TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mardi 17 décembre 2024 sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission des affaires sociales a examiné le rapport pour avis de Mme Elisabeth Doineau, rapporteure générale, sur le projet de loi spéciale n° 207 (2024-2025) prévue par l'article 45 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

M. Philippe Mouiller, président. - Notre ordre du jour appelle l'examen du rapport pour avis sur le projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf).

Ce texte, qui a été adopté hier par l'Assemblée nationale, sera examiné demain à 14 h 30 en séance publique. La commission des finances, saisie au fond, se réunira quant à elle aujourd'hui même, à 14 h 30. Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé à 18 heures.

Sans anticiper les propos de notre rapporteure générale, je vous rappelle que, bien que le projet de loi spéciale ait un statut de projet de loi de finances, il porte, en son article 3, une disposition obligatoire et exclusive des lois de financement de la sécurité sociale (LFSS), à savoir l'octroi d'une autorisation d'emprunt à des organismes de sécurité sociale - c'est ce qui justifie la saisine pour avis de notre commission.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure pour avis. - Le fait que nous soyons réunis en cette mi-décembre pour examiner le projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la Lolf montre la gravité de la situation. Comme vous le savez, le Gouvernement a été censuré sur les conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'examiner les dispositions restant en discussion sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. La discussion était mal engagée, nous l'avions indiqué, puisque ce texte a été soumis au Parlement avec une semaine de retard ; par ailleurs, l'Assemblée nationale n'a pas respecté son délai constitutionnel de vingt jours.

Le Sénat a beaucoup travaillé et fait preuve de responsabilité pour ne pas dégrader le solde des finances publiques. Il a notamment modifié la réforme des allégements généraux pour éviter qu'elle ne détruise 50 000 emplois et mis en place une revalorisation différenciée des pensions de retraite. Il a également instauré une contribution de solidarité devant rapporter 2,5 milliards d'euros pour financer la dépendance. Il a aussi obtenu l'étalement sur quatre ans, au lieu de trois, de la hausse de la cotisation employeur à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). À l'issue de nos travaux, nous avions réduit le déficit de 1 milliard d'euros par rapport au texte initial.

La CMP a considérablement réduit le rendement de la réforme des allégements généraux et supprimé la contribution de solidarité. Ainsi, le texte issu des travaux de la CMP prévoyait un déficit de 18,3 milliards d'euros en 2025.

La censure du Gouvernement a tout remis en cause.

D'un point de vue procédural, il nous faut distinguer deux cas de figure. Le premier est celui où le Parlement ne se prononce pas sur le PLFSS dans le délai constitutionnel de cinquante jours. Le Gouvernement a alors la possibilité - mais pas l'obligation - de mettre en oeuvre les dispositions du PLFSS par voie d'ordonnance. Le second cas est celui où il n'est pas possible de promulguer un texte au 1er janvier. Dans ce cas, la Constitution prévoit, pour ce qui concerne l'État, qu'une loi l'autorise à percevoir les impôts et que le Gouvernement reconduise les services votés par décret. En revanche, rien n'est prévu pour la sécurité sociale, alors que, selon les dispositions organiques du code de la sécurité sociale, l'autorisation de la sécurité sociale de recourir à l'emprunt ne peut figurer que dans une loi de financement de la sécurité sociale.

Il faut bien être conscient que, juridiquement, le Parlement n'a pas rejeté le PLFSS : l'Assemblée nationale a rejeté les conclusions de la CMP et la navette pourrait tout à fait reprendre. Ainsi, après une lecture des conclusions de la CMP par le Sénat, l'Assemblée nationale puis le Sénat pourrait procéder à une nouvelle lecture, avant un « éventuel dernier mot » de l'Assemblée nationale. Toutefois, comme vous le savez, le droit d'amendement est fortement restreint après la CMP. Seuls sont recevables les amendements en lien direct avec une disposition en cours de discussion. Il serait donc possible de modifier ou de supprimer des articles, mais presque impossible d'en créer de nouveaux.

À court terme, il faut assurer la « continuité de la vie nationale » au 1er janvier, malgré l'absence de la loi de finances et de la LFSS.

