marges financières aux compagnies pour investir dans les CAD ainsi que dans le renouvellement des flottes, car les plus anciens aéronefs sont aussi par nature les plus polluants. Pour rappel, et ne l'oublions pas, la dette nette d'Air France est à ce jour d'environ 5 milliards d'euros.

J'ai donc décidé de déposer un sous-amendement qui limite la hausse de la TSBA sur les billets d'avion pour les vols intra-européens en classe économique. Un doublement plutôt que le quasi quadruplement envisagé par le gouvernement me paraît le niveau maximal pour préserver les liaisons participant à l'aménagement du territoire.

Ce sous-amendement réduit également le niveau de taxation applicable à l'aviation d'affaires par rapport au dispositif proposé par le gouvernement. Les passagers de l'aviation d'affaires seraient ainsi, selon le dispositif proposé par le sous-amendement, taxés entre quatre fois et dix fois plus que les passagers en classe « business », en fonction des vols et des aéronefs utilisés. Ce qui est déjà considérable, vous en conviendrez. Ce ratio pourrait atteindre vingt-cinq dans le dispositif gouvernemental, ce qui est non seulement disproportionné, mais serait tout simplement une mise à mort de l'aviation d'affaires.

Pour conclure, je voudrais vous rappeler la morale d'une fable d'un célèbre auteur picard, Jean de La Fontaine. Cette fable, c'est celle de la poule aux oeufs d'or dans laquelle, celui qui décida en vain de la tuer pour découvrir le trésor qui s'y cachait, s'est « lui-même ôté le plus beau de son bien ». Prenons garde à ne pas tuer la poule aux oeufs d'or. Le secteur aérien et aéronautique français représente un magnifique fleuron national. Il pèse plus de 300 000 emplois directs et indirects et contribue très positivement et massivement à la balance commerciale de notre pays. Demandons-lui naturellement un effort, mais faisons en sorte de le préserver.

M. Saïd Omar Oili. - Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué la cherté des billets d'avion, ce qui est déjà le cas pour les destinations outre-mer, notamment Mayotte. Le billet aller-retour entre la métropole et Mayotte coûte environ 3 500 euros. Taxer ce trajet signifie pour nous iliens, la fin de nos déplacements alors que nous sommes complètement enclavés et que la seule possibilité de quitter notre territoire réside dans le transport aérien. La taxation envisagée représente donc un véritable problème pour nous.

M. Ronan Dantec. - Le rapport de Stéphane Demilly aborde de nombreux sujets qu'il convient de distinguer clairement. Tout d'abord, en écho à l'intervention précédente et à certains propos du rapporteur, reconnaissons qu'un amendement exonérant les lignes aériennes d'aménagement du territoire et ultramarines, pourrait faire l'objet d'un consensus. Je ne suis pas loin d'être d'accord avec Stéphane Demilly. Cependant, ces lignes ne doivent pas entrer dans le débat général de la TSBA. En effet, les questions d'aménagement du territoire en sont distinctes. C'est pourquoi je pense déposer un amendement en ce sens.

Mon deuxième point porte sur les carburants alternatifs. Cessons d'en parler. Les différents travaux sur le sujet démontrent que c'est une impasse. Ce discours d'« écoblanchiment » constitue une perte de temps. Poursuivre la piste des carburants alternatifs conduirait à laisser aux mains de la concurrence internationale le transport aérien mondial car cette piste n'est pas fondée sur un modèle économique viable. Le chemin serait trop long pour y parvenir et supposerait de diviser par cinq le prix de l'électricité en France pour assurer la compétitivité des carburants alternatifs. Une telle stratégie est vouée à l'échec. En revanche, la réduction de la consommation énergétique, dont celle du kérosène des avions, est pertinente, à l'instar des actions d'Airbus menées en ce sens, ce qui contribue d'ailleurs à la compétitivité du groupe. Investir dans la stratégie des carburants alternatifs en s'appuyant sur un modèle économique que l'on sait impossible et inopérant dans le contexte budgétaire actuel constitue donc une gabegie d'argent public. Le prix de l'électricité ne le permet tout simplement pas, sauf à pouvoir le diviser par cinq, ce qui n'est pas le cas, à ce jour. Les recettes issues de la TSBA ne peuvent donc être consacrées au développement des carburants alternatifs, sous peine de gaspillage, même si le soutien à la création d'avions plus économes en énergie, demeure un enjeu, ce que Airbus a bien compris, pour des raisons de concurrence internationale.

J'en arrive donc à mon troisième point, la TSBA, dissociée de la question de l'aménagement du territoire et de la fable sur les carburants alternatifs. Force est de constater qu'en dépit d'une augmentation considérable des tarifs aériens, ces deux dernières années, les avions demeurent pleins. La multiplication par deux du prix d'un billet n'a pas dissuadé les voyageurs de prendre l'avion. Or, il est ici question d'une taxe de 9 euros pour la grande majorité des billets, ce qui représente une part très faible du prix de ces billets. Cette augmentation du prix des billets ne devrait pas affecter la demande alors qu'elle contribuera de manière substantielle au budget de la France. Il n'est donc pas question de tuer la poule aux oeufs d'or, mais de l'exploiter plus rationnellement. Je suis donc en faveur non seulement de maintenir cette taxe, le gouvernement y étant attaché, mais aussi avec le principe d'en affecter une partie des recettes au maintien de l'aide publique au développement, et en particulier aux crédits alloués au ministère de l'Europe et des affaires étrangères pour l'aide publique bilatérale de la France, qui devrait connaître une baisse de 40 %. En effet, l'aide publique de la France présente aujourd'hui l'impact carbone le plus important par euro investi. En conséquence, conserver la TSBA et maintenir l'aide publique au développement constituent ainsi les mesures les plus efficaces en matière de lutte contre le changement climatique.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Lors des auditions préparatoires du rapporteur, le directeur général délégué d'ADP a déclaré « trop c'est trop ». Cela interpelle. Il y a eu un engagement de neutralité carbone en 2050 pris lors du sommet européen de l'aviation à Toulouse en 2022. Il faut l'atteindre, notamment par un effort en matière de recherche, ce que vise le premier amendement du rapporteur qui propose d'augmenter les crédits de recherche en faveur du CORAC.

Par ailleurs, je suis étonné par les propos de notre collègue Ronan Dantec sur l'inefficacité des biocarburants. Les nombreuses auditions préparatoires que j'ai pu mener dans le cadre de la mission d'information que j'ai présidée en 2023 sur le développement d'une filière de biocarburants, carburants synthétiques durables et hydrogène vert, n'ont pas conduit à cette conclusion. Je maintiens que le secteur du transport aérien doit être décarboné, dans son intérêt, ce qui se produira vraisemblablement par la mise en oeuvre de solutions mixtes. L'avion électrique transportant peu de passagers sur de petites distances en constitue une.

Outre le carburant, il convient également de prendre en compte le besoin de renouvellement des flottes des compagnies aériennes. Ces dernières doivent avoir cette capacité d'investir dans des flottes plus modernes et moins consommatrices d'énergie. Les voies et moyens ne font pas consensus et, en particulier, la sobriété en matière d'utilisation de l'avion, ce qui ne signifie pas nécessairement une forme de décroissance. Le terme de « sobriété » n'est pas aussi scandaleux qu'il n'y paraît. En effet, un des constats de la mission d'information que j'avais présidée sur les biocarburants est le futur déficit énergétique, sachant que la consommation totale de pétrole ne sera jamais compensée par les énergies nouvelles. Comment allons-nous gérer ce déficit pour les générations futures ?

Le deuxième aspect de mon propos concerne l'aménagement du territoire et plus particulièrement le sous-amendement proposé par le rapporteur. En tant qu'habitant de la métropole de Lyon, je devrais être contre ce sous-amendement. En effet, son application devrait poser un certain nombre de problèmes aux aérodromes de deuxième et troisième catégories qui risquent d'être désertés par des compagnies qui ne les utiliseront plus. Les entreprises tendent à quitter les zones rurales pour se rapprocher des métropoles, afin de bénéficier de leurs infrastructures, TGV, axes autoroutiers et aéroports. La question de la politique d'aménagement du territoire se pose. Contrairement à notre collègue Ronan Dantec, je pense que le dispositif proposé aura des conséquences. Nous avons intérêt à faire en sorte que l'activité économique reste la mieux répartie sur l'ensemble de notre territoire. Afin d'être en phase avec l'ensemble des représentants des commissaires de mon groupe politique, je propose donc que l'on s'abstienne sur cet amendement, car tous ne partagent pas ma position.

Mon troisième et dernier point concerne la biodiversité. En effet, outre les initiatives visant une réduction des émissions de CO2, la réflexion sur les modes de transport doit également intégrer l'impact sur la biodiversité. Il semble que le transport par câble et le transport par avion constituent les modes de transport ayant le moins d'impact sur la biodiversité.

M. Alexandre Basquin. - Le secteur aérien est un secteur extrêmement structurant pour notre territoire national, mais aussi pour l'aménagement de nombreux territoires au sein même de notre territoire national. Ce secteur représente 100 000 emplois directs et 300 000 emplois indirects, ce qui n'est pas négligeable. Je pense qu'il aurait fallu insister davantage dans votre exposé, avec force et volonté, sur le besoin criant d'investissement public en direction de la filière aéronautique, notamment en matière de recherche, au regard des objectifs de décarbonation. Même si les constructeurs réalisent déjà des efforts considérables afin de respecter leurs engagements, il est apparu lors des auditions préparatoires que vous avez organisées que des investissements publics plus importants seraient bénéfiques.

Je regrette que le « chiffon rouge » de la TSBA soit agité, car il s'agit d'une ressource substantielle qui peut participer à l'effort collectif de manière substantielle. Comme l'a signalé notre collègue Ronan Dantec, la France n'est pas le pays qui taxe le plus en ce domaine. Elle se situe même loin derrière l'Allemagne. Or, un alignement sur le taux allemand rapporterait 2,5 milliards d'euros de recettes. En dépit d'un taux supérieur à celui appliqué en France, il n'apparait pas que la fréquentation et les activités des aéroports allemands, anglais ou néerlandais comme Francfort, Londres ou Amsterdam, n'aient été affectées.

M. Philippe Tabarot. - Deux taxes en deux ans, c'est considérable pour le secteur aérien, comme cela a été rappelé par le rapporteur. Je soutiendrai les amendements de la commission. Je voterai également bien sûr en faveur du sous-amendement déposé par Stéphane Demilly, identique à celui de Vincent Capo-Canellas, dont je salue le travail qu'il accomplit sur ce secteur complexe, car, d'une part, cette initiative tend à réduire les effets pervers de la taxe et, d'autre part, permet de répartir l'effort de manière beaucoup plus juste que l'amendement du gouvernement.

Je souhaite évoquer les compagnies low cost qui seront directement ou indirectement impactées par cette taxe. En dépit des nombreux griefs qui leur sont adressés par un certain nombre de nos concitoyens, ces compagnies ont permis de créer de l'emploi, de développer des territoires et de permettre à des Français qui n'en ont pas toujours les moyens de découvrir de nombreuses destinations européennes, voire mondiales. L'augmentation de la TSBA aura également des impacts sur les aéroports français.

Enfin, s'agissant du produit de la taxe, je rappelle que pour moitié, elle n'est pas fléchée sur le secteur des transports alors qu'elle est préemptée sur ce secteur. Je déposerai donc des amendements visant à ce qu'une part des recettes puisse revenir à l'Agence de Financement des Infrastructures de transports de France (Afit France), dont les crédits devraient être réduits de 700 millions à 800 millions d'euros cette année. Il me semble également essentiel qu'une partie des recettes soit utilisée afin de décarboner le transport aérien. Me ralliant aux propos de notre collègue Gilbert-Luc Devinaz, notre collègue Ronan Dantec apparait pessimiste quant à la possibilité de décarboner le transport aérien.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - En réponse à notre collègue Saïd Omar Oili, l'amendement proposé permet d'éviter une quadruplication de la TSBA concernant les vols vers l'Outre-mer. Le doublement me semble largement suffisant.

S'agissant des différentes questions soulevées par notre collègue Ronan Dantec, l'exonération de TSBA des lignes d'aménagement du territoire ou des lignes vers les DOM-TOM par rapport aux autres lignes poserait un problème de compatibilité avec le droit de l'Union européenne. Nous étudierons ce point dans le cadre de l'amendement qui sera déposé.

Concernant les carburants d'aviation durables, il faut raison garder. S'il est vrai qu'il n'existe pas de modèle économique aujourd'hui, en l'absence de quantité, demain la quantité créera le modèle économique. J'en prends pour preuve l'anecdote suivante. Il y a 25 ans, j'ai créé à l'Assemblée nationale le premier groupe d'études sur les biocarburants, en dépit de l'incompréhension de certains de mes collègues, affirmant leur inefficacité. Le carburant E10, qui contient jusqu'à 10 % d'agroéthanol, est devenu le carburant le plus vendu en France, tandis que le carburant E85 qui contient entre 60 % et 85 % de bioéthanol, a vu ses ventes exploser. Un modèle économique peut exister, sous réserve qu'il y ait une demande et une offre, adaptées.

En réponse à notre collègue Gilbert-Luc Devinaz, les biocarburants fonctionnent et sont utiles même si, d'une part, ils ne pourront pas remplacer le kérosène et l'ensemble des carburants automobiles et, d'autre part, ils doivent être exploités tout en préservant l'affectation des sols de notre Terre dont la vocation première est de nourrir la planète. L'utilité des biocarburants commande de maintenir le montant prévu initialement au niveau du CORAC afin de soutenir la décarbonation.

Notre collègue Alexandre Basquin a mentionné l'agitation d'un « chiffon rouge », mais, ainsi que l'a sous-entendu notre collègue Gilbert-Luc Devinaz, l'ensemble des acteurs du secteur aérien nous ont confié ne pas avoir été consultés. Cette taxe leur a été imposée sans aucune étude d'impact et sans aucune consultation, ce qui est pour le moins surprenant !

Cher collègue Alexandre Basquin, vous avez fait référence à l'exemple allemand, qui ne me semble justement pas pertinent car l'augmentation des taxes en Allemagne a, en définitive, entraîné une baisse du trafic. Le secteur aérien allemand connaît des difficultés économiques en raison d'une surtaxation.

Enfin, notre collègue Philippe Tabarot a mis en évidence un point essentiel, celui de la démocratisation de l'accès au transport aérien. Il est effectivement crucial de veiller à ce que ce mode de transport ne devienne pas accessible uniquement aux seules personnes fortunées en raison de surtaxes aux effets d'éviction sur les catégories les plus modestes.

M. Vincent Capo-Canellas. - Je remercie le président Longeot d'avoir invité un membre de la commission des finances ainsi que le rapporteur pour sa présentation extrêmement riche. Les débats montrent que les enjeux sont nombreux. Le rapporteur a évoqué à plusieurs reprises la modernisation du contrôle aérien, sujet sur lequel j'ai commis différents rapports, dont le dernier, en date du 2 octobre 2024, porte sur les protocoles sociaux, l'organisation du travail des personnels de la DGAC et la performance du contrôle aérien français. Il est essentiel que la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) mette en oeuvre ce qui est prévu dans le protocole. Le coût est de 100 millions d'euros par an, à horizon 2027, lorsque toutes les mesures seront mises en oeuvre. La DSNA doit entreprendre sa modernisation en raison des enjeux liés à la décarbonation. 7 % à 8 % des émissions pourraient être éliminées si le contrôle aérien atteignait son meilleur niveau.

S'agissant des clearances, je partage l'avis du rapporteur. Il est choquant que dans la fonction publique, on puisse ne pas effectuer le travail pour lequel on est censé être présent, ce qui pose aussi des questions de sécurité.

Concernant la rationalisation du réseau d'implantation de la DSNA et sa modernisation, la dette technique due au vieillissement des installations de base, a été oubliée au profit de la modernisation numérique et des grands programmes tels que Foreflight, ou Coflight. La DSNA propose une modernisation et une rationalisation de son réseau, mission difficile à accomplir, car elle nécessitera une concertation territoriale approfondie, un dialogue social et du temps. On dénombre 80 tours. Leur réfection se déroulera sur les 40 prochaines années à raison de deux tours par an.

Par ailleurs, je partage les propos du rapporteur sur le CORAC et tiens à souligner le paradoxe du transport aérien de devoir être décarboné avec une réduction des moyens apportés par l'État pour le faire. Je rappelle que c'est rentable parce que l'État s'y retrouve.

Quant au sujet majeur qui est au coeur de nos débats d'aujourd'hui, la taxe de solidarité sur les billets d'avion, je souhaite apporter quelques précisions. Tout d'abord, le trafic intérieur n'a pas retrouvé son niveau de 2019, en s'établissant actuellement à 74 % du trafic. En outre, les conflits et enjeux diplomatiques dans certaines régions du monde telles que l'Asie, conduisent à des baisses localisées de trafic.

La TSBA soulève plusieurs difficultés, comme l'a clairement indiqué le rapporteur. Premièrement, il n'existe aucune étude d'impact. 340 millions d'euros au total sont perçus au titre de la TSBA ; le gouvernement propose de collecter 1 milliard d'euros supplémentaires en augmentant la taxe, dont 850 millions d'euros concernent l'aviation de ligne et 150 millions d'euros, l'aviation d'affaires. Or la taxe collecte moins de 1 million d'euros sur l'aviation d'affaires à ce jour. Se fixer un objectif de collecter 150 millions d'euros n'est pas réaliste. C'est une taxe de rendement sans retour vers les transports.

Quant à la question des CAD, j'ai déposé un amendement que j'ai discuté avec le Gouvernement afin de définir la meilleure formulation permettant son adoption, car il est voté depuis deux ou trois ans par le Sénat. Or le rapporteur et moi-même souhaitons la mise en oeuvre d'un crédit d'impôt sur les CAD. Nous pensons avoir trouvé un point d'équilibre. La critique selon laquelle « on taxe et on ne décarbone pas » a conduit le Gouvernement à admettre qu'il fallait au moins ouvrir un chemin et créer un crédit d'impôt sur les CAD. Cet amendement présente certains défauts, dont celui d'être très cantonné, mais il a le mérite d'exister et pourra être amélioré. J'espère qu'il sera voté. Le Gouvernement a annoncé donner un avis favorable.

S'agissant du modèle économique potentiel, j'y crois, comme notre collègue Gilbert-Luc Devinaz qui a présidé la mission d'information sur le développement d'une filière de biocarburants, carburants synthétiques durables et hydrogène vert. Ainsi que l'a souligné le rapporteur, la création du marché permettra au modèle économique d'émerger.

Quant à la taxe, j'identifie deux points à corriger. Le premier, que j'ai précédemment abordé est l'aviation d'affaires pour laquelle elle était dépourvue de sens. Elle revenait à tuer la base fiscale. S'il n'y a plus d'entreprise, il n'y aurait d'ailleurs plus de vols sanitaires opérés par des sociétés françaises. On était arrivé au-delà du seuil de douleur qui détruisait les entreprises. Il convient de l'encadrer tout en trouvant le bon étiage, c'est-à-dire celui qui permette de maintenir une activité économique et l'emploi, y compris celui en région, parce que l'aviation d'affaires ne représente pas uniquement un problème parisien. Aussi, je propose de tripler la taxe actuelle.

Concernant le problème de la TSBA, je propose, par un sous-amendement, de doubler la taxe existante, mais pas au-delà, pour les classes économiques, pour la catégorie 1, que sont les vols intérieurs, y compris ultramarins, et l'Europe, pour deux raisons. Tout d'abord, il serait paradoxal que la démocratisation du transport aérien soit mise à mal. Ensuite, je rappelle que le modèle économique en France est celui du low cost. La desserte de nos territoires se fait très majoritairement par les compagnies low cost. Or une augmentation trop élevée de la taxe sur les vols intérieurs de la classe économique risque de conduire à la fermeture de nombreuses lignes et corrélativement à la destruction d'emplois. Une nouvelle fois, il convient de déterminer le bon étiage s'agissant des vols des classes économiques. Réduire l'augmentation de la taxe sur les classes économiques devrait permettre de maintenir la desserte de nos propres territoires.

