ANNEXE - RÉPONSES DE LA COUR DES COMPTES AU QUESTIONNAIRE DE M. ALAIN VASSELLE, RAPPORTEUR GÉNÉRAL DE LA LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE, SUR LE RAPPORT CONSACRÉ À LA SÉCURITÉ SOCIALE
LA PROCÉDURE DE RÉFORME DANS LE SECTEUR SOCIAL
Question 1
A deux reprises au cours des dernières semaines, le Parlement a eu à examiner deux importantes réformes - la gestion de la dette sociale et les retraites - de façon tronquée puisque toutes les mesures financières s'y rapportant ont été renvoyées aux projets de loi de financement de la sécurité sociale ou de finances pour 2011.
Si on peut comprendre la volonté de réserver aux lois financières le monopole des décisions en termes d'impôts, de taxes ou de contributions, cette approche n'en est pas moins peu satisfaisante pour assurer la clarté des réformes et des débats parlementaires.
a) Que pensez-vous de la procédure retenue par le Gouvernement ?
Réponse
Le Parlement examine en effet au cours de cet automne quatre projets de lois distincts qui comportent des dispositions relatives aux dépenses et recettes de la sécurité sociale :
• pour la reprise de la dette, le projet de loi
organique ;
• le projet de loi portant réforme des
retraites ;
• les dispositions financières relatives
à ces deux sujets figurent dans deux textes, le PLF et surtout le PLFSS.
Il convient cependant de distinguer les deux cas : pour la Cades, la procédure suivie par le Gouvernement est contrainte et donc incontournable : si l'on veut déroger à une règle organique, qui interdit de prolonger la durée de vie de la Cades, il convient bien qu'une disposition organique soit votée avant le vote de la LFSS.
Cette situation a pu créer des difficultés de calendrier. Ainsi, les mesures précises de financement et de garantie des ressources de la Cades étaient inconnues au moment où votre commission a examiné le projet de loi organique, ce que, je le sais vous avez regretté.
Quant aux dispositions réformant les retraites, il est logique qu'elles fassent l'objet d'une loi spécifique. Par contre, les mesures de financement affectant l'année 2011 doivent être en PLFSS ou PLF 2011.
La Cour ne peut qu'approuver la position que le Premier ministre a rappelée dans une circulaire (JO du 11 juin 2010) aux termes de laquelle les mesures qui financent ou privent de financement la sécurité sociale ont leur place en LFSS et celles qui concernent le budget de l'Etat en LF. Il s'agit d'éviter que n'importe quelle loi perturbe l'équilibre financier que ces deux textes doivent établir.
b) Aurait-il été judicieux que le Gouvernement dépose, en même temps que ses projets de loi de réforme de la dette ou des retraites, des collectifs budgétaires ou sociaux ?
La complexité réelle qui résulte de ces quatre textes parallèles me semble en réalité davantage due à des raisons de fond qu'à la procédure elle-même. Cette complexité résulte directement du choix d'un schéma de financement qui écarte le recours à une augmentation des recettes traditionnelles des régimes de sécurité sociale (cotisations, CSG, CRDS) au profit d'une « transformation » - si vous me permettez de reprendre un terme bancaire - au profit du FSV et ensuite de la Cnav de ressources issues de la réduction de niches fiscales ou sociales. En effet, l'attribution du produit de la réduction de niches fiscales à des organismes de sécurité sociale suppose l'utilisation d'une suite de `tuyaux' financiers inévitablement très complexes.
Ce choix du mode de financement explique un peu l'architecture un peu byzantine des circuits financiers proposés et le caractère éclaté des différents débats.
Du fait de cette complexité, on n'aurait pas gagné en clarté en présentant un collectif social joint à la loi de réforme des retraites
c) Si, par exemple, la réforme de la dépendance devait être examinée en début d'année prochaine, pourrait-on réellement attendre les projets de loi de financement et de finances pour 2012 pour en tirer les conséquences financières ?