Aucune disposition ne prévoit comment autoriser la sécurité sociale à emprunter en l'absence de LFSS promulguée au 1er janvier. Or, si la sécurité sociale ne pouvait pas emprunter, le versement des prestations serait remis en cause. Toutefois, comme nous l'avons souligné, le principe de « continuité de la vie nationale », qui avait été invoqué par le Conseil constitutionnel dans sa décision de 1979 après la censure totale de la loi de finances pour 1980, semble pouvoir justifier qu'en l'absence de loi de financement de la sécurité sociale, une telle autorisation figure dans un autre texte législatif. Cette analyse est confirmée par le récent avis du Conseil d'État sur l'application de l'article 45 de la Lolf.

Le Gouvernement aurait pu déposer deux textes, l'un pour l'État, la loi spéciale prévue par l'article 45 de la Lolf, et l'autre pour la sécurité sociale. Il aurait aussi pu déposer un texte unique de caractère non spécifié. Il a finalement choisi de déposer un texte unique, un projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la Lolf, enrichi d'un article autorisant la sécurité sociale à emprunter. La Lolf prévoit explicitement que la loi spéciale a le statut de loi de finances ; notre commission n'est donc saisie que pour avis. Le Conseil d'État considère que cette solution est constitutionnelle, l'article autorisant la sécurité sociale à emprunter étant nécessaire à la « continuité de la vie nationale ». Cela évite aussi d'allonger inutilement la procédure parlementaire.

Le projet de loi spéciale est très succinct. Dans sa version initiale, il comprenait seulement trois articles : l'article 1er, qui autorise l'État à percevoir l'impôt ; l'article 2, qui autorise l'État à recourir à l'emprunt ; l'article 3, sur lequel la commission s'est saisie pour avis, qui autorise la sécurité sociale à emprunter.

Pourquoi, selon le Conseil d'État, ne serait-il pas constitutionnel d'indexer, dans le cadre de ce texte, sur l'inflation le barème de l'impôt sur le revenu ? Tout simplement parce que la loi spéciale n'a pas vocation à se substituer à une loi de finances. L'article 45 de la Lolf permet seulement d'inscrire dans la loi l'autorisation de percevoir l'impôt.

La reconduction des services votés doit, quant à elle, avoir lieu au niveau réglementaire - c'est pour cette raison que le projet de loi spéciale n'en fait pas état. Mais le niveau de déficit est tel que si l'on n'autorisait pas l'État à emprunter, il ne serait matériellement pas possible de reconduire les services votés. C'est pourquoi le Conseil d'État considère que la loi spéciale peut autoriser l'État à emprunter. Le fait d'autoriser la sécurité sociale à emprunter n'est, quant à lui, prévu par aucun texte. Son seul fondement est la « continuité de la vie nationale ». Selon le Conseil d'État, aucune autre disposition ne peut figurer dans une loi spéciale. Ainsi, selon lui, une loi spéciale ne peut pas contenir de disposition visant à indexer le barème de l'impôt sur le revenu. En effet, cette indexation n'a pas toujours eu lieu et relève d'un choix discrétionnaire. Par ailleurs, elle n'est pas nécessaire à la « continuité de la vie nationale ».

L'article 3, qui nous intéresse plus particulièrement, est assez succinct. En effet, il ne fixe pas de plafonds d'emprunt pour les différents organismes concernés. Tel est pourtant le cas de la disposition des lois de financement de la sécurité sociale autorisant la sécurité sociale à emprunter. Par exemple, dans le cadre du PLFSS 2025, le plafond d'emprunt de l'Urssaf Caisse nationale était fixé à 65 milliards d'euros, contre 45 milliards d'euros pour 2024. Ces plafonds sont une obligation prévue par la loi organique. Or aucun plafond n'est fixé dans le cadre de l'article 3 du projet de loi spéciale. Selon le Gouvernement, l'inclusion de ces plafonds, de nature « politique », dans la loi spéciale, ne serait pas constitutionnelle. Cette absence s'explique probablement également par des raisons pratiques. En effet, des plafonds auraient impliqué de choisir un certain niveau, on ne sait pas trop selon quelles hypothèses. Par ailleurs, il aurait pu être juridiquement délicat d'augmenter ces plafonds en cours d'année.

