CHAPITRE II LES TÉLÉCOMMUNICATIONS FRANÇAISES :
UN SECTEUR EN PLEINE MUTATION

Peu de secteurs de l'économie ont connu d'aussi profonds bouleversements que ceux qui sont intervenus en 1996 dans les télécommunications. Ces changements concernent tant le cadre réglementaire qui régit ces activités que l'opérateur historique France Télécom lui-même.

I. UN DROIT DES TÉLÉCOMMUNICATIONS PROFONDÉMENT MODIFIÉ QUI PERMET L'ENTRÉE DE LA FRANCE DANS LA SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION ET L'OUVERTURE DU SECTEUR DES TÉLÉCOMMUNICATIONS À LA CONCURRENCE

En 1996, pas moins de trois lois, dont votre commission des Affaires économiques a été saisie au fond 3 ( * ) , ont contribué à renouveler le visage du secteur des télécommunications françaises. En particulier, deux de ces textes ont profondément modifié le cadre réglementaire.

A. LA LOI N° 96-299 DU 10 AVRIL 1996 RELATIVE AUX EXPÉRIMENTATIONS DANS LE DOMAINE DES TECHNOLOGIES ET SERVICES DE L'INFORMATION REND POSSIBLE L'ENTRÉE DE NOTRE PA YS DANS LA SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION

1. Un texte lourd d'enjeux

Comme le soulignait le rapporteur du texte, notre collègue M. Jean-Marie Rausch, les dispositions adoptées au printemps dernier par le Parlement revêtent un très forte portée symbolique, puisqu'elles ont pour vocation de fournir aux pouvoirs publics, mais aussi aux entreprises, les technologies de l'information qui leur permettront « d'orienter la marche de la société française vers la société de communication »

Le texte adopté vise à permettre d'expérimenter localement, et de manière restreinte, certains outils qui paraissent destinés à jouer un rôle majeur dans la mutation que subissent actuellement les sociétés industrielles, à savoir, d'une part, les technologies novatrices de diffusion audiovisuelle -que l'on désigne communément sous le vocable « d'autoroutes de l'information »- et, d'autre part, une large gamme de services multimédia que ces autoroutes rendent possibles.

La genèse de ce texte se trouve dans le constat d'une certaine inadaptation de la législation en vigueur face au développement des nouvelles technologies.

En effet, fin 1994, le Gouvernement de M. Édouard Balladur avait lancé un appel à propositions en vue de mettre en place des expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information. La sélection des projets les plus innovants a mis en évidence le fait que la législation en vigueur était quelque peu inadaptée à l'exploitation de produits ou de services multimédias sur les autoroutes de l'information. En effet, celles-ci ont vocation à transporter à la fois de la voix, des données, des textes, de la musique et des images, alors que les textes légaux existants organisent un certain cloisonnement entre deux modes de transmission de l'information, considérés jusqu'à présent comme distincts les télécommunications (téléphonie vocale, transferts de données numériques...) et la communication audiovisuelle (programmes de radiodiffusion et de télévision).

Plus précisément, l'examen des conditions de lancement des expérimentations les plus innovantes a fait apparaître deux obstacles de nature législative auxquels elles étaient susceptibles de se heurter. Le premier obstacle était l'exclusivité reconnue à France Télécom pour, d'une part, établir des réseaux filaires de télécommunications ouverts au public et, d'autre part, fournir au public des prestations de téléphonie vocale entre points fixes. Le deuxième obstacle était constitué par les obligations imposées à la diffusion et à la protection de services audiovisuels. dont la rigueur aboutissait à freiner l'utilisation des techniques de diffusion numérique -qui permettent de proposer plusieurs programmes sur un même canal- et à paralyser l'offre de services audiovisuels à la demande.

Il apparaissait donc impératif de pouvoir lancer des expérimentations dérogeant aux règles en vigueur, avant même que ces règles ne soient changées globalement -ce qui était d'ores et déjà prévu pour le 1 er janvier 1998 dans le domaine des télécommunications, en raison des décisions prises dans le cadre de l'Union européenne- pour éviter que les opérateurs français ne prennent du retard sur leurs concurrents européens.

