- L'ESSENTIEL
- I. UNE PROGRESSION MAÎTRISÉE DES
DÉPENSES DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT
- II. UN BUDGET STRUCTURÉ AUTOUR DU
RENFORCEMENT DES MOYENS DE CYBERSÉCURITÉ ET LA PRÉVENTION
DES INGÉRENCES ÉTRANGÈRES
- A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS,
PRINCIPALEMENT AU BÉNÉFICE DU SGDSN, AU SERVICE DE LA MISE EN
oeUVRE OPÉRATIONNELLE DE LA STRATÉGIE DE
CYBERSÉCURITÉ
- B. UNE POLITIQUE D'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ENCORE
EN DEÇÀ DES BESOINS STRATÉGIQUES, MALGRÉ DES
INITIATIVES STRUCTURANTES QU'IL FAUT DÉSORMAIS AMPLIFIER
- 1. Une dynamique qui peine à se
concrétiser, comme en témoigne le faible volume d'investissements
programmés, mettant en lumière un manque d'ambition
- 2. Un secteur de plus en plus encadré, mais
dont la régulation risque d'être entravée par des
ressources limitées, en particulier de la Cnil et de l'Arcom
- 1. Une dynamique qui peine à se
concrétiser, comme en témoigne le faible volume d'investissements
programmés, mettant en lumière un manque d'ambition
- A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS,
PRINCIPALEMENT AU BÉNÉFICE DU SGDSN, AU SERVICE DE LA MISE EN
oeUVRE OPÉRATIONNELLE DE LA STRATÉGIE DE
CYBERSÉCURITÉ
- III. UNE GESTION RIGOUREUSE, À SALUER, DU
BUDGET ANNEXE DES PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE
(BAPOIA)
- I. UNE PROGRESSION MAÎTRISÉE DES
DÉPENSES DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES
- LISTE DES DÉPLACEMENTS
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N° 145 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026 |
|
Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025 |
|
AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des lois constitutionnelles,
de législation, du suffrage universel, du Règlement et
d'administration générale (1) |
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TOME IX DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT BUDGET ANNEXE « PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE » |
|
Par M. Michel MASSET, Sénateur |
|
(1) Cette commission est composée de : Mme Muriel Jourda, présidente ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, M. Marc-Philippe Daubresse, Mmes Laurence Harribey, Isabelle Florennes, Patricia Schillinger, Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Michel Masset, vice-présidents ; Mmes Marie Mercier, Jacqueline Eustache-Brinio, Lauriane Josende, M. Olivier Bitz, secrétaires ; M. Jean-Michel Arnaud, Mme Nadine Bellurot, MM. Jean-Baptiste Blanc, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Sophie Briante Guillemont, M. Ian Brossat, Mme Agnès Canayer, MM. Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, David Margueritte, Hervé Marseille, Thani Mohamed Soilihi, Mme Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Anne-Sophie Patru, M. Hervé Reynaud, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mme Elsa Schalck, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel. |
|
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180 Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026) |
L'ESSENTIEL
La mission « Direction de l'action du Gouvernement » fédère des entités diverses rattachées au Premier ministre. Pour 2026, le projet de loi de finances (PLF) dote la mission « Direction de l'action du Gouvernement » d'un budget de 1,028 milliard d'euros en autorisations d'engagement (+0,48 %) et de 1,06 milliard d'euros en crédits de paiement (+3,34 %).
Le schéma d'emplois prévoit une baisse de 7 équivalents temps plein (ETP) pour 2026, supportée intégralement par le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental ».
Les crédits dédiés à la diffusion légale et à l'information administrative sont, pour leur part, inscrits dans le budget annexe « Publications officielles et information administrative », également examiné par le rapporteur.
Dans le prolongement des efforts réalisés les années précédentes, la direction de l'information légale et administrative (Dila) participe activement à l'objectif de maîtrise des dépenses publiques. Les crédits du budget annexe s'élèvent pour 2026 à 147 M€, pour des prévisions de recettes s'établissant à 175 M€.
Pour toutes ces raisons, suivant l'avis du rapporteur, la commission a ainsi émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe des « Publications officielles et information administrative ».
I. UNE PROGRESSION MAÎTRISÉE DES DÉPENSES DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT
A. UNE HAUSSE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 129 PORTÉE PAR L'AUGMENTATION DES DÉPENSES DE PERSONNEL
Les crédits inscrits au budget pour 2026 traduisent un effort renouvelé de maîtrise des dépenses de fonctionnement.
Hors dépenses de personnel, les crédits du programme 129 augmentent de 10,6 M€ en crédits de paiement (CP), soit une augmentation de 1,2 %, pour s'établir à 598,6 M€. Les dépenses de personnel progressent quant à elles de 7 % en 2026, pour atteindre 319,9 M€.
Les créations d'emplois prévues en 2026 sont limitées à +18 ETP en faveur du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), compensées par la suppression de 25 ETP, au détriment du Haut-commissariat à la stratégie et au plan (HCSP, -10 ETP), du service d'information du gouvernement (SIG, -5 ETP) et de l'Institut national du service public (INSP, -10 ETP). Le schéma d'emplois pour 2026 subit ainsi une baisse nette de 7 ETP.
