B. ENCADRER PRÉCISÉMENT LE DISPOSITIF ET L'ADAPTER À SON OBJET
Au-delà de la question de principe, plusieurs points techniques ont été soulevés par les personnalités auditionnées par votre rapporteur. On peut les regrouper en cinq thèmes qui concernent les commerces éligibles, les zones concernées, le revenu à prendre en considération, la procédure et le financement.
1. Les commerces éligibles
La proposition de loi initiale évoquait dans son titre les « services de proximité » et à son article 1 er les « commerces de proximité ». Outre que ces deux notions n'étaient pas identiques, elles paraissaient extrêmement larges. Ces formules étaient en tout état de cause plus vastes que la nature des commerces auxquels songeaient les auteurs de la proposition de loi, qui visaient essentiellement les établissements dont l'activité constitue un point d'animation de la vie locale : il en est ainsi des commerces de bouche tels que les épiceries, boulangeries, boucheries, superettes, etc., ainsi que des bars, restaurants, tabacs, multi-services, voire dans certains cas des garage ou des stations-service ...
Comme il n'était pas envisageable de fixer dans la loi la liste de ces activités, votre rapporteur a proposé à votre commission de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de le faire par référence à la nomenclature d'activités françaises (NAF). Il s'agissait ainsi de déterminer, parmi les 220 catégories actuelles d'activités (ce nombre étant toutefois susceptible de changer avec la mise en oeuvre, à compter du 1 er janvier 2003, de la NAF, révision 1), celles pouvant être éligibles au dispositif, sachant que le nouveau texte de loi proposé par votre rapporteur précisait que les exploitants devraient être des commerçants ou des artisans inscrits au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. Le renvoi à un décret devait en outre permettre d'adapter cette liste de manière plus facile si les circonstances l'exigeaient.
De plus, et afin d'être certain que le bénéfice de la mesure n'aurait été ouvert qu'au petit commerce, votre rapporteur a également proposé à votre commission de préciser que le chiffre d'affaires des entreprises concernées ne pourrait excéder le seuil retenu par l'article 50-0 du code général des impôts pour ouvrir droit au régime fiscal du « micro-BIC », à savoir 76.300 € HT s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, ou 27.000 € HT s'il s'agit d'autres entreprises.
Enfin, les commerces exploités par un allocataire du revenu minimum de maintien d'activité auraient dû répondre à des conditions de durée minimale d'ouverture au public fixées par décret. Cette contrainte a été proposée par votre rapporteur pour faire le lit des objections tenant à un éventuel effet d'aubaine du dispositif pour des personnes peu scrupuleuses, qui s'inscriraient comme commerçant ou artisan mais fermeraient constamment le magasin pour vaquer à d'autres occupations tout en étant assurées de disposer d'un revenu égal au RMI.
Pour votre rapporteur, c'est faire injure aux commerçants et aux artisans que d'évoquer de telles hypothèses. Ces métiers sont suffisamment difficiles et contraignants pour faire crédit à ceux qui s'y engagent, qui s'y investissent avec ardeur et ténacité, d'une volonté d'exercer leur activité professionnelle dans le but de satisfaire leur clientèle. Au demeurant, l'exemple du RMI démontre que de telles suspicions sont nulles et non avenues : parmi les 1,84 million d'allocataires du RMI, on ne compte qu'environ 15.000 entrepreneurs et travailleurs indépendants (ETI), soit moins de 1,6 %. Si un tel état d'esprit prévalait dans ces professions, nul doute que ce nombre serait substantiellement plus important.
Cependant, afin de couper court à toute insinuation, et pour garantir que l'activité commerciale aurait permis d'assurer effectivement l'animation de la vie locale, votre rapporteur a proposé à votre commission des affaires économiques de retenir le principe d'instituer des conditions de durée minimale d'ouverture du commerce au public. Selon le dispositif suggéré, il aurait appartenu au pouvoir réglementaire de les fixer précisément, de manière à la fois annuelle, hebdomadaire et quotidienne, pour que l'accessibilité à la clientèle soit assurée de manière satisfaisante.
