CHAPITRE II - CHAMBRES DE MÉTIERS ET DE L'ARTISANAT
Article 8 - (articles 5-1 à 5-8 [nouveaux] du code de l'artisanat) - Le réseau des chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : cet article précise la nouvelle organisation du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a apporté peu de changements de fond à un texte issu, pour l'essentiel, d'un large accord trouvé par les chambres de métiers lors de leur assemblée générale de décembre 2008. L'article 8 du projet de loi prévoit d'insérer huit nouveaux articles dans le code de l'artisanat, numérotés de 5-1 à 5-8, qui décrivent l'architecture générale du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat (A), précisent l'organisation et les missions des chambres de ressort régional (B) et définissent les missions de l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (C).
A. L'architecture générale du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat
L'article 5-1 précise que le réseau est composé d'établissements publics placés sous la tutelle de l'État et administrés par des dirigeants et des collaborateurs d'entreprise élus. Le réseau comprend :
- l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCM) ;
- au niveau régional, les chambres de métiers et de l'artisanat de région (CMAR) ou les chambres régionales de métiers et de l'artisanat (CRMA) ;
- au niveau du département, les chambres de métiers et de l'artisanat départementales (CMAD).
Les chambres de métiers des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle sont associées au réseau national dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.
B. Organisation et missions des chambres de ressort régional
•
L'article 5-2
précise la nature
des liens entre chambres départementales et chambres de ressort
régional et explicite la différence entre CMAR et CRMA.
- le I de l'article 5-2 indique que la circonscription des CMAR et des CRMA est la région ; dans le cas de la Corse, il s'agit de la collectivité territoriale de Corse ;
- le II dispose que, dans les régions comportant un seul département (concrètement, les départements d'Outre-Mer), la chambre de métiers et de l'artisanat devient chambre de métiers et de l'artisanat de région et exerce ses fonctions à une date fixée par décret ;
- le III précise que les chambres départementales sont rattachées à la chambre de ressort régional (CMAR ou CRMA selon le cas de figure). Il décrit également les modalités de transformation des CRMA en CMAR. Si la majorité des établissements d'une circonscription régionale le décident, la chambre régionale (CRMA) devient chambre de région (CMAR). Cette chambre de région comprend au plus autant de sections que de chambres départementales ayant fait le choix de la fusion. Les CMAD qui ne souhaitent pas fusionner conservent leur qualité d'établissement public et sont rattachées à la CRMA.
- le IV prévoit qu'un décret en Conseil d'État définit les fonctions administratives qui sont exercées au niveau national ou régional. On peut se faire une idée de ce que sera la répartition des fonctions entre les différents échelons du réseau en se reportant aux conclusions de l'assemblée générale des chambres de métiers de décembre 2009.
Fonctions administratives exercées |
|
Échelon national |
Exportation, représentation à l'international, statistique, informatique, services juridiques |
Échelon régional |
Paie, comptabilité, achats et marchés non centralisés au niveau national, gestion des ressources humaines, communication |
Échelon départemental |
Services de proximité aux entreprises et aux autres publics dans le cadre stratégique fixé au niveau régional (CFE, apprentissage,...) |
•
L'article 5.3
indique que la chambre de
niveau régional assure la représentation des métiers et de
l'artisanat au plan régional
.
•
L'article 5.4
indique que les chambres
départementales assurent leurs missions dans le respect des
prérogatives de la chambre de niveau régional à laquelle
elles sont rattachées.
•
L'article 5.5
précise les
compétences des chambres de ressort régional
.
Celles-ci :
- définissent la stratégie du réseau dans la région ;
- répartissent entre les chambres départementales les ressources qui leur sont affectées après déduction de leur propre quote-part ;
- abondent le budget des chambres départementales pour subvenir à des dépenses exceptionnelles ou à des circonstances particulières.
L'article 5-6 prévoit que les conditions de la transposition des dispositions de l'article 5-5 aux chambres des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle sont précisées par décret en Conseil d'État.
C. Les missions de l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCM)
L'article 5-7 dispose que l'APCM représente les intérêts des métiers et de l'artisanat au niveau de l'État, de l'union européenne et au plan international. Il précise aussi la composition de son organe délibérant (sont représentés les présidents des établissements publics du réseau ainsi que les présidents des sections nées de la fusion des chambres départementales au sein d'une CMAR).
L'article 5-8 énumère les compétences de l'APCM, qui étaient au nombre de quatre dans la rédaction initiale du texte :
- élaboration de la stratégie nationale du réseau ;
- définition des normes d'intervention des établissements du réseau et contrôle du respect de ces normes ;
- gestion des projets nationaux du réseau ;
- définition et suivi de la mise en oeuvre de la politique du réseau en matière de gestion des personnels ; négociation et signature des accords sociaux applicables au personnel des chambres (avec agrément par décret pour les accords ayant un impact sur les rémunérations).
