CHAPITRE II -
DES MOYENS RENFORCÉS POUR LUTTER CONTRE
L'EXCLUSION
I. MISE EN OEUVRE DE LA LOI DU 29 JUILLET 1998 D'ORIENTATION RELATIVE À LA LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS
La
loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte
contre les exclusions comporte un volet logement important, confortant et
améliorant les dispositifs existants, notamment ceux mis en place par la
loi du 31 mai 1990, visant à mettre en oeuvre un droit au logement.
On peut rappeler que le coût de ces mesures avait été
estimé à 4 milliards de francs sur la période 1998-2000.
La quasi-totalité des textes d'application permettant la mise en oeuvre
du volet logement ont été publiés. Il en est ainsi du
décret concernant les plans départementaux d'action pour le
logement des personnes défavorisées et les fonds de
solidarité pour le logement.
Le décret n° 99-987 du 22 octobre 1999 relatif
aux plans départementaux d'action pour le logement des personnes
défavorisées et aux fonds de solidarité pour le logement
renforce le rôle et l'efficacité du plan départemental.
Ainsi, le plan, dont le contenu est précisé, devient le seul
outil de la politique locale pour le logement des personnes
défavorisées, notamment en ce qui concerne les aides du fonds de
solidarité pour le logement, dont la définition ne pourra plus
résulter de documents au statut incertain et manquant, de ce fait, de
légitimité. Le comité de pilotage du plan est
structuré et se voit confier les missions de suivi de la mise en oeuvre
du plan, d'établissement des bilans annuels et d'évaluation du
plan.
Par ailleurs, s'agissant des aides des fonds de solidarité pour le
logement, le décret détermine un corps de règles communes
en vue d'une plus grande égalité au regard des conditions
d'application du droit au logement, tout en laissant d'importantes
possibilités d'adaptation à la diversité des situations
rencontrées localement.
Le décret organise la procédure de fonctionnement des FSL dans
des conditions respectueuses de la citoyenneté des personnes en
difficulté ; il décrit l'administration et l'organisation
des FSL selon qu'ils sont ou non constitués en groupement
d'intérêt public.
Enfin, le décret d'application relatif à la limitation des frais
de fonctionnement des FSL est prévu pour la fin 1999, après
concertation avec la CNAF et des arrêtés fixant les règles
comptables des FSL paraîtront ensuite.
Par ailleurs, et toujours pour améliorer les conditions de logement des
personnes défavorisées, des préconisations portant sur le
plan tant législatif et réglementaire que financier sont
suggérées dans le rapport Bouché déjà
cité en ce qui concerne les édifices menaçant ruine, ainsi
que les immeubles et les îlots insalubres.
Ces mesures, inspirées par un souci de prévention et de suivi des
opérations les plus complexes, cherchent à dépasser le
strict cadre répressif des dispositifs existants.
Elles tendent à mieux repérer et organiser le traitement des cas
enregistrés, à améliorer le fonctionnement des
procédures, renforcer leur sécurité juridique à
travers la notification des arrêtés de péril aux caisses
d'allocations familiales et aux fonds de solidarité pour le logement et
par l'inscription de ces arrêtés au fichier des
hypothèques. Elles cherchent à lutter contre les marchands de
sommeil en modifiant les règles d'attribution des allocations d'aide au
logement.
Une autre série de mesures entend faciliter les travaux de sortie
d'insalubrité -facilitation d'un recouvrement par les
collectivités locales à l'issue de l'engagement de travaux
d'office, utilisation du bail à réhabilitation- et rendre
effectif le droit des occupants au relogement.
Ces orientations feront l'objet, pour l'essentiel, dans leurs aspects
législatifs, des mesures de lutte contre l'insalubrité
intégrées au projet de loi urbanisme, habitat et
déplacements, en cours d'élaboration.