En outre, il était nécessaire que les pouvoirs publics puissent assez rapidement disposer d'éléments d'informations résultant d'expériences concrètes et non pas seulement d'analyses abstraites pour pouvoir prendre les meilleures décisions dans le domaine -ô combien stratégique- que constitue le développement des autoroutes de l'information.

Enfin, ainsi que le rappelle l'exposé des motifs du projet de loi, il s'agissait de créer l'environnement permettant d'atteindre l'objectif fixé -à l'initiative du Sénat- par la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire d'une couverture du territoire national par les autoroutes de l'information en 2015.

Bien que porteur de lourds enjeux symboliques, le texte adopté est cependant d'une portée juridique restreinte.

2. Une portée juridique restreinte

La loi du 10 avril 1996 n'a pas remis en cause les principes de la législation relative aux télécommunications ni de celle relative a la communication audiovisuelle.

Elle a simplement permis d'y déroger, de manière temporaire (la durée maximale des licences expérimentales est fixée à cinq ans) et selon des procédures rigoureuses, afin que puissent être mises en oeuvre certaines des expérimentations les plus innovantes qui ont été proposées par les différents acteurs économiques ou locaux.

Les principales dispositions de ce texte sont résumées dans le tableau ci-après :

PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA LOI N° 96-299 DU 10 AVRIL 1996 RELATIVE
AUX EXPÉRIMENTATIONS DANS LE DOMAINE DES TECHNOLOGIES ET
SERVICES DE L'INFORMATION

Article premier : régime des licences expérimentales

Cet article définit les critères généraux et la procédure juridique applicables aux expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information, dont la mise en oeuvre suppose une dérogation par rapport à la législation en vigueur.

Article 2 : expérimentations dérogeant à la réglementation des télécommunications

Cet article permet de déroger, de façon limitée et dans certaines conditions, au monopole de France Télécom concernant le service téléphonique entre points fixes.

Article 3 : dérogations à la législation sur la communication audiovisuelle au profit des expérimentations par voie hertzienne terrestre.

Article 4 : dérogations pour la reprise par multiplexage d'éléments de programme audiovisuels . Cet article vise à donner une base légale à la diffusion multiplexée de services audiovisuels.

Article 5 : expérimentations de services audiovisuels à la demande . Cet article vise à donner une base légale aux expérimentations de services audiovisuels à la demande.

Article 6 : durée d'application du régime des licences. Cet article limite aux trois années qui suivent la publication de la loi la possibilité de délivrer les licences expérimentales.

Article 7 : rapport d'information au Parlement . Cet article dispose que le Gouvernement remettra au Parlement dans un délai de trois ans un rapport d'information sur l'évolution des projets expérimentaux.

Article 8 : applicabilité dans les territoires d'outre-mer.

La France est donc désormais dotée du cadre juridique lui permettant de profiter des nouvelles opportunités fournies par les avancées technologiques.

B. LA LOI N° 96-659 DU 26 JUILLET 1996 DE RÉGLEMENTATION DES TÉLÉCOMMUNICATIONS A CONSACRÉ LOUVERTURE DU SECTEUR À LA CONCURRENCE DANS LE RESPECT DU SERVICE PUBLIC

L'année 1996 a également vu l'adoption de la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications 4 ( * ) qui a inscrit dans le droit français le principe de l'ouverture à la concurrence de ce secteur.

Cette réforme constitue un tournant dans l'histoire des télécommunications en France, puisqu'elle a marqué la fin d'un monopole public séculaire sur le téléphone.

1. Une réforme rendue nécessaire tant par l'engagement européen de la France que par les évolutions technologiques

a) La dynamique de l'engagement européen

L'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications a progressivement été réalisée à l'échelon communautaire.

Le secteur des télécommunications n'était pas visé par le Traité de Rome. En 1987, la publication du Livre vert de la Commission européenne sur « Le rôle des télécommunications dans la construction européenne » a permis de définir des règles d'action mises en oeuvre et précisées depuis.

Le tableau ci-après retrace les évolutions européennes dans le secteur des télécommunications.