Avec l'adoption par les députés d'un amendement, une cinquième compétence a été ajoutée : l'APCM désigne expressément les achats de fournitures ou les achats de prestations de services faisant l'objet de marchés, marchés à bons de commande ou accords-cadres qu'elle passe au nom et pour le compte des établissements du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat. La décision de l'Assemblée générale de l'APCM prise dans ce domaine s'impose aux établissements du réseau. Cette possibilité de centraliser certains achats vise à renforcer le rôle de tête de réseau de l'APCM et s'inscrit dans une politique de rationalisation des achats permettant des économies d'échelle.
II. La position de votre commission
Votre commission est satisfaite par le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, car il permet une meilleure gouvernance du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat et met en place les outils d'un pilotage régional plus efficace, sans sacrifier pour autant les missions de service de proximité qui sont la raison d'être principale des chambres.
Jusqu'à présent, les chambres de niveau régional, dont les attributions avaient récemment été redéfinies par le décret n°2004-1165 du 2 novembre 2004, avaient pour mission de définir les axes stratégiques de l'action du réseau au sein de la région, mais les chambres de ressort territorial inférieur possédaient en réalité une totale autonomie liée au fait qu'elles collectaient directement leurs recettes financières et établissaient leur budget de manière autonome (voir commentaire de l'article 10 bis à ce sujet). La réforme donne désormais aux chambres de niveau régional des moyens en adéquation avec leurs compétences affichées, puisque ce sont elles qui collecteront les ressources financières avant de les redistribuer aux chambres départementales (ou de les affecter aux sections issues de la fusion des CMA qui choisiront de fusionner).
La physionomie finale du réseau n'apparaîtra cependant véritablement que lorsque les décrets d'application auront été pris. Votre rapporteur note en effet que le projet de loi se contente de définir l'architecture générale du réseau, mais laisse en partie indéterminée la nature précise des liens entre les CMA de ressort régional et les chambres départementales . C'est là une différence importante entre la réforme des CCI et celle des CMA : la première se fait en effet, pour l'essentiel, au niveau législatif, ce qui est cohérent avec le fait que le régime juridique des CCI est d'ores et déjà établi au niveau législatif, alors que la seconde sera élaborée en grande partie au niveau règlementaire, ce qui est bien dans la tradition du droit des chambres de métiers, qui, historiquement, est quasi exclusivement de nature règlementaire 22 ( * ) .
En disposant que les chambres de métiers et de l'artisanat départementales sont rattachées à une chambre de région, le législateur indique que les chambres départementales se trouvent dans le ressort géographique de la chambre régionale. Cette précision est techniquement indispensable pour identifier sans ambiguïté les établissements publics entre lesquels le législateur entend créer des liens, mais cela ne dit rien du contenu de ces liens.
En disposant que l'échelon départemental est tenu de suivre les orientations générales définies dans le cadre de la stratégie régionale (aux termes du futur article 5.4 du code de l'artisanat, les chambres départementales assurent leurs missions dans le respect des prérogatives de la chambre de niveau régional à laquelle elles sont rattachées), le législateur va au-delà d'un simple rattachement « technique », puisqu'il établit une certaine forme de hiérarchie. Ceci étant, une stratégie peut être définie de façon plus ou moins vague. En outre, sans pouvoir financier, le droit de définir des axes stratégiques a peu de chances d'être effectif.
Le coeur de la réorganisation du réseau des CMA est donc la disposition qui confère à la chambre régionale le pouvoir de collecter la taxe pour frais de chambre et d'en répartir le produit. L'ampleur de ce pouvoir budgétaire dépendra de la manière dont seront définies concrètement les modalités de répartition des ressources financières. A priori, cette répartition peut se faire selon deux modèles. Le premier correspond à une répartition quasi-automatique, où les sommes reçues par les chambres départementales dépendent de critères non discrétionnaires (nombres de ressortissants, étendue du territoire, etc.). Dans ce cas, la chambre régionale distribue certes les ressources financières, mais sans avoir un réel droit de regard sur leur utilisation. On peut envisager à l'inverse un mode de redistribution des ressources financières vers les chambres départementales sur des critères discrétionnaires, ce qui établirait une véritable subordination des chambres départementales par rapport à la chambre régionale. Ces deux solutions (qu'on peut d'ailleurs combiner en pratique) sont compatibles avec la rédaction du futur article 5-5 du code de l'artisanat mais aboutissent à un fonctionnement du réseau des chambres de métiers extrêmement différent.
C'est ainsi le pouvoir règlementaire qui fixera le curseur. L'article 9 du projet de loi prévoit que les modalités d'organisation et de fonctionnement des établissements publics du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, ainsi que celles du rattachement des chambres départementales aux chambres régionales sont fixées par décret en Conseil d'État.
Tout en soulignant cette relative indétermination du texte législatif sur la nature précise des relations entre chambres départementales et régionales, votre rapporteur souligne qu'elle ne constitue pas en soi un défaut. Il n'y a pas de raison, en effet, de fixer d'en haut, immédiatement, le détail de l'organisation du réseau des CMA. Le législateur se doit de poser un cadre général, de déterminer les objectifs et de donner une impulsion forte, charge aux chambres ensuite, en relation avec leur tutelle , de s'approprier la réforme et de définir concrètement les règles les plus propices à l'accomplissement économe de leurs missions. Comme on l'a déjà indiqué, les chambres de métiers ont déjà donné la preuve qu'elles sont activement engagées dans la réforme de leur réseau et laisser le texte « ouvert » leur conserve la possibilité de prolonger cet engagement.