Un dernier mot enfin sur l'augmentation du prix. Lorsque les transporteurs aériens ont augmenté leur prix face à la hausse du prix des carburants, cette répercussion était généralisée, car l'ensemble des transporteurs étaient concernés. La capacité des transporteurs à augmenter leurs prix est différente dans l'hypothèse de l'augmentation de la taxe, car c'est un dispositif français et non mondial. Les prix seraient donc augmentés en France et pas ailleurs. En outre, la taxe serait payée deux fois pour les allers-retours nationaux, au premier décollage, pour aller de Perpignan à Pau, par exemple, puis une seconde fois, au retour. Il convient également de garder à l'esprit la résistance au prix.

M. Jean-François Longeot, président. - Je vous propose d'examiner les amendements du rapporteur.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis. - Comme dirait le président dans un merveilleux oxymore, nous proposons de « baisser l'augmentation » de la taxe dans le sous-amendement n°  I-2256. Les tarifs de la taxe proposés à la baisse par ce sous-amendement à l'amendement n° I-2076 du Gouvernement, pour les destinations européennes ou assimilées, sont de 5,30 € pour la catégorie normale, 30 € avec services additionnels, 120 € pour les avions d'affaires avec turbopropulseur et 240 € pour les avions d'affaires avec turboréacteur.

S'agissant des destinations intermédiaires, les tarifs de la taxe de 15 € et 80 € respectivement pour les catégories normales et avec services additionnels, correspondant à la proposition gouvernementale, sont conservés. Les tarifs pour catégories de service des avions d'affaires avec turbopropulseur et ou turboréacteur sont revus à la baisse, en s'établissant respectivement à 350 € et 530 € pour ces destinations intermédiaires.

Enfin, concernant les destinations lointaines, les tarifs de la taxe de 40 € et 120 €, respectivement pour la catégorie de service normale et avec services additionnels, sont inchangés, à la différence de ceux des avions d'affaires avec turbopropulseur et ou turboréacteur, réduits respectivement à 550 € et 1 200 €, afin de sauver l'aviation d'affaires.

Quant à l'amendement n°  II-252, il concerne le CORAC que j'ai évoqué précédemment. Il propose de relever le soutien apporté par l'État à la filière aéronautique à la hauteur de la trajectoire annoncée par le Président de la République en juin 2023. Ce dernier s'était engagé à ce que l'État abonde le CORAC de 300 millions d'euros par an d'ici 2027. Toutefois, le projet de loi de finances ne prévoit qu'un montant de 230 millions d'euros. Le présent amendement vise donc à augmenter ce montant de 70 millions d'euros afin de respecter l'engagement pris en 2023 et maintenir ainsi les ambitions de décarbonation du secteur aérien.

La commission adopte le sous-amendement n° I-2256 ainsi que l'amendement n° II-252.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports aériens de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous le bénéfice de l'adoption de ses amendements.

Crédits « Transports routiers »
(Mercredi 27 novembre 2024)

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports routiers. - Monsieur le Président, chers collègues, je suis heureux de vous retrouver ce matin pour vous présenter les principales orientations de mon rapport pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers dans le PLF pour 2025.

Je précise d'emblée que cet exercice s'est inscrit dans un cadre budgétaire très particulier, qui m'a conduit à devoir prioriser certains combats à travers mes amendements. Cette stratégie a payé s'agissant du versement mobilité. Les trois amendements que vous avez adoptés la semaine dernière, sur proposition de Philippe Tabarot et moi-même, devraient en outre faire l'objet d'un avis, sinon de sagesse, au moins favorable, de la commission des finances, ce dont je me réjouis !

J'en viens au coeur de mon propos, que j'entamerai en abordant la baisse, brutale et inédite, des capacités de financement de l'Afit France proposée par le PLF pour 2025. Ce PLF marque en effet un retournement s'agissant des recettes de l'agence, qui s'établiront à 3,7 Mds€ l'année prochaine, soit un affaissement de l'ordre de 900 M€ par rapport à l'année 2024. Si ce niveau de recettes s'inscrit dans une tendance à la hausse par rapport à la LFI pour 2023, il s'agit pourtant bien d'une rupture avec la dynamique impulsée, il y a un an et demi, à la suite de la publication du rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) et de l'annonce de l'ambitieux plan d'avenir pour les transports par le Gouvernement.

À cette situation s'ajoute l'incertitude structurelle - dénoncée chaque année par notre commission - pesant sur les ressources de l'agence, que l'instauration de la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance cette année n'a pas résorbée.

Dans ce contexte, les dépenses de l'agence seront nécessairement revues à la baisse l'année prochaine, bien que le Gouvernement n'ait pas encore précisé comment l'enveloppe serait ventilée entre les différents modes de transport.

Une chose est sûre : le plan vélo et marche 2023-2027 fera partie des « victimes » de ce contexte budgétaire, puisqu'il ne bénéficiera d'aucune autorisation d'engagement en 2025. Si l'on ajoute à cela la fonte des crédits du Fonds vert (-1,5 Md€) et les économies réalisées sur les dotations des collectivités territoriales, le risque d'une mise à l'arrêt des projets locaux en faveur des mobilités actives est bien réel. Les 400 collectivités territoriales qui avaient candidaté au septième appel à projets « Aménagements cyclables » lancé fin 2023 sont restées sans réponse de l'État : l'appel à projets a été gelé en 2024 et le Gouvernement confirme que les lauréats ne seront pas désignés.

Sur ce sujet, je vous soumettrai un amendement DEVDUR.3 allouant 105 M€ à ce plan l'année prochaine pour permettre la désignation des lauréats du septième appel à projets « Aménagements cyclables » ; je suis convaincu que c'est une mesure de bon sens. Je souligne que 400 collectivités ont mobilisé des moyens humains, techniques et financiers significatifs pour déposer leur candidature.

Afin d'atténuer l'« à-coup » budgétaire porté par le PLF pour 2025 à l'Afit France, la commission (à l'initiative de Philippe Tabarot et moi-même) a adopté un amendement la semaine dernière pour diminuer de moitié la baisse du plafond de TICPE de l'agence pour l'année prochaine et j'espère qu'il connaîtra le même succès en séance publique.

Surtout, je considère que le PLF pour 2025 achève de démontrer les limites d'un pilotage annuel - voire infra-annuel - pour financer les investissements dans les infrastructures de transports, qui s'inscrivent par nature dans le temps long.

Dès lors, la conférence nationale sur le financement des mobilités, annoncée pour le début d'année prochaine, revêt une importance majeure et il est capital que le Parlement y soit étroitement associé. J'espère que cet événement ne constitue pas un simple élément de langage de la part du Gouvernement pour repousser encore la remise à plat du modèle de financement des transports, que notre commission appelle de ses voeux depuis des années. Aussi, pour donner toutes les chances à cette conférence de se concrétiser, je souhaite que nous amorcions dès aujourd'hui la réflexion. Plusieurs pistes de financement me semblent devoir être mises à l'ordre du jour de cette conférence. J'en citerai quelques-unes : d'abord, l'évolution du versement mobilité - les trois amendements que nous avons adoptés la semaine dernière (et que j'ai évoqués au début de mon propos) vont dans ce sens, j'y reviendrai. Il faut maintenant confirmer l'essai en séance publique et dans la suite de la navette parlementaire !

Ensuite, le fléchage d'une part du produit issu des ventes aux enchères des quotas carbone (ETS) vers les transports, comme le Sénat l'avait soutenu lors de l'examen de la LFI pour 2024 ; je note d'ailleurs que la commission des finances a redéposé cet amendement cette année.

Puis, j'ai eu l'occasion de m'exprimer à ce sujet la semaine dernière, mais il me semblerait judicieux que cette conférence replace dans le débat la piste d'une généralisation de la possibilité, pour les régions, de lever l'écotaxe. Il serait logique - et vertueux, selon un principe d'utilisateur-payeur - que les externalités négatives induites par le trafic de poids lourds puissent être mises au profit du financement des modes décarbonés ou de la transition écologique des infrastructures, pour lesquels les besoins sont massifs.

Enfin, n'omettons pas l'instauration d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 5,5 % pour les transports collectifs, ainsi que la commission le porte depuis de nombreuses années.

Surtout, il me semble indispensable que cette conférence traite la question de l'avenir des concessions autoroutières, qui laisse entrevoir de multiples pistes de recettes pour les transports. Le traitement des investissements de seconde génération devrait être abordé : il s'agit d'opérations d'investissement qui n'ont pas été réalisées par les SCA alors même qu'elles ont déjà été financées par le produit des péages. Le rapport d'information d'octobre 2024 de la commission des finances sur la préparation de l'échéance des concessions préconise de recenser ces investissements, d'en évaluer le montant et, pour ceux qui ne seraient plus pertinents et qui généreraient donc un avantage financier indu pour les SCA, de les orienter vers des investissements de remplacement en faveur de la transition écologique. Je souscris totalement à cette proposition et souhaite qu'elle nourrisse la réflexion en vue de la conférence de financement. Pour ce faire, je vous proposerai un amendement n°  II-284 visant à demander à l'État une étude pour approfondir cette question.

Il faudra également que la conférence mette sur la table les différentes options en débat pour l'après-concession et leurs implications en termes de financement des infrastructures de transport sur le long terme et de répartition des risques.

En lien avec cette question des autoroutes, je souhaite que nous soyons vigilants sur les moyens de l'Autorité de régulation des transports (ART), de manière à assurer sa capacité à agir et nous éclairer en toute indépendance sur les nombreux chantiers qui sont devant nous. Je pense par exemple à la définition du « bon état » des biens restitués - qui nécessite encore un affinement, notamment pour fixer les critères concernant les ouvrages d'art nécessitant des travaux de réhabilitation - à l'identification des investissements de seconde génération et au paramétrage des futurs contrats concessifs, si ce modèle devait être reconduit.

Or, le projet de loi portant dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (Ddadue), qui sera examiné prochainement par l'Assemblée nationale avant d'être transmis au Sénat, propose de confier à l'ART de nouvelles missions en matière de contrôle des données routières numériques. Cette piste va dans le sens d'une plus grande rationalisation des compétences, en proposant la mise en place d'un cadre régulatoire unifié et cohérent en matière de services numériques de mobilité. Néanmoins, si ce transfert est confirmé par le Parlement, nous devrons veiller à ce qu'il s'accompagne d'un redéploiement en conséquence des moyens de l'autorité. Surtout, pour mettre le régulateur à l'abri des aléas budgétaires, il serait opportun d'envisager de lui allouer une ressource dédiée, par exemple via la fiscalité affectée. L'ART possédait d'ailleurs une ressource dédiée à sa création. Notre commission serait fondée à s'approprier cette piste de travail.

J'en viens à présent à la question de l'entretien des infrastructures routières. Si on peut se réjouir de la stabilité des moyens dédiés à l'entretien du réseau routier national non concédé (RRNNC) dans le PLF pour 2025 par rapport à 2024 (1 Md€), il ne semble pas encore suffire à inverser la spirale de dégradation du réseau. Je ne vous proposerai néanmoins pas d'amendement cette année sur ce sujet, car je souhaite qu'il fasse l'objet d'un travail en profondeur lors de la prochaine conférence nationale de financement. En effet, le changement climatique, dont nous voyons déjà les effets, ne fera qu'aggraver la dégradation de ce réseau et amplifier d'autant les coûts d'entretien. On ne peut donc se contenter d'un remède « palliatif » consistant à demander une enveloppe supplémentaire lors de chaque examen budgétaire, nous avons besoin d'identifier des ressources pérennes susceptibles d'être fléchées vers l'entretien du réseau routier de l'État.

S'agissant de l'entretien du réseau routier des départements et des communes, en revanche, j'identifie un fort risque dans le contexte budgétaire actuel que la route constitue comme souvent une variable d'ajustement. Or, les besoins sont colossaux : selon le dernier rapport de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales, les départements ont consacré 4,7 Md€ à leur voirie en 2023 et les communes de moins de 3 500 habitants y ont consacré 3,8 Md€. Pour cette raison, Philippe Tabarot et moi-même vous avons soumis un amendement, la semaine dernière, que vous avez adopté, pour maintenir l'affectation d'une fraction du produit de la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance (TEITLD) aux communes et à leurs groupements exerçant la compétence voirie ainsi qu'aux départements.

J'en viens à l'entretien des ouvrages d'art, sujet que notre commission a particulièrement à coeur. Le Programme national Ponts (PNP) a permis de recenser et remettre un carnet de santé aux communes pour 40 523 ponts. Je salue en outre l'ouverture de 20 M€ supplémentaires pour le PNP Travaux, décidée en loi de finances de fin de gestion pour 2023, qui a permis de porter son enveloppe à 55 M€. Si ces crédits sont censés permettre de couvrir les besoins en 2025, le Cerema indique que des moyens supplémentaires pourraient s'avérer nécessaires en fin d'année prochaine, compte tenu de contraintes qui pèsent sur ses recettes et ses dépenses. Louis-Jean de Nicolaÿ et moi-même vous donnons donc rendez-vous dans un an pour examiner la situation lors de l'examen de la loi de finances de fin de gestion pour 2025.

En revanche, au-delà de 2025, un prolongement et un redimensionnement du PNP sera nécessaire sur le volet Travaux. Le Cerema estime le coût de remise en état des ouvrages des 31 500 communes des PNP 1 et 2 à plus de 3 Md€, dont 1,3 pour les ouvrages les plus dégradés (classés 4), et 730 M€ rien que pour ceux nécessitant une mise en sécurité immédiate liée à un problème de structure.

Le Cerema estime à 40 M€ par an, à compter de 2026, l'enveloppe nécessaire pour traiter ces ouvrages dans les dix prochaines années. Je souhaite que cette problématique soit également mise sur la table lors de la conférence nationale de financement, de même que celle du financement de l'entretien des 9 480 ponts de rétablissement des collectivités territoriales, qui doivent faire l'objet de conventions de gestion avec l'État et ses opérateurs, en application de la loi dite « Didier » de 2014.

J'en arrive à la question du financement des AOM, qui sont face à un véritable mur d'investissements.

La décarbonation du secteur des transports - qui représente 30 % des émissions de CO2 dans notre pays - de même que le déploiement des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) rendent nécessaire un choc d'offre en matière de transports collectifs. Or, le déploiement des Serm, ne fait toujours l'objet d'aucune garantie financière. Il est urgent que la conférence de financement, qui aurait dû avoir lieu avant le 30 juin 2024, puisse se tenir.

Les régions seront fortement impliquées dans le déploiement des Serm, ainsi que dans celui du plan national de cars express annoncé par le Gouvernement, qui nécessitera des investissements en matériel, l'adaptation du réseau interurbain et des dépenses de fonctionnement. Or, alors même que leur rôle de chef de file des mobilités avait été consacré par la LOM, les régions ne disposent toujours d'aucune ressource dédiée pour mettre en oeuvre leur compétence mobilité. Philippe Tabarot et moi-même vous avons donc proposé un amendement la semaine dernière visant à instituer un VM régional, que vous avez adopté, ce dont je me félicite.

S'agissant des AOM locales hors Île-de-France, elles disposent de peu de marges de manoeuvre pour lever le VM, nombre d'entre elles étant déjà au taux plafond. Le Gart indique en effet que 90 % des AOM de plus de 200 000 habitants n'ont plus aucune marge pour augmenter le taux applicable. Par conséquent, et dans un souci d'équité territoriale avec IDFM, Philippe Tabarot et moi-même vous avons proposé mercredi dernier - avec succès - de relever de 0,2 % le plafond de VM pour les agglomérations ayant un projet de Serm labellisé.

On ne saurait évoquer les problèmes de financement des mobilités sans se pencher sur le sort des zones peu denses. Or, depuis la prise de compétence en 2021, il semble que seule une cinquantaine de communautés de communes aient instauré le VM. Ce chiffre découle en partie des critères trop restrictifs fixés par la loi pour lever le VM, cette possibilité étant conditionnée à l'organisation de services réguliers de transport public de personnes. Or, la mise en place de tels services est rarement pertinente en zone peu dense, le nombre de voyageurs n'y étant généralement pas suffisant pour assurer la rentabilité de l'offre. D'autres solutions y sont plus adaptées, comme le covoiturage, l'autopartage et les mobilités actives. Malheureusement, l'impossibilité de lever le VM freine, de fait, le lancement de ce type de projets dans de nombreux territoires ruraux.

C'est pour répondre à ces lacunes que vous avez adopté la semaine dernière, sur ma proposition et celle de Philippe Tabarot, un amendement visant à assouplir les conditions pour lever le VM, au profit des zones peu denses. J'ajouterai que permettre à ces AOM de financer leurs projets de mobilité sera la condition de réussite du plan national des cars express, qui ne saurait irriguer efficacement les territoires qu'en reposant sur la multimodalité, l'intermodalité et une connexion fine des centres et des périphéries.

Il me semble enfin indispensable d'évoquer la question des AOM qui ne disposent pas de bases fiscales suffisantes pour lever le VM. Nous avions introduit une mesure dans la LOM à ce sujet, qui n'avait malheureusement pas survécu à la navette parlementaire. Néanmoins, Philippe Tabarot et moi-même avons rectifié l'amendement sur le VM régional que nous vous avons présenté la semaine dernière afin de permettre aux régions d'attribuer une partie de cette nouvelle recette aux AOM des zones peu denses, qu'il s'agisse de communautés de communes AOM ou de régions étant AOM par substitution... c'est une réelle avancée pour lutter contre les zones blanches de la mobilité !

J'en termine avec le dernier axe de mon propos : la nécessité de maintenir les efforts en faveur du verdissement du parc automobile.

Tout d'abord, je salue le renforcement du malus automobile proposé par le PLF pour 2025, qui va dans le sens d'une plus grande sobriété du parc de véhicules. On a entendu dire par les constructeurs automobiles que cette évolution reviendrait à taxer 80 % du parc d'ici 2027 : cette projection me semble en réalité très fragile, car elle ne prend pas en compte le verdissement du parc qui continuera à progresser d'ici cette échéance.

Surtout, le renforcement du malus au poids me semble une avancée pour orienter les consommateurs - et donc les constructeurs - vers des modèles de véhicules plus légers et plus sobres pour l'environnement. Depuis les années 1960, le poids des véhicules n'a cessé de progresser pour atteindre près de 1 300 kg en 2007. Or, toute augmentation du poids des véhicules conduit à un cercle vicieux, car il faut alors renforcer la motorisation, les pneus, les équipements de sécurité, etc. Des chercheurs ont ainsi démontré que l'ajout de 100 kg d'équipements conduit en fait à un accroissement du poids de 200 kg.

Dès lors, il me semble que nous devons adopter une stratégie pour inciter les constructeurs, y compris pour les véhicules électriques, à produire des véhicules plus légers, mais aussi moins puissants. Le rapport poids / puissance est en effet un élément clé de l'efficacité énergétique des véhicules.

Le développement des véhicules intermédiaires (Veli) devrait dès lors être encouragé : il s'agit de véhicules routiers légers, situés entre le vélo et la petite voiture électrique, et qui présentent de réels avantages environnementaux (à travers une économie de ressources et une efficacité énergétique renforcée), en plus d'offrir une solution de déplacement peu onéreuse et adaptée aux trajets du quotidien, notamment en zone peu ou moyennement dense. De nombreux chercheurs recommandent d'intégrer ces véhicules, qui sont le « chaînon manquant » entre le vélo et la voiture électrique, aux dispositifs d'aide à l'acquisition. Pour l'instant, les aides au verdissement encouragent en effet l'électrification, mais très peu la sobriété du parc. Je vous proposerai tout à l'heure un amendement n°  II-283 en ce sens.