Au-delà des questions juridiques, il faut se rappeler les enjeux financiers. La LFSS 2024 était la première LFSS à ne pas prévoir de réduction du déficit à moyen terme. Ainsi, le déficit était censé augmenter jusqu'à 17,2 milliards d'euros en 2027. Malheureusement, ce seuil devrait être dépassé dès cette année.

Le PLFSS 2025 initial prévoyait également un déficit de 17,2 milliards d'euros en 2027, mais le déficit augmentait ensuite fortement pour atteindre 19,9 milliards d'euros en 2028. Le texte adopté par le Sénat a réduit le déficit 2025 à 15 milliards d'euros, au lieu de 16 milliards d'euros selon le texte initial, et, surtout, l'a stabilisé à peu près à son niveau de 2025 jusqu'en 2028. En effet, alors que les mesures du Sénat tendant à augmenter le déficit étaient en quasi-totalité temporaire, celles qui visaient à le réduire étaient toutes pérennes.

Le texte issu des travaux de la CMP prévoyait, quant à lui, un déficit nettement supérieur à celui qui était prévu non seulement par le texte du Sénat, mais aussi par le texte initial. Cette prévision était alors de 18,3 milliards d'euros en 2025 et 21,5 milliards d'euros en 2028.

Il n'est pas possible de savoir ce que serait le niveau de déficit 2025 en l'absence de LFSS, ne serait-ce que parce qu'on ne sait pas quelles dispositions réglementaires seraient prises par le Gouvernement. Toutefois, on peut estimer que, sans mesures législatives ni réglementaires, le déficit serait vraisemblablement supérieur à 30 milliards d'euros. Par ailleurs, si le Gouvernement parvenait à prendre les dispositions réglementaires associées au PLFSS, ce qui est évidemment optimiste, le déficit pourrait approcher 25 milliards d'euros.

Plusieurs scénarios sont envisageables pour l'année prochaine.

Un premier scénario, que je viens d'évoquer, est celui où aucune mesure ne serait prise pour réduire le déficit. Dans ce cas, je l'ai dit, le déficit serait très élevé, vraisemblablement supérieur à 30 milliards d'euros en 2025. Pour mémoire, c'est deux fois plus que le déficit prévu par le texte initial.

Un deuxième scénario est celui d'une reprise de la navette du texte actuel. Comme le droit d'amendement est très restreint après la CMP, il ne devrait être possible que de modifier ou de supprimer des dispositions en navette. Des mesures pourraient toutefois être prises au niveau réglementaire.

Un troisième scénario, qui, par comparaison, pourrait presque sembler ambitieux, consiste à adopter un nouveau PLFSS, pour retrouver en 2025 un déficit probablement analogue à celui que prévoyait le texte sur lequel le Gouvernement a été censuré, soit autour de 20 milliards d'euros. Cela ne serait pas trop grave si ce texte comprenait une trajectoire crédible d'amélioration du solde d'ici à 2028. On peut espérer que cela soit effectivement possible, bien que ce soit peut-être optimiste.

La sécurité sociale ne se finance qu'à court terme sur les marchés financiers. Si des déficits élevés s'accumulent à l'Urssaf Caisse nationale, celle-ci risque de ne plus parvenir à se financer, ce qui remettrait en cause le paiement des prestations, comme on a craint que cela ne se produise en 2020, lors de la crise sanitaire. Il faudrait donc procéder à de nouveaux transferts de dette à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Mais on voit mal comment ces nouveaux transferts seraient possibles sans trajectoire crédible de réduction du déficit.

En conclusion et dans l'immédiat, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption conforme de l'article 3 du projet de loi spéciale.

M. Bernard Jomier. - Évidemment, le Parlement doit adopter ce projet de loi spéciale.

Je vous remercie d'avoir rappelé les éléments qui préfigurent les débats du premier trimestre sur les finances sociales. Le texte adopté en CMP prévoit une courbe de déficit dramatique. Chers collègues, à ceux d'entre vous qui ont été membres de la CMP, je suis désolé de vous le dire, mais, ce texte, vous l'avez voté, après une réunion au cours de laquelle il n'a pas été possible de travailler sérieusement à un quatrième scénario. Le scénario le plus optimiste évoqué par la rapporteure générale est de 20 milliards d'euros de déficit, ce qui n'est pas soutenable. Ce quatrième scénario, en vue de réduire le déficit, passera par la reprise du débat sur les recettes et sur le fléchage des dépenses. Nous avons émis des propositions.