Évolution des crédits au sein du
programme 129
(en euros)
|
N° |
Intitulé de l'action |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||||
|
LFI |
Demandées |
Évolution |
LFI |
Demandés |
Évolution |
||
|
01 |
Coordination du travail gouvernemental |
111 608 602 |
110 278 275 |
-1,19 |
111 608 602 |
110 278 275 |
-1,19 |
|
02 |
Coordination de la sécurité et de la défense |
405 474 977 |
430 383 070 |
+6,14 |
406 175 209 |
431 083 302 |
+6,13 |
|
03 |
Coordination de la politique européenne |
18 250 360 |
19 401 670 |
+6,31 |
18 250 360 |
19 401 670 |
+6,31 |
|
10 |
Soutien |
137 258 344 |
129 169 621 |
-5,89 |
150 396 068 |
158 147 423 |
+5,15 |
|
11 |
Stratégie et prospective |
22 856 517 |
23 317 423 |
+2,02 |
22 856 517 |
23 317 423 |
+2,02 |
|
13 |
Ordre de la Légion d'honneur |
30 810 819 |
30 959 316 |
+0,48 |
30 810 819 |
30 959 316 |
+0,48 |
|
15 |
Mildeca |
15 743 744 |
15 338 315 |
-2,58 |
15 743 744 |
15 338 315 |
-2,58 |
|
16 |
Coordination de la politique numérique |
81 743 076 |
81 679 108 |
-0,08 |
82 336 299 |
82 272 331 |
-0,08 |
|
17 |
Coordination de la politique des ressources humaines de l'État |
48 781 438 |
47 657 620 |
-2,3 |
48 781 438 |
47 657 620 |
-2,3 |
|
Total |
872 527 877 |
888 184 418 |
+1,79 |
886 959 056 |
918 455 523 |
+3,55 |
|
Source : Projet annuel de performances - Annexe au PLF 2026
Un exemple de fusion d'entités du programme
129 :
la création du Haut-commissariat à la
stratégie et au plan
Annoncée par l'ancien Premier ministre Michel Barnier en octobre 2024, la création du Haut-commissariat à la stratégie et au plan, issu de la fusion du Commissariat général à la stratégie et à la prospective (France Stratégie) avec le Haut-commissariat au plan, a été actée par le décret n° 2025-450 du 23 mai 2025.
Sur le plan budgétaire, la fusion sera effective au 1er janvier 2026. À la fin de l'année 2025, elle aura déjà généré 12 % d'économies de fonctionnement.
La dotation allouée au HCSP dans le PLF 2026 s'élève à 23,32 M€, dont 7,12 M€ en crédits hors titre 2. Le projet de loi prévoit également un schéma d'emplois de -10 ETP.
Cette fusion constitue un exemple de synergie pertinente qui s'inscrit efficacement dans l'objectif de maîtrise des dépenses publiques.
B. UN EFFORT PARTICULIÈREMENT EXIGEANT POUR LES ENTITÉS DU PROGRAMME 308, EN DÉPIT DE L'ACCROISSEMENT DE LEURS MISSIONS
1. Un gel des moyens dont sont dotées les autorités administratives indépendantes
Les économies demandées aux autorités administratives indépendantes (AAI) sur leurs dépenses de fonctionnement courant atteignent 0,9 M€, soit une baisse de 2,4 %.
Avec un budget de 71,07 M€ en CP hors titre 2, les entités du programme 308 contiennent l'évolution de leurs crédits, conformément à l'effort de maîtrise de la dépense publique (+0,1 M€ en CP). La hausse générale des dépenses (+1,97 % en CP) tient essentiellement à la progression des crédits de titre 2 de 2,7 %, en raison de facteurs d'évolution automatique.
Si les AAI du programme ne bénéficient d'aucune création de postes en 2026, leur plafond progresse toutefois de 5 équivalents temps plein travaillés (ETPT), pour s'établir à 755 ETPT.
Le rapporteur attire l'attention sur le fait que cet effort de maîtrise ne permet pas aux entités du programme 308 d'assurer pleinement leurs missions essentielles.
À titre d'illustration, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) indique ne pas disposer des moyens nécessaires pour recruter les experts indispensables au renforcement des capacités de contrôle en matière d'ingérences étrangères. Enfin, le Défenseur des droits, qui avait sollicité 14 ETP supplémentaires, n'obtient aucune création de postes et doit recourir de manière massive à des stagiaires - environ 80 par an.
Évolution des crédits au sein du
programme 308
(en euros)
|
N° |
Intitulé |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
|||||
|
LFI |
Demandées |
Évolution |
LFI |
Demandés |
Évolution |
|||
|
02 |
Cnil |
30 287 188 |
31 228 373 |
+3,11 |
30 287 188 |
31 228 373 |
+3,11 |
|
|
03 |
Arcom |
49 898 887 |
50 521 416 |
+1,25 |
49 898 887 |
50 521 416 |
+1,25 |
|
|
05 |
CGLPL |
5 773 296 |
5 705 901 |
-1,17 |
6 214 519 |
6 146 795 |
-1,09 |
|
|
06 |
Autres AAI |
4 977 758 |
6 324 505 |
+27,06 |
4 977 758 |
6 324 505 |
+27,06 |
|
|
06.01 |
Cada |
2 037 292 |
2 194 826 |
+7,73 |
2 037 292 |
2 194 826 |
+7,73 |
|
|
06.02 |
CCNE |
1 500 486 |
2 082 253 |
+38,77 |
1 500 486 |
2 082 253 |
+38,77 |
|
|
06.03 |
CNCDH |
1 439 980 |
2 047 426 |
+42,18 |
1 439 980 |
2 047 426 |
+42,18 |
|
|
09 |
Défenseur des droits |
30 935 772 |
31 206 422 |
+0,87 |
30 935 772 |
31 206 422 |
+0,87 |
|
|
10 |
HATVP |
24 738 843 |
10 531 674 |
-57,43 |
12 269 965 |
11 531 674 |
-6,02 |
|
|
12 |
CNCTR |
3 502 643 |
3 798 954 |
+8,46 |
3 502 643 |
3 798 954 |
+8,46 |
|
|
13 |
CSDN |
741 595 |
806 088 |
+8,7 |
741 595 |
806 088 |
+8,7 |
|
|
Total |
150 855 982 |
140 123 333 |
-7,11 |
138 828 327 |
141 564 227 |
+1,97 |
||
Source : Projet annuel de performances - Annexe au PLF 2026
2. Un accroissement significatif des missions confiées aux entités du programme
La majorité des AAI du programme voient leur activité croître en 2026, en raison des nouvelles missions confiées, sans pour autant que leurs moyens ne soient renforcés pour y parvenir.