En outre, je veux saluer les efforts réalisés depuis 2022 dans le cadre de l'appel à projets « eXtreme Défi » de l'Ademe qui vise à soutenir la production de véhicules intermédiaires. En trois ans, ce dispositif aura permis la réalisation de 65 concepts de véhicules, la réalisation de près de 200 véhicules prototypes et un début d'industrialisation pour quatre premiers projets : c'est une avancée pour la montée en charge de cette filière industrielle !

Je terminerai en évoquant un sujet majeur : la baisse drastique de l'enveloppe dédiée aux aides à l'acquisition de véhicules propres prévue par le PLF pour 2025. Elle passe en effet de 1,5 Md€ en 2024 à 970 M€ l'année prochaine, soit une baisse de 530 M€. Si on prend en compte la surexécution des crédits constatée en 2024 du fait notamment du succès inespéré du leasing social, cette baisse dépasse même les 800 M€.

Cette diminution intervient alors que, afin d'être en mesure de respecter l'interdiction de la vente des véhicules thermiques neufs dans l'Union européenne en 2035, la part de marché du véhicule électrique en France devrait passer de 17 % à 25 % d'ici l'année prochaine ; la marche paraît vraiment très haute, surtout en affaiblissant ainsi les incitations au verdissement...

Je m'inquiète également de l'annonce de la suppression prochaine de la prime à la conversion (PAC), moins d'un an après l'adoption définitive de la loi d'initiative sénatoriale visant à favoriser le réemploi des véhicules destinés à la PAC au profit de services de mobilité solidaire et avant même qu'elle ait pu produire ses effets, faute de publication du décret d'application. Ce dispositif avait en outre fait ses preuves d'un point de vue environnemental : en 2022, il avait permis d'éviter 35 tonnes d'émissions de particules fines et 120 000 tonnes d'émissions de CO2.

Au total, ces évolutions risquent de pénaliser encore les ménages les plus modestes, pour lesquels l'accès à la mobilité électrique est loin d'être acquis.

Dans un autre contexte, je vous aurais proposé des amendements visant à revenir sur les coupes budgétaires proposées dans ce secteur par le PLF. Mais je suis réaliste et j'ai bien compris que de tels amendements n'auraient aucune chance d'être adoptés cette année...

À titre personnel, et avec mon groupe politique, je continuerai à faire pression sur le Gouvernement pour que nous ne suivions pas la même pente que l'Allemagne, où la vente de véhicules électriques s'est effondrée à la suite d'une contraction brutale des aides au verdissement il y a un an. Il doit s'agir d'un point de vigilance absolu pour notre commission.

Je vous proposerai néanmoins deux amendements visant à renforcer l'efficacité sociale et environnementale des aides au verdissement, à travers d'une part le rétablissement de l'éligibilité au bonus écologique des véhicules électriques d'occasion, dans un souci de démocratisation du véhicule électrique et pour tenir compte du dynamisme actuel de ce marché. D'autre part à travers une barémisation de l'écoscore (ou score environnemental du véhicule) mis en place en 2024 par l'Ademe pour conditionner l'éligibilité des véhicules propres aux aides à l'acquisition, afin qu'il permette de moduler le niveau de subvention selon le degré de sobriété des véhicules, en prenant notamment en compte leur poids. Je souhaite également que cet outil, qui a largement fait ses preuves cette année pour les véhicules légers, puisse être étendu aux véhicules lourds, comme le propose l'Ademe, en commençant par le secteur des autobus et autocars qui sont soumis à une intense concurrence venant des pays asiatiques.

Pour terminer, je vous proposerai d'émettre un avis favorable sur les crédits relatifs aux transports routiers sous le bénéfice des amendements que je vous propose.

M. Philippe Tabarot, président. - Merci, Monsieur le rapporteur pour cette présentation.

M. Rémy Pointereau. - Je remercie le rapporteur pour son exposé, mais un certain nombre de choses ne me satisfont que moyennement.

Le malus qui sera mis en place au 1er janvier 2025, a priori sur les véhicules de plus de 1 500 kg, s'appliquera t-il uniquement sur les véhicules thermiques ou les véhicules hybrides rechargeables y seront-ils eux aussi soumis ? Le poids de ces véhicules dépasse celui des voitures thermiques, les batteries étant très lourdes : ce malus pénalise donc les véhicules hybrides rechargeables, ce qui semble contradictoire avec l'objectif de verdissement du parc. Avec une telle mesure, nous risquons d'achever véritablement la filière automobile française et européenne, déjà en pleine crise et concurrencée par les véhicules électriques importés de Chine via les ports néerlandais. Ce malus, dont le montant pourrait aller jusqu'à 15 000 euros, pénaliserait particulièrement les territoires ruraux qui font face à un problème de densité des bornes électriques. Peut-on encore pénaliser les territoires ruraux, déjà grandement en difficulté, en attaquant de nouveau leur pouvoir d'achat ? J'aimerais avoir des informations complémentaires sur ce malus, sans quoi je ne pourrais pas voter le rapport. J'ai cru comprendre qu'un accord pouvait potentiellement être conclu pour exonérer encore pendant deux ans les voitures électriques hybrides rechargeables, qu'en est-il ?

M. Philippe Tabarot, président. - La parole est à Monsieur le rapporteur, qui répondra à la question du sénateur Pointereau et présentera ensuite ses quatre amendements. Nous évoquerons après cela des rectifications aux amendements adoptés la semaine dernière, mais qui n'en modifient pas l'esprit ou la teneur.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Cher collègue, j'ai été très attentif à ce sujet.

Je n'ai pas déposé d'amendement pour aggraver le malus « au poids », bien que la situation l'exigerait. Je soutiens les véhicules intermédiaires parce que leur efficacité énergétique est absolument considérable, elle est sans commune mesure avec celles des autres véhicules, dont le poids mort est maintenant extrêmement élevé. Pour rappel, le poids mort d'un véhicule est sa capacité de charge totale rapportée au poids du passager qu'il transporte. Et j'ajouterai qu'on ne peut pas se satisfaire de rouler en voiture électrique sans prendre en compte la question de la consommation électrique dudit véhicule, qui varie dans des ratios extrêmement élevés. La consommation électrique des véhicules intermédiaires, que je défends, est inférieure à 10 kilowattheures pour 100 km, alors que les véhicules électriques les plus lourds dépassent les 20 kilowattheures pour 100 km.

L'article 8 du PLF vise à restreindre l'abattement de malus au poids dont bénéficient les véhicules hybrides non rechargeables (les véhicules sans batterie intégrant un système de recharge au freinage) aux plus performants d'entre eux : c'est une distinction essentielle. Un amendement du Gouvernement - adopté en séance publique ce matin - a proposé de repousser à 2027 la mise en oeuvre effective de cette mesure. Ces véhicules hybrides non rechargeables permettent de répondre à deux problèmes : l'alourdissement de la masse morte des véhicules et le fait que les utilisateurs ne rechargeaient pas assez souvent leur véhicule.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

M. Philippe Tabarot, président. - La majorité sénatoriale partage une grande partie des constats - mais pas tous - de notre collègue Olivier Jacquin. J'invite donc les membres de mon groupe à voter ce rapport afin de le récompenser pour sa sobriété quant au nombre et à la teneur des amendements qu'il propose. En ce qui concerne les amendements, je propose à mes collègues de voter les amendements nos  II-283 et II-284 et contre les amendements DEVDUR.3 et DEVDUR.4, dans le contexte budgétaire tendu que nous connaissons, notamment. Je propose donc au rapporteur de présenter ses amendements.

Article 42

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - S'agissant de l'amendement DEVDUR.3, il a pour objectif d'augmenter les crédits alloués à l'action 44 « Transports collectifs » du programme 203 « Infrastructures et services de transport » à hauteur de 105 M€ en AE au bénéfice du plan « vélo et marche » 2023-2027. Comme évoqué dans mon rapport, cet amendement vise à assurer l'achèvement en 2025 du septième appel à projets « Aménagement cyclable » abandonné au milieu du gué en 2024. Il permet donc de répondre aux 400 collectivités territoriales que je vous mentionnais tout à l'heure.

L'amendement DEVDUR.3 n'est pas adopté.

L'amendement DEVDUR.4 vise à allouer 10 M€ supplémentaires à l'action 3 « Aide à l'acquisition de véhicules propres » du programme 174 « Énergie, climat et après-mine » afin de renforcer le dispositif du score environnemental du véhicule ou « écoscore », élaboré par l'Ademe et mis en place en 2024. L'écoscore constitue désormais l'un des critères d'éligibilité aux trois dispositifs d'aide à l'acquisition de véhicules propres : le bonus écologique, la prime à la conversion et le leasing social. Il évalue les émissions de CO2 liées à la fabrication du véhicule à travers plusieurs composantes. Cet amendement vise à faire évoluer l'écoscore à travers plusieurs éléments. Premièrement, une barémisation de cet outil grâce à la création de plusieurs strates d'écoscore conditionnant les niveaux de subventions possibles via les aides à l'acquisition de véhicules propres. Deuxièmement, une prise en compte dans ce barème du poids des véhicules afin de subventionner plus fortement les véhicules électriques légers en raison de leur sobriété que les véhicules électriques lourds. Enfin, il propose une extension de l'écoscore aux véhicules lourds, à commencer par les bus et les autocars, secteur dans lequel la concurrence asiatique est particulièrement forte.

L'amendement DEVDUR.4 n'est pas adopté.

M. Ronan Dantec. - Je me permets de manifester mon étonnement car il me semble que cet amendement représentait une avancée consensuelle sur l'écoscore.

M. Philippe Tabarot, président. - Je ne voterai pas pour cet amendement car je suis en désaccord avec certains des critères proposés par notre collègue. Même si je reconnais que le poids du véhicule peut être un critère pertinent pour certains dispositifs, y compris fiscaux, je ne souscris pas totalement à ce que prévoit cet amendement, nous ne souscrivons pas totalement à la philosophie de cette proposition.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - J'ai cru comprendre que cet amendement, tant sur la question de l'écoscore que sur les critères du poids du véhicule et de l'efficacité énergétique, posait problème à certains constructeurs automobiles quant à l'évolution de leurs gammes. C'est dommage car il s'agissait, selon moi, d'un des amendements les plus intéressants et originaux parmi ceux que j'ai proposés ce matin.

L'amendement n°  II-283 vise à élargir le champ d'application des aides au verdissement des véhicules. Il s'agit d'une part de rétablir l'éligibilité des véhicules électriques d'occasion au bonus écologique, cette mesure ayant été supprimée en cours d'année, et d'autre part, de rendre éligible à l'ensemble des aides à l'acquisition des véhicules propres les véhicules dits intermédiaires.

L'amendement n° II-283 est adopté à l'unanimité.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Je vous remercie pour l'adoption de l'amendement n° II-283. S'agissant de l'amendement n° II-284, le rapport d'information n° 65 (2024-2025) de la commission des finances sur la préparation de l'échéance des contrats de concessions autoroutières publié le 23 octobre 2024 met en avant les enjeux financiers soulevés par les investissements dits « de seconde génération » des sociétés concessionnaires d'autoroute qui constituent les investissements prévus par les contrats et financés par les recettes tarifaires, mais n'ayant pas été réalisés par les SCA. Il recommande que les services de l'État approfondissent donc le travail de recensement de ces investissements entamé par l'Autorité de régulation des transports et en évalue précisément le montant financier. Ce rapport préconise également qu'un travail soit réalisé par l'État pour identifier les investissements qui demeurent pertinents et pour ceux qui ne le seraient plus, et qui généreraient donc un avantage financier injustifié pour les SCA, qu'un travail soit entrepris pour les remplacer par d'autres, en lien avec la transition écologique. Le présent amendement vise donc à solliciter une étude sur ces différents points par les services de l'État. Pour ce faire, il alloue 50 000 euros supplémentaires en 2025 au programme 203 « Infrastructures de transport », action 47 « Fonctions supports » en AE et en CP.

M. Philippe Tabarot, président. - Je propose à mes collègues de voter cet amendement.

L'amendement n° II-284 est adopté à l'unanimité.

M. Hervé Gillé. - Nous allons nous abstenir symboliquement de voter ce rapport. Nous saluons l'honnêteté intellectuelle du rapporteur. La démarche de négociation menée avec la majorité sénatoriale est certes pertinente, comme toujours, mais il n'est reste pas moins que la différence entre les attentes de notre groupe sur la question des transports routiers, d'une part, et les constats du rapporteur et ses propositions d'amendements d'autre part est trop importante.

M. Alexandre Basquin. - Le groupe CRCE-K s'abstiendra aussi de manière symbolique.

M. Philippe Tabarot, président. - Je vous demande, chers collègues, d'adopter ce rapport car dans sa grande majorité, il établit des constats partagés par notre commission. Je tiens encore à remercier le rapporteur pour sa sobriété quant au nombre d'amendements déposés et à leur coût. Notre collaboration sur les avis transports a été très positive et transpartisane.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports routiers de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous le bénéfice de l'adoption de ses amendements.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous le bénéfice de l'adoption de ses amendements.

M. Philippe Tabarot, président. - Je vous propose de revenir sur certains amendements adoptés la semaine dernière par la commission. Par souci de transparence, Olivier Jacquin et moi-même tenions à vous informer a posteriori que nous avions procédé, avec l'accord du Président Longeot, à des rectifications sur trois amendements que nous avons proposés la semaine dernière et que vous aviez adoptés. Il ne s'est bien sûr pas agi d'en modifier l'esprit ou la teneur, mais simplement de procéder à des ajustements paramétriques, qui pourrait favoriser leur adoption en séance et ainsi d'assurer une meilleure mise en valeur des travaux de notre commission.

Nous avons tout d'abord modifié l'amendement n° I-582 qui propose la création d'un versement mobilité perçu par les régions. La version rectifiée prévoit un dispositif à destination des territoires ruraux : une fraction de 10 % de ce VM régional sera attribuée à l'organisation de services de mobilité locaux dans les territoires des communautés de communes en zone peu dense. En outre, ce VM régional ne s'appliquera qu'en France métropolitaine. Enfin cette rectification mentionne que les représentants des employeurs disposeront d'au moins 50 % des sièges au sein du Comité des partenaires régional qui sera consulté lors des modifications des taux de ce VM. Nous avons ainsi arraché de haute lutte un avis de sagesse de la commission des finances sur cet amendement ainsi modifié et le Gouvernement y sera très sûrement favorable, ce qui est donc de très bon augure pour la suite de la navette parlementaire.

La deuxième rectification concerne l'amendement n° I-586 qui proposait d'affecter un douzième du produit de la taxe sur les infrastructures de transport de longue distance aux communes et groupements de communes exerçant la compétence voirie. La commission des finances avait émis un avis favorable sur cet amendement sous réserve de sa rectification. Dans un esprit de compromis, nous avons donc procédé à une rectification qui le rend identique à un amendement du rapporteur général qui propose d'affecter également un douzième du produit de cette taxe aux départements.

Cette modification revient, de fait, à amputer de 50 millions les crédits alloués à l'Afit France. Afin d'éviter cet effet de bord, nous avons donc également modifié l'amendement n° I-585, et c'est le sens de la troisième rectification intervenue : nous vous proposons donc de rehausser l'affectation de TICPE de l'agence en fléchant 50 millions d'euros supplémentaires pour celle-ci.

Par ailleurs, comme je vous l'ai indiqué la semaine passée, je souhaite qu'une hausse du tarif de solidarité sur les billets d'avion soit affectée à l'Afit France : il ne m'était pas possible de le faire à l'époque car le Gouvernement n'avait pas encore déposé son amendement visant à rehausser cette taxe. J'envisage donc de rectifier une nouvelle fois l'amendement n° I-585 sur les moyens de l'Afit France lorsque le dispositif gouvernemental aura été, le cas échéant, adopté et modifié par le Sénat, notamment à l'initiative de nos collègues Demilly et Capo-Canellas. Cette rectification proposera d'allouer une part de produit supplémentaire de cette taxe à l'Afit France.

Plus globalement, l'objectif de cette démarche est d'avoir un meilleur fléchage de la taxation du secteur vers le secteur des transports, et notamment en direction de l'Afit France.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Je précise que ces rectifications ont été réalisées en étroite collaboration, c'est un travail presque transpartisan que nous menons ensemble depuis plusieurs semaines. Comme l'a dit le sénateur Tabarot, nous avons procédé à ces modifications pour permettre aux amendements de prospérer en séance et ils vont toujours dans le sens que nous vous avions indiqué la semaine dernière.

M. Hervé Gillé. - Nous soutenons tous cette proposition, mais je vous alerte sur le fait que la partie n'est pas finie, il faudra oeuvrer pour que le VM régional soit adopté dans les conditions définies par notre commission.

M. Philippe Tabarot, président. - Je rencontre cet après-midi le ministre du budget pour évoquer avec lui ce sujet et faire en sorte que ce VM régional soit bel et bien instauré.

M. Ronan Dantec. - C'est pourquoi il est nécessaire de pousser en faveur de l'augmentation de la TSBA !

Crédits « Transports ferroviaires, fluviaux et maritimes »
(Mercredi 20 novembre 2024)

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - En préambule, je tiens à saluer mon collègue Olivier Jacquin, rapporteur pour avis sur les transports routiers. Nous avons mené plusieurs auditions de concert et nous vous présenterons des amendements communs. Je remercie également Franck Dhersin et Jacques Fernique pour leur présence lors des auditions préparatoires.

Je suis heureux de vous présenter les principales orientations de mon rapport pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes du PLF pour 2025.

Je souhaite en premier lieu aborder la question cruciale du financement des infrastructures de transports. Sur ce point, ma philosophie est claire : les transports sont pris dans un mouvement de tenaille intenable. D'un côté, la pression fiscale s'accroît : contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, contribution exceptionnelle sur le résultat d'exploitation des grandes entreprises de transport maritime, hausse souhaitée par le Gouvernement du tarif de solidarité sur les billets d'avion... La situation dégradée des finances publiques oblige, je le regrette, à faire preuve de créativité budgétaire. De l'autre côté, alors que ces recettes sont assises sur le secteur des transports, elles ne sont pas fléchées vers leur financement. Pire encore, un mouvement de « fuite des recettes » s'annonce. J'en veux pour preuve la diminution de 700 millions d'euros d'affectation de la TICPE à l'Agence de financement des infrastructures de France (Afit France) dans le PLF pour 2025 par rapport au PLF pour 2024. L'agence a d'ailleurs déjà subi une baisse de près de 400 millions d'euros de fiscalité affectée en cours d'année par rapport à ce qui était prévu en loi de finances initiale pour 2024, alors que nous nous réjouissions il y a un an du montant de son budget, qui devait être de 4,6 milliards d'euros. Pour 2025, le PLF prévoit un montant de recettes totales de 3,7 milliards d'euros. Un tel niveau correspond au scénario de « cadrage budgétaire » décrit par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), et non au scénario de « planification écologique », qui est pourtant la feuille de route du Gouvernement en la matière. Ce mouvement de ciseau, entre hausse de la pression fiscale et désaffectation des recettes, est, à long terme, contradictoire avec la nécessité d'assurer le report modal et la décarbonation des mobilités. Je vous propose donc un amendement, signé également par Olivier Jacquin, tendant à limiter la diminution du montant de TICPE affecté à l'Afit France, en fléchant 350 millions d'euros supplémentaires vers le budget de l'agence par rapport aux prévisions qui figurent dans le PLF pour 2025. Concernant également l'Afit France, il me paraît indispensable, si le Gouvernement dépose de nouveau un amendement sur le tarif de solidarité sur les billets d'avion, qu'une partie des recettes ainsi dégagées soit fléchée vers l'agence. Celle-ci est d'ailleurs d'ores et déjà destinataire d'une fraction de cette taxe.