En ce qui concerne les FSL, il est apparu important de veiller à ce que
leur intervention ne facilite pas le maintien ou l'accès d'un
ménage dans des logements insalubres. L'article 21 du décret
du 22 octobre 1999 prévoit donc que, lorsqu'un logement ne
remplit pas les conditions de salubrité prévues par la
réglementation en vigueur, l'aide à l'accès au logement
soit refusée et que le maintien dans le logement puisse être
subordonné à l'engagement du bailleur de procéder aux
travaux nécessaires. Il prévoit aussi que les
arrêtés d'insalubrité et de péril soient
notifiés aux fonds de solidarité pour le logement.
II. DES MOYENS BUDGÉTAIRES ACCRUS POUR LES DÉPENSES DE SOLIDARITÉ
Le
chapitre 46-50 sert au financement de trois mesures de solidarité pour
le logement des personnes défavorisées, à savoir la
participation de l'Etat aux FSL et aux fonds d'aide aux accédants en
difficulté, et les subventions aux associations logeant des personnes
défavorisées.
Dans le projet de loi de finances pour 1999, les dotations budgétaires
s'élevaient à 685 millions de francs, en augmentation de
50 % et répartis ainsi :
- 550 millions de francs pour les FSL ;
- 130 millions de francs pour l'aide aux associations logeant des
personnes défavorisées ;
- 5 millions de francs pour le fonds d'aide aux accédants en
difficulté.
Les crédits progressent, dans la loi de finances pour 2000, de
5,11 % et sont fixés à 720 millions de francs dont
548 millions de francs aux FSL et 170 millions de francs pour les
associations.
A ces dotations, s'ajoute celle relative à la lutte contre le
saturnisme, inscrite au chapitre 37-40 pour un montant de 75 millions
de francs.
Mais il convient de noter, que la consommation de ces crédits,
s'agissant des FSL, est très insuffisante ; ainsi 183 millions
de francs avaient été reportés de l'exercice 1998 sur
celui de 1999 et, au 31 août 1999, la consommation des
crédits n'était que de 281,58 millions de francs, soit
32,4 %.
Votre rapporteur pour avis ne peut que déplorer cette montée en
charge particulièrement lente du dispositif de la loi d'orientation
relative à la lutte contre les exclusions, pour ce qui concerne les
FSL.
A. UN EFFORT FINANCIER IMPORTANT POUR LES FONDS DE SOLIDARITÉ POUR LE LOGEMENT
En
application de la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit
au logement, les plans départementaux d'action pour le logement des
personnes défavorisées ont institué dans chaque
département un fonds de solidarité pour le logement (FSL).
Ces fonds doivent aider les ménages défavorisés à
se maintenir dans les logements locatifs ou à y accéder. Ils
financent également la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement
social lié au logement, qui concernent tous les ménages
défavorisés le nécessitant, qu'ils soient locataires,
accédants ou propriétaires occupants.
Depuis la loi du 14 décembre 1996 relative à la mise en
oeuvre du pacte de relance pour la ville, les FSL peuvent soutenir les
personnes co-propriétaires occupants, habitant dans une zone urbaine
sensible (ZUS) ou dans le périmètre d'une opération
programmée de l'habitat (OPAH) et qui sont dans l'impossibilité
d'acquitter leurs charges de copropriété ou le remboursement des
emprunts contractés pour l'acquisition de leur logement.
Les ressources des FSL sont constituées de dotations et de ressources
internes (reports, retours de prêts...). Chaque FSL
bénéficie d'une participation obligatoire de l'Etat et du Conseil
général, ce dernier devant verser au moins autant que l'Etat.
Ensuite les principaux contributeurs sont les CAF, les communes, les organismes
d'HLM et depuis 1998 les ASSEDIC, en raison de la réforme des fonds
sociaux de l'UNEDIC adoptée le 2 juillet 1997.
Ainsi, les fonds sociaux ne sont plus utilisés sous forme de versements
directs aux ménages chômeurs, mais viennent abonder des
dispositifs spécifiques, notamment les FSL pour les aides au logement.
Au titre du dernier trimestre 1997, les ASSEDIC ont versé
14,3 millions de francs aux FSL.