La question est différente pour un éventuel projet de loi sur la dépendance, dont on ne connaît pas à ce stade les contours ni les conséquences sur l'équilibre des comptes de l'Etat et des comptes sociaux. A minima, l'étude d'impact qui sera présentée devra apporter une information claire et lisible sur l'ensemble des financements induits.
LE TRAITEMENT DE LA DETTE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Question 2
Comme la commission des affaires sociales, la Cour a fait valoir à plusieurs reprises dans ses derniers rapports que, plus on se rapproche du terme de la Cades, plus le transfert de dettes nouvelles à cet organisme « coûte cher » et exige un apport croissant de recettes.
a) Dans ce contexte, que pense la Cour du schéma de reprise des déficits présenté par le Gouvernement le 30 juin dernier ?
b) En particulier, l'impact de la crise sur les comptes sociaux justifie-t-il :
- l'allongement de quatre ans de la durée de vie de la Cades au titre de la reprise de 34 milliards qui, selon le Gouvernement, représentent la « dette de crise » ;
- la mobilisation anticipée du Fonds de réserve pour les retraites afin de financer les déficits de la branche vieillesse qui s'accumuleront avant son retour programmé à l'équilibre en 2018 ?
c) La Cour estime-t-elle pénalisant pour la Cades que les ressources qui lui sont affectées soient de plus en plus diversifiées et non plus seulement constituées de la CRDS ?
d) Le texte amendé du projet de loi organique sur la gestion de la dette sociales prévoit notamment l'établissement d'un tableau patrimonial de la sécurité sociale et une nouvelle composition du conseil d'administration de la Cades ; ces dispositions permettront-elles à la Cour de lever sa réserve exprimée à l'occasion de la certification des comptes de l'Etat et liée à la sphère d'appartenance de la Cades ?
Réponse
a) Dans ce contexte, que pense la Cour du schéma de reprise des déficits présenté par le Gouvernement le 30 juin dernier ?
Dans le RALFSS 2010, la Cour ne prend pas parti sur le schéma de reprise des déficits. Elle observait simplement que la reprise de 130 Md€ par la CADES supposerait un apport important de ressources supplémentaires pour respecter l'échéance actuellement évaluée à 2021. Nous avions d'ailleurs déjà écrit que plus on attend pour transférer la dette à la CADES, plus le transfert est massif ainsi que le financement de l'amortissement induit.
b) En particulier, l'impact de la crise sur les comptes sociaux justifie-t-il :
- l'allongement de quatre ans de la durée de vie de la Cades au titre de la reprise de 34 milliards qui, selon le Gouvernement, représentent la « dette de crise » ;
Si les pouvoirs publics ne souhaitent pas lui apporter les recettes nécessaires à la reprise des déficits du régime général entre 2009 et 2011, représentant l'équivalent de 0,7 point de CRDS, un arbitrage entre l'allongement de la durée de vie de la Cades et l'instauration de nouvelles recettes semble inévitable. Dès lors, un allongement exceptionnel et limité à 4 ans pourrait être admis, mais à condition que le financement de tous les déficits résiduels et à venir soit garanti par des économies ou des recettes nouvelles permettant de ne pas laisser se reconstituer les déficits.
Les prévisions à 2014 annexées au PLFSS 2011 montrent en effet que toutes les branches du régime général restent déficitaires. Dès lors que les mesures propres à réduire le déficit de la branche maladie au delà de 2011 et celui de la branche famille au-delà de 2010 ne sont pas indiquées, il y a lieu de craindre la reconstitution des déficits portés par l'ACOSS.
- la mobilisation du fonds de réserve des retraites etc.
Le FRR ne devait être débloqué qu'à partir de 2020. C'était le seul et modeste effort d'épargne que les générations actives actuellement avaient consenti pour alléger le fardeau des générations futures. Le consommer avant 2018 suppose qu'on soit certain que les retraites auront retrouvé leur équilibre d'ici là. Or, les projections sont fondées sur un schéma de réforme (âges repoussés à 63 et 68 ans) non retenu et des hypothèses macro économiques (taux de chômage à 4,5 % à compter de 2024 et croissance moyenne annuelle de la productivité du travail de 1,5 %) qui ne seront pas forcément vérifiées.
c) La Cour estime-t-elle pénalisant pour la Cades que les ressources qui lui sont affectées soient de plus en plus diversifiées et non plus seulement constituées de la CRDS ?