De telles corrections ne suffiront malheureusement pas à renverser complètement la situation, ce qui me paraît impossible vu la situation dégradée de nos finances publiques. Si 2025 peut faire figure « d'année blanche » compte tenu du contexte budgétaire contraint, elle doit rester une exception. Je vous rappelle à ce propos que le ministre chargé des transports a annoncé devant notre commission que se tiendrait début 2025 une conférence nationale sur le financement des mobilités. Cet événement doit permettre de dégager de nouvelles recettes durables affectées en faveur des infrastructures de transport. Je pense en particulier aux recettes issues du marché carbone européen (SEQE-UE) assises notamment sur le secteur des transports et, à plus long terme, à une part du produit des péages autoroutiers à la fin des concessions d'autoroutes en cours. Cette conférence devra permettre de préciser l'origine, la ventilation et le rythme d'engagement des 100 milliards d'euros de crédits du « Plan de nouvelle donne ferroviaire » présenté par Élisabeth Borne, alors Première ministre, en février 2023.

J'en viens maintenant aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM), qui assurent le financement des transports du quotidien et des transports régionaux. Elles n'ont actuellement pas les moyens de faire face au mur d'investissements nécessaires pour déployer les services express régionaux métropolitains (Serm). D'ailleurs, au cours de l'examen de la loi Serm, la commission n'avait pas manqué de s'inquiéter de l'absence de garantie sur le financement de leurs dépenses d'investissement et de fonctionnement. C'est la raison pour laquelle nous avions introduit dans le texte le principe de l'organisation d'une conférence nationale de financement sur les Serm, qui se fait attendre. J'estime donc impératif de tenir au plus vite cette conférence, qui aurait dû avoir lieu avant le 30 juin dernier. Les régions, qui sont AOM pour les transports ferroviaires régionaux conventionnés, seront particulièrement impliquées dans ces projets de Serm. Or, elles ne disposent d'aucune ressource dédiée pour exercer leur compétence mobilité, ce qui les contraint à la mettre en oeuvre sur leur dotation générale de fonctionnement.

Face à ce double constat, je vous propose deux amendements, communs avec mon collègue rapporteur pour avis Olivier Jacquin, afin, en premier lieu, d'augmenter le taux plafond de versement mobilité (VM) de 0,2 point à destination des AOM qui ont obtenu la labellisation d'un projet de Serm et, en second lieu, de créer une part régionale de VM à hauteur de 0,2 point pour permettre aux régions de participer au financement des Serm et faire face à la hausse des péages ferroviaires. Ces deux évolutions seraient conditionnées à une consultation des organisations des employeurs et ne concerneraient que les entreprises de plus de 50 salariés. Elles seraient en outre liées à une hausse significative de l'offre de service : il ne s'agit pas de demander aux entreprises de financer la gratuité des transports publics. Ces dispositifs participeraient également d'une logique d'équité territoriale, puisque les AOM d'Île-de-France ont obtenu de pouvoir augmenter le taux de VM perçu afin d'assurer le financement du Grand-Paris-Express.

Je soutiendrai également deux amendements que vous présentera mon collègue rapporteur Olivier Jacquin. Le premier vise à assouplir les conditions requises pour lever le VM au profit des AOM situées en zone peu dense en leur permettant de prélever le VM pour l'organisation d'un panel de services de transport plus large que les transports collectifs réguliers, prenant en compte le transport à la demande et les mobilités partagées et actives. Le second tend à allouer aux communes et groupements de communes exerçant la compétence voirie une fraction égale à un douzième du produit prévisionnel de la taxe sur les infrastructures de longue distance. Cela devait représenter environ 50 millions d'euros.

En outre, l'exonération fiscale et sociale du bénéfice de la prise en charge par l'employeur du coût de l'abonnement de transport en commun de ses employés pour la fraction qui excède son obligation légale (50 %) arrive à terme. Afin que les salariés du secteur privé puissent bénéficier de ce niveau de prise en charge, au même titre que les salariés du secteur public, je vous propose, de concert avec Olivier Jacquin, de prolonger ce dispositif incitatif. Ce ne serait qu'une possibilité ouverte à l'employeur, non une obligation.

J'en arrive à la question spécifique du transport ferroviaire. Le réseau devrait bénéficier de financements pour sa régénération et sa modernisation à hauteur de 3,3 milliards d'euros en 2025. Cependant, les investissements en faveur de la régénération du réseau ne permettront pas de renverser la poursuite de son vieillissement. Quant à ceux en faveur de sa modernisation, ils sont encore trop limités, que ce soit pour déployer le système de gestion du trafic européen (dit ERTMS) ou la commande centralisée du réseau (CCR). Sans financements nouveaux, SNCF Réseau n'achèvera en effet la mise en place de la CCR qu'en 2070. Il existe aujourd'hui un consensus sur le fait qu'environ 1,5 milliard d'euros supplémentaires sont nécessaires a minima pour régénérer et moderniser le réseau. La révision du contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État pourrait être donc l'occasion de définir une nouvelle trajectoire d'investissements en faveur du réseau, rompant avec le scénario actuel qui, en l'état, va conduire à un vieillissement du réseau entraînant une baisse de performance et une chute du trafic incompatibles avec l'objectif d'augmentation de la part modale du transport ferroviaire. Dans le cas contraire, comme l'a mis en avant l'Autorité de régulation des transports, SNCF Réseau entrerait dans une spirale négative de paupérisation, liée à la diminution du trafic et donc de ses recettes. Alors que les péages ferroviaires, déjà les plus élevés d'Europe, ne pourront représenter qu'une partie des moyens du gestionnaire d'infrastructure, dégager de nouvelles recettes en faveur du réseau est un impératif. Nous en revenons toujours à cette question ! Les entreprises de transport ferroviaire subissent en effet une augmentation des péages ferroviaires versés au gestionnaire d'infrastructure. Les redevances versées à SNCF Réseau devraient ainsi augmenter de 6 % entre 2024 et 2025 pour le transport ferroviaire conventionné. Pour le TGV, cette hausse est de 2,5 %. Ces hausses prévues en 2025 s'inscrivent dans une dynamique durable. Or, cette situation fragilise le processus d'ouverture à la concurrence du secteur, car elle grève la rentabilité des services. En outre, nous voyons poindre une nouvelle difficulté. Dans un contexte de péages ferroviaires élevés, les nouveaux entrants se positionnent uniquement sur les marchés à haut potentiel. Or, SNCF Voyageurs assure des dessertes de TGV rentables, mais également des dessertes déficitaires, entre lesquelles existe une forme de péréquation. C'est une forme de délégation de service public qui n'en porte pas le nom. Il y a donc un risque de dégradation du service sur les lignes les moins rentables puisque SNCF Voyageurs sera concurrencé sur les segments rentables et seul sur les segments déficitaires. En clair, on privatiserait les profits et on socialiserait les pertes. Afin de prévenir une telle situation qui serait inacceptable, il me paraît donc opportun d'étudier les pistes suivantes : moduler les péages ferroviaires en fonction de la rentabilité des sillons ou attribuer les sillons par lots comprenant des dessertes plus ou moins rentables. La commission devrait d'ailleurs consacrer prochainement une table ronde pour dresser un bilan d'étape sur l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire, afin, notamment, d'étudier cette question.

Ce processus est d'ailleurs supervisé par un régulateur indépendant, l'Autorité de régulation des transports (ART). Je crains que sa dotation de fonctionnement, de 15 millions d'euros, puisse l'empêcher d'assumer convenablement l'ensemble de ses missions. Je souhaite donc alerter le Gouvernement sur cette situation.

La question du fret ferroviaire ne peut être éludée. L'année 2023 a été marquée par des difficultés conjoncturelles prononcées (grèves liées à la réforme des retraites, effondrement du tunnel de la Maurienne), une chute de 17 % du trafic et, malheureusement, une forme de report modal inversé vers le transport routier. Si l'année 2024 devrait cependant amorcer un début de retour à la normale, l'atteinte de l'objectif d'un doublement de la part modale du fret ferroviaire introduit par la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 d'ici 2030 n'est pas encore en vue. J'accueille donc avec satisfaction le passage de l'aide à l'exploitation des services de wagons isolés de 70 millions d'euros en 2024 à 100 millions d'euros en 2025. Cependant, je regrette que cette hausse ait été pour partie faite au détriment de l'aide au démarrage de nouveaux services, dont le montant diminue de 16 millions d'euros en 2025. Je ne peux que prendre acte du déploiement du plan de discontinuité de fret SNCF. Sur ce dossier, cette solution était la « moins mauvaise », compte tenu du risque de faillite de l'entreprise dans l'hypothèse d'une absence d'accord avec la Commission européenne. La faillite, cela implique aussi le licenciement de 5 000 cheminots ; le plan de discontinuité préserve l'emploi et ne prévoit que le transfert de 500 cheminots vers SNCF Voyageurs. Toutes les parties prenantes le savent. Je suis donc quelque peu contrarié de voir ce sujet instrumentalisé dans le dialogue social par certains syndicats afin d'obtenir des concessions salariales avant Noël. Il va peut-être falloir reprendre l'examen de certaines propositions de loi sénatoriales déposées sur l'exercice du droit de grève dans les transports... Demain on peut entrevoir que certains syndicats appellent une « grève d'échauffement » qui coûtera 20 millions d'euros à la SNCF.

J'en viens à présent au transport fluvial et maritime. Tout d'abord, les jeux Olympiques et Paralympiques ont mis en valeur le fort potentiel environnemental du transport fluvial : par-delà la cérémonie d'ouverture de juillet dernier qui a marqué les esprits, le recours au transport fluvial pendant les chantiers olympiques a permis d'éviter la circulation de près de 50 000 camions. Or la transition écologique de la flotte fluviale est un vrai défi financier, qu'il s'agisse des dépenses liées au déploiement de bornes électriques ou du coût particulièrement élevé des bateaux « zéro émission ». Nous veillerons à ce que ces sujets soient au coeur de la stratégie nationale fluviale, lancée par le précédent Gouvernement en février 2024 et attendue pour le début de l'année prochaine.

Autre sujet de préoccupation : le financement des investissements de Voies navigables de France (VNF) en faveur du réseau fluvial, dont le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) avait pointé la dégradation préoccupante liée à des décennies de sous-investissements. À ce titre, la baisse significative des fonds de concours de l'Afit France dédiés à l'entretien et au développement du réseau fluvial interroge, tant les besoins sont considérables : le ministre en a convenu lors de son audition. Nous devrons donc être attentifs à ce que la conférence nationale sur le financement des mobilités, annoncée pour 2025, aborde cette question.

S'agissant de l'ambitieux chantier de la modernisation du réseau fluvial dans lequel VNF s'est engagé, dans la mesure où les gains de productivité attendus de l'automatisation de certains ouvrages ne produiront pas leurs effets avant quelques années, le Contrat d'objectifs et de performance (COP) conclu entre l'opérateur et l'État pour la période 2020-2029 (et révisé en décembre 2023) prévoit une stabilisation du plafond d'emplois de VNF jusqu'en 2026. Je m'en étais félicité devant vous il y a un an, car cette mesure intervient après plusieurs années de réductions d'effectifs particulièrement sévères, avec - 15 % en dix ans. Cette pause de la baisse des ETP est non seulement bienvenue pour aider VNF à mener de front ses différentes missions ; mais aussi nécessaire pour un climat social apaisé dans l'établissement.

Compte tenu de ces enjeux, je veux croire que l'accord conclu l'année dernière entre VNF et l'État ne sera pas remis en cause dans le contexte budgétaire complexe que nous connaissons...

S'agissant des ports maritimes, nous devrons veiller à deux sujets majeurs dans le cadre de la conférence de financement qui s'annonce. Le premier porte sur les enjeux d'attractivité des ports français. J'ai évoqué, lors de l'audition du ministre Durovray, la décision récente de grands armateurs de fret de ne plus desservir Marseille et Le Havre avec leurs porte-conteneurs géants, ce qui soulève des inquiétudes au regard des objectifs ambitieux fixés par la Stratégie nationale portuaire de 2021 en termes de gains de part de marché. La conférence de financement devra aborder les questions relatives à la fiabilité des infrastructures portuaires, au renforcement de leur dimension logistique et intermodale et à leur interconnexion avec l'arrière-pays, qui sont autant d'éléments de leur attractivité. D'autre part, s'agissant des défis du financement de la décarbonation des ports, le règlement européen sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs « Afir » de septembre 2023, que j'ai évoqué à l'occasion du précédent PLF, suppose le déploiement de 42 branchements électriques à quai d'ici 2030 dans cinq grands ports maritimes. Les branchements réalisés ou programmés à ce jour ont mobilisé ou mobiliseront pour une large part des crédits du Plan de relance et des financements dans le cadre des CPER 2023-2027. Il faudra encore trouver des financements pour huit branchements complémentaires entre 2028 et 2030, nous serons attentifs à cette question.

J'en viens, pour finir, au transport maritime. Les crédits inscrits dans le PLF pour 2025 traduisent tout d'abord une contraction des mécanismes de soutien à l'emploi maritime. D'une part, la prise en charge des cotisations salariales pour les entreprises d'armement maritime, mise en place en 2022 pour trois ans, s'interrompt à la fin de cette année, conformément au calendrier annoncé. D'autre part, comme le prévoit l'article 7 du PLFSS, les exonérations de charges patronales seront désormais réservées aux entreprises de transport de passagers, comme c'était le cas avant la loi « Leroy » de 2016. Ces mesures s'inscrivent, nous ne le savons que trop, dans un contexte budgétaire sur lequel je ne reviendrai pas. Je déplore toutefois qu'elles interviennent à un moment où les armateurs, confrontés comme nous le savons à une intense concurrence internationale, font face à d'importantes pressions sur les coûts, en raison notamment du poids financier de la transition écologique du secteur. J'ai plus particulièrement été alerté sur les risques que font courir ces dispositions au pavillon français dans les secteurs des navires câbliers, qui ont un rôle majeur en termes de souveraineté, et des navires dédiés aux énergies marines renouvelables (EMR), marché émergent et prometteur pour les entreprises françaises. J'ai du reste, à titre personnel, cosigné un amendement au PLFSS pour étendre l'exonération des charges patronales à ces deux catégories d'armateurs, pour lesquelles les enjeux de compétitivité sont particulièrement sensibles.

Ensuite, l'article 12 du PLF institue une contribution exceptionnelle dont seront redevables, au cours de deux exercices, certaines entreprises de transport maritime qui bénéficient du régime de taxation au tonnage. Je rappelle que le seuil élevé de chiffre d'affaires, 1 milliard d'euros, défini par l'article 12 cible, de fait, le groupe CMA-CGM, fleuron français du secteur. Je tiens sur ce point à exprimer deux convictions fortes. D'une part, la participation des entreprises de transport maritime à l'effort de redressement des comptes publics ne pose pas de difficulté particulière, mais cette contribution doit rester exceptionnelle et ne doit pas fragiliser nos armateurs sur le marché mondial qui est particulièrement concurrentiel. D'autre part, cette contribution exceptionnelle ne doit pas être le prétexte à une remise en cause de la taxe au tonnage, qui est un élément décisif de la protection du pavillon français : ce dispositif a été mis en place en 2003 pour que nos armateurs relèvent du même régime fiscal que 86 % de la flotte mondiale. Or la taxe au tonnage a fait l'objet, dans le débat politique des derniers mois, de propositions qui me paraissent pour le moins contestables, voire risquées. Je suggère donc que notre commission ait une position ferme sur ce point.

Pour terminer, je vous proposerai d'émettre un avis favorable sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci pour cet exposé.

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture ». - Je me réjouis de me retrouver parmi vous. Philippe Tabarot a présenté hier en commission des finances les grandes lignes de son rapport de ce matin et je tiens à dire que nous sommes tout à fait en phase sur les conclusions que l'on peut tirer des crédits qui nous sont proposés. Comme vous le savez, le budget pour 2025 est très contraint parce qu'il a été élaboré dans des délais très courts par le Gouvernement et qu'il y a une impérieuse nécessité de redresser la situation des finances publiques : malheureusement et logiquement, le budget transport et mobilité n'échappe pas à cet impératif.

La commission des finances rejoint ce qui a été dit par votre rapporteur. Ainsi, l'Afit France, cette année, pourra simplement honorer les « coups partis » l'année dernière mais ne pourra pas engager de nouvelles actions, ce qui soulève de vraies questions, notamment pour les CPER. En effet, l'État s'était engagé à apporter 9 milliards aux CPER, mais on ne voit pas bien comment cela pourrait se faire. À cela s'ajoutera, on le voit bien, le fait que les collectivités, au premier rang desquelles les régions, seront elles-mêmes très certainement amenées à faire tout autant d'efforts financiers, sinon plus. On peut donc se poser des questions, pour ne pas dire s'inquiéter, sur l'avenir des CPER.

Les crédits du programme 203 qui portent, pour simplifier, sur l'entretien, sont censés assurer la continuité du service public ; cependant, comme ils sont maintenus sans prise en compte de l'inflation, on peut là aussi s'interroger. En revanche, les crédits consacrés à la régénération des réseaux ne sont pas gelés : c'est la moindre des choses, compte tenu de l'état calamiteux - et je pèse mes mots - de nos infrastructures routières ou, pire encore, ferroviaires. Comme l'a rappelé votre rapporteur, le président de l'ART n'hésite pas à évoquer un risque de paupérisation et je rappelle souvent que c'est quasiment un miracle qu'il n'y ait eu qu'un seul accident de type Brétigny-sur-Orge dans l'histoire du ferroviaire, tellement l'état du réseau est inquiétant.

Plus généralement, je rejoins toutes les possibilités évoquées par le rapporteur sur la nécessité de dégager des moyens supplémentaires. Je rappelle que la commission des finances et son rapporteur général déposeront un amendement visant à affecter une partie des crédits carbone à l'Afit France. Cet amendement avait été adopté par le Sénat l'année dernière mais n'avait pas résisté à l'application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

De plus, pour ma part, j'ai l'intention de reprendre des amendements relatifs à l'amélioration du versement mobilité avec en particulier la possibilité - que nous avions adoptée lors de la discussion de la loi d'orientation des mobilités (LOM)- pour les AOM en milieu rural de mettre en place un versement mobilité à taux réduit ; en effet, il est évident que donner aux intercommunalités la compétence mobilité sans leur donner les moyens de l'exercer ne sert pas à grand-chose et c'est d'ailleurs pour cette raison que le Sénat n'avait pas pu accepter que la commission mixte paritaire conclusive sur la LOM soit conclusive.

Enfin, puisque Philippe Tabarot a eu la gentillesse de rappeler mes récentes propositions, je pense que, s'agissant de la régénération des infrastructures, il faudra envisager de nouvelles solutions ; par exemple nous avons proposé qu'à terme, quand on mettra en place de nouvelles concessions avec les sociétés d'autoroutes, il faudra qu'une partie des recettes de péages soit affectée à la régénération de l'ensemble des réseaux routiers et ferroviaires.

