L'ESSENTIEL

La mission « Direction de l'action du Gouvernement » fédère, dans un ensemble budgétaire commun, des entités diverses rattachées au Premier ministre.

Sous la responsabilité du secrétaire général du Gouvernement, deux programmes composent cette mission :

· Le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » (85,5 % des crédits de la mission) regroupe les crédits des cabinets et des administrations chargées des fonctions d'état-major, de stratégie et de coordination qui soutiennent le Premier ministre dans sa responsabilité de direction de l'action du Gouvernement ;

· Le programme 308 « Protection des droits et libertés » (14,5 % des crédits de la mission) rassemble les crédits de dix autorités indépendantes exerçant leurs missions dans le champ de la protection des droits de l'homme et des libertés publiques et individuelles.

Les crédits relatifs à la diffusion légale et à l'information administrative sont, pour leur part, inscrits dans le budget annexe « Publications officielles et information administrative », également examiné par le rapporteur.

Pour 2025, le projet de loi de finances (PLF) dote la mission « Direction de l'action du Gouvernement » d'un budget de 1,063 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 1,066 milliard d'euros en crédits de paiement (CP).

La mission « Direction de l'action du Gouvernement » ne connaît pas d'évolution de son périmètre en 2025 mais fait l'objet de plusieurs transferts en « base » du projet de loi de finances.

En raison de la fusion entre le programme 129 et le programme 352 « Innovation et transformation numériques », 22 millions d'euros sont transférés vers le programme 129 au profit de la direction interministérielle du numérique (Dinum).

Évolution à périmètre courant et par programme des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement »
(en euros)

Programme

AE
LFI 2024

AE
PLF 2025

Progression (en %)

CP
LFI 2024

CP
PLF 2025

Progression (en %)

129 - Coordination du travail gouvernemental (85,5 % des crédits)

881 693 809

909 249 251

+3,13

917 433 848

924 329 528

+0,75

308 - Protection des droits et libertés (14,5 % des crédits)

139 451 701

153 728 147

+10,24

135 402 866

141 455 030

+4,47

Total de la mission

1 021 145 510

1 062 977 398

+4,1

1 052 836 714

1 065 784 558

+1,23

Source : Commission des lois du Sénat, d'après les éléments du
projet annuel de performance de la mission annexé au PLF 2025

Cette faible progression des crédits s'inscrit dans la trajectoire de maîtrise des dépenses publiques, en particulier concernant les services qui dépendent du Premier ministre. Au sein du programme 129, quatre actions font l'objet d'une diminution de leurs crédits : la coordination du travail gouvernemental, la coordination de la sécurité et de la défense, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) et la coordination de la politique des ressources humaines en matière d'encadrement supérieur et dirigeant de l'État.

La mission comprend, en second lieu, des entités dont le périmètre d'activité s'accroît, à l'instar de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) ou encore du Défenseur des droits.

Ainsi, les mesures d'économies prévues en 2025 se concentreront sur le programme 129.

Reflétant les trajectoires budgétaires divergentes de chacun des programmes, le schéma d'emplois pour 2025 s'élève à - 20 équivalents temps plein (ETP) pour le programme 129 et + 18 ETP pour le programme 308. La majorité des suppressions de postes concerne l'action « Coordination du travail gouvernemental » qui voit ses effectifs diminuer de 17 équivalents temps plein, dont dix liés à l'achèvement de l'activité de la délégation interministérielle au jeux Olympiques et Paralympiques de Paris (Dijop).

Seules trois actions bénéficient d'une augmentation d'effectifs : la Cnil (+ 8 ETP), le Défenseur des droits (+ 4 ETP) et la HATVP (+ 6 ETP).

Évolution du schéma d'emplois de la mission
« Direction de l'action du Gouvernement » (hors opérateurs)

Schéma d'emplois (en ETP) - hors opérateurs

RAP 2023

LFI 2024

PLF 2025

Programme

Action

129

Action 01 : Coordination du travail gouvernemental

17,4

22

- 17

Action 02 : Coordination de la sécurité et de la défense

97,4

56

0

Action 03 : Coordination de la politique européenne

3,7

1

0

Action 10 : Soutien

2,2

9

- 1

Action 11 : Stratégie et prospective

5,2

0

0

Action 15 : Mildeca

- 1

0

0

Action 16 : Dinum

9,6

30

- 1

Action 17 : Diese

8

8

- 1

Sous-total programme 129

142,5

126

- 20

308

Action 02 : Cnil

19,5

10

8

Action 05 : CGLPL

1,5

2

0

Action 06 : Autres AAI

2

5

0

Action 09 : Défenseur des droits

4,3

10

4

Action 10 : Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

4

4

6

Action 12 : Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement

2

2

0

Action 13 : Commission du secret de la Défense nationale

- 1

0

0

Sous-total programme 308

32,3

33

18

TOTAL MISSION

174,8

159

- 2

Source : éléments transmis par le Secrétariat général du Gouvernement

La mission « Publications officielles et information administrative » est quant à elle structurée en deux programmes budgétaires composant le budget annexe « Publications officielles et information administrative » (BAPOIA) géré par la direction de l'information légale et administrative (Dila). Le programme 623 « Édition et diffusion » recouvre les activités de diffusion légale, d'information administrative, d'imprimerie et d'édition. Le programme 624 « Pilotage et ressources humaines » regroupe les moyens logistiques et humains.

Dans le prolongement des efforts réalisés les années précédentes, la Dila participe activement à la maîtrise des dépenses publiques. Les crédits du BAPOIA s'élèvent pour 2025 à 147 millions d'euros en AE et 150,6 millions d'euros en CP, soit une diminution de 12,1 millions en AE et de 1,1 million d'euros en CP par rapport à 2024 (- 7,6 % en AE et - 0,7 % en CP). La prévision des recettes du budget annexe s'élève à 181 millions d'euros en 2025 contre 167,3 millions d'euros en LFI 2024.

Parmi les événements structurants de 2024, figure la décision du Conseil d'État du 6 février qui a reconnu les missions de la Dila comme relevant d'un service public administratif et ses agents d'un statut de droit public. La Dila est par conséquent conduite à régulariser au 1er janvier 2025 le statut des agents recrutés sur contrats de droit privé par la direction des Journaux officiels.

Sur proposition du rapporteur pour avis, qui approuve, malgré l'insuffisante programmation des dépenses pour certaines entités, les principales orientations de la mission budgétaire, la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative » du projet de loi de finances pour 2025.

I. UNE ÉVOLUTION BUDGÉTAIRE CONTRASTÉE DANS UN CONTEXTE GÉNÉRAL DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES

A. UNE DIMINUTION SUBSTANTIELLE, SINON PRÉOCCUPANTE, DES CRÉDITS ALLOUÉS AU PROGRAMME 129, PORTANT EN PARTICULIER SUR LES ACTIONS DE COORDINATION

Évolution des crédits du programme 129 demandés en 2025
par rapport à la loi de finances pour 2024
(en euros)

Intitulé
de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI
pour 2024

Demandées
pour 2025

Évolution
(en %)

LFI
pour 2024

Demandés
pour 2025

Évolution
(en %)

01

Coordination du travail gouvernemental

118 346 799

114 448 411

-3,29

118 346 799

114 448 411

-3,29

02

Coordination de la sécurité et de la défense

439 464 025

424 940 577

-3,3

438 887 793

425 495 600

-3,05

03

Coordination de la politique européenne

17 536 511

18 555 928

+5,81

17 536 511

18 555 928

+5,81

10

Soutien

123 907 465

143 815 787

+16,07

154 761 736

157 790 199

+1,96

11

Stratégie et prospective

23 096 738

23 446 924

+1,52

23 096 738

23 446 924

+1,52

13

Ordre de la Légion d'honneur

31 037 854

31 500 000

+1,49

31 037 854

31 500 000

+1,49

15

MILDECA

16 644 960

16 603 139

-0,25

16 644 960

16 603 139

-0,25

16

Coordination de la politique numérique

61 298 105

85 935 663

+40,19

61 298 105

85 935 663

+40,19

17

Coordination de la politique des ressources humaines en matière d'encadrement supérieur et dirigeant de l'État

50 361 352

50 002 822

-0,71

50 361 352

50 002 822

-0,71

Total

881 693 809

909 249 251

+3,13

917 433 848

924 329 528

+0,75

Source : PAP de la mission « Coordination du travail gouvernemental »
annexé au projet de loi de finances pour 2025

1. Des réductions de dépenses ciblées autour des actions de coordination

Dans le contexte actuel de rationalisation des dépenses publiques, les services du Premier ministre contribuent pleinement à l'effort demandé aux administrations. Les crédits du programme 129, hors mesures de transferts, s'élèvent à 897 millions d'euros, en diminution de 20,81 millions d'euros par rapport à la LFI 2024 (- 2,3 %).