L'instauration d'un prélèvement bien identifié, à assiette large, évoluant en fonction de la croissance économique, donc dynamique, constitue une force du dispositif d'amortissement de la dette sociale, qui suscite la confiance des investisseurs. L'affectation de diverses recettes nouvelles, aux rendements et à la dynamique variables, exige donc la mise en place de mécanismes rigoureux de garantie ex-post des ressources, comme votre commission en a décidé.
d) Le texte amendé du projet de loi organique sur la gestion de la dette sociales prévoit notamment l'établissement d'un tableau patrimonial de la sécurité sociale et une nouvelle composition du conseil d'administration de la Cades ; ces dispositions permettront-elles à la Cour de lever sa réserve exprimée à l'occasion de la certification des comptes de l'Etat et liée à la sphère d'appartenance de la Cades ?
L'objectif poursuivi est de rattacher la Cades à un ensemble comptable. La logique voulant qu'elle soit rattachée à l'univers de la sécurité sociale, il convenait de trouver les solutions pour qu'elle n'apparaisse plus comme contrôlée par l'Etat, la situation actuelle conduisant à l'inclusion de ses dettes au passif du bilan de l'Etat.
En l'état actuel du projet de loi organique, un tableau patrimonial sera introduit dans l'annexe A du PLFSS sur lequel la Cour devra formuler un avis qui sera intégré dans le RALFSS. Il s'agit d'une évolution positive que la Cour avait effectivement recommandée.
L'ensemble des passifs sociaux, dont ceux portés par la Cades y seront ainsi retracés.
Afin que la Cades ne soit plus considérée comme contrôlée par l'Etat, il est également apparu nécessaire de modifier la composition de son conseil d'administration. Sous réserve de leur bonne mise en oeuvre, ces évolutions devraient permettre à la Cour de lever sa réserve.
L'ONDAM
Question 3
Les propositions du groupe de travail sur le pilotage de l'Ondam présidé par Raoul Briet, que le Gouvernement s'engage à mettre en oeuvre comme il le précise dans les réponses qu'il fait à la Cour, vous paraissent-elles de nature à régler les difficultés régulièrement mises en avant par la Cour concernant la construction et le suivi de l'Ondam ?
Réponse
Les propositions du groupe présidé par Raoul Briet, dont certaines figurent dans le projet de LFSS, nous paraissent en effet de nature à renforcer le respect de l'Ondam. La prévision sera améliorée, grâce à l'examen prévu à l'automne par le Comité d'alerte. Son suivi en cours d'année sera rendu plus efficace grâce aux procédures instituées, destinées à prévenir les dépassements, qui en réduisaient la portée.
La Cour est d'ailleurs arrivée globalement aux mêmes conclusions que le groupe de travail. Elle rajoute cependant une condition : le constat de l'Ondam doit s'appuyer sur les données comptables, seule référence qui doit guider l'action. Or, ce n'est pas encore complètement le cas aujourd'hui.
LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA BRANCHE MALADIE
Question 4
Le PLFSS pour 2011 prévoit de mettre en oeuvre un plan d'économie de 2,5 milliards d'euros, ce qui maintiendra le déficit de la branche aux alentours de 11 milliards.
a) Pensez-vous que cet effort, constitué d'une série de mesures d'ampleur relativement limitée (dont certaines reprennent d'ailleurs des propositions de la Cour), est suffisant ?
Réponse
L'effort d'économies annoncé est en effet assez réduit, par rapport au déficit de la branche. En outre, une part des économies attendues, notamment celles liés aux prescriptions des médecins, qui représentent le quart du gain espéré, repose sur l'hypothèse d'une modification de comportements qui souvent se révèle plus lente que prévu.