Chacun sait comment s'est déroulée la CMP. Le Gouvernement a proposé une réduction des allégements généraux de cotisations sociales patronales de 4 milliards d'euros, puis des membres de Renaissance sont venus voir les membres de l'opposition afin de les inciter à adopter une version de la réduction ramenée à 1,6 milliard d'euros, pour, finalement, ne même pas voter cet article, ainsi amendé et le dire à leur président de groupe ! Quelle irresponsabilité totale ! Et la majorité sénatoriale a été prise dans ce petit jeu !

L'irresponsabilité totale du socle commun nous a empêchés de débattre sérieusement, et nous voilà dans la situation exposée par la rapporteure générale. Mais on ne peut pas laisser les finances sociales dériver ainsi !

Personne n'a voulu proposer de pistes de réduction des dépenses. Il manque 2 milliards d'euros pour les hôpitaux : tout le monde le sait ! Personne n'a proposé de retirer 3 milliards d'euros aux hôpitaux - et heureusement ! Mais quel sera le débat dans les mois à venir ? Devoir choisir entre 30 milliards et 20 milliards d'euros de déficit signifie que rien n'est fait.

Le gouvernement de François Bayrou aura probablement de grandes difficultés politiques à défendre des réformes structurelles. Mais dans le même temps, il ne faut pas nous demander de travailler sur des hypothèses de budget de la sécurité sociale qui la fragilisent considérablement. Il ne suffira pas de faire appel à la Cades pour régler le problème.

Je le dis clairement : il faudra creuser un autre sillon, en ayant la capacité à discuter et à conclure des compromis, comme M. Henno l'a récemment souligné.

M. Philippe Mouiller, président. - Sous réserve que l'on ait un PLFSS à voter ! Ce n'est pas acté.

Mme Pascale Gruny. - Effectivement, la CMP a été difficile, mais la situation sera identique avec le prochain gouvernement. Les compromis sont toujours compliqués.

Si l'on revient sur la loi relative aux retraites, on creusera aussi le déficit, cher Bernard Jomier. On n'a pas les moyens d'y revenir. J'aurais souhaité que l'on vote des mesures d'accompagnement des métiers pénibles et des carrières longues, mais cela n'a pas été possible puisqu'il s'agissait d'un texte financier.

Pourquoi n'aurait-on pas de PLFSS ? Dans ce cas, de quelle base partirait-on ?

M. Philippe Mouiller, président. - Dès lors que la loi spéciale est adoptée, on peut fonctionner dans un système de guichet ouvert, sans réforme ni évolution. Ne s'appliqueraient, dans une telle hypothèse, que les dispositions prévues par la loi. Cela signifierait que l'on serait dans une dérive générale, mais, juridiquement, c'est possible.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Je rêve que l'on discute du fond, au-delà des postures, et que l'on s'interroge ensemble sur le moyen de rétablir l'équilibre du système de sécurité sociale, pour l'assurance maladie comme pour les retraites. Jusqu'à présent, nous n'avons pas réussi à le faire. Les propositions de la gauche concernant les retraites ne me paraissent pas propices au retour à l'équilibre.

Lutter contre la fraude et les soins redondants et inutiles faisait partie de nos propositions d'économies. J'aimerais que l'on puisse en débattre, sans subir de blocages de la part des lobbies. Je souhaite donc que le Gouvernement ouvre la possibilité de revisiter complètement le PLFSS.

M. Olivier Henno. - Merci à Élisabeth Doineau pour son travail. La Constitution est bien faite. Nous avons le devoir d'adopter cette loi spéciale, pour assurer la continuité de l'État.

Nous sommes à l'heure de vérité concernant le déficit. Par le passé, les compromis et les accords se sont souvent faits sur l'augmentation de la dette, que ce soit par l'augmentation des dépenses ou la diminution des recettes. Or ce ne sera plus possible désormais, indépendamment de l'existence de majorité absolue ou relative à l'Assemblée nationale. La dette ne peut plus être la variable d'ajustement de nos choix. Cette réalité commande d'être responsable, et de revisiter certains principes de notre système de protection sociale. C'est aussi une obligation morale par rapport aux générations à venir.