En raison de la fusion entre le programme 129 et le programme 352 « Innovation et transformation numériques », 3 millions d'euros de crédits de titre 2 et 19 millions d'euros de crédits hors titre 2 sont transférés en « base » du projet de loi de finances 2025 vers le programme 129 au profit de la direction interministérielle du numérique (Dinum).

La recherche d'économies s'est tout particulièrement concentrée autour des actions de coordination menées dans le cadre du programme.

À rebours de la trajectoire empruntée ces dernières années, la ventilation des crédits au sein du programme se caractérise par une réduction des dépenses allouées à l'action « Coordination de la sécurité et de la défense ». Celle-ci, qui représente 50 % du budget total du programme, voit ses crédits diminuer de 3,3 % en autorisations d'engagement et de 3 % en crédits de paiement en 2025 par rapport à la LFI 2024.

L'action « Coordination du travail gouvernemental » voit également ses crédits diminuer de 3,3 % en AE et en CP pour s'établir à 114,5 millions d'euros.

À périmètre constant, l'action « Coordination de la politique européenne » accuse, elle aussi, une diminution de crédits de l'ordre 'de 1,2 million d'euros (- 1 %). Les crédits transférés au profit du Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) s'élèvent à 5 millions d'euros.

Enfin, l'action « Coordination de la politique des ressources humaines en matière d'encadrement supérieur et dirigeant de l'État » connaît également une diminution de ses crédits, de l'ordre 0,4 million d'euros, soit près de 1 % par rapport à 2024.

2. Une augmentation faciale des dépenses du programme résultant de l'absorption par la Dinum du programme 352

Conformément à la recommandation de la Cour des comptes issue de son rapport sur le pilotage de la transformation numérique en 20231(*), une simplification de la maquette budgétaire a été menée via la fusion du programme 352 « Innovation et transformation numériques » et du programme 129. Le financement de l'action de la Dinum par un seul programme budgétaire permet de rationaliser les ressources supports.

Les moyens 2025 de la Dinum augmentent dès lors facialement en effectifs et en crédits du seul fait de la fusion du programme 352 et du programme 129. À ce titre, ont été transférés en base du PLF 2025 vers le programme 30 ETPT et 22 millions d'euros de crédits.

Les dotations de la Dinum passent de 135,5 millions d'euros en AE et 141 millions d'euros en CP en LFI 2024 à 85,8 millions d'euros en AE et 86,4 millions d'euros en CP prévus dans le PLF 2025 (en prenant en compte les crédits qui étaient dédiés au programme 352), soit une diminution de 49,7 millions d'euros en AE et de 54,6 millions d'euros en CP entre les deux exercices.

Cette baisse s'explique principalement par la suppression du fonds d'investissement « Numérique et données » pour la planification écologique qui s'élevait à 50 millions d'euros.

En termes d'effectifs, si le plafond d'emplois de la Dinum est en hausse de 25 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2025, celle-ci est liée aux 30 ETPT affectés au dispositif des entrepreneurs d'intérêt général, issu de la fusion entre les programmes. La correction technique correspondant à la révision du schéma d'emplois en 2024 a conduit à la réduction de 5 ETPT.

B. UN RENFORCEMENT IMPORTANT DES MOYENS DÉVOLUS AUX AUTORITÉS DU PROGRAMME 308 REFLÉTANT LA CROISSANCE DYNAMIQUE DE 'L'ACTIVITÉ DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES

Évolution des crédits du programme 308 demandés en 2025
par rapport à la loi de finances pour 2024
(en euros)

Intitulé
de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI
pour 2024

Demandées
pour 2025

Évolution
en %

LFI
pour 2024

Demandés
pour 2025

Évolution
en %

02

Cnil

28 646 143

30 592 501

+6,79

28 646 143

30 592 501

+6,79

03

Arcom

50 939 100

51 235 879

+0,58

50 939 100

51 235 879

+0,58

05

CGLPL

10 308 509

5 811 422

-43,62

6 259 674

6 288 305

+0,46

06

Autres autorités indépendantes

5 034 765

5 057 390

+0,45

5 034 765

5 057 390

+0,45

06.01

Cada

1 895 350

2 054 898

+8,42

1 895 350

2 054 898

+8,42

06.02

CCNE

1 574 833

1 539 353

-2,25

1 574 833

1 539 353

-2,25

06.03

CNCDH

1 564 582

1 463 139

-6,48

1 564 582

1 463 139

-6,48

09

Défenseur des droits

30 107 399

31 457 379

+4,48

30 107 399

31 457 379

+4,48

10

HATVP

10 241 638

25 296 275

+146,99

10 241 638

12 546 275

+22,5

12

CNCTR

3 520 188

3 530 210

+0,28

3 520 188

3 530 210

+0,28

13

CSDN

653 959

747 091

+14,24

653 959

747 091

+14,24

Total

139 451 701

153 728 147

+10,24

135 402 866

141 455 030

+4,47

Source : PAP de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » annexé au PLF pour 2025

Bénéficiant d'une visibilité renforcée, la majorité des autorités du programme 308 sont soumises à une croissance continue de leurs activités. La progression du nombre de missions confiées aux autorités indépendantes et l'extension de leur champ s'accompagnent logiquement d'une augmentation des crédits qui leur sont accordés.

1. Une programmation budgétaire dynamique qui tient compte des missions nouvelles confiées aux autorités du programme

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une augmentation des crédits dédiés à la protection des droits et libertés en 2025 de 14,3 millions d'euros en AE (+ 10 %) et de 6,06 millions d'euros en CP (+ 4 %). Cette évolution est en grande partie liée à l'octroi d'une dotation exceptionnelle de 15,2 millions d'euros en AE et 2,43 millions d'euros en CP au profit de la HATVP pour le financement de son projet immobilier et la signature d'un bail de neuf ans.

Le PLF 2025 prévoit également un renforcement des moyens de la HATVP pour la mise en oeuvre de la loi du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères. La mise en application de cette loi induit une charge de travail nouvelle pour les agents de la HATVP qui vont développer la mise en place d'un dispositif « FARA (foreign agents registration act) à la française », un contrôle du nouveau risque d'ingérence étrangère lors de projets de reconversion professionnelle et un contrôle du financement des « think tanks ». À partir du 1er juillet 2025, l'institution devra également tenir deux répertoires concernant respectivement les activités d'influence réalisées pour le compte d'un mandant étranger et les dons et versements reçus de la part de toute puissance ou personne morale étrangère extérieure à l'Union européenne. La HATVP voit dès lors ses effectifs renforcés de six ETP.

Au titre de la mise en place en 2025 du filtre CYBER - « anti-arnaque » -, la Cnil bénéficiera d'une augmentation de 1,95 million d'euros de crédits hors titre 2. Cette nouvelle mission a été instaurée par la loi du 21 mai 2024 visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (SREN) afin de mieux protéger les internautes des risques encourus lors de l'accès à des pages ou à des sites internet malveillants hébergés en France et hors Europe dont le nombre potentiel serait de l'ordre de 300 000 par an. Ces pages et sites pourront être déréférencés ou voir leur accès empêché. La Cnil connaît,
au titre de cette nouvelle compétence, une progression de ses effectifs à hauteur de 8 ETP. Afin d'assurer la proportionnalité du dispositif, une personnalité qualifiée désignée parmi les membres du collège de la Cnil sera chargée du contrôle de ces mesures.

L'augmentation des crédits s'explique également par l'octroi de 0,92 million d'euros de mesures nouvelles au Défenseur des droits pour financer les dépenses de fonctionnement des vingt nouveaux délégués territoriaux. En complément, le schéma d'emploi pour 2025 prévoit 4 ETP supplémentaires pour accompagner la croissance de ses activités et renforcer l'équipe juridique.