Votre commission a adopté, sur proposition de son rapporteur, un amendement de simplification rédactionnelle.
Elle a également adopté un amendement de M. Philippe Leroy et Mme Fabienne Keller précisant que les chambres de métiers des départements d'Alsace et de Moselle se rattachent volontairement à la chambre de ressort régional.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 9 - (article 7 du code de l'artisanat) - Mise en oeuvre de la nouvelle organisation du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : cet article renvoie à un décret en conseil d'État le soin de déterminer les modalités d'organisation et de fonctionnement du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 9, qui n'a subi à l'Assemblée nationale qu'une modification rédactionnelle, rétablit dans le code de l'artisanat un article 7 qui dispose que : « Les modalités d'organisation et de fonctionnement des établissements publics constituant le réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, ainsi que celles du rattachement des chambres de métiers et de l'artisanat départementales aux chambres de métiers et de l'artisanat de région ou aux chambres régionales de métiers et de l'artisanat sont fixées par décret en Conseil d'État ».
II. La position de votre commission
Comme cela a été indiqué dans le commentaire de l'article 8, le cadre législatif fixé par le projet de loi laisse très largement ouvert le détail de l'organisation et du fonctionnement du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat. Il laisse également en suspend la définition exacte de la portée du terme « rattachement ». Conformément à ce qui est la vocation même de la loi sur ce type de sujet, le texte se limite à déterminer les principes fondamentaux de la réforme et à en désigner les grands objectifs. En conséquence, il renvoie à un décret en conseil d'État le soin de fixer les modalités pratiques. Cette manière de procéder permettra d'associer pleinement les chambres de métiers et de l'artisanat au processus et leur laissera le temps, en relation avec leur tutelle, d'approfondir la réflexion qu'elles ont déjà engagée pour atteindre les objectifs que leur fixe la loi.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 10 - (article 19 ter [nouveau] du code de l'artisanat) - Dispositions visant à assurer une bonne gestion des chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : cet article établit les règles concernant la nomination d'un commissaire aux comptes par les chambres de métiers et de l'artisanat.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 10 du projet de loi insère dans le code de l'artisanat un article 19 ter aux termes duquel : « les établissements du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat sont tenus de nommer au moins un commissaire aux comptes, choisis conformément au code des marchés publics ».
L'Assemblée nationale a adopté, sur proposition de la rapporteure au fond, un amendement précisant que la nomination est décidée par l'assemblée générale de la chambre concernée, sur proposition de son président.
Le second alinéa de l'article 19 ter dispose que s'applique la peine prévue à l'article L. 242-8 du code de commerce pour les dirigeants de chambres de métiers et de l'artisanat qui n'auraient pas, chaque année, établi un bilan, un compte de résultat et une annexe.
II. La position de votre commission
Il existe dans le droit en vigueur une différence de régime entre les chambres de métiers et de l'artisanat et les chambres de commerce et d'industrie en ce qui concerne le contrôle des comptes. L'article L. 712-6 du code de commerce dispose en effet que les établissements du réseau des CCI sont tenus de nommer au moins un commissaire aux comptes et un suppléant. Pour les CMA en revanche, la nomination d'un commissaire aux comptes n'est pas systématique , puisque, dans cette matière, elles sont régies par l'article 135 de la loi de sécurité financière du 1 er août 2003 qui concerne les établissements publics de l'État de manière générale. Aux termes de cet article, la nomination d'un commissaire aux comptes ne s'impose pas lorsque le nombre de salariés, le montant hors taxes du chiffre d'affaires ou des ressources ainsi que le total du bilan ne dépassent pas, pour deux de ces critères, des seuils fixés par décret en Conseil d'État.
L'article 10 du projet de loi harmonise donc, en la matière, les règles applicables aux chambres de métiers et de l'artisanat avec celles déjà applicables aux chambres de commerce et d'industrie en rendant systématique la désignation d'un commissaire aux comptes.
Dans un même souci d'harmonisation, l'article 10 du projet de loi soumet aux peines prévues par l'article L. 242-8 du code de commerce les dirigeants des CMA qui n'auront pas, chaque année, établi un bilan, un compte de résultat et une annexe. Cela correspond, là encore, au régime déjà applicable aux dirigeants de CCI en la matière.
Enfin, la précision apportée par l'Assemblée nationale en ce qui concerne les modalités de nomination du ou des commissaire(s) dans une chambre de métiers et de l'artisanat s'inscrit elle-aussi dans une démarche de mise en cohérence du droit, puisque la procédure choisie - nomination par l'assemblée générale sur proposition du président - est d'ores et déjà celle qui s'applique aux CCI et aux CMA s'agissant de la certification des comptes de leurs centres de formation des apprentis (CFA) en gestion directe (décret du 31 mai 2000 relatif au financement des centres de formation d'apprentis et des sections d'apprentissage).
