II. LES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT DU MILIEU RURAL
Les crédits d'équipement du milieu rural ont traditionnellement pour objet de faciliter l'accès des usagers ruraux aux services publics à caractère industriel et commercial : l'assainissement et la distribution d'eau ; l'énergie électrique. Deux fonds de péréquation concourent à cet objectif : le fonds national pour le développement des adductions d'eau (FNDAE), compte spécial du Trésor ; le fonds d'amortissement des charges d'électrification (FACE). Si votre commission continue à examiner, dans le cadre de l'examen des crédits d'aménagement rural du ministère de l'agriculture, l'évolution de ces fonds, force est de constater que le lien entre le ministère et ces fonds s'est distendu.
Ainsi, depuis les lois de décentralisation, les ministères concernés-les ministères de l'agriculture et de l'industrie, aidés d'un conseil, pour le FACE ; le ministère de l'agriculture, aidé d'un comité pour le FNDAE, sont uniquement chargés de la répartition de l'enveloppe entre les départements. Ce sont ces derniers qui, en application de l'article 110 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, ont en charge la programmation des aides du FNDAE et du FACE, en fonction des travaux à réaliser sur leur territoire.
Le ministère de l'agriculture n'a désormais plus qu'une connaissance approximative des équipements réalisés avec le concours de l'État : en application de l'article premier du décret n° 88-477 du 29 avril 1988 relatif aux modalités de transfert aux départements de services ou parties de services des directions départementales de l'agriculture et de la forêt, les services assumant les missions de programmation et de gestion des crédits d'équipement rural et d'aménagement foncier pour le compte du département, ainsi que la préparation des délibérations du Conseil général relatives à la répartition des crédits du FACE et du FNDAE, ont été transférés aux départements.
Dès lors, le recensement des équipements publics ruraux, sur le plan départemental et national, nécessite une étroite collaboration entre les Conseils généraux et les services de l'État.
Or, selon le ministère, « l'inventaire des équipements réalisés tous les cinq ans par les communes rurales dans les domaines de l'eau, l'assainissement et l'électrification rurale, démontre tout particulièrement les difficultés qu'il y a à disposer d'une information précise et complète, tout particulièrement dans les deux premiers domaines ».
On notera, sur ce point, que le ministère souhaiterait que « des textes réglementaires précisent les modalités de mise à disposition par les collectivités territoriales, pour le compte de l'État, des informations relatives aux équipements réalisés et prévus. Ces données collectées constituent une base primordiale de suivi et d'aide à la décision dans la gestion des fonds de péréquation que sont le FNDAE et le FACE ».
A. L'ALIMENTATION EN EAU POTABLE ET L'ASSAINISSEMENT
Le fonds national pour le développement des adductions d'eau, compte spécial du Trésor géré par le ministère de l'agriculture, a été conçu, dès son origine en 1954, comme un instrument financier de solidarité nationale : prélevées sur l'ensemble de la population, ses ressources sont redistribuées aux seules communes rurales. Il est destiné à aider les communes rurales à mettre en place leurs services publics de distribution d'eau et, depuis 1979, d'assainissement.
En autorisations de programme, le FNDAE a attribué 936,5 millions de francs de crédits en 1994 et 840 millions de francs en 1995, ce qui représente environ 12 % du montant total des investissements réalisés éligibles à ce fonds et 10 % des investissements théoriquement nécessaires.
La faiblesse de ce taux explique, pour partie, la sous-réalisation constatée par rapport aux besoins : alors que le précédent inventaire de l'alimentation en eau potable et de l'assainissement des communes rurales avait fait apparaître un besoin d'investissement total de l'ordre de 10 milliards de francs par an sur la période de 1990-1994, la réalisation effective semble inférieure, soit 7 à 8 milliards de francs chaque année.
Le nouvel inventaire quinquennal permettra d'établir la situation au 1er janvier 1995, il déterminera le montant d'investissements effectivement effectué de 1990 à 1995 et celui des réalisations nécessaires de 1995 à 1999.
Il apparaît, d'ores et déjà, qu'en dépit du rattrapage effectué -98 % des communes rurales sont desservies-, un effort significatif doit être poursuivi.
Le milieu rural continue à souffrir d'un retard important en matière de sécurité et de fiabilité des réseaux, de vulnérabilité de la ressource, de collecte et de traitement des eaux usées.
En outre, les spécificités de la distribution, de la collecte et de l'assainissement en milieu rural (la dispersion de la population à desservir, la petite taille des services qui doivent gérer des réseaux importants...) contribuent à y renchérir le prix de l'eau, en moyenne 27 % plus cher qu'en milieu urbain. En outre, le durcissement de la réglementation, notamment en application de dispositions communautaires, l'obligation de séparer du budget général de la commune les budgets des services de distribution et d'assainissement, la suppression des tarifications pour des volumes forfaitaires devraient contribuer à accroître cet écart.
Par conséquent, afin de permettre aux communes rurales de ne Pas accroître, voire de combler partiellement leur retard, une augmentation des moyens du fonds paraît nécessaire.
Le comité de gestion du FNDAE, réuni le 8 juin 1995, a ainsi estimé indispensable une revalorisation de 3,03centimes/m3 au 1er janvier 1996 de la redevance actuelle sur le prix de l'eau qui s'établit aujourd'hui à 12 centimes/m3.