Le plafond d'emplois du programme augmentera quant à lui de 22 ETPT en 2025 pour atteindre 753 ETPT sous l'effet des évolutions des schémas d'emplois 2024 et 2025 sur l'exercice 2025.

2. La poursuite de l'élargissement des missions historiques des différentes entités, notamment en termes de cybersécurité

Les prévisions du projet de loi finances tiennent également compte de l'extension des missions historiques des autorités et viennent renforcer les moyens dévolus à celles-ci.

Dans cette optique, les moyens de la Cnil intègrent l'entrée en application progressive du paquet législatif européen relatif aux services numériques (Règlement sur la gouvernance des données 2(*), Règlement sur les données3(*), Règlement sur les marchés numériques4(*), Règlement sur les services numériques 5(*), Espace européen des données de santé6(*)). Ces nouvelles législations européennes sur le numérique aspirent à mieux protéger les citoyens européens et favoriser la croissance économique grâce à une innovation fondée sur une meilleure utilisation de la donnée. La Cnil n'est désormais plus seulement une autorité garante de la sauvegarde des droits fondamentaux et de la protection de la vie privée, mais devient pleinement un organe de régulation.

Les moyens et effectifs du DDD sont de nouveau renforcés pour permettre la refonte de ses outils numériques afin de faciliter sa saisine par Internet et sécuriser le dispositif d'orientation et de protection des lanceurs d'alerte, dont le nombre de dossiers a plus que doublé (+128 %) depuis la refonte du dispositif en 2022. L'institution connaît également depuis plusieurs années une croissance de son activité relative aux appels reçus sur ses plateformes téléphoniques (plateformes « historique », anti-discriminations et numéro d'appel des détenus) qui connaissent une augmentation substantielle (près de 119 000 appels en 2023, soit +18 % par rapport à l'exercice précédent).

Par ailleurs, le contrôle préalable à la nomination dans certains emplois de l'État pour la HATVP, notamment des conseillers ministériels, et le suivi des réserves émises pendant trois ans constituent désormais une activité très pesante pour l'autorité.

L'activité de la Commission nationale d'accès aux documents administratifs (CADA) est également accrue par la mise en oeuvre progressive depuis 2023 de la procédure de traitement des demandes sérielles qui autorise désormais la Commission à n'instruire qu'un seul dossier par série et à n'émettre qu'un seul avis posant les règles de communicabilité applicables à l'ensemble de la série. À ce titre, le budget de la CADA est en augmentation de 8,5 % pour l'année 2025.

Enfin, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) s'apprête à mettre en place un système de gratuité des courriers de saisines en libre réponse, ce qui risque de susciter un afflux de saisines en 2025 et dans les années à venir. Cette augmentation pourrait conduire, au moins pour partie, à une augmentation de courriers de rappel de saisines ou de compléments à des saisines déjà en cours.

Une stratégie immobilière à parfaire mais des efforts à souligner

Dans le prolongement des réflexions menées par Nathalie Delattre, qui rapportait précédemment les crédits de la mission, le rapporteur souligne l'hétérogénéité de l'efficience des différentes opérations immobilières nouvellement réalisées ou projetées.

Le rapporteur salue l'opération immobilière envisagée par le CGLPL. Celui-ci occupait jusqu'en 2024 une surface de 744 m². Il a dès lors opté pour un montage de sous-location avec FranceAgriMer sur une surface resserrée (380 m²), ce qui permet une sous-consommation de la dotation initiale de 2,8 millions d'euros. Toutefois, ce projet est menacé par la libération incertaine de ces locaux en 2025.

Le rapporteur se félicite également des gains financiers et fonctionnels réalisés grâce à l'opération de regroupement au sein de l'ensemble immobilier Ségur-Fontenoy de services du Premier ministre et d'autorités administratives indépendantes mais regrette que la surface utile brute (SUB) par résident demeure élevée. Ces gains ont été évalués à un peu plus de 7,3 millions d'euros par an.

Concrètement, l'opération se traduit par l'abandon de locations par les différentes entités concernées qui étaient bien souvent logées dans des conditions financières qui dépassaient nettement le coût maximum fixé par la direction de l'immobilier de l'État (DIE) et dont les services étaient éclatés sur différents sites. Ont notamment été résiliés les deux baux de la Cnil et ceux du Défenseur des droits. Le regroupement a également permis de céder plusieurs biens parmi lesquels l'hôtel de Broglie acquis pour 63 millions d'euros par l'Assemblée nationale, et de libérer deux ensembles immobiliers, réaffectés à d'autres services de l'État. La mutualisation des fonctions support a permis de réduire les effectifs d'une cinquantaine de postes.

Toutefois, le rapporteur pointe le niveau encore élevé de la SUB par résident, s'établissant à 23,38 m² en 2025 alors que le plafond fixé par la DIE est de 18 m². Hors emprises des services du Premier ministre qui, en raison de la typologie singulière du parc immobilier ainsi que des fonctions des résidents, ne permettent pas la densification nécessaire pour atteindre la cible de la circulaire, le ratio d'occupation s'établit, pour le bâtiment Ségur-Fontenoy, à 20,39 m² par résident.

Le rapporteur apparaît néanmoins circonspect quant au choix de la HATVP d'opter pour la signature d'un bail d'une durée de neuf ans auprès d'un bailleur privé.

Certes, la Haute Autorité a anticipé ce projet de longue date et mobilisé la DIE, et le site retenu sera également occupé par l'Arcom, permettant ainsi des mutualisations, notamment s'agissant d'espaces de réunion et de la gestion du site. Le rapporteur s'interroge cependant sur les raisons qui ont conduit à ce qu'aucun site domanial n'ait pu être proposé à la HATVP et estime regrettable le recours à des baux locatifs pour des entités ayant vocation à s'installer de manière pérenne. Le coût total de l'opération, qui s'élève à 15 millions d'euros - soit un montant nettement supérieur au budget annuel de l'autorité -, apparaît lui aussi soutenu.

Enfin, le rapporteur invite à poursuivre l'expérimentation de la pratique, lorsque celle-ci est possible, de bureaux non attribués (flex office) dans la perspective d'une évaluation ultérieure. La Dinum a déjà initié cette pratique, à partir de septembre 2024, qui permet à ce jour d'accueillir tous les effectifs dans de meilleures conditions à surface constante. La Cnil lancera elle aussi une première expérimentation dès la fin 2024, pour deux de ses services.

II. UN BUDGET SOUCIEUX DE SOUTENIR L'ACCÈS AUX DROITS ET DE LA TRANSPARENCE DE L'INFORMATION PUBLIQUE, EN PARTIE GRÂCE AUX EFFORTS MENÉS EN MATIÈRE DE NUMÉRISATION DE L'ACTION ADMINISTRATIVE

A. UN RENFORCEMENT DES DISPOSITIFS EN FAVEUR DE LA TRANSPARENCE ET DE L'ACCÈS AUX DROITS, NOTAMMENT GRÂCE AU DÉVELOPPEMENT DU NUMÉRIQUE MAIS DONT LA NOTORIÉTÉ DEMEURE TROP FAIBLE

1. Un budget axé sur les préoccupations d'accès aux droits et à la transparence de l'information publique

Le rapporteur salue la mise en oeuvre du plan d'action national 2024-2026 pour un Gouvernement ouvert. Parmi les actions qui ont vocation à être menées ou poursuivies, la Dinum déploie, par l'intermédiaire de son département ETALAB, un programme ambitieux de mise à disposition des données publiques et joue un rôle d'impulsion auprès des ministères en faveur de la numérisation de l'accès aux services publics.

Dans le même esprit, la plateforme documentation-administrative, pilotée par la direction des services administratifs et financiers (DSAF) du Premier ministre, tend à renforcer l'information du public en rendant davantage compte de l'action des services du Premier ministre et des autorités administratives indépendantes. Elle facilite la mise à disposition en données ouvertes (open data) des documents produits et détenus par les services de l'État et répond ainsi au droit d'accès des citoyens aux documents administratifs.

En termes de transparence et d'ouverture des données, la France se classe première parmi les pays européens. À ce titre, le numérique contribue fortement à l'objectif de confiance des citoyens dans l'action publique.