(en millions de francs)
|
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 (prévisions) |
Total des dotations |
460,1 |
567,5 |
796,6 |
664,7 |
736,2 |
972 |
Total des ressources internes |
699,5 |
830,5 |
844,9 |
1 014,0 |
928,8 |
836 |
Total des ressources |
1 159,6 |
1 398,0 |
1 641,5 |
1 678,7 |
1 665,0 |
1 808 |
Les aides financières accordées par les FSL peuvent prendre la forme de prêts, de subventions ou de garanties adaptée à chaque situation, qui sont présentées dans le tableau ci-dessous :
Années |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 (prévisions) |
Aides au maintien |
296,5 |
337,7 |
336,8 |
339,9 |
338,6 |
395 |
Aides à l'accès |
196,0 |
247,0 |
321,2 |
382,3 |
401,5 |
461 |
Paiement de garanties |
9,6 |
17,4 |
22,4 |
30,4 |
36,8 |
46 |
Copropriétaires occupants |
- |
- |
- |
- |
- |
3 |
ASLL (1) |
124,2 |
148,0 |
171,0 |
202,4 |
209,5 |
242 |
Gestion locative |
|
|
8,4 |
10,6 |
13,2 |
12 |
Subventions aux associations |
7,0 |
15,9 |
20,1 |
30,2 |
37,2 |
38 |
Fonctionnement |
55,0 |
72,2 |
80,2 |
98,7 |
108,1 |
121 |
Divers |
20,5 |
- |
- |
4,9 |
3,8 |
4 |
Dépenses totales
|
709,2
|
846,1
|
965,6
|
1
099,7
|
1148,8
|
1
322
|
NB :
Les chiffres figurant dans ce tableau sont les décaissements de
trésorerie.
(1) accompagnement social lié au logement
(2)
total des dépenses des FSL non compris les frais de fonctionnement et
les dépenses diverses
Source
: Secrétariat d'Etat au
logement
En 1997, les dépenses des FSL ont augmenté de 4,1 % pour
atteindre 1,148 milliards de francs, soit une relative stabilisation par
rapport aux années précédentes ; pour 1998, on
prévoit une croissance plus forte des dépenses de l'ordre de
15 %, et on estime qu'en 1999, la hausse sera de 16,3 %. Le montant
estimé des reports fin 1998 était évalué à
486 millions de francs, ce qui doit permettre d'éviter toute
rupture d'activité des FSL.
En ce qui concerne le montant des aides et des mesures d'accompagnement social
lié au logement, leur niveau moyen s'élève, en 1997,
à 6.530 francs pour une aide au maintien dans le logement,
3.255 francs pour une aide à l'accès au logement, et
4.293 francs pour une mesure d'accompagnement social lié au
logement (ASLL). A partir de données recueillies auprès d'une
soixantaine de FSL, on peut estimer, au niveau national, qu'en 1997,
215.836 ménages ont été aidés et/ou ont
bénéficié d'une mesure d'ASLL.
B. LA PROGRESSION DES CRÉDITS SERVANT AU FINANCEMENT DE L'ALLOCATION DE LOGEMENT TEMPORAIRE
L'aide aux associations logeant à titre
temporaire des
personnes défavorisées, communément appelée aide au
logement temporaire (ALT) a été instituée par la loi
n° 91-1406 du 31 décembre 1991 portant diverses dispositions
d'ordre social. C'est une aide forfaitaire versée exclusivement aux
associations ayant conclu une convention avec l'Etat.
L'aide au logement (ALT) a deux finalités :
- c'est une aide qui a été créée pour se
substituer exceptionnellement aux aides à la personne, qu'il s'agisse de
l'APL ou des AL, quand le versement de ces aides n'est pas possible, notamment
du fait d'une durée de séjour trop brève pour permettre
l'ouverture d'une aide à la personne ;
- l'ALT doit également permettre aux associations qui accueillent
des personnes défavorisées de se doter d'un parc plus important.
Comme les aides à la personne, l'ALT n'est pas contingentée.
Elle est financée par le Fonds national d'aide au logement (FNAL) qui
bénéficie à cet effet d'une contribution de l'Etat et
d'une contribution des régimes de prestations familiales, à
parité, et versée par les CAF qui prélèvent 2 % au
titre des frais de gestion.