La mise en place, depuis le 1er octobre 2025, du nouveau téléservice prévu par la loi du 25 juillet 2024 relative à la prévention des ingérences étrangères accentue la charge de la HATVP. Le rapporteur préconise, par la voie d'un amendement, d'accorder 6 ETP supplémentaires à l'institution, afin d'assurer les missions confiées.
De nouvelles compétences dans le cadre du règlement européen sur les services numériques (RSN) sont confiées à l'Arcom et à la Cnil en matière de transparence algorithmique, de ciblage publicitaire et de profilage des mineurs.
Enfin, en 2026, en vertu de la loi de bioéthique de 2021, le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) organisera les états généraux de la bioéthique, auxquels 0,6 M€ est consacré.
Dans ce contexte, le rapporteur tient, à titre personnel, à affirmer la nécessité de maintenir les trajectoires budgétaires prévues par le PLF 2026 et de doter des moyens idoines les entités du programme 308, pour qu'elles puissent véritablement exécuter leurs missions.
Comparaison européenne des entités
Le rapporteur a émis le souhait d'objectiver le débat autour des critiques portées à l'encontre des AAI françaises, parfois perçues comme trop nombreuses et trop coûteuses. Dès lors, une comparaison européenne conduit à tirer deux enseignements :
· Les périmètres d'action des entités européennes ne se recouvrent qu'imparfaitement ;
· La France se place dans le bas du tableau européen en effectifs comme en moyens.
Un focus sur la Cnil permet de constater qu'elle dispose
d'un budget et d'effectifs particulièrement
limités au regard du rang démographique de la France.
L'équivalent allemand de la Cnil, la Bundesbeauftragte für den
Datenschutz und die Informationsfreiheit, dispose de plus de 1 000 ETP en
moyenne sur les cinq dernières années pour 84 millions
d'habitants, soit bien plus que la Cnil avec un peu moins de 300 ETP
pour 70 millions d'habitants et que l'homologue italien bénéficie
de 150 ETP pour 59 millions d'habitants. En revanche, les budgets allemands
et italiens avoisinent respectivement 100 M€ et 42 M€ par
an, bien au-delà des 31 M€ d'euros de la Cnil.
Enfin, compte tenu des risques qui pèsent sur le budget des AAI et API de la mission, le rapporteur entend rappeler que l'indépendance des AAI, non absolue, dépend de la loi et des moyens qui leurs sont accordés. Dès lors, le rapporteur en appelle, à titre individuel, à la responsabilité des parlementaires, garants de cette indépendance, en accordant aux AAI les moyens nécessaires à l'exercice de leurs missions.
II. UN BUDGET STRUCTURÉ AUTOUR DU RENFORCEMENT DES MOYENS DE CYBERSÉCURITÉ ET LA PRÉVENTION DES INGÉRENCES ÉTRANGÈRES
A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS, PRINCIPALEMENT AU BÉNÉFICE DU SGDSN, AU SERVICE DE LA MISE EN oeUVRE OPÉRATIONNELLE DE LA STRATÉGIE DE CYBERSÉCURITÉ
L'Anssi identifie trois évolutions majeures : une capacité accrue des attaquants à conduire des opérations massives en des délais très courts ; un basculement d'une logique d'espionnage ciblé vers des actions de déstabilisation et de sabotage ; et une convergence croissante des motivations entre acteurs étatiques et cybercriminels.
1. Le renforcement de la résilience cyber de la sphère publique, portée par le SGDSN, dans un contexte de menaces accrues
Le budget pour 2026 concentre un effort spécifique
autour des enjeux de cybersécurité et de
prévention des ingérences étrangères.
À ce titre,
les crédits de paiement alloués au SGDSN
augmentent de 25 M€ et le schéma d'emplois
prévoit la création de 18 ETP. Hors transferts en base,
ses crédits de masse salariale augmentent de 13,8 M€ (+12,5
%).
La nouvelle stratégie nationale de cybersécurité, adoptée en novembre 2024, fixe un cap renouvelé en matière de cyber-résilience. Dans ce contexte, le SGDSN, en particulier à travers l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), se voit confier de nouvelles missions comme la mise en oeuvre de la directive NIS2, pour laquelle il jouera un rôle de régulateur, de contrôle et d'aide au développement des services numériques ; la mise en application du règlement sur la résilience cyber (CRA) pour lequel il assurera le rôle d'autorité notifiante en charge d'évaluer et de contrôler les organismes d'évaluation de la conformité (OEC) ; et l'actualisation du règlement sur la cybersécurité (CSA), pour lequel il veillera à la bonne articulation des schémas nationaux et européens de certification.
Les entités du programme 308 déclinent elles aussi des politiques en matière de renforcement cyber. Dans cette optique, la Cnil consacre l'un de ses axes prioritaires à la cybersécurité dans son plan stratégique 2025-2028 tandis que la HATVP sécurisera son système d'information et ses outils numériques, lesquels hébergent des données personnelles sensibles.
2. Lutte contre les manipulations de l'information et les ingérences étrangères : une montée en puissance de Viginum et un renforcement de la coordination publique
Le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) poursuivra en 2026 sa montée en puissance, avec 3 ETP supplémentaires. Dans un contexte d'intensification des menaces liées aux ingérences étrangères, plusieurs projets structurants seront engagés en 2026 à l'instar du projet TRILOG, programme interministériel de centralisation de la technique de recueil de données informatiques qui doit permettre d'offrir à la CNCTR des capacités accrues de contrôle.
Viginum constate une profonde mutation des opérations d'ingérence numériques étrangères, qui cherchent désormais moins à diffuser des contenus trompeurs qu'à instrumentaliser les tensions internes pour polariser l'opinion. Le paysage informationnel subit une triple pression :
1° Une pression stratégique, portée par l'instrumentalisation de l'espace numérique par des acteurs étrangers exploitant nos principes démocratiques pour semer la confusion, affaiblir la confiance dans les institutions et peser sur les débats publics.
2° Une pression systémique, résultant des transformations du paysage numérique : montée en puissance des influenceurs ou la multiplication de médias alternatifs administrés depuis l'étranger traduits automatiquement par l'intelligence artificielle (IA).