Ainsi, cette triple limite à la fois juridique, économique et technique devait éviter tout risque de dérapage ou de détournement de la finalité du dispositif.
Par ailleurs, votre rapporteur a également suggéré de donner un titre nouveau au texte, plus conforme à sa vocation première : « proposition de loi tendant à préserver les commerces de proximité en zone rurale ».
2. Les zones concernées
Le « zonage » retenu par les auteurs de la proposition de loi initiale résultait du constat que l'essentiel des difficultés les plus importantes en matière de déchirure du tissu du commerce rural de proximité était concentré dans des communes de moins de 1.000 habitants. Le dépouillement de l'Inventaire communal 1998 en témoigne d'ailleurs largement.
Il est cependant apparu à votre rapporteur que cette grille de lecture n'était pas satisfaisante dans la mesure où, à la fois :
- elle excluait du dispositif des communes rurales qui, bien que comptant plus de 1.000 habitants, pouvaient présenter toutes les caractéristiques de désertification et de disparition du commerce rural qu'il s'agit de combattre ;
- elle autorisait des effets d'aubaine pour certains commerçants qui, installés dans des zones de chalandise « normales » voire importantes, auraient pu compenser leur manque de dynamisme commercial et d'esprit entrepreneurial par une aide publique injustifiée.
Aussi lui a-t-il paru plus opportun de rechercher un zonage qui s'inscrive en cohérence avec ceux déjà retenus dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire. Il lui a rapidement semblé que les zones de revitalisation rurale, instituées par l'article 52 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, constituaient le cadre adapté aux objectifs du dispositif. Elles concernent le tiers des communes françaises (12.000 environ) et 40 % du territoire, et répondent à des critères précis parfaitement cohérents avec la problématique de la désertification : très faible peuplement et déclin de la population totale ou de la population active, notamment.
La légitimité de ce choix est au demeurant corroborée par la comparaison que l'on peut faire entre la carte des ZRR et certaines des cartes publiées dans l'Inventaire communal 1998 : évolution de la distance moyenne aux équipements, évolution du nombre d'équipements, ... Il est frappant de constater combien elles se ressemblent et comme elles paraissent se décalquer.
C'est donc ce zonage des ZRR que votre rapporteur a proposé à votre commission des affaires économiques de retenir.
3. Le revenu à prendre en considération
Le critère du revenu à prendre en considération a constitué, pour votre rapporteur, l'élément central de sa réflexion. Il a en effet rapidement constaté que les notions de « bénéfice dégagé par l'activité commerciale » ou de « revenu mensuel net du commerce » qui figuraient dans sa proposition de loi initiale n'étaient pas opérationnelles. Aussi a-t-il, sur ce point précis, sollicité les avis de praticiens et d'experts, tels que des fonctionnaires de l'administration fiscale, le président de la Fédération des centres de gestion agréés ou encore un responsable administratif du Conseil national de la comptabilité. Il a également examiné avec attention les remarques formulées par les représentants des chambres des métiers et des chambres de commerce et d'industrie qu'il a auditionnés.