Certes, des mesures nouvelles de baisses de prix sont annoncées pour les médicaments, mesures qui constituent le poste le plus important de ce plan d'économies (650 M€, sur un total de 2,5 Md€). Mais on constate que des mesures beaucoup plus volontaristes sont en cours en Allemagne qui prévoit des économies annuelles de 2 Md€, alors même que la situation de départ demanderait en France des mesures plus énergiques.
Ces mesures à court terme ne suffiront cependant pas, loin de là, à résorber le déficit de la branche maladie.
b) Quelles sont les mesures prioritaires qu'il conviendrait d'adopter pour permettre un retour réel à l'équilibre à moyen terme de la branche ?
Il faudra aussi et surtout contenir les deux postes de dépenses les plus importants de l'assurance maladie que sont les hôpitaux et les ALD
- dans les hôpitaux, la piste à privilégier est celle d'une forte restructuration et réorganisation de l'activité de nombre d'hôpitaux. .Les nombreux départs en retraite prévus dans les prochaines années devraient faciliter ces adaptations.
La fixation de seuils d'activité minimaux devrait en effet conduire à objectiver un constat incontournable, celui du nombre excessif de services, pour certains en-deçà de la taille critique et donc en réalité dangereux pour les patients (des sondages récents confirment d'ailleurs que les patients privilégient de plus en plus la sécurité des soins sur la proximité).
- pour les ALD la maîtrise de la progression des dépenses prises en charge à 100 %, qui représentent 65 % des dépenses de l'assurance maladie, est une priorité. Le concept a dérivé : les malades chroniques seraient trois fois plus nombreux, en proportion, en France qu'en Allemagne, ce qui est l'indice d'une approche extensive de la notion d'ALD.
Il est donc urgent de réexaminer les critères d'entrée en ALD, en distinguant le repérage et le suivi des personnes ayant une affection chronique, de la prise en charge à 100 % des dépenses afférentes. Il faut cependant se rappeler qu'au sein de ces 65 % de dépenses, la concentration est forte sur certaines catégories de malades. Les mesures inscrites dans le PLFSS sont certes modestes. Mais la Cour est bien consciente de la sensibilité du sujet qui doit être sérieusement documenté avant toute décision.
LES DÉFICIENCES DE LA TUTELLE
Question 5
La Cour est une nouvelle fois très critique sur le fonctionnement du système d'information de la branche maladie du régime général, notamment pour sa partie relative au secteur hospitalier : retards et insuffisances sur l'introduction de la tarification à l'activité, du forfait hospitalier, de la franchise de un euro, de la facturation des soins, du codage des ordonnances hospitalières exécutées en ville, etc. Elle mentionne, comme facteurs explicatifs, la brièveté des délais et les difficultés de la Cnam mais insiste aussi sur « l'insuffisance du pilotage par le ministère », « une administration centrale inadaptée », « les défaillances de l'Etat » et souligne qu'« en l'absence de moyens mieux appropriés, les perspectives de progrès au niveau de la maîtrise d'ouvrage stratégique demeurent faibles ».
a) Que faudrait-il faire pour que les directions concernées soient plus efficaces, les enjeux sous-jacents étant effectivement très importants ?
b) Que propose la Cour pour améliorer le fonctionnement de la direction générale de l'offre de soins et de la direction de la sécurité sociale ?
c) Le comité de pilotage qui devrait être institué sera-t-il suffisant pour résoudre les difficultés identifiées par la Cour en matière de tutelle ?
Réponse
- La première mesure à prendre est d'ordre structurel. Le ministère chargé de la santé annonce depuis trois ans une réforme de son administration centrale, destinée à améliorer sa gestion stratégique des systèmes d'information de santé. Une mission de préfiguration a été mise en place par la ministre, notamment suite aux précédents rapports de la Cour en ce domaine (relatifs par exemple au GIE SESAM VITALE, ainsi qu'aux deux anciens GIP DOSSIER MEDICAL PERSONNEL et CARTE PROFESSIONNELLE DE SANTE). Or depuis plusieurs mois, le projet de décret qui vise à créer une « délégation stratégique des systèmes d'information de santé » est en attente. La Cour ne peut que recommander que ce pilotage stratégique soit enfin mis en place.