3° Une pression idéologique, marquée depuis début 2025 par une offensive contre la souveraineté démocratique européenne. Sous couvert de défense de la liberté d'expression, cette stratégie se traduit par une réduction des financements américains dédiés à la lutte contre la désinformation et un discours hostile aux médias traditionnels et aux régulateurs.
B. UNE POLITIQUE D'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ENCORE EN DEÇÀ DES BESOINS STRATÉGIQUES, MALGRÉ DES INITIATIVES STRUCTURANTES QU'IL FAUT DÉSORMAIS AMPLIFIER
1. Une dynamique qui peine à se concrétiser, comme en témoigne le faible volume d'investissements programmés, mettant en lumière un manque d'ambition
Si les crédits dédiés à la direction interministérielle du numérique (Dinum), qui conduit la stratégie de l'État en matière d'intelligence artificielle à travers son département Etalab, apparaissent peu satisfaisants au regard des enjeux, certains projets et actions présentées au rapporteur lors des auditions sont toutefois prometteurs.
À cet égard, le SGDSN est étroitement associé à la création le 3 février 2025 de l'Institut national de l'évaluation et de la sécurité de l'intelligence artificielle (Inesia) qui vise à fédérer un écosystème national en réunissant les capacités de recherche des acteurs français.
Depuis 2025, la Cada expérimente le recours à l'IA pour réduire les délais de traitement des demandes de conseil. L'outil en phase d'expérimentation propose des projets de réponses et facilite le tri des demandes nécessitant ou non un examen par le collège.
2. Un secteur de plus en plus encadré, mais dont la régulation risque d'être entravée par des ressources limitées, en particulier de la Cnil et de l'Arcom
L'année 2026 sera marquée par la poursuite de l'entrée en vigueur du règlement européen sur l'intelligence artificielle (RIA). Ce règlement vise à garantir que le développement et l'utilisation des produits et productions de l'IA respectent les droits fondamentaux et les valeurs européennes. L'Arcom devrait exercer des compétences nouvelles à ce titre en tant qu'autorité pressentie pour devenir autorité de surveillance du marché pour certains systèmes d'IA, notamment ceux destinés à interagir avec le public et sera chargée de la supervision des hypertrucages (deepfakes).
De son côté, la Cnil souligne la complémentarité forte entre le RIA et le RGPD. L'utilisation des données personnelles étant au coeur du fonctionnement de nombreuses IA, une articulation efficace entre la régulation de l'IA et l'application du RGPD est indispensable. Pour autant, la Cnil a alerté le rapporteur sur l'absence de moyens supplémentaires pour mener à bien ces missions, alors qu'elle avait évalué ses besoins à +15 ETP pour 2026. Pour assurer à la Cnil les moyens concrets de mettre en oeuvre le RIA, le rapporteur propose de relever ses effectifs de la Cnil de 10 ETP.
Les risques liés aux outils d'intelligence artificielle en matière d'accès aux droits, de protection des données et du processus démocratique
Le Défenseur des droits, initialement mobilisé sur les enjeux de discrimination algorithmique, constate désormais que l'usage des algorithmes et de l'intelligence artificielle touche l'ensemble de ses missions de protection des droits et libertés.
Selon lui, les biais algorithmiques sont rarement détectables au niveau individuel et une analyse globale est nécessaire.
Le Défenseur des droits a fourni un exemple d'une expérience en conditions réelles révélatrice de biais persistants.
Entre 2021 et 2023, trois associations ont diffusé des offres d'emploi neutres dans leur formulation. Les résultats ont mis en évidence un ciblage différencié selon le sexe : les annonces d'auxiliaires petite enfance et de secrétaires ont été proposées à 94 % et 92 % à des femmes alors que les offres de pilote ou de responsable d'infrastructure informatique ont été adressées respectivement à 85 % et 68 % à des hommes.
Le Défenseur des droits a rappelé que le ciblage doit s'accompagner de garanties minimisant les biais.
Il convient de s'assurer que les entités du programme soient dotées des moyens suffisants pour mener leurs missions et lutter efficacement contre les dérives et les menaces liées à l'avènement des instruments d'IA pour les Français.
III. UNE GESTION RIGOUREUSE, À SALUER, DU BUDGET ANNEXE DES PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE (BAPOIA)
A. UN BUDGET EN BAISSE SUR LE PLAN DES DÉPENSES COMME DES RECETTES
1. Une baisse des dépenses dans le prolongement des exercices précédents, qui devrait se poursuivre dans les années à venir
Pour l'exercice 2026, le montant des crédits du BAPOIA, qui s'élève à 145,7 M€ en AE et 147,4 M€ en CP, présente une légère hausse de 0,2 M€ en AE (+0,16 %) et une baisse de 1,6 M€ en CP (-1 %). Hors compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », les crédits du BAPOIA affichent la même stabilité en AE avec un montant de 141,8 M€ et une diminution en CP avec -1 % (143,5 M€). Les dépenses de personnel diminuent quant à elles, à périmètre constant, de 1,1 M€ (50,9 M€, soit -2,12 %).
Dans le détail, les crédits du programme 623 « Édition et diffusion » s'élèvent à 43,7 M€ en CP (+4 %) et ceux du programme 624 « Pilotage et ressources humaines » s'élèvent en 2026 à 103,7 M€ en CP (-3,1 %).
2. Une baisse des recettes principalement liée à l'organisation des élections municipales et communautaires
Le niveau prévisionnel des recettes retenu pour l'exercice 2026 est évalué à 175,3 M€, soit un montant total présentant une baisse de 5 % (-5,7 M€), afin de tenir compte :
· des effets régulièrement constatés du cycle électoral, en raison d'investissements communaux moins dynamiques l'année de la tenue des élections municipales (-65 M€ soit une baisse de 9 %) et qui entraînent une baisse des recettes issues des annonces publiées au bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ;
· des effets de la situation économique sur le comportement des annonceurs publics et de la fin de la convention passée avec les concentrateurs d'annonces au 31 décembre 2026.
