B. LA MULTIPLICATION DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES CHARGÉES DE LA PROTECTION DES DROITS
1. La première génération d'autorités : la CNIL et la CADA
Au cours des années 1970, le législateur a commencé à confier des missions spécifiques à des autorités administratives indépendantes. Ainsi, la loi du 6 janvier 1978 crée la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), premier organisme qualifié d'AAI, et la loi du 17 juillet 1978 crée la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA).
Le Parlement met ainsi en place des structures distinctes du cadre administratif traditionnel, qu'il dote de garanties d'indépendance et auxquelles il confie des missions relevant de la protection des droits fondamentaux.
D'autres autorités, créées dans les années 1980, jouent un rôle déterminant dans la protection des libertés, tout en exerçant une mission de régulation d'un marché. Ainsi, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, créé par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, joue un rôle fondamental pour l'exercice d'une liberté publique, tout en régulant le secteur de l'audiovisuel.
2. Le développement d'une deuxième génération d'autorités dans les années 2000, sous l'influence du droit international et européen et des attentes des citoyens
Une deuxième génération d'autorités a été créée au cours des années 2000, répondant à de nouvelles attentes des citoyens et à des obligations définies par des engagements internationaux ratifiés par la France.
La création du Défenseur des enfants par la loi du 6 mars 2000 permet en effet à la France de se conformer à la recommandation du Conseil de l'Europe n° 1121 (1990) relative aux droits de l'enfant, qui invite « les Etats membres à envisager, s'ils ne l'ont pas encore fait, de nommer un médiateur spécial pour les enfants, qui pourrait les informer de leurs droits, les conseiller, intervenir et, éventuellement, ester en justice des poursuites en leur nom » 5 ( * ) .
La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) créée par la loi du 6 juin 2000, visait, selon le rapporteur du projet de loi au Sénat, notre ancien collègue Henri de Richemont, à donner « un recours utile aux citoyens au service d'une transparence accrue des services de sécurité », à une époque d'affirmation des exigences en ce domaine 6 ( * ) .
La France a ensuite répondu aux exigences communautaires en créant la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE, loi du 30 décembre 2004) 7 ( * ) . En effet, la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique requiert des Etats membres qu'ils désignent un ou plusieurs organismes chargés de promouvoir l'égalité de traitement (art. 13) 8 ( * ) .
Plus récemment encore, la création du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, par la loi , a permis à la France de satisfaire aux exigences du protocole facultatif se rapportant à la convention des Nations unies (18 décembre 2002) contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants 9 ( * ) . Ce protocole stipule en effet, dans sa quatrième partie, que chaque Etat partie met en place un mécanisme national de prévention indépendant en vue de prévenir la torture.
* 5 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois par M. Christian Bonnet sur la proposition de loi instituant un Médiateur des enfants, n° 43 (1999-2000), consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l99-043/l99-043.html
* 6 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois par M. Henri de Richemont sur le projet de loi portant création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité, n° 173 (1999-2000), consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l99-173/l99-173.html
* 7 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois par M. Jean-René Lecerf sur le projet de loi portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, n° 65 (2004-2005), consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l04-065/l04-065.html
* 8 Ces organismes doivent être en mesure d'apporter aux personnes victimes d'une discrimination une aide indépendante pour engager une procédure pour discrimination, de conduire des études indépendantes concernant les discriminations et de publier des rapports indépendants et d'émettre des recommandations sur toutes les questions liées à ces discriminations.
* 9 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois par M. Jean-Jacques Hyest sur le projet de loi instituant un contrôleur général des lieux de privation de liberté, n° 414 (2006-2007), consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l06-414/l06-414.html