La Dila joue également un rôle essentiel dans cette politique via ses différents sites comme Légifrance, Service public et Vie publique. Davantage que favoriser l'accès aux droits, les actions menées par la direction vise à favoriser l'accès au droit et à simplifier son approche, notamment par l'intermédiaire de démarches de vulgarisation, à destination de publics qui pourraient faire preuve d'appréhension face à la complexité de l'ordre normatif français et européen.

Dans le même temps, l'ouverture par la Cnil, le 1er décembre 2022, d'un téléservice permettant de recueillir les demandes d'exercice des droits indirects est plébiscitée par le public. Cette évolution a entraîné une hausse de 220 % des demandes reçues par la Cnil (23 677 en 2023 contre 6 555 en 2022) et qui devrait continuer à croître en 2025.

Le Défenseur des droits, qui documente régulièrement, à travers le traitement de ses réclamations et la publication de rapports et études, les principaux obstacles dans l'accès aux droits, s'apprête à lancer la deuxième édition de sa grande enquête sur ce sujet. Il reviendra sur les difficultés rencontrées en matière d'accès aux droits et leur évolution, notamment pour les publics précaires et vulnérables. La précédente enquête, présentée en 2017, a mis en exergue, parmi les autres constats, qu'au sein des personnes évoquant des difficultés pour résoudre un problème, la difficulté à contacter un correspondant est le plus fréquemment rapporté. Aussi, une personne sur trois cite le manque d'information que ce soit en termes de facilité d'accès à celle-ci ou de recours à l'encontre d'une décision de l'administration.

2. Une progression des programmes numériques mais dont la pleine exécution est menacée par une baisse des dépenses

L'année 2025 se caractérise par la mise en oeuvre de nombreuses initiatives numériques pour renforcer l'accès aux droits et la transparence de l'action publique.

À ce titre, trente postes ont été transférés à la Dinum pour 2025 afin d'amplifier le programme « Entrepreneurs d'intérêt général » et de soutenir les projets numériques des ministères. Cette mesure s'inscrit dans le sillage de la stratégie numérique de l'État, publiée en mars 2023, qui souligne la nécessité d'améliorer l'attractivité des métiers numériques de l'État et d'internaliser les compétences clefs dans les domaines numériques (pilotage stratégique, direction technique, etc.). En la matière, le rapporteur salue la volonté
de la Dinum pour 2025 de réduire le recours aux prestataires extérieurs et de réinternaliser certaines fonctions en vue d'améliorer sa réactivité et son adaptabilité face aux besoins grandissants des administrations.

Dans la même optique, la Dila développe des programmes numériques à l'instar de l'éditeur légistique Edile expérimenté à partir de 2023 et dont l'utilisation s'étend progressivement à tous les ministères. La finalité du projet, dont l'aboutissement est prévu d'ici la fin de l'année 2025, consiste à interfacer Edile avec l'application Solon, qui gère le processus de validation des textes normatifs, et à permettre une production automatique de projets de textes conformes aux règles légistiques et aux formats de diffusion. Les retours des utilisateurs sont encourageants, présentant l'outil comme ergonomique et intuitif et permettant un gain de temps important.

Cependant, le rapporteur met en garde contre le sous-financement de certains programmes numériques qui risquerait d'obérer l'efficacité escomptée.

À cet égard, la Cnil a évalué avoir besoin de trois emplois supplémentaires dès 2025 et 200 000 euros de crédits de fonctionnement en plus, ainsi qu'un financement progressif jusqu'en 2027, pour un total cumulé de 400 000 euros et cinq emplois. À ce jour, ni ces emplois ni ces crédits n'ont été accordés pour 2025, laissant la mission « cyber filtre » sous-financée.

Au vu des nombreux efforts déployés par la Cnil pour optimiser l'utilisation de ses ressources, remettre en cause les moyens accordés à cette institution apparaît préjudiciable. La Cnil se retrouverait ainsi dans l'incapacité de mener à bien la totalité de ses missions, notamment répressives qui représentent une source de recettes d'en moyenne 118 millions d'euros par an au budget de l'État.

La situation est également préoccupante pour les autres entités du programme 308, menacé par un gel des crédits. La HATVP a par exemple indiqué qu'elle risquerait d'accuser un retard dans la mise en oeuvre des deux registres « influence étrangère » créés par la loi du 25 juillet 2024.

Parallèlement, le rapporteur souhaite alerter sur le risque que représente le « tout numérique ». Il partage le constat du Défenseur des droits qui recense parmi les principaux obstacles dans l'accès aux droits la fermeture de guichets des services publics associée à la dématérialisation des démarches administratives. Par ailleurs, il redoute que la dégradation des relations entre l'administration et les usagers, susceptible de créer un climat de défiance d'une part et de suspicion de l'autre, ne crée des situations de rupture de droits ou de non-recours. En ce sens, il apparaît opportun que la présence de terrain des services publics, avec notamment les maisons France Services, soit maintenue. À cet égard, le rapporteur aspire à ce que les agents soient davantage formés par les différentes entités vers lesquelles ils renvoient en cas de complexité des réponses à apporter (caisses d'allocations familiales, directions régionales des finances publiques, etc.).

3. Les actions menées souffrent d'un déficit de notoriété auprès du grand public et s'adressent encore trop peu aux collectivités locales

Le rapporteur exprime le souhait de voir les administrations de la mission déployer davantage leurs actions auprès des collectivités territoriales, y compris les plus petites structures, encore trop éloignées de ces politiques. Dans cette perspective, il estime bienvenue la création du programme Transformation numérique des territoires (TNT), lancé en 2021 et piloté par la Dinum, pour une durée de trois ans. Ce programme constitue le principal programme de coopération État - collectivités en matière d'administration numérique et vise à former au numérique les agents territoriaux afin de garantir une meilleure utilisation des données et le déploiement de l'intelligence artificielle au sein des administrations locales.

Dans le même esprit, des institutions comme le Défenseur des droits entendent accroître leurs actions en lien avec les collectivités, notamment à travers le déploiement du réseau territorial et des partenariats en poursuivant « l'aller-vers » les publics les plus éloignés du droit. Ces initiatives rejoignent les constats de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) qui souligne que la mise en oeuvre effective des droits fondamentaux se heurte à l'inégale répartition des ressources et des moyens entre les territoires.

Dans le cadre de sa mission de conseil aux pouvoirs publics, la Cnil accompagne elle aussi les collectivités territoriales dans leur mise en conformité au RGPD, notamment sur les aspects cyber. Ainsi, elle produit des contenus dédiés aux collectivités et entretient des liens privilégiés avec les trois grandes associations d'élus locaux (Association des maires de France, Régions de France et Départements de France).

Les grands axes de collaboration sont, d'une part, la sensibilisation des élus et le rôle d'interface des associations dans la centralisation des problématiques récurrentes et, d'autre part, l'accompagnement via des réponses à des demandes de conseil. Dans cette perspective, la Cnil a également lancé un appel à projets à destination, entre autres, des collectivités territoriales sur des projets impliquant l'usage de l'intelligence artificielle dans le cadre de services publics, en particulier pour améliorer la qualité du service rendu, faciliter leurs accès et soutenir la performance des agents.

Le MOOC (massive open online course7(*)) produit par la Cnil s'est enrichi d'un nouveau module consacré aux collectivités territoriales composé de quinze thématiques parmi lesquelles les sujets relatifs aux téléservices, aux registres d'alerte et de protection des populations ou aux rançongiciels. Environ 35 000 utilisateurs se sont connectés à ce nouveau module, ce qui représente un taux élevé de suivi pour une formation à distance.

Le rapporteur regrette néanmoins le déficit de notoriété de ces acteurs tant auprès des élus et des collectivités qu'auprès du grand public. Il salue dès lors les opérations visant à accroître leur visibilité comme c'est le cas de la Cnil avec sa stratégie d'interventions hors d'Île-de-France, sous la forme des journées RGPD, organisée dans une collectivité différente chaque année. Elle a aussi noué un partenariat éditorial avec la revue Maires de France visant à valoriser ses ressources au travers de la publication de fiches pratiques renvoyant aux documents sources ou traiter les problématiques juridiques soulevées par les remontées de terrain.