Une circulaire parue le 22 janvier 1998 rappelle les modalités de
renouvellement des conventions ALT et de calcul du montant de l'aide, de
façon à mieux contrôler, à l'occasion du
renouvellement, l'utilisation antérieure de l'ALT et à
éviter que les versements d'ALT aux associations ne soient
supérieurs aux frais réels engagés par ces
dernières pour la mobilisation des locaux.
Après la très forte montée en charge du dispositif
de 1993 à 1996, la progression des dépenses s'est ralentie.
En 1998, le montant des engagements s'est élevé à
283,3 millions de francs et le montant des crédits consommés
hors frais de gestion à 267,1 millions de francs, soit un taux de
consommation des crédits de 94,2 %.
L'article 53 de la loi d'orientation relative à la lutte contre
les exclusions ayant rendu éligibles à l'ALT les centres
communaux ou intercommunaux d'action sociale, cette mesure a
représenté, dès 1998, une augmentation de 7,6 % des
dépenses d'ALT. Le coût (en consommation, y compris les frais de
gestion) est estimé à 19,5 millions de francs en 1998 et
à 38 millions de francs en 1999, financé pour moitié sur
le budget de l'Etat.
Dans le projet de loi de finances pour 2000 la dotation pour le financement
de l'ALT progresse fortement pour être fixée à
170 millions de francs, soit + 30,7 % par rapport à
1999.
C. LES MESURES NOUVELLES DE LUTTE CONTRE LE SATURNISME
L'article 123 de la loi du 29 juillet 1998,
inscrit
dans le code de la santé publique, vise à imposer aux
propriétaires la réalisation de travaux palliatifs dès
lors qu'un cas de saturnisme infantile est signalé ou qu'un risque
d'accessibilité au plomb d'un immeuble est porté à la
connaissance des préfets.
En outre, la loi crée l'obligation d'annexer un état des risques
d'accessibilité au plomb à tout contrôle ou promesse de
vente d'un immeuble construit avant 1948 et situé dans une zone à
risque d'exposition au plomb.
Les décrets n° 99-483 et 99-484 du 9 juin 1999
définissent les modalités de transmission des données
médicales et les conditions d'application des mesures d'urgence. Ils
sont assortis de deux arrêtés relatifs à la
méthodologie du diagnostic et du contrôle ainsi qu'au seuil de
positivité, et complétés par une circulaire d'application
signée le 30 août 1999.
Dans le nouveau dispositif
applicable, les préfets sont en mesure de demander aux
propriétaires de réaliser les travaux palliatifs
nécessaires et en cas de carence des propriétaires,
l'autorité publique devra se substituer à eux.
Dès 1999, les financements nécessaires ont été mis
en place sur le chapitre 34-30 du budget du logement, car il a
été considéré que l'établissement des
diagnostics ainsi que le contrôle des travaux imposés aux
propriétaires constituaient des dépenses de fonctionnement. On
peut néanmoins se demander si le financement des travaux, en cas de
défaillance des propriétaires, pourra être financé
sur un chapitre de fonctionnement.
Pour couvrir les dépenses envisagées au titre de 1999, l'article
50 du chapitre 34-30 a été doté de 15 millions
de francs par le décret n° 99-722 du
3 août 1999, pour dépenses accidentelles, et
abondé, en cours d'exercice, de 15 millions supplémentaires
par le décret n° 99-753 du 2 septembre 1999 portant
ouverture de crédits à titre d'avance.
Dans le projet de loi de finances pour 2000, les crédits
finançant le plan de lutte contre le saturnisme sont inscrits au
chapitre 37-40 et ils s'élèvent à 75 millions de
francs. Il s'agit de sommes supérieures aux estimations faites lors de
la discussion du projet de loi d'orientation relative à la lutte contre
les exclusions, qui portaient sur 50 millions de francs.
Votre
rapporteur pour avis se félicite de cet effort des pouvoirs publics qui
doit permettre de financer treize mille diagnostics, mais il se demande si ces
sommes seront suffisantes pour financer les travaux engagés, par l'Etat
dans le cas des propriétaires défaillants.