CALENDRIER EUROPÉEN DE L'OUVERTURE
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS À LA CONCURRENCE

1984

- Décision d'engager l'élaboration d'un « Livre vert » sur le rôle des télécommunications dans la construction européenne

1986

- Adoption de l'Acte unique européen

1987

- Publication par la Commission européenne du « Livre vert » sur les télécommunications européennes

16 mai 1988

- Directive instaurant la concurrence pour les terminaux (dont postes téléphoniques).

7 décembre 1989

- Sous présidence française : décision du Conseil des Ministres européens d'ouvrir progressivement à la concurrence la plupart des services de télécommunications, sous réserve des droits exclusifs et spéciaux sur le service téléphonique entre points fixes et sur les infrastructures publiques.

28 juin 1990

- Directives ONP et « services » instaurant la concurrence pour les services de télécommunications hors service téléphonique.

1 er janvier 1993

- Concurrence sur les services de transmissions de données.

16 juin 1993

- Décision du Conseil des Ministres européens de généraliser la concurrence sur tous les services de télécommunications à compter du 1 er janvier 1998.

17 novembre 1994

- Décision du Conseil des Ministres européens de généraliser la concurrence sur les infrastructures à compter
du 1 er janvier 1998..

16 janvier 1996

- Directive instaurant la concurrence sur les mobiles (libéralisés depuis 1987 en France)

13 mars 1996

- Directive modifiant la directive « services » pour fixer le calendrier et les conditions de la généralisation de la concurrence.

1 er juillet 1996

- Concurrence sur les infrastructures alternatives.

1 er janvier 1998

- Concurrence sur le service téléphonique ouvert au public et l'établissement des infrastructures sous- jacentes.

Comme le soulignait déjà votre rapporteur pour avis dans son avis budgétaire sur le projet de loi de finances pour 1996, les mesures adoptées à l'échelon européen nécessitaient donc une adaptation du cadre réglementaire français. Mais les progrès techniques eux-mêmes rendaient cette évolution inéluctable.

b) Un mouvement mondial d'ouverture poussé par les avancées technologiques

Un mouvement mondial de libéralisation

Jusqu'en 1984, les télécommunications étaient partout cloisonnées en monopoles nationaux détenus par les opérateurs publics.

Depuis, de très nombreux pays ont instauré la concurrence dans ce secteur : en 1984, les États-Unis et la Grande-Bretagne ont été les premiers à le faire, bientôt suivis par les pays d'Europe du Nord, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, l'Allemagne, la France, l'Italie, l'Espagne.

L'ouverture internationale du secteur à la concurrence fait d'ailleurs actuellement l'objet de négociations. Les ministres des pays membres du GATT ont. à Marrakech, lors de la signature du cycle de l'Uruguay, décidé d'entamer de nouvelles négociations dans plusieurs secteurs et notamment dans le secteur des télécommunications. Ils ont fixé au Groupe de négociations sur les télécommunications de base (GNTB), structure qui a été mise en place à l'Organisation mondiale du commerce pour mener à bien ces négociations, un délai de deux ans pour aboutir.

Pour ces négociations sur les télécommunications, la Communauté européenne et les États membres ont une compétence partagée. La délégation européenne comprend donc tout à la fois des représentants de la Commission et des représentants des États membres.

Suite à un revirement des États-Unis sur la question des télécommunications par satellites dans les dix derniers jours de la négociation, il a été impossible d'aboutir à la signature d'un accord le 30 avril 1996. Il a alors été décidé de prolonger les négociations jusqu'au 15 février 1997 en s'appuyant sur les résultats déjà obtenus.

Votre rapporteur pour avis estime que l'impossibilité de conclure un accord en avril dernier n'entame pas le processus, largement inéluctable, de libéralisation de ce secteur.

Les nouvelles technologies rendent les monopoles nationaux largement caducs

Comme l'ont fort bien montré les débats de votre commission des Affaires économiques, lors de l'adoption de la loi de réglementation des télécommunications 5 ( * ) , les nouvelles technologies ignorent les frontières et tendent à faire des monopoles nationaux des « boucliers de cartons ».

L'exemple du « call back », qui permet déjà de détourner le monopole de France Télécom sur le téléphone entre points fixes pour les appels internationaux, est à cet égard révélateur.

Face à ces évolutions, le Gouvernement a déposé en avril un projet de loi, adopté par le Parlement, permettant d'adopter le cadre réglementaire français.