Votre commission a adopté un amendement présenté par M. Eric Doligé, rapporteur pour avis de la commission des finances, soumettant les CMA à des obligations comptables renforcées, puisqu'il prévoit la publication et la transmission annuelle à la tutelle d'un bilan et d'un compte de résultat, ainsi que la tenue d'une comptabilité analytique pour distinguer l'utilisation des fonds destinés à l'exercice des missions marchandes et non marchandes.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 10 bis (nouveau) - (article 1601 du code général des impôts) - Modalités de financement du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : cet article réforme la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises qui finance le réseau des chambres de métiers et de l'artisanat.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Un amendement du rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale modifie la taxe pour frais de chambres de métiers.
LA TAXE POUR FRAIS DE CHAMBRES DE MÉTIERS L'article 1601 du code général des impôts prévoit qu'une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises est perçue au profit des établissements du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, à savoir, l'APCM, les CRMA et les CMA. Cette taxe, acquittée par les entreprises individuelles ou les sociétés inscrites au répertoire des métiers, est composée : - d' un droit fixe par ressortissant , égal à la somme des droits fixes arrêtés par la chambre de métiers et de l'artisanat, la chambre régionale de métiers et de l'artisanat et l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat, dans la limite d'un montant maximum fixé respectivement à 101 euros, 9 euros et 15 euros (pour les chambres de métiers et de l'artisanat de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane et de La Réunion, le montant maximum du droit fixe est fixé à 110 euros) ; - d' un droit additionnel à la cotisation foncière des entreprises , dont le produit est arrêté par les chambres de métiers et de l'artisanat. Celui-ci ne peut excéder 50 % du produit du droit fixe revenant aux chambres de métiers et de l'artisanat majoré d'un coefficient de 1,12. Les chambres de métiers et de l'artisanat sont autorisées à porter le produit du droit additionnel jusqu'à 85 % du produit du droit fixe, afin de mettre en oeuvre des actions ou de réaliser des investissements, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État ; - d' un droit additionnel par ressortissant , affecté par les chambres régionales de métiers et de l'artisanat ou, dans les départements et collectivités d'outre-mer, par les chambres de métiers et de l'artisanat, au financement d'actions de formation. Ce droit est fixé à 0,12 % du montant annuel du plafond de la sécurité sociale. |
L'article 10 bis apporte plusieurs modifications au régime de la taxe pour frais de chambre de métiers.
• Cette taxe est actuellement collectée
par tous les établissements du réseau, quel que soit leur
échelon territorial. L'article 10
bis
supprime
donc
le droit de collecte de la taxe au niveau de
l'échelon de base du réseau
afin de mettre en
cohérence l'article 1601 du code général des impôts
avec le futur article 5-5 du code de l'artisanat, ce dernier
prévoyant de confier la collecte et la redistribution des ressources
financières aux chambres régionales.
• Le caractère forfaitaire du droit fixe
de la taxe pour frais de chambres impose chaque année une discussion au
Parlement concernant son taux de revalorisation. C'est pourquoi la nouvelle
rédaction de l'article 1601
définit
désormais
la valeur du droit fixe en proportion du plafond
annuel de la sécurité sociale, ce qui permet sa
réévaluation automatique
;
• L'article 10
bis
prévoit
également
une réduction progressive du plafond du droit
fixe d'ici à 2014
. Cet allègement du taux de
prélèvement est cohérent avec l'objectif d'une
rationalisation du fonctionnement du réseau devant favoriser une
maîtrise des dépenses.
LE TAUX PLAFOND DU DROIT FIXE DE LA TAXE POUR FRAIS DE CHAMBRE DE MÉTIERS
En % du plafond annuel de la sécurité sociale |
2011 |
2012 |
2013 |
À partir de 2014 |
Variation entre 2011 et 2014 |
APCM |
0,0436 |
0,0425 |
0,0414 |
0,0403 |
- 7,5 % |
CMAR, CMAR |
0,3112 |
0,3032 |
0,2952 |
0,2872 |
- 7,7 % |
Droit fixe applicable au département de la Moselle |
0,0274 |
0,0267 |
0,0254 |
0,0247 |
- 10 % |
•
Le taux maximum du droit additionnel
pour les chambres de niveau régional est fixé à 60 %
du droit fixe, ce taux pouvant être porté
à 90 %
pour mettre en oeuvre certaines
dépenses ou réaliser des investissements ;
• Par coordination,
la collecte du droit
additionnel destiné à financer les actions de formation est
remontée au niveau des chambres de ressort régional
.
II. La position de votre commission
La refonte de la taxe pour frais de chambre de métiers était indispensable pour l'adapter à la réforme de la taxe professionnelle adoptée en 2009. Votre commission se félicite du travail réalisé dans ce sens par l'Assemblée nationale.