Cette majoration permettrait de réduire l'écart, qui semble aujourd'hui se creuser, entre les besoins d'investissements des communes rurales et les aides qui sont effectivement affectées à ceux-ci.
Elle paraît d'autant plus nécessaire que l'intervention des autres financeurs ne pourra pas progresser : les départements ont à faire face à des charges croissantes dans d'autres domaines, notamment social, et les agences de bassin sont amenées à focaliser leurs interventions sur les zones urbaines.
B. L'ÉLECTRIFICATION
Le FACE joue, pour l'électrification rurale, un rôle analogue à celui du FNDAE en matière d'alimentation en eau potable et d'assainissement.
Depuis sa création en 1936, il permet de soutenir, par l'octroi de subventions en capital, l'effort d'investissement pour l'électrification des communes rurales. Ces collectivités, le plus souvent regroupées en syndicats intercommunaux ou départementaux, assurent la responsabilité directe des investissements de distribution électrique. Depuis 1992, il contribue également à l'intégration esthétique des réseaux.
Le fonds est alimenté par une contribution (1,95% des recettes afférent aux distributions dans les communes urbaines et 0,39 % pour les communes rurales) versée annuellement par les distributeurs d'énergie électrique basse tension.
Comme pour la distribution d'eau et l'assainissement, on constate un écart persistant entre communes rurales et urbaines en matière de distribution.
En effet, les communes rurales présentent encore une qualité de service inférieure, même si elle s'en rapproche, à celle fournie en zones urbaines. Cette situation est appréciée par l'importance du taux d'abonnés mal alimentés, c'est-à-dire ceux qui subissent des chutes de tension en moyenne supérieures à 11 % : en 1990, elles concernaient 5,2 % des abonnés en zones rurales contre 2 % pour les abonnés en zones urbaines.
Alors que l'objectif du dernier inventaire d'électrification rurale était d'atteindre un taux quasiment nul au 1er janvier 1995, cet objectif n'a pas été atteint. On estime que 3 % d'abonnés seraient encore mal alimentés en zone rurale et on dénombrait encore, en 1993, 15 départements dont le taux d'abonnés mal alimentés dépassait les 6 %.
Les efforts importants qui doivent encore être accomplis justifient, par conséquent, la pérennité, voire le renforcement des ressources du FACE, compte tenu du chiffre prévisible des besoins pour les cinq prochaines années 1995-1999.
On constate, en outre, que les crédits de la tranche C (le programme « environnement »), 400 millions de francs en 1995, ne permettent de financer qu'un quart des besoins formulés.
Le montant des travaux aidés par le FACE (au taux de 50 % pour le programme « environnement » et de 70 % pour le reste des programmes) représente environ 2,5 milliards de francs. Il faut y ajouter les travaux financés par les collectivités sur le produit des taxes départementales et municipales sur l'électricité, pour un montant annuel d'environ 1,6 milliard de francs.
C. LES ORDURES MENAGÈRES
La gestion des ordures ménagères en milieu rural doit répondre aux objectifs de la loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets ainsi qu'aux installations classées pour la protection de l'environnement. Cette loi fixe notamment parmi ses objectifs une valorisation la plus large possible des déchets par réemploi, recyclage ou toute autre action visant à obtenir à partir des déchets des matériaux réutilisables ou de l'énergie. Elle limite, à compter du 1er juillet 2002, l'utilisation des centres de stockage pour les seuls déchets ultimes. En outre, elle prévoit que chaque département devra être couvert, d'ici le 4 février 1996, par un plan d'élimination des déchets ménagers et assimilés. Ces plans constituent le cadre dans lequel sont définis les organisations et projets des collectivités en matière de collecte, du tri et de traitement de leurs déchets.
À l'évidence, l'élimination des déchets en milieu rural présente des spécificités que les plans doivent prendre en compte, notamment en favorisant les regroupements intercommunaux pour tout ou partie de la chaîne et en adaptant les objectifs et moyens des collectes sélectives au contexte rural.
On constate que la majorité des plans adoptés dans les départements « à caractère rural » prévoient la création de structures de regroupement des communes, à la fois pour la collecte et pour le traitement des déchets, la mise en place progressive d'un réseau de déchetteries, la mise en place de centres de transfert des déchets, (de l'ordre de 10 à 15 par département), la création de 1 à 3 plateformes de compostage, le développement du compostage individuel, l'utilisation, à courte échéance, de décharges autorisées, et la mise aux normes ou la création de 1 ou 2 incinérateurs.
On évalue les investissements nécessaires à la mise en place de ces installations d'élimination des déchets à 1.000 francs par habitant, sur la période de mise en oeuvre du plan.
Ainsi, les communes et leurs groupements vont devoir faire face à des investissements importants pour satisfaire aux objectifs de la loi. Les projets d'installations d'élimination des déchets ménagers et assimilés, dont ceux des communes rurales, qui répondent aux critères retenus par le comité consultatif de modernisation de la gestion des déchets pourront donc bénéficier du fond de modernisation. Les ressources de ce fonds seront d'ailleurs accrues : le taux de la taxe sur le stockage des déchets ménagers et assimilés a été augmenté par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement. On estime, au premier semestre 1995, à environ 85 millions de francs le montant des aides destinées aux communes rurales, au titre du fond de modernisation de la gestion des déchets.