2. La loi de réglementation des télécommunications met en place pour les années à venir un cadre concurrentiel qui s'articule autour du respect du service public des télécommunications

a) Une ouverture à la concurrence qui renforce les droits des consommateurs

L'avancée principale du texte est de permettre à de nouveaux opérateurs d'établir un réseau ou de fournir un service de télécommunication.


• De nouvelles libertés

Le texte de loi réforme le code des postes et télécommunications et assouplit les régimes juridiques existants en abolissant le monopole jusqu'alors réservé à France Télécom.

La concurrence en 1998 sera complète : elle touchera, sans restriction, l'ensemble des segments du marché, indépendamment de la clientèle visée, de la technologie utilisée ou du service offert. Cette concurrence sera également ouverte : le nombre de licences susceptibles d'être octroyées à de nouveaux opérateurs ne sera pas limité a priori.

Le nouveau régime juridique des activités de télécommunications est le suivant :

- Pour l'établissement et l'exploitation des réseaux :

D'autres opérateurs que France Télécom pourront désormais être autorisés par le ministre chargé des télécommunications (pour les réseaux ouverts au public) ou par l'Autorité de régulation des télécommunications (pour les réseaux dits indépendants) à établir et exploiter les réseaux. Les petites installations de proximité pourront être établies librement.

- Pour la fourniture des services de télécommunications : Le service téléphonique entre points fixes n'est plus l'apanage exclusif de France Télécom, d'autres opérateurs pourront être autorisés par le ministre à le fournir.

Le régime de la fourniture d'autres services (services radioélectriques. certains services sur réseaux câblés...) est également libéralisé puisqu'il s'agit, suivant les cas, soit d une liberté totale soit d'un simple régime déclaratif auprès de l'Autorité de régulation des télécommunications.

Pour rendre possible la concurrence et la coexistence de plusieurs opérateurs téléphoniques, le texte pose le principe et les conditions de l'interconnexion , c'est-à-dire de la liaison physique et logique des réseaux de télécommunications des différents opérateurs, par convention entre eux. Le texte affirme l'existence d'un droit à partir du moment où la demande n'est pas déraisonnable, ce qui assure en pratique que le développement de la concurrence ne puisse pas être freiné par l'éventuelle mauvaise volonté d'un opérateur déjà en place. Néanmoins, c'est à un décret -qui est actuellement en cours d'élaboration- que renvoie l'article 6 de la loi (article L.34-8 du code des postes et télécommunications) pour la fixation des principes de tarification des accords d'interconnexion. Ce point, lourd d'enjeux financiers pour les futurs entrants sur le marché, ne manquera pas de retenir toute l'attention de votre Commission pour avis .


• De nouvelles garanties pour le consommateur

Le texte adopté permet certaines avancées notables pour l'ensemble des usagers, grand public ou entreprises.

- Il s'agit d'abord de la « portabilité » des numéros de téléphone, c'est-à-dire de la possibilité pour un abonné de garder le même numéro de téléphone s'il déménage ou s'il s'abonne à un autre opérateur.

La portabilité sera mise en oeuvre en deux temps :

Le nouvel article L.34-10 du code des postes et télécommunications prévoit qu'à partir de 1998 un abonné pourra conserver son numéro s'il change d'opérateur sans changer d'implantation géographique. À compter de 2001 , l'abonné pourra obtenir un numéro qu'il gardera même s'il change d'implantation géographique. C'est la portabilité dite « géographique ».

- En outre, le texte adopté assouplit le régime de la cryptologie, c'est-à-dire du chiffrement des données, permettant ainsi le développement futur des transactions électroniques. Désormais, la liberté sera totale d'utiliser des moyens de cryptologie pour rendre confidentiel un message à condition que les clés de chiffrement employées soient gérées par un « tiers de confiance ».

- De plus, la concurrence préservera l'universalité des télécommunications. Un annuaire universel, recensant tous les abonnés de tous les opérateurs, sera établi pour éviter que la concurrence sur le téléphone ne se traduise par des « bibliothèques » d'annuaires forts peu commodes à manier et à consulter.