Aussi, le Défenseur des droits prévoit en 2025 de faire connaître à l'ensemble des responsables publics ses recommandations visant à assurer un meilleur respect des droits des usagers par les administrations et de mener une grande opération « hors-les-murs » intitulée « Place aux droits ! » dans un département à dominante rurale. Il souligne que la notoriété du nouveau cadre juridique protégeant les lanceurs d'alerte reste à construire.

Le CGLPL entend quant à lui profiter de la diffusion de son nouveau logo fin 2024 pour entamer une campagne d'affichage et accroître sa notoriété.

B. LA PERSPECTIVE D'UN DÉVELOPPEMENT DES OUTILS D'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE INSUFFISANT

1. Un développement bienvenu des instruments d'intelligence artificielle tempéré par un reflux important des investissements en la matière

Nombreuses sont les institutions qui, à raison, s'acheminent vers davantage d'outils d'intelligence artificielle. Compte tenu des gains potentiels liés aux dispositifs d'intelligence artificielle et de la rapidité avec laquelle ils se développent, il semble pertinent de leur consacrer une part significative des investissements qui seront réalisés dans les années à venir. Le rapporteur tient à réaffirmer la nécessité de ne pas prendre de retard dans ce domaine, craignant que ce retard engendre à l'avenir une « dette technologique » liée au décrochage technologique que connaîtrait l'administration française.

D'ores et déjà, des autorités telles que la Cnil s'emploient à moderniser leurs outils informatiques et à recourir à l'intelligence artificielle pour améliorer leurs performances. À ce titre, peuvent être cités des projets ambitieux comme la participation au projet de classification des amendements, développé par la DGFiP, permettant de résumer les amendements.

La Dila a de son côté mené plusieurs projets en matière d'intelligence artificielle générative. Parmi les principaux projets figurent :

· le projet « THEIA » qui vise à automatiser la pose de liens de citation (références législatives, réglementaires, etc.) dans les textes publiés au Journal officiel et ainsi augmenter le nombre de textes consolidés ;

· le développement d'un agent conversationnel sur l'information administrative pour lequel la phrase d'expérimentation a abouti, en janvier 2024, avec des premiers résultats encourageants. Il a été décidé, dans un premier temps, de mettre à disposition cet outil exclusivement aux agents de la Dila. Un responsable « intelligence artificielle » a été recruté pour renforcer l'équipe interne et mettre en oeuvre le plan d'extension à de nouveaux cas d'usage.

La Dinum a également manifesté son intention d'amplifier ses travaux en matière d'intelligence artificielle au service de l'action publique par l'octroi de 3 millions d'euros supplémentaires en 2025. Dans ce cadre, les financements de la Dinum sont complétés par le fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP) à hauteur de 6,5 millions d'euros. Toutefois, les crédits alloués à la Dinum en matière d'intelligence artificielle apparaissent insuffisants pour que l'ensemble des projets et des missions soient menés pleinement et efficacement. À budget constant, le rythme des chantiers en cours va vraisemblablement ralentir. Une démarche de recherche de financements au niveau européen est en cours pour soutenir les projets en manque de moyens mais rien ne garantit que celle-ci s'avère fructueuse.

En ce qui concerne la Cnil, le rapport du Sénat relatif à la proposition de législation européenne sur l'intelligence artificielle du 30 mars 20238(*) souligne que, pour remplir efficacement ses nouvelles missions de surveillance des systèmes d'intelligence artificielle, la Cnil devrait bénéficier d'un renforcement progressif de ses ressources humaines, impliquant notamment le recrutement d'ingénieurs spécialisés en intelligence artificielle et de juristes en droit des nouvelles technologies. Le rapporteur s'associe à cette recommandation et réaffirme l'opportunité d'un renforcement dès 2025 des moyens de la Cnil consacrés à l'intelligence artificielle, que ce soit en termes d'emplois (+ 8 ETP) ou de crédits demandés (+ 0,45 million d'euros).

Malgré les efforts, les moyens budgétaires actuels de la Cnil lui permettent à peine de maintenir à niveau ses activités historiques de protection des données personnelles, toutes en forte croissance du fait des besoins de la population.

2. Un développement de l'intelligence artificielle encadré par le souci constant du respect de la protection des données personnelles

Le poids des algorithmes devient crucial dans les traitements de données à caractère personnel et les risques associés à un dispositif d'intelligence artificielle sont proportionnels à la sensibilité des données utilisées. Pour répondre à ce besoin, un service de l'intelligence artificielle a été créé en 2023 au sein de la direction des technologies et de l'innovation à la Cnil et est actuellement doté de cinq emplois.

À l'issue d'une consultation publique, la Cnil a publié le 8 avril 2024 ses premières recommandations sur le développement des systèmes d'intelligence artificielle, impliquant un traitement de données personnelles, notamment dans les administrations publiques. Ces orientations doivent aider les professionnels à concilier innovation et respect des droits des personnes pour le développement innovant et responsable de leurs systèmes d'intelligence artificielle.

La Cnil agit résolument pour que les acteurs intègrent la protection des données par défaut, via l'organisation de consultations publiques, l'édiction d'actes de droit souple ou encore la création de tables doctrinales.

Par ailleurs, de nouvelles législations européennes sur le numérique sont apparues afin de mieux protéger les citoyens européens grâce à une innovation fondée sur une meilleure utilisation de la donnée. Ces textes - RGN (règlement sur la gouvernance des données)9(*), RD (règlement sur les données)10(*), RSA (règlement sur l'intelligence artificielle)11(*), RSN (règlement sur les services numériques)12(*) et RMN (règlement sur les marchés numériques)13(*) - viennent établir un nouveau cadre de gouvernance de la donnée, attribuant de nouvelles compétences aux régulateurs existants. La mise en oeuvre de ces textes, qui incombe à différents régulateurs avec des chevauchements fréquents, implique une inter-régulation et une coopération entre les régulateurs compétents. La loi du 21 mai 2024 visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (SREN) vient à ce titre étendre le champ de compétences de la Cnil lui attribuant le pouvoir de saisir tout document sous le contrôle du juge ou la possibilité d'enregistrer les réponses des personnes auditionnées. Une application effective de ces textes nécessite une articulation efficace entre les régulateurs de l'espace numérique (Cnil, Arcom, Arcep, DGCCRF, etc.). À l'occasion de son audition, la Cnil a indiqué s'inscrire pleinement dans cette collaboration, déjà mise en oeuvre sur de nombreux aspects et qui a vocation à s'intensifier.

Aussi, afin de mener ses nouvelles missions, la Cnil dispose d'un pouvoir de contrôle lui permettant d'obtenir communication de tout document nécessaire, sans que le secret ne puisse lui être opposé.

Un respect scrupuleux de l'obligation de transposition des directives,
malgré un réajustement ponctuel en 2024

Le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) veille au respect de l'obligation de transposition des directives européennes par les ministères et les appuie dans leurs travaux.

L'objectif de déficit de transposition des directives européennes a été fixé par le Conseil européen de Bruxelles de 2007 à 1 %. Dans ses conclusions, le Conseil rappelle qu'il convient d'accorder systématiquement un degré de priorité élevé à la transposition complète, cohérente et en temps utile des dispositions de cette directive. Les autorités françaises accordent une attention particulière à la transposition ponctuelle, effective, complète et fidèle des directives comme en témoigne la mobilisation des départements ministériels, sous l'égide du SGAE et du Secrétariat général du Gouvernement (SGG). À cet égard, la France se place en 2023 au premier rang avec 0,1 % de déficit de transposition pour une moyenne des membres de l'Union européenne à 0,9 % et atteint très régulièrement le seuil de 0,5 % de déficit.

La cible sera respectée pour l'année 2024 malgré une probable dégradation des résultats de transposition autour de 0,8 %. Cette dégradation s'explique principalement par le contexte politique de l'été 2024 et le décalage de l'examen des projets de loi.

Le SGAE et le SGG coopèrent étroitement dans le suivi de la mise en oeuvre du droit de l'Union européenne en France notamment dans le cadre des travaux du groupe à haut niveau (GHN). La circulaire du 22 mars 2024 relative à la mise en oeuvre du droit de l'Union européenne prévoit l'organisation de quatre GHN par an. À l'issue des auditions réalisées auprès de ces deux services, le rapporteur tient à mettre en exergue la fluidité des relations entre ces services dont les effets se font ressentir positivement en matière de transposition.