Au terme de cette démarche, il lui a semblé que la notion susceptible d'être la plus facilement prise en considération, en particulier parce qu'elle est définie par le code général des impôts, qu'elle figure d'ores et déjà dans diverses liasses fiscales, et qu'elle pourrait être aisément introduite dans d'autres documents auxquels ont recours les professionnels, était celle de la valeur ajoutée. Cette valeur ajoutée, déterminée par le paragraphe II de l'article 1647 B sexies du CGI, pouvait être ainsi retenue quelle que soit la forme juridique adoptée par l'exploitant pour exercer son activité commerciale, et quel que soit par ailleurs le régime fiscal qu'il a choisi (réel, réel simplifié ou micro-BIC). Elle aurait été facilement calculée par les centres de gestion et contrôlable par l'administration fiscale. Quant à la prise en compte d'éventuelles charges salariales, qui ne sont actuellement pas retenues pour déterminer la valeur ajoutée, elle aurait pu être opérée par la fixation, par décret, d'un montant forfaitaire par salarié qui serait venu en déduction de la valeur ajoutée dégagée au cours de l'exercice précédent. Le choix de retenir une somme forfaitaire avait pour objet d'éviter que l'exploitant ne salarie par exemple son conjoint à un niveau tel qu'il parvienne à bénéficier du montant maximum de l'allocation de revenu minimum de maintien d'activité.
Pour votre rapporteur, c'est ainsi qu'on se serait le mieux rapproché de la notion de « reste à vivre » qui sous-tendait la proposition de loi, dans des conditions de faisabilité technique assurées. L'allocation mensuelle de revenu minimum de maintien d'activité aurait été calculée, pour une année, par la différence entre un montant fixé par décret (correspondant au « plafond » de sortie du dispositif) et le douzième du total de la valeur ajoutée dégagée l'année précédente par l'ensemble des activités commerciales et artisanales (pour prendre en compte les situations de pluri-activité) de l'exploitant, après déduction éventuelle des montants forfaitaires correspondant à des salaires.
Quand au « plafond » évoqué ci-dessus, sa détermination par la loi était exclue pour des raisons tant constitutionnelles que pratiques, mais il aurait dû être, pour votre rapporteur, de l'ordre des 1.016 € prévus par la proposition de loi initiale. En tout état de cause, on rappellera que le montant maximum de l'allocation différentielle mensuelle n'aurait pu être supérieur au montant du RMI, c'est-à-dire actuellement 411,70 €.
A cet égard, et pour conclure la discussion académique portant sur l'influence qu'aurait pu avoir sur le dynamisme d'entrepreneurs individuels l'assurance de disposer de revenus alloués par la puissance publique, votre rapporteur observe que le cadre législatif actuel autorise parfaitement un commerçant ou un artisan à s'organiser de manière à bénéficier du RMI. En l'espèce, la proposition de loi ne faisait rien d'autre que de permettre aux professionnels du commerce rural, qui souffrent de handicaps structurels indiscutables et de conditions d'exercice de leur activité très dures, de compléter de manière décente les revenus parfois extrêmement faibles qu'ils tirent de leur entreprise. On ne voit pas comment son adoption aurait pu conduire à des stratégies de « profiteur » plus fortes ou plus intéressantes qu'aujourd'hui.
Une seule objection aurait mérité d'être retenue : la différence entre les méthodes de détermination des revenus à prendre en compte au titre du RMI et du revenu minimum de maintien d'activité. Dans le premier cas, ce sont les revenus de l'ensemble du foyer qui sont retenus ; dans le second, il ne s'agissait que de ceux de l'entreprise. En contrepartie, le dispositif de la proposition de loi n'ouvrait pas droit à des montants d'allocation différents à raison de la configuration familiale du ménage similaires à ceux institués pour le RMI.
Cette différence de principe était délibérée. En effet, pour votre rapporteur, il n'est pas normal que les revenus perçus par le conjoint au titre d'une activité professionnelle, en particulier lorsqu'elle est totalement étrangère à l'activité commerciale ou artisanale de l'entrepreneur, soient, comme c'est encore trop souvent le cas aujourd'hui, la « béquille » qui permette la poursuite de cette activité. Toute la problématique des propositions faites par votre rapporteur à votre commission reposait sur une appréhension à la fois économique et sociale de la fonction du commerce de proximité en zone rurale. C'était l'activité de l'entreprise qui était prise en compte, c'était l'utilité sociale du commerçant ou de l'artisan au regard de la satisfaction des besoins de la population qui était évaluée, c'était le résultat économique de la fonction commerciale qui servait de référence au dispositif. Dès lors, il ne pouvait être question que les revenus du conjoint ou de toute autre personne vivant au foyer soient intégrés aux ressources à retenir pour déterminer les droits au bénéfice de l'allocation de revenu minimum de maintien d'activité ou pour calculer son montant.