- Le groupe de pilotage que vous évoquez, qui réunit les tutelles et les principaux opérateurs concernés, dans les domaines informatiques, a bien été constitué par le ministère, ainsi qu'un « groupe de travail des projets interdépendants ». Ces deux instances sont nécessaires, mais leur réussite dépend des ressources humaines mises en oeuvre pour en préparer et en suivre les travaux. Or, la direction générale de l'offre de soins et la direction de la sécurité sociale continuent à manquer de professionnels de ce domaine d'un niveau comparable à ceux du secteur privé. Les quelques postes proposés par ces directions sont à l'heure actuelle soit vacants, soit non inscrits à son budget. Un renfort est donc indispensable. Il s'agit de la maîtrise d'ouvrage stratégique d'un des plus considérables ensembles informatiques français.
- Enfin, plus largement, le ministère manque également d'une capacité appropriée d'audit, soit interne, soit externe, par le recours à des équipes d'audit du secteur privé.
L'HÔPITAL
Question 6
a) La Cour, à juste titre, critique le fait que les tarifs annuels des soins hospitaliers sont connus trop tardivement. Elle préconise donc qu'ils soient désormais appliqués dès le 1 er janvier. Cela suppose néanmoins une réorganisation de la manière dont ces tarifs sont déterminés. Que propose la Cour pour y parvenir ?
Réponse
La recommandation de la Cour part d'un constat simple : ce n'est pas parce que formellement l'Ondam n'est connu qu'à la publication de la LFSS, en fin décembre, que les travaux de détermination des tarifs hospitaliers ne peuvent commencer qu'en janvier (en réalité, ils ont d'ailleurs déjà débuté avant), reportant ainsi la date de leur mise en oeuvre.
De quelles informations a-t-on besoin, en effet, pour définir le nouveau tarif applicable aux dépenses hospitalières (T2A) ?
- du montant total de l'enveloppe hôpital (sous composante dite ODMCO). Ce montant est calculé lors de la préparation du PLFSS par le gouvernement, afin de proposer au vote du Parlement le montant du sous-objectif de l'Ondam dénommé " dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l'activité ". Certes, il n'est pas possible de publier le tarif avant la promulgation de la loi. Mais il est possible d'accélérer sa préparation, dans la mesure où les données relatives à l'activité récente sont disponibles;
- Ensuite, de l'avis du conseil de l'hospitalisation, qui doit formuler une recommandation sur le tarif. Mais pourquoi ne pas modifier la procédure, en prévoyant qu'il se prononce sur un tarif paramétré en fonction de l'ODMCO ?
- Il faudrait aussi connaître plus tôt la prévision de répartition des actes. Mais celle-ci peut-être connue avant, même si c'est peut-être avec un peu moins de précision.
La Cour n'a pas procédé à un inventaire exhaustif des effets induits. Il conviendrait bien sûr de modifier en cohérence les textes et d'adapter l'organisation ou les calendriers de travail, notamment au sein de l'Atih. La simplification de la gestion et la visibilité que ce nouveau calendrier donnerait aux gestionnaires paraissent amplement justifier ces efforts. Il n'est d'ailleurs pas obligatoire que le décalage de 2 mois soit fait en une fois. On peut l'étaler en deux étapes, sur 2 ans, ou plus.
b) D'une façon plus générale, la Cour indique qu'à l'hôpital, « pour atteindre une amélioration durable, il faudra accroître la productivité et adopter des mesures d'organisation ». Où en est-on aujourd'hui ? Les ARS ont-elles déjà commencé à renforcer leur suivi des établissements hospitaliers ? Que pensez-vous de la décision de reporter la fermeture, pourtant annoncée, d'un certain nombre de services chirurgicaux ?
J'ai déjà évoqué la nécessité de fixer des seuils minimaux d'activité, mesure qui permet de faciliter les restructurations hospitalières et d'en objectiver la nécessité. Tout report est donc regrettable.