Le SGAE signale toutefois que le délai standard compris entre 18 et 24 mois, n'est pas toujours suffisant, notamment pour les textes les plus denses en mesures de transposition. Il apparaît dès lors souhaitable que les autorités françaises fassent preuve de vigilance lors des négociations et qu'elles commencent le travail de mise en oeuvre du droit européen dès qu'intervient l'accord politique entre les colégislateurs.

Source : Tableau de bord de la commission européenne

III. LA BONNE GESTION DU BUDGET ANNEXE DES PUBLICATIONS OFFICIELLES ET DE L'INFORMATION ADMINISTRATIVE SALUÉE PAR LE RAPPORTEUR

La direction de l'information légale et administrative (Dila) a pour mission de garantir l'accès au droit, d'informer les citoyens sur leurs démarches administratives et, plus généralement, de contribuer à la transparence de la vie publique. Elle exerce un rôle de diffusion légale, d'information administrative et d'animation du débat public. La Dila assure également l'impression de livres et de revues pour des administrations, ainsi que de ses propres publications sous la marque La Documentation française.

Le budget annexe « Publications officielles et information administrative » (POIA), géré par la Dila, est composé de deux programmes budgétaires :

· le programme 623 « Édition et diffusion » recouvre les activités de diffusion légale, d'information administrative, d'imprimerie et d'édition ;

· le programme 624 « Pilotage et ressources humaines » regroupe les moyens logistiques et humains.

A. UN BUDGET CARACTÉRISÉ PAR UNE BAISSE DES DÉPENSES ET UNE HAUSSE DES RECETTES

1. Une baisse des dépenses dans le prolongement des exercices précédents mais dont le rythme devrait ralentir dans les années à venir

En 2025, les crédits du budget annexe diminuent de 12,1 millions d'euros en AE (- 7,63 %) et d'un million d'euros en CP (- 0,69 %) par rapport à la LFI 2024 pour s'établir à 147 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 151 millions d'euros en crédits de paiement.

Évolution des crédits du budget annexe en 2025
par rapport à la loi de finances initiale pour 2024
(en euros)

Programme et action

AE
LFI 2024

AE
PLF 2025

Évolution
(en %)

CP
LFI 2024

CP
PLF 2025

Évolution
(en %)

623 - Edition et diffusion

47 882 590

40 984 590

- 14,41

44 171 044

42 753 257

- 3,21

01

Accès au droit et diffusion légale

32 771 367

26 953 530

- 17,75

29 727 516

30 182 000

+ 1,53

02

Information administrative et vie publique

15 111 223

14 031 254

- 7,15

14 443 528

12 571 257

- 12,95

624 - Pilotage et ressources humaines

111 284 846

106 036 301

- 4,72

107 458 446

107 828 851

+ 0,34

01

Pilotage, modernisation et activités numériques

15 012 909

10 257 607

- 31,67

11 186 509

12 050 157

+ 7,72

02

Dépenses de personnel

66 271 937

66 778 694

+ 0,76

66 271 937

66 778 694

+ 0,74

03

Convention d'État - Société anonyme de composition et d'impression des journaux officiels

30 000 000

29 000 000

- 3,33

30 000 000

29 000 000

- 3,33

Total

159 167 436

147 021 085

- 7,63

151 629 490

150 582 108

- 0,69

Source : PAP du budget annexe « Publications officielles et information administrative »
annexé au projet de loi de finances pour 2025

Les efforts se concentrent sur les dépenses du programme 623 qui diminuent, pour 2025, de 7 millions d'euros en AE (- 14,41 %) et de 1,4 million d'euros en CP (- 3,21 %).

La Dila poursuit également sa politique de rationalisation immobilière, initiée en 2022, mettant en oeuvre son schéma directeur immobilier pluriannuel. Ce schéma directeur prévoit la création de postes de travail au sein du site Desaix, dans le but de restituer d'ici 2026-2027 à la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre (DSAF) les espaces loués sur le site Ségur-Fontenoy.

Néanmoins, si un certain nombre d'évolutions ont permis à la Dila de réduire son activité, à l'instar de l'abandon de la rotative ou l'arrêt de l'édition des bulletins officiels ministériels qui a désormais été reprise par les ministères, il n'est plus possible de réduire les crédits et les emplois à l'avenir avec la même ampleur. La fin des plans de départ des agents de droit privé et la nécessité de faire fonctionner des services numériques de plus en plus exigeants constituent les principales raisons de ce ralentissement.

2. Une hausse prévisionnelle des recettes malgré les faibles marges de manoeuvre dont dispose la Dila pour accroître leur niveau

Les recettes attendues en 2025 s'élèvent à 181 millions d'euros, un chiffre en hausse de près de 14 millions d'euros par rapport à 2024 (+8,19 %). L'excédent dégagé entre les recettes et les dépenses double par rapport à prévu pour 2024 et atteint près de 31 millions d'euros.

L'essentiel des recettes provient des annonces légales au BODACC14(*) (100 millions d'euros) et au BOAMP15(*) (71,1 millions d'euros). Elles sont donc en grande partie dépendantes d'une situation économique, indépendante par nature des choix de la Dila, et d'obligations légales ou réglementaires de publication. La Dila dispose par conséquent de peu de leviers pour augmenter son niveau de recettes. À cet égard, le coût des annonces au BOAMP pèse sur les acheteurs publics et une hausse de ces recettes impliquerait d'augmenter les dépenses d'acheteurs publics. Pour le BODACC, la décision de publier est obligatoire et s'impose à la Dila.

B. LE RENFORCEMENT DE LA QUALITÉ DES TRAVAUX MALGRÉ LA RÉDUCTION CONTINUE DES EFFECTIFS

1. Une nouvelle baisse du nombre d'agents, dans la continuité des exercices précédents mais remise en question par une décision du Conseil d'État

La décision du Conseil d'État du 6 février 2024, rendue dans le cadre d'un contentieux, remet en cause le statut de droit privé des agents issus de l'ancienne direction des Journaux officiels, représentant un tiers des agents de la Dila, considérant qu'ils relèvent d'un statut de droit public. Une régularisation des contrats existants pour les salariés actuellement en fonction afin de les mettre en conformité avec le droit public est en cours. Le changement de statut des agents recrutés sur contrat de droit privé s'inscrit dans la logique d'évolution de la Dila, qui n'a plus d'activité de presse payante mais surtout de services publics numériques gratuits.

Les conséquences financières de ce changement ne sont pas encore pleinement établies mais cette décision contraint la Dila à revoir son schéma d'emplois pluriannuel puisqu'elle accélère les départs prévus en 2025 sur 2024. Le schéma d'emplois initial (- 15 ETP en 2024, - 5 ETP en 2025) est révisé pour s'établir à - 20 ETP en 2024 et 0 ETP en 2025.

Les conséquences pour les agents et pour la Dila sont significatives, nécessitant une évolution dans les instances sociales, une restructuration de la rémunération des agents qui devra respecter les règles de droit public et un changement de régime de retraite complémentaire du fait de l'obligation légale d'affiliation à l'Ircantec.

Le passage au statut de droit public marque aussi la fin des plans de départs volontaires anticipés, qui n'existent pas en droit public.

2. Un élargissement de ses travaux à d'autres publics associé à un approfondissement de sa mission d'information dont les usagers sont satisfaits

Par l'exercice de ses missions, la Dila contribue à garantir l'accès au droit, à délivrer aux citoyens les informations nécessaires à la bonne connaissance de leurs droits et à leurs démarches administratives, à garantir la transparence de la vie publique et à proposer des publications relatives au débat public. Consciente de ces enjeux, la stratégie de communication de la Dila consiste à améliorer la notoriété des marques Service public, Vie publique et Légifrance et à s'adresser à des publics peu ou non utilisateurs de ces services. S'il est constaté une très forte notoriété assistée (84 %) de Service Public, il n'en demeure pas moins que sa notoriété immédiate reste très faible (7 %).