La trajectoire 2026-2028 tend vers une stabilisation du niveau de recettes autour de 170,3 M€.
L'excédent dégagé entre les recettes et les dépenses atteint près de 28 M€, soit un peu moins que l'année précédente (30,5 M€).
B. UN SCHÉMA D'EMPLOIS STABILISÉ APRÈS PLUSIEURS ANNÉES DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS, N'AFFECTANT PAS LES AMBITIONS DE TRANSFORMATION ET D'AMÉLIORATION DE LA DILA
1. Après une longue période de diminution progressive des effectifs, la direction de l'information légale et administrative (Dila) entérine la stabilisation de son schéma d'emplois
Le plafond d'emplois de la Dila pour l'année 2026 est fixé à 487,16 ETPT. Il progresse de 1,25 ETPT par rapport à 2025 (485,91 ETPT), soit une hausse de 0,26 %. Au cours des trois dernières années, la Dila a engagé d'importantes réductions d'effectifs, se traduisant par une baisse significative de son plafond d'emplois.
Schéma et plafond d'emplois de la Dila entre 2020 et 2024 et prévu en 2025-2026
|
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
|
|
En ETP |
-17 |
-11 |
-7 |
-15 |
-20 |
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Source : réponses au questionnaire adressé à la Dila
Pour mémoire, comme indiqué dans l'avis du rapporteur pour l'exercice 2025, ces suppressions d'emplois (une baisse de 37 % des effectifs sur la période 2014-2024) ont été rendues possibles par la mise en oeuvre de réformes structurelles, notamment grâce aux nouveaux outils de production normative (NOPN) visant à construire un processus totalement dématérialisé et à fluidifier la production des textes normatifs depuis leur rédaction dans les ministères jusqu'à leur publication au Journal officiel, désormais finalisée.
2. La Dila poursuit en 2026 son projet de transformation numérique et de satisfaction de l'usager
Face à la montée en puissance des plateformes d'IA disposant de modes de référencement très efficaces et qui se substituent progressivement aux moteurs de recherche, la Dila doit s'adapter afin de conserver le dynamisme de progression de ses sites. Cette adaptation passe par la valorisation des contenus en tant que bases de données fiables et vérifiées ainsi que par le développement de sa position de marque, en particulier à travers ses trois sites phares que sont Vie publique, Légifrance et Service public.
Par ailleurs, pour garantir un accès fluide à l'information administrative et adapté aux besoins de chacun, la Dila développe de nouveaux canaux d'interaction avec les usagers comme les réseaux sociaux ou la création d'une application mobile interministérielle, en cours de développement conjointement avec la Dinum, pour faciliter les démarches administratives.
L'objectif principal est de concentrer l'activité de développement des démarches de la Dila là où elle a la plus forte plus-value. À ce titre, le montant des investissements dédiés à l'action « 02 - Information administrative et vie publique » du programme 623 est porté de 3 M€ en 2025 à plus de 6,7 M€ en 2026.
La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative » inscrits au projet de loi de finances pour 2026.
EXAMEN EN COMMISSION
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous commençons nos travaux par l'examen du rapport pour avis de notre collègue Michel Masset sur les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
M. Michel Masset, rapporteur pour avis de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ». - La mission « Direction de l'action du Gouvernement » est comme toujours hétérogène et singulière.
Elle rassemble en effet des entités très différentes les unes des autres : neuf autorités administratives indépendantes, une autorité publique indépendante - l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) - ainsi que plusieurs administrations rattachées au Premier ministre, chargées de missions de prospective, de coordination et de soutien.
Dans le cadre de la préparation de ce rapport, j'ai rencontré onze institutions. Je considère en effet qu'il est indispensable de rencontrer ces acteurs dont nous contrôlons et évaluons les crédits. Toute réflexion sur une éventuelle maîtrise de leurs dépenses doit s'inscrire dans une logique de dialogue et de respect de leur indépendance.
Je me suis également rendu dans les locaux de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) et de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), que je remercie pour la qualité de leur accueil et de nos échanges.
Dans la continuité des auditions de cette année, je veillerai, en 2026, à aller à la rencontre des autres entités visées par cette mission au mois de mars ou d'avril, afin de faire un point d'étape.
Cette mission contribue, elle aussi, à l'effort budgétaire national, même si l'évolution de ses moyens est contrastée. Ses crédits - hors dépenses de personnel - augmenteront de 10,6 millions d'euros, soit une progression de 1,7 %, à un rythme voisin de l'inflation prévue pour 2026.
Cet effort repose autant sur les entités du programme 129, dont les crédits hors secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) augmentent de 0,7 % par rapport à la loi de finances de 2025, que sur celles du programme 308 dont les crédits, hors masse salariale, demeurent quasiment stables - à 50 000 euros près.
Je veux également saluer la gestion très rigoureuse du budget annexe de la Direction de l'information légale et administrative (Dila). Son excédent prévisionnel atteint 28 millions d'euros, grâce à une maîtrise fine des dépenses et à des investissements menés avec discernement et constance.
Lors des auditions, j'ai interrogé les différentes entités sur leur bilan de l'année écoulée, sur les nouvelles missions qui leur ont été confiées, sur leur analyse du projet de loi de finances (PLF) pour 2026 et sur leurs besoins, compte tenu du contexte national et international.
Je concentrerai mon propos sur quatre autorités représentatives de cette mission : la Cnil, le Défenseur des droits, l'Arcom et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).
Toutes ont fait état d'une très forte mobilisation en 2025 et de nouvelles responsabilités viendront s'ajouter en 2026, sans qu'aucun renfort d'effectifs ne soit prévu. Et je tiens à souligner que la plupart de ces nouvelles responsabilités leur ont été confiées par le législateur. Nous avons donc une charge particulière à assurer la mise en oeuvre de ces missions supplémentaires en prévoyant des moyens adéquats. Je vous proposerai plusieurs amendements en ce sens, même si je suis sceptique sur l'issue des votes...