M. Jacques Fernique- Entre la conférence de financement des mobilités et la conférence sur les Serm, il y a de quoi organiser de très longs débats et remplir nos réunions plénières. Le constat a été fait et, s'agissant du fameux plan d'avenir pour les transports, le temps passe vite mais les données concrètes, significatives et structurantes n'ont pas véritablement évolué. L'Autorité de régulation des transports (ART) a bien défini la problématique, en rappelant, le scénario tendanciel - qui se caractériserait par la paupérisation et le délabrement du réseau et des conditions de trafic - et le scénario de transition écologique. En ce qui concerne le ferroviaire, nous ne sommes plus tout à fait dans le scénario tendanciel tel qu'il apparaissait en 2023 : des progrès parfois intéressants ont été accomplis mais nous sommes encore loin de la trajectoire souhaitable. C'est pourquoi il est nécessaire que ces conférences débouchent sur des résultats tangibles et ne se limitent pas à des éléments de langage, pour ne pas dire que l'on procrastine.

Si j'ai bien compris, le projet de loi de finances qui nous est proposé aurait pour conséquence des pertes en autorisations d'engagement d'environ 373 millions d'euros pour les infrastructures ferroviaires, de 201 millions d'euros pour le réseau routier et de 130 millions d'euros pour les infrastructures de transport collectif en Île-de-France. Pour le fret ferroviaire, le compte n'y est pas non plus tout à fait en raison de l'inflation.

Les propositions qui sont faites dans les amendements sur le versement mobilité (VM) prévoient un léger déplafonnement de 0,2 % mais cette proposition est nettement en deçà des demandes d'équité portées par le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) au regard du dispositif applicable en Île-de-France. Je me pose également une question : à supposer que l'on vote un tel amendement de déplafonnement, même de 0,2 %, les perspectives et les conditions sont-elles véritablement réunies pour qu'il soit définitivement adopté, y compris dans la phase sénatoriale de discussion de ce PLF ?

S'agissant de la taxe au tonnage, le sujet est un peu technique et compliqué, mais il s'agit quand même substantiellement d'une niche fiscale très importante. Je rappelle qu'à l'initiative du député Philippe Brun, l'Assemblée nationale a voté le plafonnement de celle-ci à 500 millions d'euros et, personnellement, je ne suis pas d'accord avec notre rapporteur qui estime qu'il ne faut pas toucher à cette niche fiscale.

M. Alexandre Basquin. - J'évoquerai les amendements proposés en commençant par dire que nous y souscrivons. En effet, ce sont des premiers pas qui vont dans le bon sens, en matière de TICPE, de versement mobilité et de prolongement du dispositif incitatif à la prime de transport. J'approuve particulièrement votre proposition de fléchage du versement mobilité sur le transport à la demande et la mobilité partagée car cela ne peut que favoriser notamment les zones rurales ; nous y sommes très sensibles.

En revanche, sur l'ensemble du rapport ainsi que votre avis favorable à l'adoption des crédits, nous avons, comme vous le savez, des divergences de fond ; nous nous opposerons à ce budget car nous considérons que le transport est une part importante et structurante de l'aménagement du territoire national et qu'il ne peut souffrir d'aucune coupe budgétaire.

Enfin, j'ai apprécié votre phrase « on privatise les profits et on socialise les pertes » : cela ne manque pas de sel.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - C'était dédicacé...

M. Hervé Gillé. - Je note que ce rapport, comparé à celui de l'année dernière, comporte des propositions et il est assorti d'amendements visant à améliorer la situation.

Je voudrais faire un pas de côté pour remettre en perspective une problématique majeure qu'on rencontre aujourd'hui sur ces sujets, à savoir un manque de transparence, un manque de qualité de reporting et une grande difficulté à nous permettre réellement de nous situer sur le cadencement des projets, leur niveau de réalisation et surtout les dérapages contractuels et conventionnels. C'est notamment une des problématiques majeures de l'Afit France : on n'y voit pas clair parce qu'un certain nombre de conventions sont signées et engagées mais, ensuite, il y a des positions de retrait en raison des retards qui sont pris. Par conséquent, certains engagements prévus ne sont pas nécessairement respectés. La qualité du reporting - à mon humble niveau, en tous cas - est largement insuffisante. Elle l'est plus généralement à tous les autres niveaux : quand on y regarde d'un peu plus près, sur SNCF, réseau ou autres, on constate vraiment un manque .de transparence qui nous empêche d'avoir une vision claire et objective de la situation. Je voulais vraiment le souligner car, si on veut avancer dans les années à venir, il faut améliorer ce niveau de transparence et cette qualité de reporting.

S'agissant de l'évolution du VM de + 0,2 %, c'est effectivement une bonne proposition, même si elle est insuffisante. Je voudrais tout de même m'assurer qu'il n'y aura pas d'ambiguïté, à savoir que les produits affectés seront bien dédiés au transport du quotidien et ne seront pas affectés d'une quelconque façon au niveau des grandes infrastructures : c'est un élément très important.

Je souligne par ailleurs un manque : je n'ai pas beaucoup entendu d'analyse du contrat de performance ni de mise en perspective de ce qu'il devrait être. Ce contrat est-il mis de côté ou pas ? C'est tout de même un document qui est théoriquement d'une importance majeure et sur lequel il serait politiquement souhaitable qu'on porte un regard très attentif.

Compte tenu de l'exposé et des propositions d'amendement qui ont été faites, nous allons nous abstenir sur votre rapport.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Je tiens d'abord à remercier mes collègues pour leurs interventions. Je confirme au rapporteur Hervé Maurey que nous sommes totalement en phase et je me réjouis qu'on puisse avancer sur les mêmes sujets : nous avons des combats communs à mener par la suite et nous essayons de nous y préparer dans cette année difficile que l'on peut qualifier d'« année blanche ».

Pour répondre à Jacques Fernique, je crois très fort - et peut-être pour la première fois - à cette conférence de financement. Nous l'avons souhaitée tous ensemble pour les Serm ; je l'ai indiqué au ministre chargé des transports devant vous lors d'une précédente réunion et il a repris cette idée à son compte en l'élargissant à l'ensemble du transport, ce qui me convient très bien - si tant est que nous ne revendiquons pas de « droit d'auteur » sur cette conférence. On a constaté que sur Île-de-France Mobilités, une telle initiative avait plutôt bien fonctionné puisqu'elle a déclenché tous les financements qui sont venus accompagner les projets.

Entre l'Île-de-France et les autres territoires, il y a un vrai besoin d'équité mais il faut également reconnaître qu'on ne peut pas comparer le nombre et l'importance des infrastructures livrées dans le cadre du Grand Paris avec d'autres projets.

J'aimerais qu'à terme on puisse, en vue de cette conférence, travailler tous ensemble pour préparer - d'ici février 2025 - des éléments plus en rapport avec les projets des AOM. Il serait à mon sens judicieux de différencier le versement mobilité en fonction de l'importance des projets qui sont menés par les agglomérations. Par exemple, les projets portant sur des bus ou des cars, des transports en site propre, des tramways ou métros méritent tous, à des degrés divers, un VM supplémentaire. Encore faut-il que, juridiquement, on puisse mettre en oeuvre un tel dispositif, mais ce sont des exemples de propositions qu'on pourrait porter à la conférence. D'autres propositions ont été évoquées, notamment par Hervé Maurey et Jean-François Husson : il est ainsi inadmissible que les transports ne bénéficient pas de retour sur les quotas carbone ; c'est indispensable et c'est une demande conjointe que nous devons formuler en permanence à chaque PLF ainsi qu'à chaque conférence. Une part des recettes issues du marché carbone est allouée au logement, ce dont on doit se féliciter, mais il est essentiel qu'une part revienne également aux transports. C'est pourquoi je pense que cette conférence présente un véritable intérêt : il ne s'agit pas de se laisser mener en bateau et, si tel devait être le cas, nous ferons front commun pour porter un certain nombre de sujets.

La question du fléchage des taxes est également pertinente dans le cadre de ces conférences et c'est un sujet que nous abordons souvent avec Louis Nègre. On peut estimer à environ 50 à 60 milliards l'ensemble des taxes dans le domaine des transports, mais nous n'en retrouvons même pas 20 % voire moins de 15 % : ce n'est pas normal. Bien sûr, il y a d'autres secteurs dans le pays qui ne produisent pas de richesses et qui ont besoin de la solidarité nationale, mais la situation actuelle est excessive. Une éventuelle taxe d'un milliard d'euros est proposée sur l'aérien sans qu'il ne soit rien indiqué sur son fléchage. Il me paraît juste, si cette taxe est maintenue, que la moitié de son produit puisse revenir au secteur du transport, à la fois dans le budget de l'Afit France, pour le routier et le ferroviaire ; et pour la décarbonation du transport aérien, notamment pour accompagner les efforts déployés pour fabriquer des carburants alternatifs. On ne peut pas retirer à l'Afit France 700 millions de TICPE - qui sont un produit de taxation sur les transports - de manière aussi brusque et c'est ce qui motive un de mes amendements.

Il ne s'agit pas de créer cette année de dépenses nouvelles en dépit de besoins avérés. Je rappelle que nous avons porté ensemble des amendements - avec, par exemple, 300 millions d'euros de plus pour les petites lignes il y a plusieurs années ou 100 millions d'euros de plus l'an dernier pour la modernisation du réseau - et je pense qu'il est indispensable de poursuivre ces efforts, mais nous sommes soumis à un cadre général de rigueur budgétaire. En revanche, il ne faut pas enlever encore plus de ressources censées être fléchées sur les transports : tel est le message que j'ai voulu faire passer à travers ce rapport pour avis.

La question du fonctionnement de l'Afit France est également financière. Pour faire des économies, on pense à fusionner un certain nombre d'organismes et j'ai entendu parler de la fusion possible de l'Afit France avec le Conseil d'orientation des infrastructures. Or je rappelle que l'Afit France remplit ses missions avec 4,5 équivalents temps plein. Les marges de manoeuvre restent donc limitées, d'autant qu'ils font très bien leur travail pour porter les projets dont le montant - moins de 4 milliards d'euros - est malheureusement inférieur à celui que nous aurions souhaité. En tous cas, lorsque les AOM jouent le jeu, les conventions suivent. Cependant, les restrictions budgétaires risquent d'avoir deux principales conséquences : d'une part, les conventions signées seront probablement respectées mais il n'y aura sans doute pas de nouvelles conventions ni de nouveaux projets. D'autre part, il y aura vraisemblablement un lissage des CPER pendant quelques mois, voire quelques années si les crédits venaient à ne pas augmenter suffisamment pendant les prochaines années.

Par ailleurs, je n'avais pas envie de faire porter le financement des mobilités sur les entreprises mais je n'ai pas trouvé d'autre solution que de déplafonner le versement mobilité car c'est la seule recette directement fléchée sur les transports et elle ne pourra pas être ponctionnée pour d'autres usages. Je sais qu'une augmentation de 0,2 % n'est peut-être pas suffisante mais, en tout cas, c'est une première avancée. De plus, il était injuste que les régions ne bénéficient pas d'une part de VM alors qu'on sait combien leur coûtent le transport ferroviaire et l'augmentation des péages. Notre commission joue pleinement son rôle.

Enfin, je n'aime pas entendre dire que la taxe au tonnage est une niche fiscale alors qu'elle concerne 86 % de la flotte mondiale. Souhaitez-vous que le pavillon français perde des parts de marché, que des armateurs français partent à l'étranger et qu'on ne défende CMA-CGM qui est une fierté nationale et va prendre part à l'effort national en étant lourdement taxé ? Notre pays doit, au contraire, être fier d'abriter un des plus grands groupes mondiaux de transport maritime et j'ajoute que 59 autres armateurs ne pourraient plus survivre sans la taxe au tonnage.

M. Jacques Fernique. - Je fais observer que la proposition d'amendement qui nous vient de l'Assemblée nationale vise à plafonner l'avantage possible dégagé par la taxe au tonnage en le limitant à 500 millions d'euros.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - À vouloir embêter la CMA-CGM, vous allez tuer 59 autres entreprises françaises et mettre en péril les installations portuaires.

M. Jacques Fernique. - Rappelez-vous ce que les mêmes nous disaient il y a deux ans et ce qui est fait cette année.

M. Jean-François Longeot, président. - Je rappelle que la CMA-CGM va indubitablement participer à l'effort de rigueur budgétaire. Je relève ici une manie terrible qui consiste à ne jamais s'occuper de ce qui ne marche pas mais de s'en prendre systématiquement à ce qui fonctionne bien.

M. Hervé Maurey. - Juste un mot sur le contrat de performance qui a été évoqué : nous l'avions qualifié de « mort-né » dès le départ ; le Gouvernement et la SNCF sont censés nous en présenter un nouveau, mais cela prend du temps puisque les déclarations les plus récentes du ministre indiquent que nous n'aurons rien avant le mois de juin prochain. Il faut donc faire preuve de patience.

Après l'article 31

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - S'agissant de l'amendement n°  I-582, alors même qu'elles ont le statut d'autorité organisatrice de la mobilité régionale, les régions ne disposent d'aucune ressource dédiée pour exercer leur compétence mobilité, ce qui les conduit à s'appuyer sur leur dotation générale de fonctionnement. En outre, elles font face à une forte hausse des péages ferroviaires versés au gestionnaire d'infrastructure, qui réduit d'autant plus leurs capacités financières. En l'état actuel des choses, les régions ne sont donc pas en mesure de faire face au mur d'investissements nécessaires pour renforcer l'offre de TER, d'une part, et pour déployer les services express régionaux métropolitains (Serm) prévus par la loi n° 2023-1269 du 27 décembre 2023, d'autre part. Dès lors, cet amendement propose de créer un versement mobilité régional (VMR), dont le plafond serait fixé à 0,2 point, afin de permettre aux régions de contribuer plus amplement aux politiques en faveur la décarbonation des transports et du report modal et de disposer de ressources pérennes pour ce faire. Les régions devront indiquer dans leur délibération les services de mobilité mis en place ou prévus qui justifient le taux du versement.

Les entreprises de moins de 51 salariés sont exclues du champ de ce versement mobilité régional afin d'éviter qu'il ne pénalise les petites entreprises. L'amendement prévoit également que le comité des partenaires, qui doit être institué par les AOM et qui rassemble notamment des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et des représentants des organisations syndicales de salariés, sera consulté avant toute instauration ou évolution de ce versement.

On sait que les entreprises n'adorent pas le versement en mobilité ; ce qu'elles aiment encore moins, c'est de constater qu'il n'y a pas d'offre de transport pertinente : nous proposons à cet égard la labellisation des Serm. De plus, nous précisons que les entreprises aient leur mot à dire, non pas sur le taux utilisé, mais sur les choix qui peuvent être faits, par exemple en matière de desserte de zone industrielle, à travers le comité des partenaires.

L'amendement n° I-582 est adopté.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Je vais présenter brièvement l'amendement n°  I-583 car nous en avons largement débattu. Cet amendement vise à rehausser le taux plafond de versement mobilité (VM) de 0,2 point à destination des AOM qui ont obtenu la labellisation d'un projet de Serm ; je rappelle qu'il y a aujourd'hui 24 projets labellisés en France et d'autres sont sur le point de l'être.

Pour éviter une augmentation trop importante du versement mobilité, j'ai d'abord souhaité que ce rehaussement soit une possibilité offerte aux AOM et non pas une obligation. D'autre part, je propose que seules les entreprises de plus de 51 salariés soient concernées par cette possibilité de déplafonnement et que les petites entreprises de 11 à 50 salariés soient exclues du champ de cette majoration. Ces dernières continueront à payer le versement mobilité existant.

L'amendement prévoit également que le comité des partenaires institué par les AOM, qui rassemble notamment des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et des représentants des organisations syndicales de salariés, sera consulté avant toute instauration de cette majoration.

L'amendement n° I-583 est adopté.

Après l'article 12 

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-584 concerne le renouvellement pour l'année 2025 d'une mesure que nous avons déjà votée : je sais qu'elle fonctionne même si ce n'est pas parfait et je souhaite introduire les mesures nécessaires pour l'évaluer concrètement.

À l'initiative du Sénat, la LFR pour 2022 a mis en place une incitation pour les employeurs à porter de 50 % à 75 %, sur la base du volontariat, la prise en charge des abonnements de transport public de leurs salariés, mais ce dispositif arrive à échéance à la fin de l'année 2024. Cet amendement propose donc de le prolonger d'un an. Cette mesure permettrait aussi de placer les salariés du secteur privé et de la fonction publique sur un pied d'égalité. En effet, depuis le 1er septembre 2023, la prise en charge des titres de transport des salariés de la fonction publique est fixée de façon pérenne à 75 %.

L'amendement n° I-584 est adopté.

M. Pierre Jean Rochette. - Il faut absolument que nous fassions remonter une hérésie dans le fonctionnement du VM : les entreprises Seveso, qui sont en général de grosses contributrices au VM, ne peuvent pas disposer d'arrêts de transport public dans leur environnement géographique. On les fait payer mais elles ne peuvent pas bénéficier du service : c'est réglementairement impossible. Je pense qu'il faut garder ce point à l'esprit car à chaque fois qu'on modifie les règles, ces entreprises nous font remonter cette problématique.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Je suis bien conscient de cette situation ; n'hésitez pas à nous transmettre tous ces éléments au moment de la conférence de financement. Je mentionne un cas de figure similaire : une installation Seveso, qui contribue au VM, se situe à proximité d'une infrastructure ferroviaire actuellement non exploitée entre Saint-Auban et Digne. Il est n'actuellement pas possible de rouvrir la ligne pour cette raison.

Article 33

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-585 vise à diviser par deux la baisse d'affectation de TICPE à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) en 2025 prévue par le projet de loi de finances, par rapport au niveau qui figurait en loi de finances initiale pour 2024. Le financement des infrastructures de transport répondant à une logique de temps long, il est en effet nécessaire d'éviter une baisse trop brutale des moyens de l'Afit France.

L'agence a déjà subi une diminution de près de 400 millions d'euros de fiscalité affectée en cours d'année par rapport à ce qui était prévu en loi de finances pour 2024. Pour 2025, ses recettes sont évaluées à 3,7 milliards d'euros, soit 900 millions d'euros de moins que ce qui était prévu par la loi de finances initiale pour 2024. Cet affaissement des moyens de l'Afit France s'explique principalement par une chute d'environ 700 millions d'euros du montant de TICPE affecté à l'agence pour 2025. Or, cette recette est assise en grande partie sur le secteur des transports. Cette désaffectation constitue donc une fuite des impôts payés par ce secteur vers le budget général de l'État. Ce mouvement de désaffectation de recettes est contradictoire avec la nécessité de renforcer le report modal et d'assurer la décarbonation des mobilités. La trajectoire de financement de l'Afit France pour 2025 s'inscrit en effet pour l'instant dans le scénario de « cadrage budgétaire » décrit par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), et non dans le scénario de « planification écologique », qui est pourtant la feuille de route du Gouvernement sur ce sujet. En particulier, le sous-investissement en faveur du transport ferroviaire engendre une « dette grise » insoutenable à long terme et pourrait plonger le réseau dans une spirale de « paupérisation » pointée par l'Autorité de régulation des transports.

Cet amendement vise donc à limiter la baisse de recettes de l'Afit France en revenant sur la moitié de la baisse d'affectation de TICPE à l'agence pour 2025. Cette sécurisation a minima des recettes de l'agence reste cependant encore en deçà des besoins de financement en faveur des infrastructures. Si cet amendement permet d'atténuer cette insuffisance, 2025 fera bien figure « d'année blanche » compte tenu du contexte budgétaire. Elle doit donc constituer une exception.

Je précise que cet amendement prend en compte celui qui a été déposé par mon collègue Olivier Jacquin et moi-même : il prévoit d'affecter aux communes 50 millions d'euros de taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, qui sont actuellement intégralement affectés à l'Afit France. Par conséquent, il propose de revenir sur les 400 millions d'euros de diminution d'affectation de recettes à l'Afit France et aurait pour résultat de limiter cette baisse à 350 millions d'euros en 2025 par rapport aux prévisions figurant dans le PLF initial. Il s'agit concrètement de flécher 50 millions d'euros pour les communes, en particulier pour entretenir la voirie communale. Je souligne qu'il ne s'agit pas d'une demande de crédits supplémentaires, mais de prévoir qu'on nous prive d'un montant moindre de recettes habituellement affectées aux transports.