- Enfin, à l'initiative de notre Haute Assemblée, le texte adopté consacre le principe de l'insaisissabilité de la ligne téléphonique, c'est-à-dire de la possibilité pour les personnes les plus en difficulté, qui ne peuvent payer leurs factures téléphoniques, de continuer pendant un an à recevoir des appels et de pouvoir appeler les services d'urgence et les numéros dits verts. Le téléphone est, en effet, bien souvent un facteur important pour préserver son capital relationnel et ne pas basculer dans l'exclusion.

La loi de réglementation a, en outre, mis en place un nouveau volet institutionnel.

b) Un nouveau dispositif institutionnel


• L'Autorité de régulation des télécommunications

Conformément aux recommandations de votre commission des Affaires économiques 6 ( * ) , le texte présenté par le Gouvernement a instauré une autorité de régulation indépendante du pouvoir (l'État ne peut, en effet, être juge et partie, c'est-à-dire arbitrer la concurrence tout en possédant France Télécom), mais dont les pouvoirs n'aient pas une étendue excessive qui heurterait notre tradition juridique où l'État est lui-même le garant de l'intérêt général.

Les dispositions du texte qui instaurent l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) satisfont à ces exigences, comme le montre le tableau ci-dessous qui détaille les compétences dévolues à l'Autorité :

COMPÉTENCES DE L'AUTORITÉ DE RÉGULATION DES TÉLÉCOMMUNICATIONS ET DU MINISTRE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

L'AUTORITÉ DE RÉGULATION DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

LE MINISTRE CHARGÉ DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

met en oeuvre les règles :

- propose les règles d'application des lois et
décrets ;

- délivre des autorisations (réseaux indépendants)
et reçoit les déclarations ;

- attribue les numéros et les fréquences, gère le
plan de numérotation ;

- délivre l'agrément des terminaux ;

- approuve les tarifs d'interconnexion

fixe les règles :

- mène les négociations internationales ;

- propose les lois et décrets ;

- délivre les licences pour les réseaux et services
téléphoniques au public

contrôle l'application des règles :

- contrôle le respect des licences

- arbitre les conflits d'interconnexion

- prononce des sanctions administratives et financières (cf. tableau, ci-après) ;

- propose des médiations dans les conflits

contrôle le service public et le service universel

- contrôle les tarifs ;

- contrôle le financement du service universel

soutient le ministre pour l'exercice de ses attributions :

- est associée aux négociations internationales ;

- est associée à l'élaboration des lois et décrets.

- donne un avis sur les tarifs ;

- propose et surveille les contributions au financement du service universel

En outre, l'Autorité de régulation (ART) est dotée de pouvoirs de sanction importants.

Le Président de l'ART dispose du pouvoir de saisine du Conseil de la Concurrence des abus de position dominante ou des pratiques entravant le libre exercice de la concurrence dont il pourrait avoir connaissance dans le secteur des télécommunications.

L'Autorité a, en outre, des pouvoirs de sanction qui lui sont propres :

1) En cas d'infraction d'un exploitant de réseau ou d'un fournisseur de services à une disposition législative ou réglementaire, l'autorité le met en demeure de s'y conformer dans un délai déterminé. Elle peut rendre publique cette mise en demeure.

2) Lorsqu'un exploitant de réseau ou un fournisseur de services ne se conforme pas dans les délais fixés à une décision de l'autorité ou à une mise en demeure, l'autorité peut prononcer à son encontre une des sanctions suivantes :

- soit, en fonction de la gravité du manquement, la suspension totale ou partielle, la réduction de la durée ou le retrait de l'autorisation ;

- soit, si le manquement n'est pas constitutif d'une infraction pénale, une sanction pécuniaire, ne pouvant excéder 1 % du chiffre d'affaires, porté à 3 % en cas de nouvelle violation de la même obligation, ou un million de francs, porté à deux millions en cas de nouvelle violation de la même obligation.

La loi de réglementation a également posé le principe de la mise en place d'un nouvel établissement public : l'agence des fréquences.


• L'agence des fréquences

L'article 14 de la loi de réglementation des télécommunications a changé le mode de gestion en France du spectre des fréquences radio-électriques, en mettant en place l'agence nationale des fréquences.

L'AGENCE NATIONALE DES FRÉQUENCES

Son statut :

- établissement public de l'État à caractère administratif.

- président du conseil d'administration nommé par décret.