En 2025, la Dila envisage de poursuivre et d'approfondir la stratégie menée auprès du public étudiant pour accroître la notoriété et les visites de ses sites internet. Elle a ainsi développé des opérations spécifiques comme la confection d'un passeport citoyen, guide pratique destiné aux 15-25 ans qui accèdent à l'autonomie ou la diffusion de podcasts, « Les 2 minutes citoyennes », en complément des fiches Vie publique, qui offre un nouveau média davantage fidèle aux usages des jeunes.

Enfin, en vue de s'adresser à un public de non-professionnels du droit, des vidéos sont proposées pour aider à l'utilisation de Légifrance et des démonstrations sont régulièrement organisées au profit de différents organismes.

En complément de cette stratégie d'élargissement de son public, la Dila veille à garantir la qualité et l'actualisation de l'information ainsi qu'à son enrichissement. Plusieurs actions en ce sens seront poursuivies en 2025 sur le site service-public.fr :

· chaque rédacteur s'assure que les 50 pages les plus vues de son portefeuille ont moins de 6 mois ;

· les infographies et vidéos sont développées pour faciliter l'accès à l'information ;

· les contenus suivent une charte du langage clair pour s'adapter aux usagers.

Des efforts sont également réalisés concernant Légifrance et des travaux techniques d'amélioration du moteur de recherche sont en cours. Ils visent à optimiser la qualité des résultats de recherche et à permettre, à terme, d'ajouter des fonctions de recherche en langage naturel pour simplifier les démarches des citoyens.

Les baromètres annuels, à apprécier au regard de la forte augmentation du nombre de visites, montrent une variation dans les satisfactions selon les publics et les usages. Ainsi, en 2023, le site service-public.fr montre une stabilisation à 78,8 % de satisfaction et la rubrique « Actualités » atteint quant à elle 97 % de satisfaction. La dernière enquête, menée au premier semestre 2024 par téléphone, rapporte un taux de satisfaction de 87 %.

A contrario, la baisse constatée du taux de satisfaction relatif aux fiches thématiques peut se justifier par la diversification des publics et par l'intégration de nouveaux formats comme les vidéos et les infographies. Des usagers peu à l'aise avec les questions administratives peuvent être moins satisfaits car ces questions peuvent être en soi complexes, en dépit des efforts de la Dila pour les présenter de manière simple et claire. À l'inverse, le public plus expert peut être gêné par une ergonomie orientée vers un public élargi.

Si ces premières observations devront faire l'objet d'études plus approfondies en 2025, il convient de noter que le taux de « très satisfaits », lui, augmente de 35,6 % en 2018 à 51,1 % en 2023.

Pour répondre au mieux aux attentes des utilisateurs de Légifrance, un panel d'usagers constitué de professionnels et non professionnels du droit a été consulté. Les résultats montrent l'adhésion désormais à la nouvelle version du site : le niveau de satisfaction est homogène dans tous les secteurs (associatif, privé, public) et le taux de satisfaction globale est de 7,6 sur 10.

Près de 80 % des utilisateurs ont émis un niveau de satisfaction supérieur à la note de 7 sur 10. Un million d'euros de crédits d'investissement sont prévus pour les évolutions du site en 2025.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative » inscrits au projet de lois de finances pour 2025.

EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 4 DÉCEMBRE 2024

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous entendons à présent l'avis de Michel Masset sur les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

M. Michel Masset, rapporteur pour avis de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ». - Prenant la suite de notre ancienne collègue Nathalie Delattre, j'aborde cet avis avec un regard neuf, tout en m'inscrivant dans la continuité de ses travaux.

La mission « Direction de l'action du Gouvernement » interpelle par son caractère à la fois hétérogène et singulier. Son intitulé reprend la première phrase de l'article 21 de la Constitution : « Le Premier ministre dirige l'action du gouvernement. » Cette mission regroupe ainsi des entités disparates, comme des autorités administratives indépendantes (AAI) ou des secrétariats généraux, dont le dénominateur commun est leur rattachement au Premier ministre.

Cette mission participe, bien que de manière contrastée, à l'effort budgétaire national en voyant ses crédits diminuer, à périmètre inchangé, de 14,8 millions d'euros, ce qui représente une baisse de 1,4 % en euros courants et de 3,1 % en euros constants, une fois l'effet de l'inflation corrigé.

La diminution se concentre principalement sur le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental », dont les crédits reculent de 2,3 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2024. L'augmentation apparente des crédits s'explique par l'intégration du programme 352, « Innovation et transformation numériques », dans le périmètre de la mission.

Je tiens à saluer la gestion rigoureuse du budget annexe de la direction de l'information légale et administrative (Dila), dont l'excédent prévisionnel devrait doubler en 2025, passant de 15 millions à 30,5 millions d'euros. Cette performance résulte d'une stricte maîtrise des dépenses et d'une optimisation judicieuse des investissements.

Les autorités du programme 308 « Protection des droits et libertés » voient quant à elles leurs crédits progresser de 4,5 % par rapport à l'année précédente. Outre l'attribution de nouvelles missions et l'extension du périmètre de leurs missions historiques, certaines de ces autorités font face à des besoins d'investissements conjoncturels, notamment dans le domaine immobilier.

À cet égard, dans le prolongement des réflexions menées par Nathalie Delattre, je souligne les efforts menés par les différentes entités de la mission. Je salue, par exemple, le choix stratégique du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), qui a réduit ses espaces de travail de moitié en sous-louant une partie de ses locaux à FranceAgriMer, économisant ainsi 2,8 millions d'euros. Je signale également les gains financiers évalués à plus de 7,3 millions d'euros par an et les gains fonctionnels réalisés grâce à l'opération de regroupement au sein de l'ensemble immobilier Ségur-Fontenoy de services jusqu'alors disséminés, bien que l'occupation par résident puisse encore être optimisée.

Je demeure néanmoins circonspect concernant la décision de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) de louer un site privé pour neuf ans, faute de proposition domaniale de la part de la direction de l'immobilier de l'État (DIE). Cette situation nous conduit à nous interroger sur la stratégie de gestion immobilière publique et appelle, à l'avenir, à privilégier des implantations durables pour des entités ayant vocation à s'inscrire dans le long terme.

Enfin, sans pour autant qu'elle devienne la norme, la pratique de bureaux non attribués, dite flex office, expérimentée par la direction interministérielle du numérique (Dinum) et par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), mérite d'être poursuivie dans la perspective d'une évaluation dans les années à venir. Elle permet d'accueillir les agents dans de meilleures conditions, à surface constante, en particulier dans les services concernés par le temps partiel et le télétravail.

Après ce panorama général, j'aborde les orientations structurantes de la mission. Malgré son apparente hétérogénéité, trois axes majeurs d'allocation des crédits se dessinent.

La mission est tout d'abord fortement marquée par le soutien en matière d'accès aux droits et à la transparence de l'information.

En 2025, les entités des deux programmes s'attacheront, comme jamais auparavant, à favoriser l'accès aux droits des citoyens et à renforcer la transparence de l'action publique. La France poursuivra sa politique d'ouverture des données publiques, qui la classe au premier rang des pays européens dans ce domaine. Cette stratégie s'inscrit pleinement dans l'objectif de confiance des citoyens dans l'action administrative.

La Dila joue un rôle essentiel dans cette politique via ses sites Légifrance, Service public et Vie publique. Elle contribue à délivrer aux citoyens les informations nécessaires à la bonne connaissance de leurs droits et à garantir la transparence de la vie publique, tout en s'adressant, avec des résultats probants, à des publics ordinairement éloignés de l'environnement administratif et qui font montre d'appréhension face à la complexité de certaines démarches.

Enfin, le rôle mené par le CGLPL en matière d'accès aux droits des personnes en détention est à saluer compte tenu des moyens dont il dispose et du volontarisme dont font preuve les bénévoles au service de l'institution.

Une deuxième ligne forte, mais plus diffuse, de la mission budgétaire concerne ensuite le numérique, et ce à deux titres.

D'une part, la régulation des plateformes numériques devient un enjeu crucial avec l'entrée en vigueur du paquet législatif européen relatif aux services numériques. Le poids des algorithmes devient central dans le traitement de données à caractère personnel et les risques associés à un dispositif d'intelligence artificielle (IA) sont proportionnels au caractère sensible des données utilisées. Dans ce cadre, la Cnil se voit ainsi attribuer 8 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires.