Mme Annie Le Houerou. - Je partage les propos de Bernard Jomier.

J'ai cru comprendre que le projet de loi spéciale ne prévoyait pas de plafond d'emprunt pour l'Urssaf Caisse nationale. Qu'en est-il exactement ?

Si nous restons figés dans nos postures, nous n'arriverons à rien, car les mêmes causes produiront les mêmes effets. Toutefois, le travail réalisé en commission au Sénat a montré que nous pouvions faire évoluer certaines lignes.

Si nous voulons préserver notre système de santé, il faudra certes poser la question des dépenses, mais aussi soulever celle des recettes. Ce n'est pas un sujet tabou. Des conférences sociales pourraient constituer à cet égard des initiatives intéressantes, susceptibles de conduire à des compromis qui ne soient pas des compromissions.

Mme Nadia Sollogoub. - Que deviendront les conventions signées par les professions de santé ? À titre d'exemple, la consultation médicale doit passer à 30 euros le 22 décembre. L'absence de PLFSS modifie-t-elle cet état de fait ?

Mme Raymonde Poncet Monge. - Nous voterons le projet de loi spéciale, bien sûr.

Pour obtenir un compromis, il faut que chacun examine honnêtement les propositions de tous. Or, au Sénat, nous avons accepté que l'on fasse revoter certains amendements au projet de loi de finances (PLF) pour 2025, sous prétexte que nous n'aurions pas bien voté ! De même, le compromis n'est pas forcément toujours à l'oeuvre en CMP, comme en témoigne le devenir de nos propositions relatives aux suppressions d'exonérations de charges. Le débat s'en trouve parfois confisqué. Or en pareil cas il faut toujours s'attendre à un retour du refoulé.

Osons donc prendre le risque d'une conférence de financement ! Partons des besoins des territoires, donnons sa juste place à la prévention, pour réaliser des économies. Prenons le risque de confronter réellement les points de vue. Parlons des 20 milliards d'euros d'exonérations non compensées : autant de cadeaux fiscaux qui se transforment en déficit !

Je le répète, plutôt qu'un véhicule législatif qui donne au débat un cadre contraint, organisons donc une véritable conférence de financement sur les retraites, cette méthode pouvant être élargie à d'autres domaines.

Mme Corinne Imbert. - Dans le cas de l'objectif de dépenses de la branche maladie, le PLFSS pour 2025 prévoyait 64 milliards d'euros de plus que le PLFSS pour 2019. Certes, il faut tenir compte des dépenses supplémentaires, du vieillissement de la population, de l'augmentation des affections de longue durée. Mais tout cela pèse-t-il 64 milliards d'euros ?

L'Urssaf Caisse nationale va pouvoir emprunter sans plafond, sans limites, sans possibilité de transfert de dette à la Cades. La Cour des comptes a souligné que le financement des déficits par l'Urssaf Caisse nationale se faisait « dans des conditions qui pourraient mettre en risque le versement des prestations ». Or, après la censure, on s'orienterait vers un déficit encore plus important que celui qui était issu du texte de la CMP.

La question des recettes n'est pas seule en cause, il faut aussi parler des dépenses. Le texte tel qu'issu des travaux du Sénat était assez « propre », selon l'expression du président Mouiller.

Nous savons ce qu'il en a résulté, et les risques financiers non négligeables sont désormais devant nous, d'autant que les emprunts risquent de nous coûter plus cher.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure pour avis. - Je préférerais que l'on parle « des accords », en deux mots, plutôt que de « désaccord ». Qu'est-ce qui financera notre protection sociale à l'avenir ? Notre modèle est assez ancien et n'est guère adapté notamment au vieillissement de la population. Nous avons rencontré des économistes pendant l'examen du PLFSS. Il faut engager une réflexion sur ce point, et le Sénat doit être au rendez-vous.

Madame Le Houerou, il était préférable de ne fixer aucun plafond pour l'Urssaf Caisse nationale. En particulier, si un plafond avait été fixé, et si des décrets de relèvement avaient été nécessaires pour l'ajuster, cela aurait pu être juridiquement compliqué. Il était donc préférable de ne pas prévoir de limite.

Enfin, Madame Sollogoub, les conventions ne sont pas remises en cause.

La commission émet un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 3 du projet de loi spéciale prévue par l'article 45 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

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