Ses missions :

- planification, gestion et contrôle de l'utilisation des fréquences ;

- préparation et coordination de la position française dans les négociations internationales sur les fréquences ;

- coordination nationale des implantations de stations radioélectriques.

c) Le service public des télécommunications, une option politique majeure

Comme il a été largement souligné lors des débats qui se sont tenus devant votre Haute Assemblée, la concurrence qui se généralisera au 1 er janvier 1998 ne signifie pas la fin du service public dans les télécommunications, tout au contraire. Les nouvelles règles du jeu ont permis de définir le service public des télécommunications et d'en assurer un financement qui soit réparti entre tous les opérateurs, même si France Télécom reste, aux termes mêmes de la loi, l'opérateur public chargé du service universel.

DÉFINITION DU SERVICE PUBLIC DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Le service public dans les télécommunications comprend trois éléments :

le service universel, c'est-à-dire le service de base du téléphone, de qualité et fourni à un tarif abordable, auquel se rajoutent plusieurs fonctionnalités complémentaires (cabines publiques, appels d'urgence gratuits, annuaire et service de renseignement) ; ce service universel, qui est au coeur de notre service public, pourra voir sa définition enrichie en fonction des besoins de la société et de la technologie. Une clause de « rendez-vous » tous les quatre ans au moins avec le Parlement est prévue à cet effet :

les services obligatoires, tels que l'accès au RNIS, les transmissions de données, le télex ou les services avancés sur le réseau téléphonique, qui seront fournis sur l'ensemble du territoire ;

les missions d'intérêt général, dans le domaine de la défense et de la sécurité, de la recherche publique et de la formation, qui sont accomplies sous la responsabilité de l'État et pour son compte.

Les principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité s'appliquent au service public des télécommunications.

La loi instaure, en outre, un mécanisme de financement 7 ( * ) par tous les opérateurs des charges qui résultent du service public, afin que les coûts qu'occasionne, par exemple, le raccordement des abonnés isolés en zone rurale par l'opérateur chargé du service universel -qui a seul l'obligation de raccorder toutes les personnes qui en font la demande- soient répartis entre tous les opérateurs.

Le tableau ci-après résume le mécanisme de financement mis en place :

LE FINANCEMENT DU SERVICE UNIVERSEL PAR L'ENSEMBLE DES
OPÉRATEURS

La participation de tous les opérateurs aux coûts nets du service universel se fera par deux moyens :

une rémunération versée en sus de la rémunération d'interconnexion (calculée au prorata de la part de l'opérateur dans le trafic téléphonique) qui compense :

- la péréquation géographique ;

- la péréquation liée au déséquilibre historique de la structure des tarifs de France Télécom (amené à se résorber).

le fonds de service universel (les versements y sont proportionnels au volume de trafic de l'opérateur), qui compense :

- la péréquation sociale ;

- le coût des cabines publiques, de l'annuaire universel, du service universel de renseignements ;

- la péréquation géographique (qui ne sera financée par le fond que quand la rémunération additionnelle sera supprimée).

À terme, le fonds de service universel sera le seul moyen de financement des coûts du service universel.

d) L`aménagement du territoire, une priorité réaffirmée


• Le contrat de plan de France Télécom et la politique tarifaire

La signature du contrat de plan entre France Télécom et l'État le 13 avril 1995 fixait des objectifs quant au rôle joué par France Télécom en matière d'aménagement du territoire.

La politique tarifaire de France Télécom contribue au développement du territoire. La baisse du prix des services des télécommunications et notamment la baisse du tarif des communications longue distance est déterminante en ce domaine et modifie la problématique du coût des télécommunications au regard de l'aménagement du territoire.

De plus, l'égalité d'accès des citoyens au téléphone se traduit par une péréquation tarifaire qui est d'abord géographique. Cette péréquation géographique, et « l'égal accès » au téléphone, quelle que soit la localisation, est réaffirmée par la loi de réglementation des télécommunications.