4. La procédure
L'article 2 de la proposition de loi initiale chargeait la commission départementale d'équipement commercial (CDEC) de l'accueil et de l'examen des demandes de revenu minimum de maintien d'activité, ainsi que de la décision d'attribution. Dans l'esprit des auteurs du texte, il s'agissait, d'une certaine manière, de conduire la CDEC à « réparer » les conséquences de son activité, tant il est vrai qu'une des raisons essentielles de la perte de vitalité du commerce rural résulte de la concurrence insupportable, au sens littéral du terme, qu'il subit de la part de la grande distribution.
Il est cependant apparu à votre rapporteur que, ni au plan des principes, ni au plan technique, il ne pouvait revenir à la CDEC d'intervenir dans le dispositif d'attribution du revenu minimum de maintien d'activité. S'agissant de la décision d'ouvrir le droit à l'allocation, elle n'aurait pu relever que du préfet, dès lors qu'il s'agissait d'une prestation financée par l'Etat. Dans ces conditions, la procédure d'instruction devait être assurée par les services de l'Etat, qui auraient en toute logique été ceux de la délégation régionale au commerce et à l'artisanat (DRCA). On rappellera que cette administration instruit déjà les dossiers montés au niveau départemental et régional dans le cadre de la procédure FISAC, et que l'objet même de son activité en fait un partenaire naturel des commerçants et de leurs représentants, en particulier consulaires.
Outre ces suggestions, votre rapporteur a également proposé à votre commission de faire examiner les demandes, avant la décision préfectorale, par une commission départementale composée notamment desdits représentants. Plutôt que de créer une « énième » structure, il a envisagé de confier ce rôle à la commission départementale d'adaptation du commerce rural : tant sa composition (maires et membres du conseil général, représentants consulaires, personnalités qualifiées, co-présidence du préfet et du président du conseil général) que l'objet même qui justifie son existence lui semblaient en effet particulièrement adaptés à cette mission.
Enfin, votre rapporteur a proposé à votre commission de confier à l'ORGANIC le soin d'assurer le service de l'allocation. Cette organisation a, par fonction, l'expérience de la gestion d'allocations au bénéfice des commerçants (en l'espèce, les pensions de retraite) et, par ailleurs, elle gère déjà les crédits FISAC pour le compte de l'Etat.
5. Le financement
A l'article 3 de leur proposition de loi, votre rapporteur et ses collègues du groupe Communiste républicain et citoyen avaient prévu de financer les charges nouvelles induites par la création du revenu minimum d'activité par le produit d'une taxe additionnelle à la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA). Or, pour votre rapporteur, il n'aurait finalement été besoin de créer aucune taxe supplémentaire, d'autant que le coût de la mesure aurait été limité, la budgétisation de la TACA ne présentant en outre aucun caractère dirimant.
a) Il n'aurait été besoin de créer aucune taxe supplémentaire
La TACA a été instituée par la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972, dite « loi Royer », afin de faire financer le régime d'indemnité de départ des commerçants et artisans par les enseignes de la grande distribution. Elle est ainsi assise sur la superficie des grandes surfaces de plus de 400 m² construites depuis le 1 er janvier 1960, et recouvrée par l'ORGANIC. Cette taxe ayant un rendement largement supérieur aux dépenses qu'elle devait initialement couvrir, ses excédents ont été par la suite mobilisés pour financer :
- à partir de 1991, le Comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC), mis en place pour soutenir les professionnels des stations-service indépendantes ;
- à compter de 1992, le FISAC, créé par la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989 modifiée pour contribuer au maintien d'une desserte commerciale et des services de proximité indispensables à la vie sociale et à la préservation de l'équilibre entre les différentes formes de commerce ;
- en plusieurs occasions depuis le début des années quatre-vingt-dix, et en fonction des circonstances, l'indemnisation des commerçants et artisans victimes de catastrophes naturelles ou technologiques (marées noires, tempêtes, inondations, accidents industriels tel celui de Toulouse en 2001).