La HATVP, en premier lieu, a dû absorber une hausse importante des saisines préalables aux nominations, en particulier celles concernant les cabinets ministériels. Cette charge a eu pour conséquence de retarder le traitement des projets de mobilité public-privé.
Une nouvelle dissolution placerait clairement la HATVP dans une situation très difficile : elle devrait alors consacrer l'essentiel de ses moyens aux contrôles liés à cette séquence politique, au détriment de ses autres missions et de tout accompagnement, alors même que 2026 sera une année charnière pour les élus locaux.
De plus, les missions confiées à la HATVP par la loi du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en France n'ont pas été suivies d'un renfort de ressources humaines alors qu'elles participent activement à notre défense nationale dans un contexte très tendu.
La Cnil et l'Arcom ont, toutes deux, été sollicitées à la suite de l'adoption de textes européens majeurs, comme le règlement sur les services numériques (RSN) ou celui sur l'intelligence artificielle (RIA). Elles sont pressenties pour devenir autorités de surveillance du marché dans des secteurs stratégiques, notamment pour la supervision des hypertrucages, afin de lutter contre les techniques trompeuses, subliminales ou exploitant des vulnérabilités.
Les autorités que nous avons auditionnées ont d'ailleurs fait part de leurs vives inquiétudes quant au niveau des moyens qui leur seront alloués l'année prochaine, considérant que le PLF 2026 ne tient pas suffisamment compte de leurs besoins réels et qu'il maintient des équilibres déjà fragiles.
La Défenseure des droits m'a ainsi alerté sur la baisse de ses moyens de fonctionnement pour les systèmes d'information, qui entravera la poursuite de projets de transformation numérique et obligera l'institution à se tourner vers des solutions moins coûteuses, mais aussi moins performantes et moins durables.
Nous devons absolument éviter que la France ne perde l'avance qu'elle avait su prendre dans ce domaine : les investissements numériques d'aujourd'hui conditionnent l'efficacité et la crédibilité de nos institutions demain.
Par ailleurs, aucune perspective de fusion, à l'instar de celle qui a été opérée pour créer le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan (HCSP), n'apparaît pertinente en l'état actuel des choses.
Je veux également exprimer un regret concernant les efforts menés en matière de cybersécurité et de lutte contre les ingérences étrangères.
Certes, 18 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires et 15 millions d'euros de crédits ont été accordés au SGDSN, conformément à la stratégie nationale de cybersécurité adoptée l'an dernier. Mais ces moyens n'ont pas été répercutés au sein des budgets des différentes entités de la mission, alors même que la menace cyber s'intensifie dans un contexte international extrêmement complexe, et que les opérations d'ingérence numérique évoluent tous les jours.
Chaque entité devrait pouvoir disposer aujourd'hui des moyens minimaux nécessaires pour se prémunir des attaques.
C'est pourquoi je tiens à vous alerter sur les conséquences des amendements déposés par le rapporteur spécial qui visent à réduire de 4 millions d'euros les crédits de cette mission, ce qui fragiliserait encore davantage des autorités dont plusieurs sont déjà en sous-capacité.
Je rappelle, à titre d'exemple, que la Cnil constitue une institution rentable pour l'État : elle a prononcé plus de 1 milliard d'euros d'amendes entre 2019 et 2024, alors même que son budget reste très inférieur à celui de ses homologues allemand ou italien.
Je veux enfin remercier ma collègue Audrey Linkenheld pour son implication et sa présence à mes côtés lors des auditions.
Au terme de l'ensemble de ces travaux, et malgré les vives réserves exprimées, je considère que les principales orientations de la mission et ses mesures nouvelles sont globalement satisfaisantes en l'état.
Je vous propose donc, mes chers collègues, d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » ainsi qu'à l'adoption des crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Je souhaite toutefois vous sensibiliser sur les risques que feraient peser les efforts de réduction des crédits demandés à cette mission et vous invite à adopter mes amendements, qui me semblent indispensables au regard des enjeux auxquels les autorités concernées doivent répondre.
M. Dany Wattebled. - Merci pour votre rapport, mon cher collègue. Si je vous ai bien compris, vous avez parlé d'un excédent de 28 millions d'euros pour bonne gestion. L'augmentation des crédits que vous demandez me surprend donc.
Où était la Cnil quand on a accepté que 60 millions de données de santé des Français soient hébergées dans le Health Data Hub ? L'École polytechnique et le ministère de l'enseignement supérieur ont également fait appel à Microsoft pour héberger leurs données. Je m'interroge donc sur certains aspects des missions de la Cnil.
La HATVP est sans pitié pour les élus, mais les hauts fonctionnaires peuvent pantoufler à souhait.
Je suis donc défavorable à une augmentation des crédits.
Mme Agnès Canayer. - Aucun décret d'application n'a été pris sur la loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France, notamment concernant les nouvelles missions attribuées à la HATVP.
Dans le droit fil des propos de mon collègue, il s'agit d'une question non pas de moyens, mais de réorganisation de ces instances, pour garantir un meilleur fonctionnement. Augmenter leurs moyens ne leur permettra pas forcément de mieux remplir leurs missions.
Permettez-moi de vous faire part de ma brève expérience ministérielle : en trois mois, j'ai dû faire huit déclarations à la HATVP. Quand on sait que les données aujourd'hui préremplies doivent être ressaisies à la main, nul doute qu'il y a là des possibilités de simplification. C'est une meilleure performance du fonctionnement de ces institutions qui sera de nature à garantir l'effectivité de leurs missions et non pas des moyens supplémentaires.
M. David Margueritte. - Je partage les propos de mes deux collègues. D'ailleurs, le rapporteur pour avis a pressenti notre position sur les amendements d'augmentation des crédits qu'il va nous présenter. Nous avons tous vécu des expériences surprenantes avec la HATVP, qui relance de manière extrêmement intrusive les élus. Il y aurait matière à alléger les procédures.