L'amendement n° I-585 est adopté.

Après l'article 12 

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Je précise que le chemin est particulièrement difficile cette année pour élaborer notre rapport pour avis, tenaillés que nous sommes entre la très forte contrainte budgétaire et des convictions qui doivent être confirmées, même en cette année particulière. C'est pourquoi les quelques amendements que je vais vous présenter aujourd'hui sont, à mon sens, extrêmement sobres et respectueux de cette ligne de conduite. Plusieurs de ces propositions sont faites en accord avec Philippe Tabarot.

Je vous présenterai mon rapport pour avis sur les transports routiers la semaine prochaine mais le délai limite auquel sont soumis les amendements de première partie m'impose de vous soumettre d'ores et déjà mes amendements portant sur cette première partie du budget. Enfin, s'agissant de mon propos préalable, et comme l'a précisé Philippe Tabarot, vous avez entendu l'annonce des conférences de financement sur les infrastructures et les Serm : ce sera l'occasion de corriger le nouveau pacte ferroviaire ainsi que la loi d'orientation des mobilités.

L'amendement n°  I-586, présenté conjointement avec Philippe Tabarot, est tout à fait cohérent avec l'amendement précédent n° I-585. Il vise à maintenir l'allocation d'une partie du produit de la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance aux communes et à leur groupement exerçant la compétence voirie. Je rappelle que cette taxe a été instituée en LFI pour 2024 afin de sécuriser le financement des infrastructures de transport. Son produit, évalué à 600 millions d'euros, devait être intégralement versé à l'Afit France. Lors de l'examen de ce texte, le Sénat avait introduit, à l'initiative de sa commission des finances, une disposition visant à allouer aux communes dès 2024 et groupements de communes exerçant la compétence voirie ainsi qu'aux départements une fraction égale à un douzième du produit prévisionnel de cette taxe. Cela devait représenter, respectivement, 50 millions d'euros pour ces deux catégories de collectivités.

L'article 21 du projet de loi de finances pour 2025 vise à revenir sur cette mesure pour rétablir le principe d'une allocation intégrale du produit de cette taxe à l'Afit France. Or les communes font face à de lourdes dépenses pour assurer l'entretien de leur réseau routier. Il est donc essentiel de prendre des mesures pour orienter ces investissements vers le réseau routier, à l'abri des aléas budgétaires. C'est pourquoi cet amendement propose de maintenir l'allocation d'une partie du produit de cette taxe, à hauteur de 50 millions d'euros, aux communes exerçant la compétence voirie. Néanmoins, afin de ne pas réduire les recettes prévisionnelles de l'Afit France en 2025, nous proposons, par l'amendement n° I-585 qui vient d'être présenté, de rehausser de 50 millions d'euros le plafond de TICPE affecté à cette agence l'année prochaine.

M. Hervé Gillé. - Cet amendement, en liaison avec le précédent, va dans le bon sens, mais je voulais souligner une interrogation majeure qui subsiste pour les départements : ils se demandent pourquoi ils ne pourraient pas bénéficier également d'une partie de la TICPE compte tenu des engagements qu'ils remplissent. J'ajoute que les départements contractualisent souvent avec les communes et surtout avec les communautés de communes sur des fonds d'accompagnement au développement des voiries communautaires. Il est donc regrettable qu'ils soient un peu les oubliés du dispositif d'accès à ces ressources.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Cela rejoint un débat plus général dont nous allons bientôt connaître le résultat. J'ai cru comprendre que les départements, qui semblaient a priori les grandes victimes de ce projet de loi de finances, devraient s'en sortir beaucoup mieux que prévu et ce ne seront peut-être pas les collectivités les plus à plaindre. Sous réserve des différents amendements déposés et des débats que nous aurons dans l'hémicycle, la question du financement des routes eu égard à la compétence départementale dans ce domaine pourra être abordée lors de la conférence de financement en début d'année 2025.

Ceci dit, l'initiative de la proposition prévoyant 50 millions d'euros en faveur des communes revient à Olivier Jacquin : je l'ai suivie, car il me semblait logique de faire un geste en faveur des plus petites communes dans le cadre du fléchage que nous avons évoqué. En résumé, je pense que les départements s'en sortiront mieux que prévu et, de plus, la conférence de financement de février pourra peut-être prévoir des recettes dédiées à l'entretien des routes départementales.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - J'avais initialement proposé de rétablir la disposition en faveur des départements ainsi que des communes : cependant, pour les raisons qui viennent d'être mentionnées, la proposition ne concerne finalement que ces dernières.

L'amendement n° I-586 est adopté.

Après l'article 12

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - L'amendement n°  I-587, également présenté en commun avec Philippe Tabarot, vise à assouplir les conditions auxquelles sont soumises les AOM pour lever le versement mobilité (VM) afin d'en faciliter le recours dans les espaces peu denses.

Pour rappel, la possibilité de lever le VM est aujourd'hui conditionnée à l'organisation de services réguliers de transport public de personnes. Or, la mise en place de tels services est rarement pertinente en zone peu dense, le nombre de voyageurs n'y étant généralement pas suffisant pour assurer la rentabilité de l'offre. Cette situation place de nombreuses AOM situées en zone rurale dans l'impossibilité de disposer de ressources pérennes pour financer des projets de mobilité. Cet amendement vise donc à permettre aux AOM de prélever le VM pour l'organisation d'un panel de services de transport plus large que les transports collectifs réguliers, en prenant en compte le transport à la demande ainsi que les mobilités partagées et actives.

L'amendement n° I-587 est adopté.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Merci à nouveau pour votre confiance. Je tenais beaucoup à cet amendement qui corrige une injustice de la loi d'orientation des mobilités.

Après l'article 9

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.9 que je propose vise à généraliser la possibilité pour les régions de mettre en place une écocontribution sur le transport de marchandises, dite « écotaxe poids lourds ». Pour rappel, cette possibilité est conditionnée par la loi « Climat et résilience » au fait de subir des reports de trafic imputables à l'instauration d'une telle taxe sur un territoire voisin. Compte tenu, d'une part, de l'impact du trafic de poids lourd sur l'environnement et sur l'état du réseau, et d'autre part des besoins massifs liés à l'entretien du réseau routier qui seront amplifiés par le changement climatique, il me semble opportun d'aller plus loin en permettant à chaque région, sur la base du volontariat - et j'insiste sur ce point - d'instaurer une écotaxe poids lourds, comme l'ont entrepris la Collectivité européenne d'Alsace et surtout la région Grand Est qui va ainsi générer un modèle économique efficace permettant de financer la route ainsi que le ferroviaire.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Je souhaite préciser à mes collègues que contrairement aux amendements précédents, je ne partage pas l'avis d'Olivier Jacquin sur celui-là et nous nous en sommes expliqués. La question de l'écotaxe a été abordée lors de la discussion sur la loi « Climat et résilience » : nous avions souhaité offrir cette possibilité uniquement aux territoires frontaliers avec d'autres pays étrangers qui mettaient en place une telle taxe. Je tiens également à saluer le travail remarquable effectué à l'époque par Jean-Claude Anglars en tant que rapporteur sur la mise en place de cette possibilité pour la Collectivité européenne d'Alsace. J'ajoute que certains territoires se sont déjà saisis de la possibilité offerte par la loi « Climat et résilience » : il en va ainsi de la région Grand Est.

Compte tenu de ces éléments, tout en saluant les efforts de la région Grand Est, je ne souhaite pas que nous votions cet amendement ; l'ensemble des recettes susceptibles d'être perçues au titre de l'écotaxe alimenteraient un budget annexe qui serait ensuite dédié à des investissements alloués aux autres modes de transport et cette caractéristique correspond bien au mécanisme de fléchage que j'ai évoqué. Cependant, je pense qu'il serait prématuré d'adopter de nouvelles dispositions sans attendre le bilan de l'efficacité du dispositif mis en place dans le Grand Est. Je rappelle aussi que nous continuons à payer les portiques qui ont été installés il y a quelques années pour assurer la mise en place de l'écotaxe à laquelle l'ancienne ministre Ségolène Royal a ensuite renoncé.

Je ne suis pas, par principe, fermé à cette possibilité et c'est pourquoi nous l'avons incluse dans la loi « Climat et résilience » mais sous certaines conditions, notamment pour les régions frontalières. Cependant, je sais qu'elle produit des effets de bord et que son périmètre pourrait donc s'agrandir : c'est un vrai sujet à soumettre à la conférence de financement de 2025. Pour l'instant, je ne voterai pas cet amendement qui me semble prématuré.

M. Jean-François Longeot, président. - Je partage les indications de Philippe Tabarot : sans être opposé au principe de l'écotaxe, il faut prendre en compte les objections qu'il a formulées. De façon encore plus réaliste, je ne suis pas favorable à cette proposition pour plusieurs raisons. Tout d'abord, comme vous pouvez le constater, le climat social n'est pas au beau fixe en ce moment et je ne suis pas certain qu'une mesure relative à l'écotaxe puisse apaiser la situation. Deuxièmement, je pense que la suppression de l'écotaxe, qui avait été votée à l'unanimité du Parlement, a été - encore plus qu'une erreur - une faute politique grave. Qui plus est, la ministre a supprimé l'écotaxe après que tous les aménagements ont été mis en place : on était donc sûr que ça allait nous coûter très cher. Enfin, comme cela a été indiqué, la conférence sur le financement des mobilités permettra d'organiser les débats que mérite ce sujet. Je voterai donc contre cette proposition et je demande à mon groupe de faire de même.

M. Jacques Fernique. - Quelques remarques s'imposent, tout d'abord pour clarifier les choses, car certaines idées qui circulent sont à la fois cocasses et énervantes lorsqu'on les considère depuis l'Alsace. On fait comme si l'écotaxe de la Collectivité européenne d'Alsace était déjà en place et même étendue au-delà de son périmètre initial. Or ce n'est pas le cas. Je ne vais pas rappeler les divers dispositifs adoptés depuis l'amendement du député Yves Bur de 2005 qui a rendu possible l'expérimentation alsacienne, en passant par l'écotaxe votée à l'unanimité avant que Ségolène Royal ne renonce finalement à son application. La feuille de route issue de la loi sur les compétences de la Collectivité européenne d'Alsace de 2019 prévoyait une écocontribution poids lourd applicable sur le périmètre des routes de ce territoire et la mise en place de cette mesure est actuellement envisagée pour 2027. Malgré le temps qui a été consacré à la préparation et à la concertation et malgré le vote à l'unanimité des conseillers d'Alsace intervenu il y a un peu plus d'un mois, la mise en place effective de cette taxe n'est donc pas encore d'actualité. Pour la région Grand Est, une volonté politique a été exprimée mais le dispositif ne sera effectif qu'un ou deux ans après la mise en place de la taxe poids lourds que l'on appelle « R-pass » en Alsace. Nous savons que les conditions de circulation des poids lourds et de transport des marchandises en Europe nécessitent une harmonisation des outils de régulation des poids lourds et notre pays est l'un de ceux qui devra faire le plus d'efforts car notre application de la directive euro-vignette est minimale par rapport à d'autres pays. Au final, il serait intéressant que notre commission envoie un signal politique sur la nécessité d'ouvrir cette possibilité à d'autres régions que celles qui subissent des reports de trafic liés à leur position frontalière. Cela ne signifie pas pour autant que nous devons mettre en place une écotaxe dans toutes les régions dès demain matin. On pourrait ainsi faire avancer le débat, ce qui donnerait un peu plus de consistance à cette fameuse conférence de financement.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Conformément à la loi « Climat et résilience » d'août 2021, presque toutes les régions - comme Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur ou l'Occitanie - disposent d'ores et déjà de cette possibilité. Il est donc peu utile d'en ajouter, d'autant que l'expérience conduite sur nos territoires de l'est sera riche d'enseignements pour envisager de nouvelles mesures. À mon sens, on n'a toujours pas trouvé de solution pour faire payer très cher les camions étrangers, tout en préservant les transporteurs français, ce qui est notre préoccupation à tous sur nos territoires.

M. Jacques Fernique. - La solution se dégage de l'expérience menée en Allemagne et de la façon dont l'Alsace est en train de l'adapter.

M. Hervé Gillé. - Le fond du sujet, c'est l'acceptabilité d'une telle mesure et la façon dont on conduit ce dossier au niveau politique. Il est également essentiel de tenir compte des catégories sociales qui seraient fiscalisées et de se demander quels taux sont acceptables par les uns et les autres : je rappelle d'ailleurs que la révolte contre l'écotaxe avait été enclenchée par des gens à revenu modeste. Le vrai défi est de réaliser un travail d'accompagnement politique autour de ce sujet.

Je comprends que la région Nouvelle-Aquitaine peut mettre en place un tel dispositif car il n'y a pas de difficulté, dans ce cas de figure, en termes de réciprocité avec les autres pays européens. Je souligne tout de même que la proposition d'Olivier Jacquin confère un outil à la main des régions et non pas une obligation. On se présente toujours comme les chantres de la décentralisation, sauf qu'à certains moments, on souhaite jouer un rôle de censeur. En l'occurrence, l'amendement d'Olivier Jacquin vient conforter une décentralisation qui est logique sur ce type de sujet.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Je fais observer qu'aucune région autre que celle du Grand Est n'a demandé à s'engager dans cette voie. Toutes les régions se sont manifestées pour demander du versement mobilité, mais aucune n'a souhaité pouvoir lever l'écotaxe, mis à part le Grand Est.

M. Jean-François Longeot, président. - Je reprendrai le début du propos d'Hervé Gillé qui a appelé à bien analyser les décisions que nous prenons. La précipitation n'est pas une bonne idée et il faut donner du temps au temps, selon la formule bien connue.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - S'agissant de la remarque de Philippe Tabarot sur les desiderata des régions, je signale qu'en auditionnant l'Association des régions de France, je me suis étonné de leur méconnaissance du modèle économique qu'est en train d'inventer la région Grand Est. Celle-ci, en taxant seulement quelques centaines de kilomètres de route - la nationale 4 et l'A31 du Luxembourg vers la Bourgogne - va générer 1 milliard d'euros de recettes en 10 ans. Pour sa part, la Collectivité européenne d'Alsace, en taxant moins de 200 km de route à seulement 15 centimes d'euros du kilomètre, va générer près de 60 millions d'euros de recettes par an, ce qui permettra de financer à la fois la politique routière et le report modal vers le ferroviaire. Comme mes collègues l'ont bien souligné, mon amendement n'oblige aucune région à le faire : il leur donne la possibilité d'avancer sur ce chemin et nos amis bretons ne seraient pas du tout obligés de suivre cette voie.

L'amendement DEVDUR.9 n'est pas adopté.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Au moins, vous constaterez que nous avons utilement animé ce débat et nous reviendrons sur ce sujet lors de la conférence de financement.

Après l'article 9

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - L'amendement DEVDUR.10 vise à instaurer une taxe sur les livraisons de colis issues des ventes en ligne qui serait basée sur un écoscore mesurant l'impact environnemental de la livraison. Je rappelle que le rapport d'information sur le transport de marchandises face aux impératifs environnementaux de nos collègues Nicole Bonnefoy et Rémy Pointereau, adopté en 2021, avait mis en avant l'impact environnemental des livraisons du e-commerce et appelé à une plus grande responsabilisation du consommateur en lui envoyant un signal prix.

Cet amendement s'inscrit pleinement dans cette logique en proposant d'instaurer un écoscore sur ces livraisons qui serait élaboré par décret pris après avis de l'Ademe en prenant notamment en compte la distance entre le lieu de fabrication ou de stockage du bien et le lieu de livraison, les délais de livraison ou encore les modes de transport utilisés pour l'acheminement de la marchandise. L'instauration d'une taxe assise sur cet écoscore permettrait d'envoyer un signal prix au consommateur et de réduire les externalités négatives liées aux livraisons en supprimant l'idée que la livraison peut être gratuite et donc sans impact. Elle permettra donc de mieux organiser les transports en les massifiant.

M. Jean-François Longeot, président. - Je souhaite partager ma position, animé d'un état d'esprit positif. L'article 3 de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy sur l'impact environnemental du transport de marchandises - dans le prolongement de la mission mise en place par notre commission, propose de supprimer la mention « livraison gratuite » - en effet, le transport gratuit n'existe pas. Je préférerais donc qu'on puisse examiner le dispositif suggéré par cet amendement à l'occasion des débats sur cette proposition de loi, si la conférence des présidents décide de l'inscrire à l'ordre du jour dans le cadre d'un espace transpartisan.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - Dans le même esprit que celui de l'intervention du président Longeot, on dispose d'un travail remarquable réalisé par nos deux collègues rapporteurs Nicole Bonnefoy et Rémy Pointereau il y a quelques années (2021) et qui peut redevenir d'actualité. L'idée de taxer d'éventuels excès ou une utilisation abusive du e-commerce avec un fléchage vers les transports et les infrastructures me paraît un sujet dont on peut opportunément discuter. Je ne pense cependant pas que le problème puisse être réglé par un amendement de cette nature. Il convient de se fonder à la fois sur les travaux de nos collègues et sur la discussion qui pourra avoir lieu lors de la conférence de financement, car je suis intimement persuadé que ce sujet sera porté par un certain nombre de parlementaires. Je ne voterai donc pas cet amendement au PLF même si je salue l'idée qui le sous-tend. Je pense qu'il faut d'abord relire l'excellent rapport que nous avons mentionné.

Mme Nicole Bonnefoy. - Dans les travaux que nous avions réalisés sur le transport lié au e-commerce, nous avions souligné qu'il fallait supprimer la mention « gratuit » sur les plateformes de e-commerce car le transport n'est jamais gratuit. Lors de la consultation lancée par la mission d'information sur les transports de marchandises dans le cadre de ses travaux préparatoires, nous avions reçu de nombreux retours qui indiquaient majoritairement que les utilisateurs des plateformes de e-commerce souhaitaient être informés de la réalité du coût du transport et envisageaient une différenciation des tarifs de livraison avec un coût plus élevé pour les transports les plus rapides et les plus impactants sur l'environnement. La question du transport pour le e-commerce est donc cruciale et ma proposition de loi, dont je vous remercie de soutenir l'inscription à l'ordre du jour, aborde ce sujet. Nous y reviendrons d'ailleurs certainement dans le cadre de la proposition de loi sur la « fast fashion » qui viendra en discussion.

M. Rémy Pointereau- J'indique simplement que je voterai cet amendement, ne serait-ce que pour envoyer un signal fort car il est vrai que la gratuité, ça n'existe pas.

M. Jean-François Longeot, président. -La méthode consistant à vouloir traiter tous les sujets à la fois dans la précipitation avant de prendre conscience des réalités de terrain ainsi que des obstacles opérationnels éventuels ne me semble pas opportune. Si on pouvait éviter d'accumuler les procédures administratives qui pèsent tous les jours sur les épaules de nos concitoyens, ils nous en seraient reconnaissants. Nous ne disposons pas d'étude d'impact pour évaluer les conséquences et les modalités d'application d'un tel dispositif. Je pense qu'il faut prendre le temps de la réflexion pour assurer l'efficacité de ce type de mesures.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis. - J'ajoute que le dispositif qui figure dans l'amendement d'Olivier Jacquin n'est pas clairement préconisé dans le remarquable rapport d'information de Nicole Bonnefoy et Rémy Pointereau.