Néanmoins, les excédents structurels de recettes ont continué à permettre la constitution d'importantes réserves, dans lesquelles les gouvernements successifs ont, ces dernières années, plusieurs fois prélevé pour abonder le budget général de l'Etat, faisant ainsi fi de la vocation de solidarité interprofessionnelle de la taxe.
Selon les prévisions budgétaires pour 2003, le produit de la TACA devrait s'élever à 223 M€ tandis que les dépenses prévisibles au titre des actions pérennes que finance la taxe atteindraient 71 M€ pour ce qui concerne le FISAC, 45 M€ pour l'aide au départ des artisans et commerçants, et 10 M€ pour le CPCD, soit au total 126 M€. Le solde entre recettes et dépenses pourrait donc atteindre 97 M€.
Dans ces conditions, il a semblé à votre rapporteur que le souhait légitime des auteurs de la proposition de loi de faire supporter par les enseignes de la grande distribution, au titre de la solidarité interprofessionnelle, le financement du revenu minimum de maintien d'activité, ne nécessitait aucunement la création d'une taxe supplémentaire. Il est manifeste que la TACA, dont la vocation est précisément de financer des actions en faveur des commerçants et artisans de proximité, aurait été en mesure de couvrir les charges induites par le dispositif de la proposition de loi.
b) Le coût de la mesure aurait été limité
Un raisonnement très « grossier » peut être fait pour tenter d'évaluer ce qu'aurait coûté au total la mesure en année pleine. Compte tenu des nouveaux critères d'éligibilité proposés par votre rapporteur, celui-ci estime que le nombre des commerces susceptibles de bénéficier du revenu minimum de maintien d'activité aurait pu approcher les 8.000 (les deux-tiers des communes éligibles, ce qui aurait déjà été un succès). S'agissant du niveau moyen de l'allocation mensuelle, l'examen des statistiques concernant le RMI permet d'estimer qu'elle aurait été de l'ordre de 250 € ( ( * )*).
Dès lors, le total des charges en année pleine du dispositif aurait pu s'élever, au très grand maximum, à 24 M€. Ce montant aurait représenté tout juste 25 % des excédents prévisibles de la TACA pour 2003.
Si l'on poursuit le jeu des comparaisons, on peut également relever que ce montant aurait été similaire au coût de l'amendement récemment adopté par l'Assemblée nationale pour étendre la période d'exonération des charges accordée aux entreprises de moins de cinq salariés qui s'installent dans les ZFU (26 M€ dès 2005, ce coût devant d'ailleurs s'accroître les années suivantes). Or, si la présence du commerce de proximité dans les quartiers sensibles est indispensable et mérite un effort financier, ne l'est-elle pas également en zone rurale ? En outre, votre rapporteur observe qu'avec les ZFU, ce sont 44 zones qui génèrent un tel coût, alors qu'avec le revenu minimum de maintien d'activité, ce sont 8.000 commerces, et presque autant de communes, qui auraient pu être concernés.
On peut enfin remarquer que ces 24 M€ auraient représenté seulement 18 % des sommes dépensées au titre du RMI au bénéfice des allocataires entrepreneurs et travailleurs indépendants (ETI) : outre que la création du revenu minimum de maintien d'activité aurait peut-être permis à certains de ces ETI de basculer d'un dispositif à l'autre, la finalité même du mécanisme de la proposition de loi n'était-elle pas, pour ces personnes, plus conforme à leur vocation d'entrepreneur que celle du RMI ?