De manière plus générale, il serait singulier d'augmenter les crédits de ces autorités dans le contexte budgétaire contraint. C'est pourquoi je ne voterai pas les amendements proposés par le rapporteur pour avis. D'ailleurs, une bonne politique publique ne s'évalue pas à l'aune de l'augmentation de ses moyens. Vu leur budget, elles devraient être particulièrement performantes et offrir des services publics de haut niveau ! Au contraire, si l'on prenait des mesures visant à limiter leurs crédits ou à les baisser de façon significative, pour certaines d'entre elles, cela les conduirait à s'interroger sur leur modèle pour améliorer leurs performances.
M. Thani Mohamed Soilihi. - Permettez-moi de vous partager une anecdote assez croustillante. Alors que je fais la même déclaration à la HATVP depuis une dizaine d'années, cette dernière a modifié par erreur mon régime matrimonial. Mais de quel droit ? J'ai mis presque un mois à obtenir la correction qui s'imposait.
Mme Audrey Linkenheld. - Je remercie Michel Masset pour la qualité de son rapport, du travail sur pièces et des auditions qu'il a réalisés. Je dois dire que je suis assez surprise des propos de certains collègues. On peut avoir des appréciations différentes, mais c'est peu respectueux du travail de notre collègue que de considérer qu'il propose des augmentations de crédits uniquement parce que ce serait le seul moyen pour ces autorités d'assurer certaines missions. On peut, me semble-t-il, s'en remettre à son esprit de discernement : il sait faire la part des choses entre les demandes formulées et la réalité des besoins. Même si nous ne souscrivons pas aux analyses des rapporteurs, nous devons les écouter, par égard pour leur travail.
Pour ce qui me concerne, je partage très largement le constat qu'il a dressé. L'évolution des crédits de la mission est, il est vrai, contrastée, avec une augmentation bienvenue des crédits du SGDSN - nous sommes tous ici convaincus des menaces, y compris cyber, qui pèsent sur notre pays. Toutefois, à l'issue des auditions auxquelles j'ai participé, il est difficile d'entendre que cet arbitrage se fasse au détriment de la protection des droits et libertés - c'est la réalité. Déjà mis à rude épreuve dans le projet de loi précédent, certains budgets n'augmentent pas ; d'autres sont susceptibles de diminuer avec l'amendement adopté par la commission des finances ; et le schéma d'emploi est nul alors même que certaines autorités ont vu leurs missions s'accroître. D'un côté, le législateur vote de nouvelles missions, et de l'autre, il n'accorderait pas de moyens supplémentaires aux autorités qui manquent de ressources ! Je précise que les autorités ne réclament pas une augmentation de leurs crédits ou de leurs effectifs par principe ! Ce n'est pas vrai. Certaines d'entre elles ont indiqué pouvoir remplir leurs nouvelles obligations à moyens constants. Mais il n'en demeure pas moins que certaines structures sont aujourd'hui à l'os ; je pense en particulier à la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), qui a pour missions la lutte contre le racisme et l'antisémitisme ainsi que le respect du droit international humanitaire en situation de guerre, des sujets d'actualité. Notons également que la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada) et la Défenseure des droits font face à une augmentation du nombre de saisines. De même, l'Arcom a une activité très soutenue, notamment actuellement à cause de CNews.
Cessons ces caricatures sur ces sujets sensibles ! Les augmentations proposées sont assez mesurées. Il s'agit de 9 000 euros pour la CNCDH ! Est-il normal, dans un État de droit, qu'en cours d'année elle n'arrivait plus à payer les salaires ? Certaines structures n'ont pas les moyens d'éditer ou de diffuser les maquettes des guides qui leur sont demandés. Il ne s'agit pas du tout d'une question de bonne gestion.
C'est pourquoi nous serons favorables à l'augmentation des crédits de la Cnil, du Défenseur des droits et de l'Arcom. Nous déposerons, pour notre part, des amendements complémentaires en faveur de la CNCDH et, probablement aussi, du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
M. Dany Wattebled. - Vous avez bien mentionné un excédent de 28 millions d'euros résultant d'une bonne gestion. Ne pourrions-nous pas nous en servir pour le ventiler parmi les différents postes de dépenses, afin d'éviter des augmentations ? Nous touchons là à un travers fréquent dans notre pays, puisque nous n'arrivons jamais à remettre un excédent dans le pot commun, ce qui me pose problème.
Mme Anne-Sophie Patru. - Merci à notre rapporteur pour ses investigations. Je tiens à rappeler que nous nous trouvons dans un contexte difficile qui doit conduire chaque acteur à fournir des efforts afin de réduire la dette publique : ces efforts doivent être proportionnés et surtout s'appliquer à l'intégralité des missions.
Nous demanderons un effort supplémentaire à la HATVP si nos collègues députés approuvent l'amendement que nous avons adopté en séance concernant le préremplissage automatique des déclarations, mais, dans la mesure où elle ne devra pas assumer cette nouvelle tâche avant 2027, elle n'a pas besoin de moyens supplémentaires à ce stade.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - Je me suis sans doute mal exprimé au sujet de l'excédent de 28 millions d'euros : il concerne le budget annexe, bien distinct de la mission.
M. Dany Wattebled. - Cette somme pourrait être affectée ailleurs.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - Un tel procédé est interdit s'agissant d'un budget annexe.
M. Dany Wattebled. - Ne pas pouvoir reporter une somme d'une ligne budgétaire à une autre est problématique.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - Une fois encore, il s'agit d'un budget annexe, ce qui interdit une écriture de compte à compte.
Plus globalement, je tiens à vous faire part de ma frustration en tant qu'ancien auditeur pour des collectivités et des entreprises de la grande distribution : en un temps contraint, il m'a fallu rencontrer les représentants de quatorze structures, mais le fait de ne pouvoir consacrer qu'une heure et demie à chacun d'entre eux m'a empêché - je le dis humblement - d'approfondir une série de points que vous avez soulevés.
Néanmoins, certains enseignements peuvent être tirés : certaines structures sont en souffrance et trois domaines posent des difficultés, à savoir la cybersécurité, l'intelligence artificielle - domaine dans lequel il ne faut pas prendre de retard - et la diffusion de l'information à l'ensemble des publics. De nouveau, j'aurais aimé pousser l'analyse plus loin, des travaux supplémentaires étant nécessaires pour identifier des pistes de simplification.