• Un enrichissement du contenu du futur schéma sectoriel des télécommunications

La loi du 4 février 1995 relative au développement et à l'aménagement du territoire (article 20) dispose qu'un schéma sectoriel des télécommunications -actuellement en cours d'élaboration- doit être défini par décret. Ce schéma sectoriel a pour objet de préciser les objectifs de développement et de modernisation des infrastructures et services de base de ce secteur, mais aussi d'indiquer comment pourraient se développer de nouvelles formes d'accès à distance aux services publics et de nouveaux services avancés de communication ou d'information.

Sur proposition de notre Haute Assemblée, la loi de réglementation des télécommunications du 26 juillet 1996 a introduit un alinéa supplémentaire à l'article 20 de la loi du 4 février 1995 relatif au schéma sectoriel des télécommunications.

Cet alinéa dispose que le schéma des télécommunications prévoira un accès préférentiel pour les établissements scolaires et universitaires aux services les plus avancés de télécommunications. Les établissements des zones les plus fragilisées pourront bénéficier de tarifs de raccordements préférentiels.


• Une exigence accrue de couverture du territoire national par la radiotéléphonie mobile

Les cahiers des charges des opérateurs de radiotéléphone leur font obligation de couvrir un pourcentage donné de la population selon un strict calendrier. Ceci correspond à une double exigence : faire en sorte que les opérateurs ne concentrent pas exclusivement leurs efforts sur les parties les plus rentables du territoire et permettre à la plus grande partie de la population d'accéder à ces services.

À titre d'exemple, les réseaux GSM autorisés en 1991 devaient couvrir 70 % de la population en 1995, soit trois ans après l'ouverture commerciale des réseaux de France Télécom et de SFR et 85 % fin 1997. Par ailleurs, l'autorisation d'exploiter le réseau DCS 1800 impose à Bouygues Télécom de couvrir 15 % de la population en juin 1996, soit six mois après l'ouverture commerciale, 54,2 % fin 1998 et 86,6 % fin 2005.

Conscient de l'enjeu considérable que représente le téléphone mobile pour l'espace rural, le Parlement, lors de la discussion de la loi de réglementation des télécommunications, a souhaité aller plus loin.

Pour promouvoir une meilleure couverture du territoire, les opérateurs de téléphonie mobile seront exemptés d'une partie du financement du service universel (celle qui correspond au déséquilibre de la structure tarifaire de France Télécom), à condition qu'ils s'engagent avant le 1er octobre 1997 à couvrir avant le 1 er janvier 2001 « des routes nationales, des autres axes routiers principaux et des zones faiblement peuplées du territoire » (voir article L.35-3 nouveau du code des postes et télécommunications, article 8 de la loi du 26 juillet 1996). Le dispositif est résumé ci-après :

L'EXEMPTION CONDITIONNELLE DES OPÉRATEURS MOBILES DANS LA LOI DE RÉGLEMENTATION DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

1 er octobre 1997 : les opérateurs s'engagent à une couverture des zones faiblement peuplées avant le 1 er janvier 2001 ;

en contrepartie, ils sont exemptés d'une partie du financement du service universel ;

ceux qui ne s'engagent pas avant le 1 er octobre 1997 sont exclus, par le ministre chargé des télécommunications sur proposition de l'Autorité de régulation, du bénéfice de l'exemption.

Ce mécanisme incitatif devrait permettre une plus large couverture de la population et non seulement du territoire national, au bénéfice des zones les moins denses.

Ce cadre législatif profondément rénové permet que se fasse sans mal la mutation engagée du secteur des télécommunications.

* 3 Voir les rapports n° 212 (Sénat 1995-1996) de M. Jean-Marie Rausch pour la loi du 10 avril 1996. n° 369 de M. Gérard Larcher pour la loi de réglementation des télécommunications et n° 406 de M. Gérard Larcher pour la loi relative à l'entreprise nationale France Télécom

* 4 Journal officiel du 27 juillet 1996, voir rapport n° 389 (1995-1996) fait au nom de la commission des Affaires économiques du Sénat par M Gérard Larcher.

* 5 Voir notamment le rapport n° 389 de M. Gérard Larcher (Sénat, 1995/1996).

* 6 Voir notamment le rapport d'information n° 260 (Sénat, 1995/1996) de M. Gérard Larcher : « L'avenir de France Télécom : un défi national »

* 7 Pour une analyse plus détaillée, voir le rapport n° 389 de M. Gérard Larcher (Sénat 1995/1996).

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