B. UNE RÉVOLUTION ÉCOLOGIQUE ?
Les travaux du Grenelle ont conduit M. Jean-Louis Borloo à estimer que « la mutation à opérer est tellement vaste et touche simultanément un si grand nombre de sujets de société qu'elle ne peut s'opérer que par la mise en mouvement de tous les acteurs ». Les conclusions du Grenelle visent donc à une transformation en profondeur de la société française .
Les travaux du Grenelle de l'environnement s'analysent en trois axes :
- la prise de conscience de l'urgence de la problématique environnementale ;
- l'accord sur plus de deux cent cinquante engagements entre les différentes parties au Grenelle ;
- la mise en avant d'une « croissance verte » , aux impacts très importants.
1. Une prise de conscience de l'enjeu environnemental
Dans la ligne du Pacte écologique de Nicolas Hulot, le Grenelle de l'environnement repose sur la prise de conscience de l'urgence à traiter les problèmes environnementaux . Comme l'a souligné le Président de la République à l'occasion de la restitution des conclusions du Grenelle le 25 octobre 2007, ce dernier « restera comme un moment important dans la prise de conscience par notre société qu'elle ne peut plus vivre dans le gaspillage, qu'elle ne peut plus négliger les conséquences sur l'avenir de la planète de sa façon de vivre, de produire et de consommer ».
Les différentes parties ont ainsi été unanimes à reconnaître à la fois l'importance des conséquences de la dégradation de l'état de la planète et l'urgence de la situation.
D'une part, un consensus s'est construit autour du constat des conséquences néfastes de la dégradation de la planète et du changement climatique sur le potentiel de croissance des différents pays, et plus encore des pays les moins développés. A ce titre, les travaux du Grenelle de l'environnement se situent dans la lignée du rapport d'octobre 2006 de l'économiste britannique M. Nicholas Stern sur le changement climatique : il avait en effet souligné que si aucune mesure n'était prise pour enrayer le changement climatique, ce dernier pourrait avoir un impact économique comparable à celui des guerres mondiales ou de la crise économique de 1929.
D'autre part, toutes les parties ont montré leur conscience de l'urgence de la situation . Agir vite est en effet devenu impératif : quelques années de dégradation non maîtrisée auraient un effet exponentiel en matière de dommages induits.
M. Rajendra Pachauri, président du Groupe international d'experts sur le climat (GIEC), souligne ainsi qu'en matière de réchauffement climatique, il ne reste que 7 ans pour inverser la courbe d'évolution des températures , c'est-à-dire pour contenir la hausse des températures en deçà de 2 degrés, ligne à ne pas franchir pour ne pas mettre gravement en danger la planète. Dans un autre domaine, il apparaît que si rien n'est fait pour corriger la tendance actuelle, plus de 10 % des espaces naturels seront détruits au niveau mondial d'ici 2050, du fait de l'urbanisation ou de la conversion en terres agricoles 4 ( * ) . Par ailleurs, un oiseau sur huit, un amphibien sur trois est menacé d'extinction : M. Hubert Reeves parle ainsi du risque d'une sixième grande extinction d'espèces .
En outre, cette prise de conscience de l'urgence écologique est renforcée par le constat de l'épuisement des ressources : la population planétaire augmente et le niveau de vie moyen s'élève partout, tandis que les ressources longtemps considérées comme abondantes et pérennes deviennent plus rares et incertaines (énergies fossiles, eau potable, terres fertiles).
* 4 Cette prévision apparaît dans le rapport de M. Pava Sukhdev, sur l'économie des écosystèmes et de la biodiversité, missionné par le commissaire à l'environnement de la Commission européenne Stavros Dimas, et par le ministre de l'environnement allemand Sigmar Gabriel à la suite d'une rencontre des ministres de l'environnement du G8+5 à Potsdam en mai 2007.