IV. LE JAPON
A. UNE MOBILISATION D'ORES ET DÉJÀ EXCEPTIONNELLE
1. Un engagement sans pareil
Aussi
bien en pourcentage dans le PIB de la DIRD (3,01) qu'en nombre de
chercheurs pour mille habitants (9,7), le Japon se situe au premier rang
mondial et a, notablement, augmenté ses efforts ces dix ou vingt
dernières années.
C'est également le pays, devant l'Allemagne ou le pourcentage des
dépenses de recherche financées par les entreprises est le plus
important (72,2 %).
2. Des insuffisances sur le plan académique
Les
résultats japonais sont excellent en terme de parts de brevets (avec un
second rang mondial, derrière les Etats-Unis), mais nettement moins en
ce qui concerne les publications scientifiques (quantitativement et, surtout,
qualitativement avec une avant dernière place, juste devant la
Grèce, pour le nombre de citations dans les revues scientifiques de 1997
à 1999, selon le classement publié par le rapport Busquin).
S'inquiétant de sa faiblesse dans ce domaine, le Japon met l'accent sur
la recherche fondamentale dans le cadre d'un effort budgétaire global
soutenu, malgré la récession, et d'une vaste
réorganisation d'ensemble.
B. DE VASTES CHANGEMENTS EN PERSPECTIVE
1. Au niveau financier
Le
désengagement, avec la récession, du monde industriel dans le
financement de la recherche est compensé par une augmentation du budget
public (et notamment de l'effort de l'Etat dont la part devrait passer de 20
à 40 %).
Le gouvernement a augmenté sa contribution de 38 % en 1998, sa part de
financement de la recherche et développement atteignant alors 20 %, soit
son plus haut niveau historique.
Elle devrait s'accroître encore de 5,4 % en 1999.
Les dépenses sont réparties de la manière suivante :
- Recherche fondamentale 13,8 %
- Recherche appliquée 24,5 %
- Développement 61,7 %
La R & D industrielle représente toujours la grande majorité
du total (près de 80 % en 1997).
2. Au niveau structurel
a) Une organisation déjà rationnelle...
L'organisation de la recherche japonaise parait
déjà
assez rationnelle, chaque intervenant, au niveau gouvernemental, disposant de
sa propre agence :
- La STA (Science and technology agency) au niveau du premier ministre, qui
exerce une mission de coordination et à laquelle sont rattachés
six instituts nationaux de recherche
35(
*
)
- La JSPS (Japon society for the promotion of science), auprès du
Monbusho (ministre de l'éducation, de la science et de la culture), dont
les actions n'interfèrent pas avec celles de la STA ;
- l'AIST (Agency for Industriel Science and Technology pour le MITI (Ministre
de l'industrie et du commerce extérieur) chargé de la R&D
industrielle, qui finance la NEDO (New Energy and Industrial Technology
Development Organization), laquelle gère des projets faisant intervenir
à la fois des partenaires publics et industriels.
b) ... mais perfectionnée encore
En 1996
ont été fusionnés au sein de la JST (Japan Science and
technology Corporation), chargée de l'exécution de la politique
scientifique de la STA, deux organismes d'information et d'aide à la
recherche.
Il est question en outre :
- de regrouper le Monbusho et la STA dans un ministère de
l'éducation, de la science et de la technologie ;
- d'inciter l'AIST a encourager des programmes de recherche plus
fondamentaux ;
- d'élargir à l'ensemble des sciences les compétences du
CST actuel (Conseil de la science et de la technologie) au sein d'un nouveau
Conseil général de la Science et de la Technologie qui jouerait
un rôle important dans l'évaluation des grands projets et la
préparation des choix budgétaires gouvernementaux.
L'autonomie des universités et des instituts nationaux de recherche
serait renforcée, certaines nouvelles embauches pouvant, comme il a
été vu, s'effectuer sous forme de contrats à durée
déterminée.
Le Japon cherche ainsi à tirer parti de la recherche pour sortir de la
crise.
Les maîtres mots de la réforme sont : coordination,
évaluation, contractualisation et internationalisation.
Trois principaux objectifs sont visés : élévation du
niveau de la recherche, autonomie des laboratoires, rationalisation du
transfert de connaissances entre la recherche et l'industrie.
Cette stratégie semble très cohérente et bien
inspirée à votre rapporteur.
* * *
De
l'analyse, qui précède, de la situation des principaux pays de
l'OCDE, il ressort que ces derniers ont souvent su concilier une accentuation
de leur effort budgétaire (moins important, il est vrai, au
départ en proportion du total de leurs dépenses
budgétaires) et des réformes d'envergure.
La part des entreprises dans le financement de la recherche est
généralement plus importante mais comporte aussi davantage de
subventions, notamment, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, au titre des
activités militaires.
La recherche fondamentale fait fréquemment l'objet d'une sollicitude
particulière de la part des pouvoirs publics (cas notamment du Japon,
et, du fait du repli des dépenses militaires, des Etats-Unis) notamment
dans les sciences de la vie.
Les difficultés économiques ne freinent pas la progression de
l'engagement dans la recherche de l'Etat et des plus grandes entreprises.
Les réformes de structures vont souvent assez loin (paiement au
mérite des professeurs en Allemagne, recrutement de contractuels au
Japon, changement des règles de la propriété
intellectuelle en Grande-bretagne...).
L'importance de l'évaluation et de la prospective (en Grande-Bretagne)
est reconnue.
Sans vouloir transposer aucun de ces modèle en France, il est possible
de s'en inspirer par exemple en ce qui concerne la valorisation de la recherche
aux Etats-Unis ou la rationalisation des structures gouvernementale au Japon.