M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis. - Je tiens à préciser qu'à titre individuel, cela fait cinq ans que je présente dans le cadre du PLF une disposition visant à empêcher la livraison gratuite des colis qui est une catastrophe environnementale. Je suis ravi que ce thème ait été traité par la mission d'information de Nicole Bonnefoy et Rémy Pointereau à laquelle j'ai assidûment participé. Je remercie également Rémy Pointereau de sa position et de sa confiance pour continuer à faire avancer ce sujet notamment dans la perspective de la prochaine conférence de financement des infrastructures et des mobilités qui nous donnera l'occasion de porter cette idée pertinente. Je propose de retirer cet amendement qui nous aura permis de débattre avec intérêt.

L'amendement DEVDUR.10 est retiré.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Transports aériens
M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis

§ Personnes entendues

Mercredi 23 octobre 2024

- Direction générale de l'aviation civile (DGAC) : MM. Damien CAZÉ, directeur général de l'aviation civile, Marc BOREL, directeur général adjoint, directeur du transport aérien, Édouard GAUCI, adjoint à la secrétaire générale et sous-directeur des affaires financières et du contrôle de gestion, Frédéric GUIGNIER, directeur des services de la navigation aérienne et Simon CANCES, conseiller technique au pôle des affaires réservées et territoriales au cabinet du directeur général.

Mardi 12 novembre 2024

- Table ronde Air France - KLM - Fédération nationale de l'aviation et de ses métiers (FNAM) :

Air France KLM : MM. Aurélien GOMEZ, directeur des affaires parlementaires et territoriales et Sébastien JUSTUM, secrétaire général adjoint.

FNAM : M. Laurent TIMSIT, délégué général.

Union des aéroports Français (UAF) : MM. Nicolas PAULISSEN, délégué général, Franck GOLDNADEL, président du directoire des Aéroports de la Côte d'Azur et Philippe CREBASSA, président du Directoire de l'Aéroport de Toulouse-Blagnac.

- Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) : MM. Philippe GABOULEAUD, secrétaire général et Arnaud BECK, secrétaire général adjoint.

- Aéroports de Paris (ADP) : MM. Edward ARKWRIGHT, directeur général exécutif, Paul BEYOU, responsable des affaires publiques nationales et Mathieu CUIP, directeur des affaires publiques.

Mardi 19 novembre 2024 

- Table ronde Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) et Safran

GIFAS : MM. Baptiste VOILLEQUIN, directeur R&D/Espace et Environnement et Jérôme JEAN, directeur des affaires publiques.

. Safran : Mmes Suzanne KUCHAREKOVA, directrice des affaires publiques et Nathalie STUBLER, directrice du développement durable.

- Table ronde Réseau action climat (RAC) et Transports&Environnement (T&E)

RAC : M. Alexis CHAILLOUX, responsable transports aériens et ferroviaires.

T&E : M. Jérôme DU BOUCHER, responsable aviation France.

- Airbus : MM. Olivier MASSERET, directeur des relations institutionnelles, Bruno FICHEFEUX, directeur des programmes du futur d'Airbus commercial Aircraft, Mme Nathalie DONNARD, directrice des affaires civiles et M. Fabien MENANT, directeur des affaires publiques d'Airbus France.

§ Contributions écrites

- European Business Aviation Association - France (EBAA)

- Équilibre des énergies

Transports routiers
M. Olivier Jacquin, rapporteur pour avis

§ Personnes entendues

Mercredi 23 octobre 2024

- Autorité de régulation des transports (ART) : MM. Thierry GUIMBAUD, président et Jordan CARTIER, secrétaire général.

- Audition conjointe de Réseau action climat (RAC) - France et de Transport & environnement (T&E) : MM. Pierre LEFLAIVE, responsable transports du RAC, Alexis CHAILLOUX, responsable transports (aérien et ferroviaire) du RAC et Léo LARIVIÈRE, responsable transition automobile et relations parlementaires de T&E.

Lundi 28 octobre 2024

- Audition conjointe de la Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB) et de Vélo et territoires : Mme Camille THOMÉ, directrice de Vélo et territoires et M. Thibault QUÉRÉ, responsable du plaidoyer de la FUB.

Mardi 29 octobre 2024

- Union des Transports Publics et ferroviaires (UTP) : MM. Jean-Philippe PEUZIAT, directeur du département affaires publiques et Charles-Édouard ROEHRICH, chargé de mission affaires institutionnelles au sein du département des affaires publiques.

- Groupement des autorités responsables de transport (Gart) : MM. Louis NÈGRE, président, Alexandre MAGNY, directeur général et Mme Florence DUJARDIN, directrice des affaires économiques et financières.

Mardi 5 novembre 2024

- Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) : M. Pascal BERTEAUD, directeur général et Mme Catherine MALIGNE, directrice de cabinet.

- Association des sociétés françaises d'autoroutes (Asfa) : MM. Philippe NOURRY, président-directeur général d'APRR, vice-président de l'ASFA et Arnaud QUÉMARD, directeur général du groupe Sanef, vice-président de l'Asfa.

Mercredi 6 novembre 2024

- Régions de France : MM. Michel NEUGNOT, co-président de la commission mobilité, transports, infrastructures et David HERRGOTT, conseiller transports.

Jeudi 7 novembre 2024

- Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) : MM. Baptiste PERRISIN FABERT, directeur général délégué et Jérémie ALMOSNI, directeur de la direction Villes et territoires durables.

- Audition conjointe de France urbaine et d'Intercommunalités de France : M. Étienne CHAUFOUR, directeur Île-de-France, chargé de l'éducation, petite enfance, jeunesse de France urbaine, Mme Sarah BOU SADER, conseillère relations parlementaires de France urbaine, M. Jean-Yves BRENIER, président de la communauté des communes des Balcons du Dauphiné, représentant d'Intercommunalités de France, Mme Carole ROPARS, responsable du pôle aménagement d'Intercommunalités de France et Mme Montaine BLONSARD, responsable des relations avec le Parlement d'Intercommunalités de France.

- Audition conjointe sur les véhicules intermédiaires : MM. Nicolas LE DOUAREC, président de l'association Aveli et Aurélien BIGO, chercheur.

- CFDT : MM. Sébastien MARIANI, secrétaire général adjoint FGTE-CFDT, Rémi HUTINET, représentant CFDT Ministère (syndicat CFDT Sedre), Emmanuel BECLERE, référent CFDT branche autoroutes, Cédric MALLARTE, représentant CFDT directions interdépartementales des autoroutes et Jean-Marie KHIARI, représentant CFDT directions interdépartementales des routes.

Mardi 12 novembre 2024

- Ecov : M. Thomas MATAGNE, président fondateur et Mme Marine BRUNO, chargée de mission affaires publiques.

- Ministère de la transition écologique et solidaire - Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer : M. Rodolphe GINTZ, directeur général et M. Nicolas BINA, conseiller élus et communication.

- Table ronde

o Mobilians : Mme Dorothée DAYRAUT JULLIAN, directrice des affaires publiques et de la communication, M. Louis CADOU, chargé des relations institutionnelles ;

o Plateforme de la filière automobile et des mobilités (PFA) : M. Nicolas LE BIGOT, directeur des affaires environnementales, techniques et règlementaires ;

o Groupe Renault : M. Nicolas TCHENG, chargé des relations avec le Parlement ;

o Groupe Stellantis : M. Jean-Pascal VIATTE, délégué affaires publiques France.

Mercredi 13 novembre 2024

- Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) : M. Franck LEROY, président.

Jeudi 14 novembre 2024

- Société des Grands Projets (SGP) : M. Frédéric BREDILLOT, membre du directoire.

§ Contributions écrites

- Acoss

- Assemblée des départements de France (ADF)

- Autorité de l'innovation pour les transports

- Avere

- Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

- Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV)

- Fédération nationale des transports routiers (FNTR)

- Île-de-France Mobilités

Transports ferroviaires, fluviaux et maritimes
M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis

§ Personnes entendues

Mercredi 23 octobre 2024

- Autorité de régulation des transports (ART) : MM. Thierry GUIMBAUD, président, et Jordan CARTIER, secrétaire général.

Mardi 29 octobre 2024

- Union des Transports Publics et ferroviaires (UTPF) : MM. Jean-Philippe PEUZIAT, directeur du département affaires publiques, et Charles-Édouard ROEHRICH, chargé de mission affaires institutionnelles au sein du département des affaires publiques.

- Groupement des autorités responsables de transport (GART) : MM. Louis NÈGRE, président, Alexandre MAGNY, directeur général et Mme Florence DUJARDIN, directrice des affaires économiques et financières.

Mardi 12 novembre 2024

Table ronde transports ferroviaires

. SNCF Voyageurs : MM. Romain DESAIX, directeur adjoint de cabinet du président-directeur général de SNCF Voyageurs, Tanguy COTTE-MARTINON, secrétaire général et Mme Laurence NION, conseillère parlementaire du Groupe SNCF.

Transdev : Mme Alix LECADRE, directrice offres et métiers ferroviaires et M. Arthur LE MOAL, directeur adjoint en charge des affaires institutionnelles

Trenitalia : Mme Anne-Cécile DELBES, directrice juridique et achats et M. Luca BERNARDINELLI, directeur financier et administratif.

- Voies navigables de France (VNF) : Mme Cécile AVEZARD, directrice territoriale Rhône-Saône, M. Régis BAC, directeur juridique, économique et financier et Mme Muriel MOURNETAS, chargée des relations institutionnelles

- Armateurs de France : MM. Édouard LOUIS-DREYFUS, président, Laurent MARTENS, délégué général et Mme Agathe RINAUDO, responsable communication et affaires institutionnelles.

- Ministères de la transition écologique, de la cohésion des territoires et de la mer - Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) : M. Rodolphe GINTZ, directeur général, et M. Nicolas BINA, conseiller élus et communication.

Mercredi 13 novembre 2024

- Société des Grands Projets (SGP) : MM. Jean-François MONTEILS, président du directoire, Frédéric BREDILLOT, membre du directoire et Deniz BOY, directeur délégué aux relations parlementaires.

- Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) : M. Franck LEROY, président.

SNCF Réseau : M. Alain QUINET, directeur général exécutif Stratégie et affaires corporate et Mme Laurence NION, conseillère parlementaire du Groupe SNCF.

§ Contributions écrites

- Alliance 4F

- Association française du Rail (AFRA)

- Direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l'aquaculture (DGAMPA)

- Entreprises fluviales de France (E2F)

- Fédération industries ferroviaires

- Fédération Nationale des Associations d'Usagers des Transports (FNAUT)

- Régions de France

LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2025.html

ANNEXE
LISTE DES AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISISON DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Amendements présentés par MM. Philippe Tabarot et Olivier Jacquin
 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

PREMIÈRE PARTIE

I-582 rect.

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144)

24 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

MM. TABAROT et JACQUIN

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

_________________

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 31

Après l'article 31

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après la section 3 bis du chapitre II du titre III du livre III de la quatrième partie du code général des collectivités territoriales, il est inséré une section 3 ter ainsi rédigée :

« Section 3 ter

« Versement destiné au financement des services de mobilité

« Art. L. 4332-8-.... - Sur le territoire métropolitain, en dehors de la région d'Île-de-France, et sur le territoire de la collectivité de Corse, le versement destiné au financement des services de mobilité peut être institué par délibération du conseil régional ou de l'organe délibérant de la collectivité de Corse.

« La délibération qui institue le versement ou qui en augmente le taux énumère les services de mobilité mis en place ou prévus, qui justifient le taux du versement.

« Les conditions d'assujettissement, de recouvrement et de remboursement de ce versement sont identiques à celles prévues aux articles L2333-64 à L2333-75 du présent code au bénéfice de la région ou de la collectivité de Corse qui l'institue.

« Le versement est affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement de toute action relevant des compétences de la région ou de la collectivité de Corse au sens de l'article L1231-3 du code des transports.

« Le taux de versement est fixé ou modifié par délibération du conseil régional ou de la collectivité de Corse dans la limite de 0,2 % des salaires définis à l'article L2333-65 du présent code.

« Il s'applique sur l'ensemble du territoire de la région ou de la collectivité de Corse.

« La région ou la collectivité de Corse peut, par décision motivée, réduire ou porter à zéro le taux du versement, sur les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale qui le composent, selon un critère qu'elle détermine à partir de la densité de la population, de l'offre de mobilité prévue ou mise en place en particulier pour assurer le déploiement de service express régional métropolitain défini à l'article L1215-6 du code des transports, et du potentiel fiscal défini à l'article L2334-4 du présent code. La réduction du taux est en rapport avec l'écart constaté, en se fondant sur ce critère, entre les différents périmètres des établissements du ressort territorial de la région ou de la collectivité de Corse.

« Une fraction correspondant à 10 % du versement est affectée aux autorités organisatrices de la mobilité mentionnées à l'article L1231-1 du code des transports sur le territoire de chaque communauté de communes. Cette fraction est répartie entre les autorités organisatrices de la mobilité au prorata de la population des communautés de communes sur lesquelles elles exercent leurs compétences recensées par l'Institut national de la statistique et des études économiques au 1er janvier de l'année précédant celle au titre de laquelle la fraction est versée.

II. - À la seconde phrase de l'article L2333-66 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « délibération », sont insérés les mots : « qui institue le versement ou qui en modifie le taux ».

III. - L'article L1231-5 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L1231-5. - Les autorités organisatrices mentionnées aux articles L1231-1 et L1231-3 créent un comité des partenaires dont elles fixent la composition et les modalités de fonctionnement sous réserve des dispositions suivantes.

« Ce comité comprend notamment des représentants des organisations professionnelles d'employeurs, des représentants des organisations syndicales de salariés, des représentants des associations présentes sur le territoire, notamment les associations d'usagers ou d'habitants, ainsi que des habitants tirés au sort. Les représentants des employeurs disposent d'au moins 50 % des sièges au sein du comité.

« Le comité des partenaires est saisi au moins une fois par semestre par les autorités organisatrices de la mobilité, pour avis, sur le niveau d'offre de mobilité en place, sur les renforcements de l'offre et le développement des offres nouvelles ; sur le taux de couverture des dépenses d'exploitation des services de mobilité par les recettes tarifaires ; sur le niveau de contribution financière des employeurs via le versement mobilité ; sur la qualité des services et l'information des usagers mise en place.

« Ce comité est consulté à l'occasion de l'évaluation de la politique de mobilité par l'autorité organisatrice de la mobilité prévue aux articles L1231-1-1 et L1231-3 et sur tout projet de mobilité structurant, y compris les services express régionaux métropolitains. Il est saisi également avant toute instauration, évolution ou modulation du taux du versement destiné au financement des services de mobilité.

« L'autorité mentionnée à l'article L1231-1 consulte également le comité des partenaires avant l'adoption du document de planification qu'elle élabore au titre du III de l'article L1231-1-1.

« Lorsqu'elle intervient en application du II de l'article L1231-1, la région crée un comité des partenaires, associant les représentants des communes ou de leurs groupements, à l'échelle pertinente qui est au maximum celle d'un bassin de mobilité au sens des deux derniers alinéas de l'article L1215-1. »

OBJET

La loi d'orientation des mobilités de 2019 a consacré le rôle de chef de file des régions en matière de mobilité et d'intermodalité. La loi n'a pas pour autant prévu de ressource financière dédiée aux régions, agissant comme autorités organisatrices de la mobilité (AOM) régionales, alors mêmes que les autres AOM bénéficient du versement mobilité. Pour mémoire, le versement mobilité est une contribution prélevée sur la masse salariale des entreprises d'au moins 11 salariés dont le produit est affecté au financement des mobilités. Son taux est fixé par délibération de l'AOM.

Face aux défis de la transition écologique, il importe de donner aux régions les moyens financiers d'investir pleinement leur rôle d'AOM régionale, notamment dans l'organisation des transports du quotidien, TER, transports routiers régionaux, et, services express régionaux métropolitains.

Le présent amendement permet à la région, en tant qu'autorité organisatrice de la mobilité régionale, de prélever sur son territoire le versement mobilité, à un taux plafond de 0,2 %, sans préjudice du versement mobilité perçu le cas échéant par chaque AOM sur son ressort territorial.

Le taux du versement mobilité peut être modulé à la baisse par la région en fonction de la densité, de l'offre de mobilité et du potentiel fiscal de chaque EPCI, afin de tenir compte des spécificités locales. Le rendement de l'amendement pourrait s'établir à plus de 500 M€ sur l'ensemble des régions dans l'hypothèse où toutes les régions souhaiteraient établir le taux du versement mobilité à 0,2 % dans les intercommunalités de plus de 100 000 habitants. Dans la pratique, un rendement inférieur compte tenu des choix locaux est à attendre.

Enfin, pour les territoires ruraux, il est prévu qu'une fraction de 10 % de ce versement mobilité régional puisse être alloué à l'organisation de services de mobilité locaux dans les territoires des communautés de communes. Cette quote-part serait reversée ainsi aux AOM locales compétentes sur chaque territoire d'une communauté de communes, soit à l'intercommunalité soit à la région si elle a pris la compétence d'AOM locale en plus de son rôle d'AOM régionale. Dans la répartition de cette enveloppe, il importe que les régions soient attentives à la situation des AOM des zones peu denses disposant de bases fiscales trop faibles - et donc d'un rendement de VM insuffisant - pour financer des projets de mobilité. Pour rappel, le Sénat avait porté, lors de l'examen de la LOM, une proposition visant à attribuer une ressource pérenne (via une part de TICPE) à ces AOM, mais cette piste avait malheureusement été supprimée dans la suite de la navette parlementaire. Il importe que cette question soit rapidement remise au coeur du débat.

Cette affectation permettrait une redistribution des territoires urbains vers les territoires ruraux à l'échelle régionale de cette ressource affectée à la mobilité.

L'objectif du présent amendement est que les AOM régionales bénéficient d'une ressource supplémentaire pour développer l'offre de transport, tout en maintenant les recettes issues de la vente des billets aux usagers.

Afin de garantir l'acceptabilité de ce prélèvement, le présent amendement impose, en conséquence :

· la justification de l'offre de service mise en en place et prévue lors de la délibération qui instaure le prélèvement ou en augmente le taux ;

· la consultation des AOM locales et du comité des partenaires régional préalablement à l'instauration et à toute modification du versement mobilité régional ;

· un avis du comité des partenaires, au sein duquel la représentation des employeurs est confortée par la tenue d'au moins 50 % des sièges. Ce comité doit être saisi au moins une fois par semestre, pour avis, sur le niveau d'offre de mobilité en place, ainsi que sur les renforcements d'offre et les offres nouvelles envisagés, sur le taux de couverture des dépenses d'exploitation des services de mobilité par les recettes tarifaires, et sur le niveau de contribution financière des employeurs via le versement mobilité, lorsque celui-ci est instauré ;

· le reversement d'une fraction du versement mobilité perçu, au bénéfice des services de mobilité en milieu rural.

 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

PREMIÈRE PARTIE

I-583

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144)

20 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

MM. TABAROT et JACQUIN

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

_________________

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 31

Après l'article 31

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le douzième alinéa de l'article L2333-67 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les autorités compétentes pour l'organisation de la mobilité mentionnées à l'avant-dernier alinéa de l'article L1215-6 du code des transports ont la faculté de majorer le taux applicable de 0,2 % si elles mènent un projet de service express métropolitain reconnu par arrêté du ministre chargé du transport en application de la procédure décrite au même alinéa du même article. Les personnes physiques ou morales assujetties au versement destiné au financement des services de mobilité qui emploient moins de 51 salariés sont exonérées de cette majoration. Le comité des partenaires mentionné à l'article L1231-5 du même code est consulté avant toute instauration de cette majoration dans les conditions prévues au même article L1231-5. »

OBJET

Les AOM locales, qui assurent le financement des transports du quotidien, n'ont actuellement pas les moyens de faire face au mur d'investissements nécessaires pour déployer les services express régionaux métropolitains (Serm).