En tout état de cause, il n'existe pas de doublons. Pour ce qui est de la HATVP, les dysfonctionnements que vous avez mentionnés sont incontestables, mais n'oublions pas que cette structure a procédé à une restructuration au cours de l'année et s'apprête à déménager, ce qui ne manquera pas de donner lieu à des mutualisations avec d'autres structures, en dépit de la surcharge liée aux élections législatives, d'où des difficultés à contrôler l'ensemble des élus. Une nouvelle dissolution serait dramatique pour la HATVP, qui croulerait alors sous la charge de travail.
J'entends votre scepticisme sur les amendements que je vous propose, mais, de grâce, n'adoptez pas les amendements du rapporteur spécial de la commission des finances, qui prévoient une diminution des crédits de 4 millions d'euros.
Mme Muriel Jourda, présidente. - En écho aux propos de Mme Linkenheld, je tiens à souligner que ne pas partager le point de vue du rapporteur ne revient pas à lui manquer de respect...
Mme Audrey Linkenheld. - Ce n'est pas ce que j'ai dit ! Vous déformez mes propos !
Mme Muriel Jourda, présidente. - Dire que nous manquons de respect à l'égard du rapporteur au motif que nous ne partageons pas ses conclusions...
Mme Audrey Linkenheld. - Non, ce n'est pas ce que j'ai dit !
Mme Muriel Jourda, présidente. - C'est ce que tout le monde a compris et il me semble que c'est faux, car le travail des uns et des autres est respecté au sein de cette commission. Une fois encore, il est possible d'être en désaccord avec le rapporteur et de ne pas voter ses amendements, sans pour autant manquer de respect envers le travail et l'analyse fournis.
Mme Audrey Linkenheld. - C'est de la mauvaise foi et je peux repréciser ma pensée si besoin.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je crains fort que tout le monde n'ait compris la même chose.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - L'amendement LOIS.1 prévoit d'attribuer à l'Arcom cinq emplois supplémentaires afin de lui permettre de faire face aux obligations issues du règlement européen sur la liberté des médias.
L'amendement LOIS.1 n'est pas adopté.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - L'amendement LOIS.2 vise à attribuer dix emplois supplémentaires à la Cnil, afin qu'elle puisse assurer pleinement ses nouvelles missions liées au RIA.
L'amendement LOIS.2 n'est pas adopté.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - L'amendement LOIS.3 prévoit d'accorder quatorze emplois supplémentaires au Défenseur des droits, afin de veiller au respect du règlement sur l'IA.
L'amendement LOIS.3 n'est pas adopté.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - L'amendement LOIS.4 vise à renforcer les capacités de la Direction interministérielle du numérique (Dinum) en prévoyant une dotation supplémentaire de 10 millions d'euros en 2026.
Cette proposition s'inscrit dans la continuité de la stratégie numérique de l'État, en répondant aux enjeux d'amélioration de l'attractivité des métiers numériques dans la fonction publique.
M. Dany Wattebled. - Les travaux que j'ai menés dans le cadre de la commission d'enquête sur la commande publique, plus particulièrement en ce qui concerne les enjeux de souveraineté, montrent qu'il ne faut pas accorder de moyens supplémentaires à la Dinum, tant le système actuel est ubuesque : qu'il s'agisse de cette structure ou de la Cnil, personne n'est responsable de rien. Je vous invite à réécouter l'audition correspondante du 5 mai 2025, ce qui vous permettra de comprendre pourquoi je m'oppose résolument à cet amendement.
L'amendement LOIS.4 n'est pas adopté.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis. - L'amendement LOIS.5 prévoit d'attribuer six ETP supplémentaires à la HATVP.
L'amendement LOIS.5 n'est pas adopté.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Secrétariat général du Gouvernement (SGG) (lundi 3 novembre 2025)
Mme Claire Landais, secrétaire générale du Gouvernement
M. Thibaut de Vanssay de Blavous, directeur des services administratifs et financiers du Premier ministre
Haute Autorité pour la transformation de la vie publique (HATVP) (lundi 3 novembre 2025)
M. Jean Maïa, président
Mme Louise Bréhier, secrétaire générale
Mme Laetitia Ferro, directrice administrative, financière et des ressources humaines
Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) (lundi 3 novembre 2025)
M. Martin Adjari, président
M. Alban de Nervaux, directeur général
Direction interministérielle du numérique (Dinum) (mardi 4 novembre 2025)
Mme Stéphanie Schaer, directrice interministérielle du numérique
Mme Yona Seghiouer-Begard, attachée auprès de la direction des services administratifs et financiers (DSAF)
Mme Nora Mansour, attachée auprès de la DSAF
Table ronde : petites autorités administratives indépendantes (jeudi 13 novembre 2025)
Commission d'accès aux documents administratifs (Cada)
Mme Hélène Servent, secrétaire générale
Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE)
Pr Jean-François Delfraissy, président
Mme Ingrid Callies, secrétaire générale
Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH)
Mme Magali Lafourcade, secrétaire générale
Mme Cécile Riou, secrétaire générale adjointe
Comité du secret de la défense nationale (CSDN)
M. Gilles Andréani, président
M. Pierre Gaudin, secrétaire général
Défenseur des droits (lundi 17 novembre 2025)
Mme Claire Hédon, défenseure des droits
Mme Mireille Le Corre, secrétaire générale
M. Franck Réthoré-Collin, directeur de l'administration générale
M. Victor Manciet, chef de cabinet
Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) (lundi 17 novembre 2025)
M. Mathias Moulin, secrétaire général adjoint
M. Jean-Marc Salmon, directeur administratif et financier
Mme Chirine Berrichi, conseillère des affaires parlementaires et institutionnelles
LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES
Service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum)
LISTE DES DÉPLACEMENTS
Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) (lundi 17 novembre 2025)
M. Vincent Strubel, directeur général
Mme Jennyfer Chrétien, directrice de cabinet