Votre commission a adopté deux amendements techniques de M. Eric Doligé, rapporteur pour avis de la commission des finances. Le premier clarifie les conditions d'utilisation des recettes fiscales levées par le réseau des CMA en précisant qu'elles doivent être utilisées dans le respect des règles de la concurrence nationale et communautaire. Le second subordonne le droit, pour les chambres régionales, de lever le droit additionnel de la taxe additionnelle à la cotisation foncière à la conclusion entre les chambres et l'État d'une convention d'objectif et de moyens dans le but d'inciter les chambres à entrer dans une démarche qui les force à définir des objectifs de performance quantifiables et des indicateurs de résultat.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 10 ter (nouveau) - (article 2 de la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambres de métiers applicable dans les départements d'Alsace et de Moselle) - Modalités de financement du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : Cet article met en cohérence la législation de la taxe pour frais de chambres dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Selon l'article 2 de la loi n° 48-977, les chambres de métiers des départements d'Alsace et de Moselle sont soumises à un régime dérogatoire en vertu duquel elles échappent aux dispositions de l'article 1601 du code général des impôts : elles arrêtent chaque année, sous réserve de l'approbation préfectorale, lors de l'établissement de leur budget, le montant total des sommes à imposer à l'ensemble des artisans de la circonscription pour subvenir aux dépenses des chambres. Dans les faits, le mécanisme de financement de ces chambres repose bien sur un droit fixe et sur des droits variables, mais, à la différence de ce que prévoit l'article 1601, ce droit fixe n'est pas limité . En 2007, il s'élevait ainsi à 163 euros pour la chambre d'Alsace et à 202 euros pour la chambre de la Moselle.
Le rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale a fait remarquer que le législateur, en s'abstenant de fixer le taux de l'imposition dans le cas de l'Alsace et de la Moselle, ne se saisissait pas de la compétence obligatoire que lui donne la Constitution , de sorte que l'article 2 de la loi du 16 juin 1948, à l'occasion d'une requête d'exception d'inconstitutionnalité, pourrait être menacé par la censure du Conseil constitutionnel pour incompétence négative. Selon la jurisprudence du Conseil, il appartient en effet au législateur de déterminer les limites à l'intérieur desquelles un établissement public à caractère administratif est habilité à arrêter le taux d'une imposition établie en vue de pourvoir à ses dépenses.
II. La position de votre commission
L'article 10 bis stabilise une situation juridique incertaine en ce qui concerne le financement des chambres de métiers et de l'artisanat des départements d'Alsace-Moselle. Il transpose dans ces départements le nouveau mécanisme de financement adopté pour le reste du territoire national, reposant sur un droit fixe calculé en proportion du plafond de la sécurité sociale.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 10 quater A (nouveau) - Conséquences financières de la fusion des chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : cet article exempte de toute taxe les opérations de fusion entre établissements du réseau des CMA
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 10 quater A prévoit que les opérations de fusion entre établissements du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat, en application des articles 5-1 à 5-8 du code de l'artisanat, sont effectuées à titre gratuit et ne donnent lieu au paiement d'aucune indemnité, ni à aucun droit, taxe, salaire ou honoraire.
II. La position de votre commission
Cet article additionnel a été adopté sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement. Le ministre a en effet soutenu que cette disposition était inutile, car les règles fiscales de droit commun neutralisent d'ores et déjà les opérations de fusion en matière d'impôt sur les sociétés, de droits de mutation à titre onéreux et de TVA. Le rapporteur pour avis a cependant fait valoir que les règles fiscales de droit commun évoquées par le ministre ne visent pas les taxes alimentant les conservations des hypothèques et la publicité foncière. Pour exonérer les opérations de fusion des CMA de ces deux taxes, il est donc utile d'introduire une disposition législative expresse.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 10 quater (nouveau) - Groupements interconsulaires et fusions entre chambres de commerce et d'industrie et chambres de métiers et de l'artisanat
Commentaire : cet article crée à titre expérimental la possibilité de groupements interconsulaires ou de fusions entre établissements du réseau des CCI et des CMA
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 10 quater comporte deux dispositions :
- la première permet aux établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie (CCI) et aux chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) de constituer, à titre expérimental et pour une durée déterminée, des groupements interconsulaires pour la défense d'intérêts spéciaux communs ;
- la seconde donne à ces établissements la possibilité, sur leur initiative, de fusionner. La création de chambres communes de commerce, d'industrie, de métiers et de l'artisanat est expérimentale et pour une durée de cinq ans. Cette disposition s'applique uniquement aux départements dont toutes les communes sont classées en zone de revitalisation rurale (ZRR) en application de l'article 1465 A du code général des impôts.
II. La position de votre commission
La possibilité de former des regroupements interconsulaires constitue une avancée intéressante, car il existe sans doute, sur certains territoires, des possibilités de synergie à exploiter entre les deux réseaux consulaires sur des sujets déterminés.
En revanche, la possibilité de fusion prévue par la seconde partie de l'article 10 quater soulève des interrogations :
- les conditions posées (100 % des communes doivent être classées en ZRR) vident la mesure de toute retombée pratique, puisqu'aucun département ne satisfait à ce critère, pas même la Lozère, contrairement à ce qui a été avancé lors des débats à l'Assemblée nationale ;
- on voit mal comment cette possibilité de fusion peut s'articuler avec l'architecture globale de la réforme. La fusion entre CCI territoriales et CMA est prévue en effet au niveau départemental. Or, la réforme du réseau des CMA vise à encourager la fusion des actuelles CMA au niveau régional, au sein d'une CMA de région. On introduit donc une possibilité de fusion CMA/CCI au niveau départemental au moment même où on s'engage dans un processus de disparition des CMA départementales. C'est incohérent ;
- les statuts du personnel sont différents dans les CCI et les CMA. Une fusion poserait le problème de l'harmonisation des statuts, l'expérience montrant que ce type d'opérations se traduit par une forte croissance des coûts de fonctionnement du fait d'un alignement sur le statut le plus avantageux pour le personnel ;
- la fusion est théoriquement expérimentale, mais à supposer qu'elle se réalise, on voit mal concrètement comment il serait possible de revenir ensuite à la situation initiale.