La loi relative aux Serm, adoptée définitivement en décembre 2023, a mis en place un cadre juridique spécifique pour assurer le développement des transports du quotidien en région. Cependant, au cours de l'examen du texte, la commission s'était inquiétée de l'absence de garantie quant au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement que ces projets occasionneront pour les AOM. C'est la raison pour laquelle elle a introduit, à l'article 10, le principe de l'organisation d'une conférence nationale de financement sur les Serm, qui aurait dû avoir lieu avant le 30 juin 2024. Cette conférence ne s'est cependant pas encore tenue et il est urgent que ce débat soit mené, afin d'identifier des solutions de financement pérennes pour ces services.

Cet amendement propose de faire un premier pas dans cette direction, en rehaussant le taux plafond de versement mobilité (VM) de 0,2 point à destination des AOM qui ont obtenu la labellisation d'un projet de Serm.

Les entreprises de moins de 51 salariés sont exclues du champ de cette majoration afin d'éviter qu'elle ne pénalise les petites entreprises.

Il prévoit également que le comité des partenaires institué par les AOM, qui rassemble notamment des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et des représentants des organisations syndicales de salariés, sera consulté avant toute instauration de cette majoration.

 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

PREMIÈRE PARTIE

I-584

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144)

20 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

MM. TABAROT et JACQUIN

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

_________________

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 12

Après l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au III de l'article 2 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022, l'année : « 2024 » est remplacée l'année : « 2025 ».

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

OBJET

À l'initiative du Sénat, la LFR pour 2022 a mis en place une incitation pour les employeurs à porter à 75 % la prise en charge des abonnements de transport public de leurs salariés, mais ce dispositif arrive à échéance à la fin de l'année 2024. Cet amendement propose donc de le prolonger d'un an. Cette mesure permettrait aussi de placer les salariés du secteur privé et de la fonction publique sur un pied d'égalité. En effet, depuis le 1er septembre 2023, la prise en charge des titres de transport des salariés de la fonction publique est fixée de façon pérenne à 75 %.

 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

PREMIÈRE PARTIE

I-585 rect.

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144)

25 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

MM. TABAROT et JACQUIN

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

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ARTICLE 33

I. - Alinéa 2, tableau, quatrième colonne, quatrième ligne

Remplacer le nombre :

1 281 042 970

par le nombre :

1 731 042 970

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

OBJET

Cet amendement vise à diviser par deux la baisse d'affectation de TICPE à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) en 2025 prévue par le projet de loi de finances, par rapport au niveau qui figurait en loi de finances initiale pour 2024. Le financement des infrastructures de transport répondant à une logique de temps long, il est en effet nécessaire d'éviter une baisse trop brutale des moyens de l'Afit France.

L'agence a déjà subi une diminution de près de 400 millions d'euros de fiscalité affectée en cours d'année par rapport à ce qui était prévu en loi de finances pour 2024. Pour 2025, ses recettes sont évaluées à 3,7 milliards d'euros, soit 900 millions d'euros de moins que ce qui était prévu par la loi de finances initiale pour 2024. Cet affaissement des moyens de l'Afit France s'explique principalement par une chute d'un ordre de grandeur de 700 millions d'euros du montant de TICPE affecté à l'agence pour 2025. Or, cette recette est assise en grande partie sur le secteur des transports. Cette désaffectation constitue donc une fuite des impôts payés par ce secteur vers le budget général de l'État.

Ce mouvement de désaffectation de recettes est contradictoire avec la nécessité de renforcer le report modal et d'assurer la décarbonation des mobilités. La trajectoire de financement de l'Afit France pour 2025 s'inscrit en effet pour l'instant dans le scénario de « cadrage budgétaire » décrit par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), et non dans le scénario de « planification écologique », qui est pourtant la feuille de route du Gouvernement sur ce sujet.

En particulier, le sous-investissement en faveur du transport ferroviaire engendre une « dette grise » insoutenable à long terme et pourrait plonger le réseau dans une spirale de « paupérisation » pointée par l'Autorité de régulation des transports.

Cet amendement vise donc à limiter la baisse de recettes de l'Afit France en revenant sur la moitié de la baisse d'affectation de TICPE à l'agence pour 2025. Cette sécurisation a minima des recettes de l'agence reste cependant encore en deçà des besoins de financement en faveur des infrastructures. Si cet amendement permet d'atténuer cette insuffisance, 2025 fera bien figure « d'année blanche » compte tenu du contexte budgétaire. Elle doit donc constituer une exception.

Il prend en compte l'amendement, déposé en commun avec Olivier Jacquin, qui prévoit de maintenir l'affection aux communes, d'une part, et aux départements, d'autre part, d'une part du produit de la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance (à hauteur, respectivement, de 50 millions d'euros), qui est actuellement intégralement affecté à l'Afit France. Par conséquent, bien qu'il propose de revenir sur 450 millions d'euros de diminution d'affectation de recettes à l'Afit France, il aura pour résultat de limiter cette baisse à 350 millions d'euros seulement en 2025 par rapport aux prévisions initiales qui figurent dans le PLF initial.

 

 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

PREMIÈRE PARTIE

I-586 rect.

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144)

25 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

MM. JACQUIN et TABAROT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

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ARTICLE 21

Alinéas 41 à 43

Supprimer ces alinéas.

OBJET

Afin de sécuriser le financement des infrastructures de transport, l'article 100 de la loi de finances initiale pour 2024 a institué une taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, dont le produit (évalué à 600 millions d'euros) devait être intégralement versé à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France).

Lors de l'examen de ce texte, le Sénat avait introduit, à l'initiative de sa commission des finances, une disposition visant à allouer dès 2024 aux communes et groupements de communes exerçant la compétence voirie, d'une part, et aux départements, d'autre part, une fraction égale à un douzième du produit prévisionnel de cette taxe. Cela devait représenter, respectivement, 50 millions d'euros pour ces deux catégories de collectivités.

L'article 21 du projet de loi de finances pour 2025 vise à revenir sur cette mesure pour rétablir le principe d'une allocation intégrale du produit de cette taxe à l'Afit France.

Les départements et les communes font face à de lourdes dépenses pour assurer l'entretien de leur réseau routier. Selon le rapport de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales publié en 2024, en 2023, les départements ont ainsi consacré plus 4,7 milliards d'euros à leur voirie, soit une augmentation d'environ 3 % en un an. En parallèle, les communes de plus de 3 500 habitants ont dépensé 3,8 milliards d'euros pour leur voirie, soit une hausse de 6 % par rapport à 2022.

Dans le contexte financier que connaissent les collectivités territoriales, et alors que le Gouvernement leur demande de réaliser d'importantes économies pour contribuer au redressement des finances publiques, on ne peut que craindre que l'entretien du réseau routier constitue, comme c'est trop souvent le cas, la variable d'ajustement. Dès lors, il est essentiel de prendre des mesures pour mettre leurs investissements en faveur du réseau routier à l'abri des aléas budgétaires. En outre, ainsi que l'avait souligné le rapporteur général de la commission des finances, à l'origine de cette mesure, il semble logique que le produit de la nouvelle taxe perçue sur les réseaux de transport faisant l'objet d'une concession puisse, au moins partiellement, être redistribué au profit des communes afin d'assurer l'entretien du réseau local non concédé. Tel est le sens de cet amendement.

Néanmoins, afin de ne pas réduire les recettes prévisionnelles de l'Afit France en 2025, un autre amendement, porté en commun avec Philippe Tabarot, propose de rehausser en conséquence de 100 millions d'euros le plafond de TICPE affecté à cette agence l'année prochaine. Il conviendrait également que ce plafond soit revu à la hausse, dans les mêmes proportions, pour 2024, afin de ne pas retirer de recettes à l'agence.

 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

PREMIÈRE PARTIE

I-587

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144)

20 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

MM. JACQUIN et TABAROT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

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ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 31

Après l'article 31

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l'article L2333-66 du code général des collectivités territoriales, la référence : « 1° du » est supprimée.

OBJET

Le présent amendement vise à assouplir les conditions auxquelles sont soumises les AOM pour lever le versement mobilité (VM), afin d'en faciliter le recours dans les territoires ruraux.

L'article L2333-36 du code général des collectivités territoriale conditionne la possibilité de lever le VM à l'organisation de services réguliers de transport public de personnes. Or, la mise en place de tels services est rarement pertinente en zone peu dense, le nombre de voyageurs n'y étant généralement pas suffisant pour assurer la rentabilité de l'offre.

Si d'autres solutions de mobilité apparaissent plus adaptées à ces territoires (transport à la demande, autopartage, covoiturage, mobilités douces, etc.), la situation actuelle place de nombreuses AOM situées en zone rurale ayant pris la compétence mobilité au 1er juillet 2021 - en application de la loi d'orientation des mobilités (LOM) de 2019 - dans l'impossibilité de disposer de ressources pérennes pour financer de tels projets. En conséquence, la dépendance de la population à l'autosolisme demeure forte dans les zones peu denses.

Cet amendement vise donc à permettre aux AOM de prélever le VM pour l'organisation d'un panel de services de transport plus large que les transports collectifs réguliers, prenant en compte le transport à la demande et les mobilités partagées et actives.

Il s'inscrit ainsi dans un double objectif de décarbonation des transports et de désenclavement des territoires ruraux, pour donner enfin toute sa portée à l'ambition, portée par la LOM il y a cinq ans, de mettre fin aux zones blanches de la mobilité.

Amendements présentés par M. Olivier Jacquin
 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

SECONDE PARTIE

MISSION ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

II-283

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144, 145, avis 148)

27 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

M. JACQUIN

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

_________________

ARTICLE 42 (CRÉDITS DE LA MISSION)

État B

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

10 000 000

 

10 000 000

 

Service public de l'énergie

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

10 000 000

 

10 000 000

Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

 

 

 

 

Sûreté nucléaire et radioprotection

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

OBJET

Le présent amendement vise à allouer 10 millions d'euros supplémentaires, en AE et en CP, à l'action 3 « Aides à l'acquisition de véhicules propres » du programme 174 « Énergie, climat et après-mines » afin d'élargir le champ d'application des aides au verdissement des véhicules : il s'agit, d'une part, de rétablir l'éligibilité des véhicules électriques d'occasion au bonus écologique et, d'autre part, de rendre éligibles à l'ensemble des aides à l'acquisition de véhicules propres (bonus écologique, leasing social et prime à la conversion) les véhicules dits intermédiaires.

En premier lieu, alors qu'environ 80 % des Français achètent leur véhicule en occasion (selon les données 2023 sur les immatriculations de véhicules, 5 309 000 de voitures particulières ont été vendues en occasion en 2023 et 1 817 000 de voitures neuves) et que le coût demeure le principal frein à l'achat de véhicules électriques, les véhicules d'occasion constituent une piste de démocratisation de la voiture électrique.

Or, si les voitures particulières électriques d'occasion sont bien éligibles à la prime à la conversion et au leasing social, un décret de février 2024 (décret n° 2024-102 du 12 février 2024 relatif aux aides à l'achat ou à la location de véhicules peu polluants) a supprimé la possibilité de bénéficier du bonus écologique pour l'achat de ce type de véhicules. Cet amendement vise à rétablir l'éligibilité des voitures et camionnettes électriques d'occasion à ce dispositif, notamment pour favoriser l'accès au véhicule électrique aux ménages modestes.

En second lieu, il convient d'encourager la diffusion des véhicules légers intermédiaires (ou VELI) - catégorie constituée d'une diversité de véhicules routiers légers situés entre les deux véhicules de référence que sont le vélo et la voiture (véhicules à assistance électrique, vélos cargos, tandems, mini-voitures, etc.) - qui présentent de réels avantages sociaux et environnementaux : outre une empreinte écologique plus faible qu'un véhicule classique (ne serait-ce qu'en terme d' utilisation de ressources) et une efficacité énergétique accrue, ils constituent une solution de déplacement peu onéreuse (coût d'achat inférieur à 10 000 €) pour les trajets du quotidien, notamment en zone rurale et pour les personnes touchées par la précarité mobilité. Or, seuls certains vélos à assistance électriques sont, pour l'heure, éligibles aux aides au verdissement des véhicules (à travers le bonus vélo). Cet amendement vise à rendre l'achat de ces véhicules éligibles à l'ensemble des aides à l'acquisition de véhicules propres.

L'article 40 de la constitution et l'article 47 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) interdisant aux parlementaires d'augmenter les crédits de la mission, la mesure est gagée sur les crédits de l'action 07 « Pilotage, support, audit et évaluations » du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables ». L'objectif est que le Gouvernement puisse lever ce gage.

 

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025

 

SECONDE PARTIE

MISSION ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

II-284

DIRECTION

DE LA SÉANCE

(n°s 143, 144, 145, avis 148)

27 NOVEMBRE 2024

 
 

A M E N D E M E N T

présenté par

C

 

G

 

M. JACQUIN

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

_________________

ARTICLE 42 (CRÉDITS DE LA MISSION)

État B

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Infrastructures et services de transports

50 000

 

50 000

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

dont titre 2

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l'énergie

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

50 000

 

50 000

Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires

 

 

 

 

TOTAL

50 000

50 000

50 000

50 000

SOLDE

0

0

OBJET

Le rapport d'information n° 65 (2024-2025) de la commission des finances sur la préparation de l'échéance des contrats de concessions autoroutières, publié le 23 octobre 2024, met en avant les enjeux financiers soulevés par les investissements dits de seconde génération des sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA), qui constituent des opérations d'investissement prévues par les contrats et financées par les recettes tarifaires, mais n'ayant pas encore été réalisées par les SCA.

Il recommande que les services de l'État approfondissent le travail de recensement de ces investissements - entamé par l'Autorité de régulation des transports (ART) - et en évaluent précisément le montant financier. Il préconise également qu'un travail soit réalisé par l'État pour identifier les investissements qui demeurent pertinents et, pour ceux qui ne le seraient plus et qui généreraient donc un avantage financier injustifié pour les SCA, qu'une réflexion soit engagée pour les remplacer par des investissements en lien avec la transition écologique.

Le présent amendement vise à solliciter la réalisation d'une étude sur ces différents points par les services de l'État. Pour ce faire, il alloue 50 000 euros supplémentaires en 2025 au programme 203 « Infrastructures de transport » (action n° 47 « Fonctions support »), en AE et en CP.

L'article 40 de la Constitution et l'article 47 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) interdisant aux parlementaires d'augmenter les crédits de la mission, la mesure est gagée sur les crédits de l'action 07 « Pilotage, support, audit et évaluations » du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables ». L'objectif est que le Gouvernement puisse lever ce gage.


* 1 Source : réponse de l'Afit France au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 2 Source : réponse de la FUB et de Vélo & territoires au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 3 Source : réponse de la FUB et de Vélo & territoires au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 4 Loi n° 2023-1269 du 27 décembre 2023 relative aux services express régionaux métropolitains.

* 5 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.

* 6 Source : PLF pour 2025 - annexe budgétaire du programme 203.

* 7 Un département initialement volontaire - la Haute-Saône - s'étant rétracté.

* 8 Source : réponse de l'ART au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 9 Source : réponse de Départements de France au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 10 Source : Essentiel de la troisième édition du rapport sur l'économie des concessions autoroutières de l'ART, novembre 2024.

* 11 Source : réponse du Cerema au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 12 L'échelle va de 1 (ouvrage globalement en bon état) à 4 (ouvrage dont la structure est altérée par un défaut majeur).

* 13 Source : réponse du Cerema au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 14 Source : réponse du Cerema au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 15 Rapport d'information n° 65 (2024-2025) sur la préparation de l'échéance des contrats de concessions autoroutières, déposé le 23 octobre 2024.

* 16 Le rapport d'information indique que « dans ce premier recensement, l'ART a ainsi identifié des opérations d'investissement représentant pas moins de 38 élargissements pour environ 1 000 kilomètres de linéaire, soit plus d'un dixième du réseau autoroutier total » (page 128).

* 17 Loi n° 2023-1269 du 27 décembre 2023 relative aux services express régionaux métropolitains.

* 18 Source : réponse du GART au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 19 La LFI pour 2024 a relevé de 0,25 point le taux plafond du VM pour Paris et les départements de la petite couronne.

* 20 Source : réponse d'Intercommunalités de France au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 21 Source : réponse de l'UTPF au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 22 Source : réponse de la FNTV au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 23 Un amendement n°  I-2086 du Gouvernement a toutefois été adopté par le Sénat pour repousser cette échéance à 2027.

* 24 Source : Revue « Transports urbains », n° 141 de septembre 2022 consacré à l'avenir des véhicules intermédiaires.

* 25 Source : Revue « Transports urbains », n° 141 de septembre 2022 consacré à l'avenir des véhicules intermédiaires.

* 26 Source : The Shift Projet, Décarboner les mobilités dans les zones de moyenne densité, Rapport du groupe de travail dirigé par Francisco Luciano, 2017.

* 27 Source : réponse d'Aurélien Bigo au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 28 Source : réponse d'Aveli au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 29 L'écoscore évalue les émissions de CO2 liées à la fabrication du véhicule, à travers plusieurs composantes, notamment : le modèle du véhicule (nombre de places...), le lieu d'assemblage, le volume et le poids des matériaux, les caractéristiques de la batterie, le transport et la distance parcourue entre le lieu de production et le lieu de commercialisation.

* 30 Source : réponse d'Aurélien Bigo au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 31 Source : retour de Mobilians au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 32 Source : réponse de la PFA au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 33 Loi n° 2024-310 du 5 avril 2024 visant à favoriser le réemploi des véhicules, au service des mobilités durables et solidaires sur les territoires.

* 34 Source : réponse de l'UTPF au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 35 Source : réponse de Transport & Environnement au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 36 Source : réponse de Mobilians au questionnaire écrit du rapporteur pour avis.

* 37 La commission a également adopté un amendement tendant à allouer dès 2024 aux communes et groupements de communes exerçant la compétence voirie une fraction égale à un douzième du produit prévisionnel de cette taxe, qui est affectée intégralement à l'Afit France. Cela devait représenter environ 50 millions d'euros.

* 38 COI, Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leur transition

* 39 Loi n° 2023-1269 du 27 décembre 2023 relative aux services express régionaux métropolitains.

* 40 La commission a également adopté un amendement visant à assouplir les conditions requises pour lever le VM, au profit des AOM situées en zone peu dense en leur permettant de prélever le VM pour l'organisation d'un panel de services de transport plus large que les transports collectifs réguliers, prenant en compte le transport à la demande et les mobilités partagées et actives.

* 41 Avis n° 2024-009 du 1er février 2024 relatif au document de référence du réseau ferré national pour l'horaire de service 2024 modifié et 2025

* 42 Lors de l'examen du PLF pour 2025 à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a déposé un amendement  II-3714 visant à abaisser de 37 ETP le plafond d'emploi du programme 203. Si la ventilation de cette baisse parmi les opérateurs du programme n'est pas précisée, elle risquerait d'affecter particulièrement VNF.

* 43 La subvention pour charges de service public à VNF représente la quasi-totalité des crédits de l'action 42 (« Voies navigables ») du programme 203, stables par rapport à 2024 : 255,6 M€ (en AE et CP) hors fonds de concours.

* 44 Le défi de l'adaptation des territoires face aux inondations : simplifier l'action, renforcer la solidarité, rapport fait au nom de la mission d'information conjointe sur les inondations survenues en 2023 et au début de l'année 2024 par Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux (n° 775, 2023-2024), septembre 2024.

* 45 « Réarmer » nos pots dans la compétition internationale, rapport d'information fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable par Michel Vaspart, juillet 2020 (n° 580, 2019-2020).

* 46 La Stratégie nationale portuaire : une présentation très attendue, une ambition qui reste à concrétiser, rapport d'information fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable par Didier Mandelli et Martine Filleul, avril 2021 (n° 520, 2020-2021).

* 47 Loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue.

* 48 22 États membres sur 27.

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