B. LA SOLUTION PROPOSÉE : LA SUPPRESSION DE LA COEXISTENCE DES PARCOURS PASS ET LAS AU PROFIT DE LA MISE EN PLACE D'UNE VOIE D'ACCÈS UNIQUE
1. L'instauration d'une première année de licence commune, comportant une majorité d'enseignements en santé
L'article 1er de la proposition de loi entend refondre le dispositif PASS-LAS en une voie unique d'accès correspondant à une formation du premier cycle de l'enseignement supérieur et permettant l'obtention d'un diplôme national de licence (alinéas 11 et 12).
La première année de cette formation s'apparenterait, comme dans le scénario envisagé par la Cour des comptes, à une première année de licence générale et scientifique donnant accès, d'un côté, aux filières santé MMOP, de l'autre, à une deuxième année de licence. En ce sens, cette voie unique conserve le principe de progression dans les études - souvent qualifié de « marche en avant » - qui a présidé à l'élaboration de la réforme PASS-LAS.
L'article 1er prévoit que la première année de cette nouvelle formation comporte une majorité d'enseignements relevant du domaine de la santé (alinéa 21), sans toutefois préciser cette part majoritaire. Dans le scénario envisagé par la Cour des comptes, celle-ci pourrait correspondre à 45 ou 50 ECTS, les enseignements hors santé représentant 10 à 15 ECTS.
Lors de son audition, la direction générale de l'enseignement supérieur et de la recherche (DGESIP) a informé la rapporteure qu'un modèle unique de voie d'accès aux études de santé est actuellement en concertation avec les acteurs universitaires. Son principal point de divergence avec le dispositif proposé par le présent texte concerne la part accordée aux enseignements en santé. Dans le schéma envisagé par le ministère de l'enseignement supérieur, le bloc d'enseignements en santé et le bloc d'enseignements « hors santé » ont en effet un poids équivalent. Selon le ministère, cette répartition équilibrée est jugée fondamentale pour concilier les objectifs de réussite académique et de poursuite dans les études. Elle serait également exigée par les responsables de licences « hors santé » qui n'accepteraient pas que leurs disciplines « pèsent » moins que les disciplines relevant de la santé.
2. L'encadrement, au niveau national, du bloc disciplinaire « hors santé » de cette première année de licence commune
L'article 1er met en place un cadrage national de cette première année de licence commune en prévoyant la fixation, par arrêté, d'une liste de disciplines pouvant y être enseignées à côté des enseignements en santé, dans le respect de critères fixés par décret en Conseil d'État (alinéa 21).
Cette disposition est destinée à corriger « l'éparpillement » disciplinaire résultant de la grande diversité des LAS mises en place par les universités. L'ouverture à des disciplines parfois très éloignées du domaine de la santé était censée servir l'objectif de diversification académique des profils, mais, dans les faits, elle a pu s'avérer contreproductive en termes de poursuite d'études et de perspectives de réorientation.
Recommandé par la Cour des comptes, ce resserrement du champ disciplinaire hors santé doit conduite à s'interroger sur les disciplines dont l'apprentissage apporterait des compétences utiles aux futurs professionnels de santé - à ce titre, la rapporteure souligne que si les matières scientifiques sont évidemment importantes, il convient de ne pas méconnaître l'apport d'autres disciplines comme le droit ou l'économie - et permettrait la poursuite d'études en cas d'échec à l'admission en MMOP.
Le ministère de l'enseignement supérieur a indiqué à la rapporteure que ce sujet faisait partie des points en cours de concertation avec les acteurs universitaires.
3. L'organisation de cette voie unique d'accès aux études de santé dans chaque département
L'article 1er prévoit l'organisation par les universités de cette première année de licence commune dans chaque département, renvoyant la détermination de ses modalités à un décret en Conseil d'État (alinéa 22).
Cette départementalisation de l'offre de formation a pour objectif de permettre un accès plus équitable aux études de santé et d'encourager un recrutement de proximité, notamment en faveur des étudiants issus de territoires ruraux pour lesquels la probabilité de s'installer dans ces territoires et d'y exercer en soins primaires est plus forte que pour des étudiants qui n'en sont pas originaires.
L'ouverture de LAS dans des universités dépourvues de composante santé et généralement situées dans de petites villes permettant un accès facilité à un public géographiquement plus éloigné et socialement plus diversifié poursuivait déjà cet objectif de diversification géographique et sociale. Comme le montre la Cour des comptes, ces formations ont bien permis d'accueillir une proportion plus importante d'étudiants ruraux, mais elles offrent des taux d'accès en MMOP très faibles compte tenu des conditions d'études proposées, ce qui limite très nettement leur intérêt.
Si la rapporteure partage les objectifs qui sous-tendent cette départementalisation de l'accès aux études de santé, elle estime qu'une telle organisation à l'échelle de chaque territoire pose question quant à sa pertinence et sa faisabilité.
La départementalisation en Île-de-France n'a, par exemple, pas beaucoup de sens, comme l'a fait valoir le doyen de la faculté de santé de l'Université Paris Cité en audition. Seuls deux départements franciliens ne sont pas couverts par un accès aux études de santé, le Val-d'Oise et la Seine-et-Marne ; les étudiants qui en sont originaires peuvent facilement suivre leurs cursus dans les départements franciliens limitrophes.
Surtout, cette départementalisation suppose des moyens dédiés pour garantir une formation de qualité aux étudiants. À défaut, elle risque de se traduire par une dilution des moyens existants et par des conditions d'études insatisfaisantes.
Ce sujet fait également partie des discussions en cours avec les acteurs universitaires. Selon les informations recueillies par la rapporteure, le ministère leur a présenté trois options de mise en oeuvre d'une telle organisation départementale :
- l'adossement de la voie unique à une formation de licence déjà existante dans une université ou l'une de ses antennes ;
- la création d'une voie unique sous la forme d'une formation à distance, en s'appuyant sur le dispositif de « campus connecté » ;
- l'accueil de la voie unique par les instituts de formations en soins infirmiers (IFSI) qui disposent d'un bon maillage territorial.
4. L'inclusion de la masso-kinésithérapie aux formations MMOP
L'article 1er inclut explicitement la masso-kinésithérapie dans les dispositions régissant l'accès aux études de santé, aujourd'hui applicables aux seules formations MMOP.
Dans les faits, l'accès aux études de kinésithérapie par les voies PASS et LAS est d'ores et déjà possible. Il n'existe cependant pas d'obligation d'épreuves de second groupe (oraux) comme pour l'accès en MMOP. Par ailleurs, l'accès en kinésithérapie est possible par d'autres voies comme les licences de science et de STAPS.
Globalement plébiscitée, cette intégration « officielle » de la filière kinésithérapie aux formations MMOP a, pour la rapporteure, le mérite de la clarté tout en participant d'une approche systémique des métiers de la santé.