En définitive, si l'idée de partager entre les réseaux un certain nombre de moyens et de missions est intéressante, la voie de la fusion paraît soulever des difficultés pratiques considérables. On peut tout à fait envisager des moyens plus simples et plus ciblés pour parvenir au même résultat.
Sur proposition de son rapporteur, votre commission a donc supprimé la disposition prévoyant la possibilité de fusion entre CCI et CMA à titre expérimental .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 10 quinquies (nouveau) - (article 1601 A du code général des impôts) - Financement du Fonds national de promotion et de communication de l'artisanat (FNPCA)
Commentaire : cet article met en cohérence le financement du FNPCA avec la réforme de la taxe pour frais de chambre de métiers.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Aux termes de l'article 1601 A du code général des impôts, le Fonds national de promotion et de communication de l'artisanat (FNCPA) est un établissement public administratif dont le financement est assuré par un droit égal à 10 % du montant maximum du droit fixe revenant aux chambres de métiers et de l'artisanat, majoré d'un coefficient de 1,137.
Les ressources du FNCPA sont donc calculées actuellement en référence à la taxe prélevée par les chambres de ressort territorial infra-régional. Or, la réforme du financement du réseau des CMA retire aux chambres départementales toute compétence en matière de taxe pour frais de chambre. Il est donc nécessaire de mettre en cohérence l'article L. 1601 A du code général des impôts avec l'article L. 1601 dans sa nouvelle rédaction.
L'article 10 quinquies nouveau du projet de loi prévoit que :
- le droit finançant le FNPCA est désormais calculé en référence à au droit fixe déterminée par les chambres de ressort régional ;
- le coefficient de majoration de 1,137 est supprimé, car il n'a plus de raison d'être . En effet, ce coefficient est prévu pour inclure dans le calcul des ressources du FNPCA la fraction du droit fixe actuellement collectée par la chambre régionale : en l'absence d'un tel coefficient, les ressources du FNPCA n'auraient pour base que le droit fixe départemental. Le coefficient de 1,137 n'est donc qu'une solution technique pour inclure dans le calcul des ressources du FNPCA la référence au droit fixe collecté au plan régional. Cependant, la réforme du financement des CMA simplifie la taxe pour frais de chambres : il n'y a plus une composante régionale et une composante infrarégionale, mais simplement un droit fixe régional. L'utilité du coefficient de majoration disparaît donc.
II. La position de votre commission
L'article 10 quinquies nouveau adopté par l'Assemblée nationale est indispensable au bouclage de la réforme du financement des chambres de métiers et de l'artisanat, puisqu'elle met en cohérence les articles L. 1601 et L. 1601 A du code général des impôts.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 10 sexies (nouveau) - (article L. 6251-1 du code du travail) - Inspection de l'apprentissage
Commentaire : cet article donne aux chambres de métiers et de l'artisanat la compétence en matière d'inspection de l'apprentissage
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article additionnel résulte d'un amendement déposé par MM. Jean-Frédéric Poisson, Jean-Pierre Decool et Mme Marie-Louise Fort. Il vise à compléter l'article L. 6251-1 du code du travail par un 3° permettant aux chambres de métiers et de l'artisanat d'assurer l'inspection de l'apprentissage auprès des entreprises artisanales.
Il en résulte la rédaction suivante pour l'article du code L. 6251-1 du code du travail :
« Un décret en Conseil d'État détermine :
1° Les corps de fonctionnaires assurant l'inspection de l'apprentissage ;
2° Les conditions spécifiques dans lesquelles les missions de l'inspection de l'apprentissage sont exercées, notamment en matière de contrôle de la formation dispensée aux apprentis, tant dans les centres de formation d'apprentis que sur les lieux de travail :
3° Les conditions spécifiques dans lesquelles les chambres de métiers et de l'artisanat assurent l'inspection de l'apprentissage auprès des entreprises artisanales. »
II. La position de votre commission
Cet article additionnel est porteur d'une réforme en profondeur de l'apprentissage . Il convient donc d'en analyser très précisément le sens et les conséquences.