Votre rapporteur a donc proposé à votre commission des affaires économiques d'exclure la création d'une taxe supplémentaire, estimant que le produit de la TACA aurait largement pu permettre de financer le revenu minimum de maintien d'activité. On ajoutera qu'au demeurant, les prévisions à moyen terme indiquent que les sommes exposées au titre de l'allocation de départ des artisans et commerçants et du CPDC devraient diminuer significativement, tandis que le produit de la TACA continuera d'augmenter.
c) La budgétisation de la TACA n'apparaissait pas présenter pas de caractère dirimant
On pourra objecter que la budgétisation de la TACA, opérée par l'article 35 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002) pour satisfaire aux prescriptions posées par la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, interdit désormais d'affecter cette taxe à telle ou telle action en faveur du commerce et de l'artisanat.
Pour votre rapporteur, il ne s'agit-là que d'arguties budgétaires qui ne sont politiquement pas acceptables. Au cours du débat budgétaire de l'automne dernier, le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation a constamment affirmé, aux représentants professionnels comme à la représentation nationale, que la budgétisation de la TACA ne signifiait nullement la remise en cause des actions de solidarité interprofessionnelle entre la grande distribution et le petit commerce ( ( * )*).
Un tel engagement ne saurait être compris comme la simple garantie de la reconduction des actions financées jusque là par la TACA, d'autant que, comme cela a été relevé ci-dessus, certaines d'entre elles devraient progressivement sinon s'éteindre totalement, du moins fortement diminuer de manière naturelle, dans les années à venir. Au contraire, cet engagement implique forcément qu'à mesure des nécessités qui se font jour, cette solidarité soit entretenue : la création du revenu minimum de maintien d'activité s'inscrivait ainsi pleinement dans cette perspective. A défaut d'une telle conception, la TACA pourrait effectivement ne devenir, comme l'ont expressément craint les professionnels de la grande distribution en octobre dernier, qu'une imposition supplémentaire acquittée par ce secteur sans aucune légitimité d'intérêt public.
C'est cette évidence qui a conduit votre rapporteur à proposer à votre commission des affaires économiques de n'indiquer, dans la proposition de loi, aucune prescription particulière quant au mécanisme de financement du revenu minimum de maintien d'activité. Dans son esprit, un article dédié à cette dépense aurait dû être créé sous le chapitre 44-03 du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (dont l'intitulé est « interventions en faveur du commerce, de l'artisanat et des services » ), tout comme cela a naturellement été fait dans le budget pour 2003 pour le FISAC (article 50), le CPDC (article 60) et l'aide au départ des commerçants et artisans (article 70), le financement étant assuré par le budget de l'Etat désormais abondé par la TACA.
* (*) En juin 2002, la CNAF comptait, pour la France métropolitaine, 919.540 allocataires du RMI, la population couverte s'élevant à 1.814.424 personnes. On peut ainsi considérer que le montant maximum de l'allocation perçue devait être, en moyenne, celui correspondant à deux personnes par foyer, soit 648,23 €. Or, le montant moyen de l'allocation mensuelle versée par la CNAF a été de 352 euros, soit 54,3 % du maximum moyen possible. Si l'on applique ce pourcentage au montant de l'allocation simple (411,70 € à compter du 1 er janvier 2003), qui aurait constitué le maximum de l'allocation de revenu minimum de maintien d'activité, on obtient un montant mensuel moyen de 223,56 €.
* (*) « Il sera garanti que les fonds continueront d'être affectés au commerce et à l'artisanat ».
Réponse de M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat, à M. Lazaro, député.
JO Débats (AN) - Séance du 8 novembre 2002 (p. 4806).
« Cette opération n'aura aucun impact négatif pour les bénéficiaires des crédits ».
Présentation de son budget au Sénat par M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat.
JO Débats (Sénat) - Séance du 2 décembre 2002 (p. 5032).