II. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « OUTRE-MER » QUI FAIT PESER UN RISQUE SUR LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES ET SUR LES CAPACITÉS D'INVESTISSEMENT DES COLLECTIVITÉS

A. LA MISSION « OUTRE-MER » CONNAÎT UNE IMPORTANTE BAISSE DE CRÉDITS PAR RAPPORT À L'EXERCICE 2025

Le PLF 2026 prévoit une baisse importante des crédits de la mission « Outre-mer », par rapport à l'exercice 2025, qui lui-même marquait une diminution notable au regard de l'année précédente. Ainsi, la mission « Outre-mer » perdrait 628 millions d'euros en AE et 153 millions d'euros en CP.

La mission se décompose en deux programmes budgétaires :

· le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » voit ses AE diminuer (1,09 Md€ contre 1,4 Md€ dans la LFI 2025) mais bénéficie d'une augmentation des CP (1,03 Md€ contre 839 M€ dans la LFI 2025). Il est composé de huit actions et tend à financer principalement le logement social, l'accompagnement des collectivités locales, les mesures en faveur de la mobilité ultramarine et la solidarité nationale en cas de catastrophe naturelle ;

· le programme 138 « Emploi outre-mer » subit une baisse sensible, étant doté de 1,82 Md€ en AE et 1,8 Md€ en CP (contre 2,16 Mds€ en AE et 2,14 Mds€ en CP dans la LFI 2025). Il est composé de quatre actions et vise à soutenir les entreprises ultramarines, à maintenir leur compétitivité et à renforcer l'insertion professionnelle des populations locales.

Source : Commission des lois à partir des documents budgétaires

Cette diminution des crédits masque en outre d'importantes disparités. Si certaines actions bénéficient d'une hausse substantielle de leurs crédits de paiement, d'autres connaissent des baisses massives, à l'instar de l'action 8 relative au fonds d'investissement (FEI).

B. LE PROGRAMME 123 : UNE HAUSSE DES CRÉDITS DE PAIEMENT POUR AMÉLIORER LES CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER, MAIS UN EFFORT DE MAÎTRISE DES ENGAGEMENTS SUR LES DISPOSITIFS DE DROIT COMMUN

Évolution par action des crédits du programme 123 entre 2025 et 2026 (en M€)

 

AE

CP

Action

LFI 2025

PLF 2026

Variation

LFI 2025

PLF 2026

Variation

01 - Logement

262

236,3

- 9,8 %

186,1

211,3

+ 13,5 %

02 - Aménagement du territoire

185,1

158,9

- 14,2 %

91,6

181,7

+ 98,3 %

03 - Continuité territoriale

74,9

76,9

+ 2,7 %

74,8

76,8

+ 2,7 %

04 - Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport

13,2

13,2

=

10,2

13,2

+ 29,4 %

06 - Collectivités territoriales

657,1

490,2

- 25,4 %

347,2

452,7

+ 30,4 %

07 - Insertion économique et
coopération régionale

0,97

0,97

=

0,97

0,97

=

08 - Fonds exceptionnel d'investissement

102

50

- 51 %

62,9

32

- 49,1 %

09 - Appui à l'accès aux financements bancaires

77,3

61,3

- 20,7 %

64,9

57,9

- 10,8 %

Total

1 372,5

1 087,3

- 20,8 %

838,8

1 026,5

+ 22,4 %

Source : Commission des lois à partir des documents budgétaires

Les crédits du programme 123 connaissent une baisse de 21 % en AE mais une hausse bienvenue de 22 % en CP, s'établissant ainsi à 1,09 Md€ en AE et 1,03 Md€ en CP. Ce mouvement permet un rééquilibrage de crédits du programme, afin de limiter le volume de restes à payer, qui devrait atteindre entre 2,7 et 2,8 Mds€ à fin 2025.

Il convient par ailleurs de noter qu'une partie des crédits7(*) du fonds de secours outre-mer (FSOM) seront transférés vers le programme 122 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », dans le but de rehausser les crédits de la dotation de solidarité aux collectivités victimes d'évènements climatiques ou géologiques (DSEC).