À titre préliminaire, on peut rappeler qu'actuellement l'apprentissage est l'objet d'une double inspection , qui se fonde sur la double nature de l'apprentissage :
- l'apprentissage est avant tout une formation . Sa finalité première est en effet l'acquisition par l'apprenti d'une qualification attestée par un diplôme décerné par l'État ayant une valeur nationale (article L 6211-1 du code du travail : [L'apprentissage] a pour objet de donner à des jeunes travailleurs, ayant satisfait à l'obligation scolaire, une formation générale, théorique et pratique, en vue de l'obtention d'une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou un titre à finalité professionnelle enregistré au répertoire national des certifications professionnelles »). Cet aspect de l'apprentissage est l'objet d'un contrôle pédagogique , actuellement mis en oeuvre par le ministère de l'éducation nationale à travers l'action des inspecteurs à compétence pédagogique au sein des services académiques de l'inspection de l'apprentissage (SAIA). Leur mission comprend le contrôle pédagogique des centres de formation d'apprentis et celui de la formation dispensée aux apprentis dans les entreprises ;
- la pédagogie de l'apprentissage reposant pour partie sur l'insertion de l'apprenti dans un cadre professionnel salarié, l'apprenti est également un travailleur lié à un employeur par un contrat de travail (article L. 6221-1 du code du travail : « Le contrat d'apprentissage est un contrat de travail de type particulier conclu entre un apprenti ou son représentant légal et un employeur »). Ce contrat de travail particulier est donc aussi l'objet d'un contrôle par l'inspection du travail .
Ce rappel permet d'éviter d'emblée une méprise possible quant à la portée exacte de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale : ce dernier concerne uniquement la dimension pédagogique de l'inspection de l'apprentissage et aucunement le rôle de l'inspection du travail 23 ( * ) . Le fait de confier l'inspection de l'apprentissage aux chambres de métiers et de l'artisanat n'a donc en soi aucun impact sur la nature et la rigueur du contrôle qu'exerce l'inspecteur du travail . D'ailleurs, l'idée même que la compétence de l'inspection du travail pourrait être transférée aux chambres de métiers et de l'artisanat est sans doute contraire aux normes de droit ayant une valeur supérieure aux lois, puisque cela violerait des engagements internationaux de la France (notamment la Convention OIT de 1947 sur l'inspection du travail, article 6).
Il convient donc se prononcer sur la pertinence de l'article 10 sexies en ne se trompant pas de sujet. La seule question à examiner est la suivante : est-il possible, utile ou opportun de confier l'inspection pédagogique de l'apprentissage artisanal aux chambres de métiers et de l'artisanat ?
Pour répondre, on peut commencer par se rapporter aux arguments qui ont été développés lors des débats à l'Assemblée nationale.
Premièrement, il a été rappelé à cette occasion qu'avant la réforme de 1971, l'inspection de l'apprentissage était déjà une compétence des chambres de métiers, de sorte que l'article 10 sexies marquerait simplement un retour à la situation prévalant il y a quarante ans. Votre rapporteur aurait apprécié que le débat à l'Assemblée nationale ou la documentation fournie par les services du secrétariat d'Etat permettent de comprendre les raisons qui ont justifié le transfert de la compétence des chambres de métiers à l'éducation nationale en 1971 et les raisons pour lesquelles il pourrait être pertinent aujourd'hui d'effectuer le transfert en sens opposé.
Ces questions ont à vrai dire été seulement effleurées. M. Jean-Frédéric Poisson a souligné qu'aujourd'hui la raison d'être de l'inspection de l'apprentissage est non seulement le contenu de l'enseignement mais également l'accompagnement des entreprises en amont et en aval lorsqu'elles accueillent des apprentis . Il a indiqué à cet égard que le contexte de l'apprentissage a fortement évolué depuis les lois Dutreil du fait des modalités d'enregistrement des contrats, des aides apportées aux entreprises pour trouver des apprentis, des aides apportées aux apprentis pour trouver une entreprise ou pour en changer, du fait également des dispositions de médiation pour la prévention et la solution à l'amiable des difficultés éventuellement rencontrées dans le cadre d'un contrat d'apprentissage et pour la préparation à toutes les formations concernant la sécurité routière.
Ces remarques sont exactes : l'apprentissage impose aux entreprises qui accueillent les apprentis des formalités importantes . Or, c'est précisément la mission des chambres de métiers et de l'artisanat, à travers les centres de formalités des entreprises, d'accompagner les entreprises dans leurs diverses démarches. Il n'est donc pas absurde de réfléchir à un développement du rôle des chambres de métiers et de l'artisanat dans ce domaine.
Néanmoins, votre rapporteur remarque que l'appui administratif aux entreprises n'a en soi strictement aucun rapport avec la mission d'inspection pédagogique de l'apprentissage qui vise, lui, à certifier le respect du cahier des charges nécessaires à l'obtention des diplômes nationaux . Le besoin des entreprises en matière d'accompagnement administratif face à l'apprentissage doit sans doute être développé, mais cette compétence relève des missions normales des CMA et elles peuvent l'exercer sans qu'il soit besoin de leur reconnaître par voie législative une compétence en matière d'inspection de l'apprentissage.
Deuxièmement, il a été souligné lors des débats à l'Assemblée nationale que l'inspection pédagogique de l'apprentissage est une compétence toujours exercée par les chambres consulaires en Alsace-Moselle , de sorte que le transfert de cette compétence aux chambres de métiers sur l'ensemble du territoire national constituerait en quelque sorte la généralisation de cette expérience locale. La généralisation a été justifiée par la réussite du dispositif dans ces départements .