Cet exemple montre bien que le suivi par les ARS demande des outils. Les ARS justement se mettent actuellement en place, leurs outils également, la Cour fera ultérieurement le bilan de leur mise en place. C'est encore trop tôt pour vous répondre sur ce point
Il en va de même pour les mesures d'organisation, qui restaient inégales selon les derniers constats de la Cour. Il conviendra d'actualiser ces constats. La Cour avait montré l'an dernier que l'action suppose la connaissance. Or, les outils sont insuffisamment développés. C'est le cas, par exemple, de la comptabilité analytique, qui demeure encore ignorée de beaucoup d'établissements.
c) La Cour a-t-elle estimé dans quelle proportion l'hôpital pourrait contribuer à réduire le déficit de l'assurance maladie ?
Les dépenses hospitalières représentent un peu moins de la moitié des dépenses de l'assurance maladie. En tendance, cette part diminue, en France comme dans les pays voisins. On peut donc considérer que l'effort de réduction des coûts est plus intense dans le secteur hospitalier que pour les soins de ville.
Le Haut Conseil de l'assurance maladie avait évoqué dans son rapport de 2009 sur l'hôpital des scénarios tendanciels. Plutôt qu'en montants absolus, il raisonnait en évolutions : les économies attendues devaient permettre une progression inférieure par rapport à celle du Pib, de 0,5 ou 1 %. Mais je ne suis pas sûr que ces réflexions aient été précisément inscrites dans le marbre...
LES NICHES SOCIALES
Question 6
a) La Cour fait des estimations sur l'incidence financière des niches sensiblement différentes de celles qui figurent dans l'annexe 5 du PLFSS. Par exemple, l'assiette des stock-options est évaluée à 3 milliards par la Cour et à 1,7 milliard dans le document du Gouvernement. Comment expliquer une telle différence ?
Réponse
Les estimations de la Cour s'écartent en effet parfois de celles présentées par l'administration dans l'annexe au PLFSS. C'est le cas, en particulier, lorsqu'ayant constaté des divergences avec d'autres données, nous avons pu procéder à une expertise plus poussée.
Pour cette insertion de suivi, c'est le cas notamment de l'assiette exonérée relative aux indemnités de licenciement. Celle-ci est estimée à un niveau plus faible dans l'annexe que ce qu'indiquent les données de la Dares. Or les enquêtes de la Dares, même si elles ne sont fondées que sur près de 500 réponses fiables, soit un niveau inférieur aux exigences de rigueur de la Dares elle-même, valent mieux que les chiffres du PLFSS, qui sont encore plus fragiles.
C'est avec une démarche analogue que l'enquête de la Cour avait estimé la perte d'assiette due aux stocks options, en 2007. Considérant que les valeurs déclaratives des sociétés étaient très inférieures à la réalité, le rapporteur de la Cour avait puisé son information directement dans les états financiers des principales sociétés du CAC 40.
Pour une enquête de suivi, moins lourde, nous n'avons pas réexaminé cette question des stock-options, nous ne sommes par retournés aux éléments des sociétés, d'autant que la crise était passée par là et qu'une taxation avait été mise en oeuvre depuis 2008. Nous avons donc sagement (ou trop modestement, qui sait ?) repris les données du PLFSS, ce que nous faisons dans le cas général.
b) Les possibilités d'économies chiffrées par la Cour ne sont-elles pas dès lors en partie surestimées ?
Il ne nous semble pas que notre estimation soit trop élevée, et il conviendrait de poser également la question, des taux à retenir, ce qui implique d'apprécier l'élasticité de la recette, par rapport à une augmentation des taux. Nous avons exposé, de manière très transparente, les différents taux possibles.
Ces sujets sont encore largement à débattre. Il nous apparaît évident, en revanche, que tout progrès dans le sens d'une programmation pluriannuelle des recettes et, dans ce cadre, des économies attendues sur les niches, fiscales et sociales, devra au préalable reposer sur une méthode explicite et contradictoire.