D'autre part, la coordination de la politique numérique de l'État s'intensifie avec la mise en oeuvre de la feuille de route de la Dinum. Toutefois, si je salue la volonté de la Dinum, réaffirmée en audition, de réduire le recours aux prestataires extérieurs et de réinternaliser certaines fonctions, conformément à la recommandation de la Cour des comptes dans son rapport déposé en juillet dernier, je regrette que les crédits nécessaires ne lui soient pas affectés. Cette observation vaut tout particulièrement pour les instruments d'intelligence artificielle, pour lesquels les investissements sont résiduels.

En 2025, les résultats économiques attendus des technologies de l'intelligence artificielle sont estimés à 90 milliards d'euros, contre 7 milliards d'euros en 2020. L'intelligence artificielle permet des gains substantiels de compétitivité et de productivité dans tous les secteurs de l'économie ainsi que dans les services publics. La première phase de la stratégie nationale pour l'intelligence artificielle, de 2018 à 2022, tend à positionner la France comme l'un des leaders mondiaux. Il faut impérativement la poursuivre et l'amplifier pour ne pas accumuler de retards, qu'il nous serait d'autant plus difficile de rattraper lors des prochains exercices.

C'est pourquoi je vous propose d'adopter un amendement LOIS.1 visant à renforcer les capacités de la Dinum en matière d'IA et à soutenir ses projets stratégiques, en prévoyant une dotation supplémentaire de 6 millions d'euros en 2025, dont 3 millions d'euros consacrés au développement du programme « Entrepreneurs d'intérêt général ». Cette proposition s'inscrit dans la continuité de la stratégie numérique de l'État en répondant aux enjeux d'amélioration de l'attractivité des métiers numériques dans la fonction publique et d'internalisation des compétences clés. La disposition permettrait de renforcer l'efficacité de l'action publique et d'engendrer, dans un contexte de contraintes budgétaires, des gains pour les années à venir. La prise en main de l'IA par l'ensemble de la sphère publique m'apparaît capitale, tant pour son retour sur investissement que pour améliorer la qualité et l'efficacité des services publics. Sans cette dotation, la capacité de la Dinum à faire évoluer des outils essentiels comme France Connect ou le réseau interministériel de l'État (RIE) serait nettement compromise. Des investissements nécessaires pourraient être contrariés, notamment en ce qui concerne les sites ultramarins desservis par le RIE, dont la bande passante et la résilience demeurent, à ce jour, insuffisants.

La troisième ligne forte concerne les initiatives, bien qu'encore trop rares,destinées aux collectivités locales et aux élus méritant d'être amplifiées. Le programme « Transformation numérique des territoires » représente un pas dans la bonne direction. D'une durée de trois ans, ce programme constitue la principale initiative de coopération État-collectivités en matière d'administration numérique et vise à former les agents territoriaux grâce à des investissements collectifs à même d'accélérer la transformation numérique de l'action publique dans nos territoires.

À l'issue des échanges conduits avec des entités relevant de la mission, j'estime que les mesures nouvelles et les principales lignes directrices de celle-ci sont pertinentes et ambitieuses. En conséquence, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption de ses crédits et de ceux du budget annexe « Publications officielles et information administrative », tout en vous présentant un amendement de crédits de 6 millions d'euros en faveur de la Dinum.

Mme Audrey Linkenheld. - Merci à Michel Masset de la qualité de son rapport, qui assure la continuité avec les précédents travaux de Nathalie Delattre.

Le groupe Socialiste, Ecologiste et Républicains et moi-même sommes cependant bien plus réservés que le rapporteur sur l'évolution des crédits de la mission. On peut entendre qu'il faille faire des efforts budgétaires, mais la question reste toujours de savoir où les réaliser.

Nous regrettons ainsi la baisse qui intervient sur les crédits des programmes « Coordination du travail gouvernemental » et « Innovation et transformation numériques ». Le sujet du numérique nous paraît, en particulier, fondamental et nous souhaiterions davantage de moyens pour le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum). La commission d'enquête sénatoriale sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères avait insisté sur la nécessité d'en renforcer les moyens humains et financiers. De la même manière, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) voit ses moyens diminuer, alors que nous savons qu'elle joue un rôle de premier plan sur les aspects de cybersécurité, rôle amené à être encore renforcé dans les mois qui viennent avec la transposition de la directive européenne NIS 2.

Quant au programme « Protection des droits et libertés », il bénéficie d'une augmentation de ses crédits et les AAI, qu'il concerne plus spécifiquement, d'ETP supplémentaires. Quoique positif, le signal nous paraît insuffisant par rapport aux missions demandées à certaines AAI, en particulier la Cnil. Celle-ci avait sollicité davantage d'ETP qu'elle n'en obtient, en considération des nouvelles missions qui lui échoient, notamment depuis l'adoption de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Pour leur part, le Défenseur des droits (DDD) et ses délégués dans les territoires reçoivent un nombre toujours plus élevé de réclamations, dont le traitement satisfaisant, indispensable à la qualité de la relation de nos concitoyens avec leurs administrations et pour la confiance qu'ils placent en elles, requerrait des moyens additionnels.

M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - Deux amendements, qui ont été déposés auprès de la commission des finances, ne vont nullement en ce sens. Le premier, du sénateur Christopher Szczurek, a pour objet une baisse supplémentaire de crédits de 14 millions d'euros. Le second, du Gouvernement, prévoit une nouvelle diminution de 26 millions d'euros.

L'amendement LOIS.1 n'est pas adopté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction de l'information légale et administrative (Dila)

· Mme Duclos-Grisier, directrice

· M. Tarik Achoui, adjoint au responsable du département des affaires financières

Secrétariat général du Gouvernement (SGG)

· Mme Claire Landais, secrétaire générale du Gouvernement

· M. Serge Duval, directeur des services administratifs et financiers des services du Premier ministre

Défenseur des droits

· Mme Claire Hédon, défenseure des droits

· Mme Mireille Le Corre, secrétaire générale

· M. Stéphane Gobretch, directeur de l'administration générale

· M. Victor Manciet, chef de cabinet

Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP)

· M. Patrick Matet, président par intérim

· Mme Louise Brehier, secrétaire générale

· Mme Laetitia Ferro, directrice des affaires administratives et financière

Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL)

· Mme Dominique Simonnot, contrôleure générale des lieux de privation de liberté

· M. André Ferragne, secrétaire général du CGLPL

Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil)

· M. Louis Dutheillet de Lamothe, secrétaire général

· M. Issam Fartout, directeur administratif et financier adjoint

· Mme Chirine Berrichi, conseillère pour les questions parlementaires et institutionnelles

Direction interministérielle du numérique (Dinum)

· Mme Stéphanie Schaer, directrice interministérielle du numérique

· M. Jérémie Vallet, adjoint à la directrice interministérielle du numérique

Secrétariat général des affaires européennes (SGAE)

· M. Baptiste Prudhomme, conseiller spécial

· Mme Caroline Dulous, cheffe du bureau Ressources humaines et moyens

· M. Matthieu Laurent, adjoint service juridique

· Mme Constance Deler, cheffe du bureau Parlements

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH)

Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE)


* 1 Cour des Comptes, Le pilotage de la transformation numérique de l'état par la direction interministérielle du numérique, 10 juillet 2024

* 2 Également connu sous le nom de Data Governance Act (DGA).

* 3 Également connu sous le nom de Data Act (DA).

* 4 Également connu sous le nom de Artificial Intelligence Act (AIA).

* 5 Également connu sous le nom de Digital Services Act (DSA).

* 6 Également connu sous le nom de Digital Markets Act (DMA).

* 7 En français, « cours en ligne ouvert à tous ».

* 8 Rapport d'information relatif à la proposition de législation européenne sur l'intelligence artificielle fait par André Gattolin, Catherine Morin-Desailly, Cyril Pellevat et Elsa Schalck au nom de la commission des affaires européennes.

* 9 Également connu sous le nom de DGA (Data Governance Act).

* 10 Également connu sous le nom de DA (Data Act).

* 11 Également connu sous le nom de AIA (Artificial Intelligence Act).

* 12 Également connu sous le nom de DSA (Digital Services Act).

* 13 Également connu sous le nom de DMA (Digital Markets Act).

* 14 Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales.

* 15 Bulletin officiel des annonces des marchés publics.

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