S'il veut bien croire que cette réussite est au rendez-vous en Alsace et en Moselle, votre rapporteur souligne cependant qu'il n'a pu recueillir aucun élément de diagnostic objectif permettant de s'en assurer .
Par ailleurs, à supposer même que cette réussite soit avérée, la transposition d'une expérience locale à l'ensemble du territoire ne peut se faire à la légère. Il serait utile, au préalable, de comprendre qu'elles sont les conditions locales particulières qui expliquent ce succès en Alsace-Moselle et de se demander si ces conditions existent ailleurs (ou s'il est possible de les reproduire ailleurs). On sait bien en effet que l'histoire particulière des départements d'Alsace et de la Moselle a façonné des institutions et des habitudes souvent remarquables, mais tout à fait spécifiques. Ce qui fonctionne sur ces territoires ne fonctionne donc pas forcément ailleurs et transposer un élément du paysage sans être en mesure de reproduire le contexte qui l'accompagne pourrait se révéler hasardeux . En tout état de cause, votre rapporteur indique qu'il n'est pas en mesure de se prononcer objectivement sur la pertinence de la généralisation de l'exemple d'Alsace-Moselle en l'absence d'une expertise préalable approfondie.
Au-delà des arguments évoqués lors des débats à l'Assemblée nationale, le transfert de la compétence de l'inspection de l'apprentissage en dehors d'une réflexion globale sur l'organisation de l'apprentissage soulève des questions multiples.
La première source de perplexité concerne la complexité administrative . En effet, si l'on transfère la compétence de l'inspection de l'apprentissage aux chambres de métiers pour l'apprentissage artisanal, il faudra créer un corps d'inspection au sein des chambres de métiers. Très vite, les CCI vont demander à disposer elles-aussi de la mission d'inspection de l'apprentissage dans les formations de leur ressort. Va donc apparaître un deuxième corps d'inspection de l'apprentissage. Comme il existe des centres de formation des apprentis de branche, qui ne dépendent pas d'une CMA ou d'une CCI en particulier, comme par ailleurs toutes les CMA et toutes les CCI ne voudront pas ou ne pourront pas assumer la compétence d'inspection de l'apprentissage, il sera nécessaire de maintenir également un corps d'inspection de l'apprentissage dans l'Éducation nationale. Ainsi, dans le cadre d'une loi de simplification administrative conçue à l'aune de la révision générale des politiques publiques, on est en voie de créer un nouveau millefeuille administratif qui confie à trois organes séparés la même mission d'inspection. C'est pour le moins paradoxal.
La deuxième source de perplexité concerne le financement de la mission d'inspection de l'apprentissage . L'exercice de cette compétence suppose en effet la mise en place d'une organisation spécifique et le recrutement d'un personnel qualifié. Or, les CMA vont devoir assumer cette charge supplémentaire dans un contexte de rationnement de leurs ressources. En seront-elles capables ? N'y a-t-il pas un risque que la charge financière soit au bout du compte transférée aux partenaires des chambres de métiers dans le domaine de l'apprentissage, à savoir les collectivités territoriales ?
Troisièmement, indépendamment de la question de l'apprentissage, la réforme du réseau des chambres de métiers, dans le cadre de la présente loi, entraîne déjà des bouleversements organisationnels importants, avec la mutualisation de certaines fonctions et des transferts de personnels. Cela constitue déjà en soi une réforme ambitieuse et difficile. Ajouter une mission nouvelle et lourde aux chambres de métier dans ce contexte ne risque-t-il pas de compliquer davantage la réorganisation ? Ne serait-il pas plus prudent de différer le transfert de cette compétence importante, ce qui aurait le mérite aussi de mener les études préalables nécessaires à un tel projet ?
Enfin, l'Éducation nationale ayant le monopole de la collation des grades, il est difficile de la priver de la compétence consistant à vérifier que les formations dispensées sont bien conformes au cahier des charges des diplômes qu'elle décerne. On peut peut-être réfléchir à des mécanismes de délégation de la compétence d'inspection permettant de garantir la valeur des diplômes, mais cela ne peut se faire au détour d'amendements votés sans que la représentation nationale ait pu réunir l'ensemble des informations susceptibles d'éclairer son jugement.
L'ensemble de ces éléments conduisent votre rapporteur à partager la position exprimée par le ministre lors des débats à l'Assemblée nationale . Ce dernier a en effet jugé la proposition du député Poisson intéressante tout en indiquant qu'elle mériterait une analyse plus approfondie et une concertation avec l'ensemble des acteurs concernés. Il a par ailleurs indiqué que toutes ces questions devaient être traitées dans les semaines ou les mois qui viennent dans le cadre d'une concertation.
Votre commission a donc supprimé cet article sur proposition de son rapporteur.
Votre commission a supprimé cet article. |
* 22 À vrai dire, techniquement parlant, seule l'introduction de la notion de rattachement entre chambres départementales et régionales justifiait le recours à un véhicule législatif pour réformer le réseau des CMA.
* 23 Les dispositions relatives à l'Inspection du travail proprement dites figurent dans la huitième partie du code du travail aux articles L. 8112-1 et suivants.