La ligne budgétaire unique (action 1) s'inscrit dans un mouvement asymétrique de baisse des AE et de hausse des CP. Ces crédits financent des actions spécifiques d'aide à la pierre et d'amélioration de l'habitat, afin de promouvoir un habitat décent et adapté aux populations ultramarines. Plus précisément, ils financeront notamment le logement social, avec pour objectifs prioritaires l'adaptation des logements aux risques naturels et la réponse à la hausse de la demande, l'amélioration de l'habitat privé ou encore la résorption de l'habitat insalubre, qui concerne 147 000 logements, soit 16 % du parc.

Le plan logement outre-mer 2024-2027 (PLOM 3)

Annoncé le 27 septembre 2022, le PLOM 3 devrait finalement être signé au dernier trimestre 2025. Il est organisé autour d'un « axe territorial », avec des stratégies adaptées élaborées par les préfets, et d'un « axe transversal », qui intégrera notamment les mesures arbitrées par le CIOM et qui vise à faciliter l'action des acteurs territoriaux.

Les PLOM territoriaux ont été finalisés dans l'ensemble des DROM, l'axe transversal du PLOM est lui en phase de validation finale.

S'agissant de l'appui aux collectivités territoriales, le rapporteur regrette la diminution en AE des actions 2, relative à l'aménagement du territoire, et 6, dédiée aux collectivités territoriales. Elle se traduit par une baisse de 21 M€ en AE pour les contrats de convergence et de transformation (CCT), hypothéquant l'atteinte des objectifs contractualisés avec les collectivités sans perspective de prolongation de ces contrats à ce jour.

Le rapporteur constate également la baisse de 166,85 M€ en AE portant notamment sur le fonds de reconstruction de la Nouvelle-Calédonie et sur les dotations scolaires de Guyane et de Mayotte. Cette mesure d'économie interroge le rapporteur, à l'aune du nombre d'élèves demeurant déscolarisés dans ces territoires (respectivement 7 % et 9 % des 3-16 ans).

Toutefois, le rapporteur souligne la hausse bienvenue des crédits de paiement pour ces deux actions, bien que l'apport de crédits supplémentaires pour les CCT ne permette pas, en réalité, de régler l'ensemble des restes à payer, ce qui fragilisera les tissus économiques concernés.

Les contrats de convergence et de transformation

L'intégralité des CCT ainsi que le contrat de développement (CDEV) de la Nouvelle-Calédonie ont été signés en 2024. Ces contrats présentent l'ensemble des engagements financiers conclus entre les collectivités locales signataires et l'État. Ils ont pour objectif de réduire les écarts de développement persistants avec la métropole.

Au total, plus de 8,7 Mds€ sont inscrits dans ces contrats, ce qui permettra de financer la réalisation de projets structurels, avec une participation financière contractualisée de l'État de 2,2 Mds€.

Outre l'augmentation des crédits de paiement dédiés au soutien des collectivités territoriales, la légère hausse des crédits relatifs aux aides à la continuité territoriale (action 3) apparaît opportune, alors même que trois nouvelles aides à la mobilité seront mises en place l'année prochaine et que le passeport pour la mobilité de la formation professionnelle (PFMP) a bénéficié à 3000 ultramarins en 2024. Le rapporteur sera attentif à la montée en charge de ces nouveaux dispositifs sur l'année 2026.

En revanche, le rapporteur déplore la baisse substantielle des crédits de l'action 8, relative au FEI. Ce fonds bénéficie aux personnes publiques qui investissent dans des équipements collectifs participant de façon déterminante au développement économique, social ou environnemental. Cette baisse s'inscrit certes dans les économies souhaitées par le Gouvernement pour respecter ses engagements en matière de déficit public, mais elle pourrait porter préjudice aux collectivités locales ultramarines qui souhaitent financer de tels projets structurants et ce, alors que le FEI, qui permet un fort effet de levier, est un outil d'intervention efficace à disposition du ministère.

De même, les crédits de l'action 9, dédiés à l'appui aux financements bancaires, diminuent fortement par rapport à l'exercice 2025, en raison d'une baisse des crédits alloués au dispositif de prêt garanti par l'État porté par la Société de gestion de fonds de garantie d'Outre-mer (SOGEFOM).

Enfin, le montant des crédits dédiés à l'action sanitaire et sociale, à la culture, à la jeunesse et aux sports (action 4) ainsi qu'à l'insertion économique et à la coopération régionales (action 7) est identique aux montants prévus par la LFI 2025.


* 7 À hauteur de 5 M€ en AE et 2 M€ en CP.

Partager cette page