2. La TVA sociale « classique » : quelques dizaines de milliers d'emplois
La TVA sociale « classique » consiste à fiscaliser une certaine proportion des cotisations sociales patronales , quel que soit niveau de rémunération du salarié concerné (par exemple, 2 points de cotisation pour l'ensemble des salariés).
Comme les employeurs sont plus sensibles au coût des salariés au niveau du SMIC (peu qualifiés) que pour les niveaux de rémunérations plus élevés, de tels dispositifs créent, par construction, moins d'emplois que si les allégements étaient concentrés sur les bas salaires ( cf . 3 ci-après).
Remarques importantes sur les simulations présentées dans le présent rapport Sauf indication contraire, tous les résultats de simulations présentés dans le présent rapport ont été harmonisés 142 ( * ) pour correspondre à une augmentation de 1,5 point du taux normal de TVA (hypothèse retenue par les simulations de la direction générale du Trésor de 2007), soit environ 2 points de cotisations patronales, 10 milliards d'euros ou 0,5 point de PIB. Le nombre d'emplois indiqué est, sauf mention contraire, le nombre d'emplois à court ou moyen terme. |
a) A court terme, un nombre d'emplois créés d'autant plus élevé que les entreprises répercutent la baisse des cotisations sur les prix
Si l'on synthétise les principales simulations disponibles, il en ressort que le nombre d'emplois créés à court terme (environ deux ans) est d'autant plus important que les entreprises répercutent la baisse des cotisations patronales dans leurs prix :
- si elles la répercutent totalement, le nombre d'emplois créés peut être (pour une augmentation du taux normal de TVA de 1,5 point) de l'ordre de 50 000 ;
- si elles ne le répercutent pas (suscitant une augmentation de l'inflation la première année pouvant aller jusqu'à près de 1 point), le nombre d'emplois créés peut être nul .
En moyenne, le nombre d'emplois créés serait de 25 000 .
Cela apparaît nettement à la lecture du graphique ci-après .
Les principales simulations sur la TVA sociale : impact
à
court terme
(augmentation de 1,5 point du taux normal de
TVA)
DGTPE 2006 |
Simulations réalisées pour le groupe de travail sur l'élargissement de l'assiette des cotisations employeurs de sécurité sociale (modèle économétrique Mésange) |
DGTPE Besson 1* |
DGTPE, modèle économétrique Mésange |
DGTPE Besson 2* |
DGTPE, modèle dynamique d'équilibre général |
OFCE A* |
Scénario central |
OFCE B* |
Baisse des marges des importateurs |
OFCE C* |
Moindre élasticité des exportations |
OFCE D* |
Augmentation des marges |
OFCE E* |
Baisse des CS salariés et employeurs |
OFCE F* |
idem+hausse marge des entreprises |
Ecole centrale 1* |
indexation unitaire des salaires sur les prix à la consommation et répercussion intégrale de la baisse du coût dans les prix |
Ecole centrale 2* |
indexation unitaire des salaires et report de 75 % de la baisse du coût dans les prix |
Ecole centrale 3* |
indexation unitaire des salaires et report de 50 % de la baisse du coût dans les prix |
Ecole centrale 4* |
indexation à 0,8 des salaires et report intégral de la baisse du coût dans les prix |
DGTPE 2010 |
DGTPE, modèle économétrique Mésange (Trésor-Eco 2010/02, mars 2010) |
Le nombre d'emplois créés à court terme est celui de la 2 e année, sauf pour l'Ecole centrale (nombre d'années non spécifié).
Un astérisque (*) indique que l'étude se trouve dans le « rapport Besson » de 2007.
Sources : rapport Besson (2007) ; rapport du groupe de travail sur l'élargissement de l'assiette des cotisations employeurs de sécurité sociale (2006) ; présentation du modèle Mésange par la DGTPE (Trésor-Eco 2010/02, mars 2010)
Les partisans de la TVA sociale mettent généralement en avant son impact sur la compétitivité . En effet, remplacer une partie des cotisations patronales par de la TVA a pour effet de réduire le coût des exportations (en raison de la baisse des cotisations patronales), tout en augmentant celui des importations (qui se voient assujetties à un taux plus élevé de TVA).
Toutefois en pratique cette amélioration transitoire de la compétitivité n'a pas d'impact massif sur le PIB et l'emploi, compte tenu notamment du montant relativement faible des exportations dans le PIB (de l'ordre de 25 %).
Une manière plus simple et plus opérationnelle pour évaluer l'impact de la TVA sociale , souvent utilisée par les économistes, consiste à évaluer le différentiel entre deux phénomènes jouant en sens inverse, et dont l'impact est relativement bien connu :
- d'un côté, la baisse des cotisations patronales crée des emplois, parce que la diminution du coût du travail incite les entreprises à embaucher, soit immédiatement (en leur permettant d'accroître leur capacité de production pour un coût salarial donné, ou en les incitant à moins substituer du capital au travail), soit une fois que l'amélioration de leur compétitivité-prix a accru leur activité. Schématiquement, les économistes considèrent que si le coût du travail baisse de 1 % pour tous les salaires, le nombre d'emplois augmente d'environ 0,5 % à court-moyen terme ;
- de l'autre côté, l'augmentation de la TVA détruit des emplois, en raison de son effet dépressif sur l'activité. Selon les estimations usuelles, une augmentation de la TVA d'un montant donné réduit le PIB d'un montant quasiment égal à moyen terme (multiplicateur budgétaire de l'ordre de 1). Cet impact peut toutefois être réduit de moitié (multiplicateur budgétaire de l'ordre de 0,5) si on suppose que les entreprises utilisent la baisse des cotisations patronales pour réduire leurs prix hors taxes, la consommation des ménages étant alors moins impactée.
Il est donc possible d'évaluer simplement l'ordre de grandeur de l'impact à court terme de la TVA sociale « classique ». La masse salariale représentant environ la moitié du PIB, une diminution du coût du travail de 0,5 point de PIB correspond à une réduction d'environ 1 % du coût du travail, qui augmente le nombre d'emplois salariés de 0,5 %. En sens inverse, un alourdissement de la TVA de 0,5 point de PIB réduit le PIB d'un montant variable selon le scénario d'inflation retenu, entre 0,5 point en cas de scénario inflationniste et 0,25 point en cas de répercussion des baisses de cotisations dans les prix. L'impact net sur le PIB, et donc sur l'emploi, est donc compris entre 0 % et 0,25 %, ce qui, le nombre d'emplois salariés étant de l'ordre de 20 millions de personnes, correspond, selon ce calcul simple, à un nombre de créations d'emplois compris entre 0 et 50 000.
b) Un nombre d'emplois créés qui se maintiendrait à moyen terme
A moyen terme (cinq ans environ), selon les simulations disponibles le nombre d'emplois créés est de l'ordre de 40 000 , comme le montre le graphique ci-après.
Les principales simulations sur la TVA sociale : impact
à
moyen terme
(augmentation de 1,5 point du taux normal de
TVA)
OFCE A* |
Scénario central |
OFCE B* |
Baisse des marges des importateurs |
OFCE C* |
Moindre élasticité des exportations |
OFCE D* |
Augmentation des marges |
OFCE E* |
Baisse des CS salariés et employeurs |
OFCE F* |
Idem+hausse marge des entreprises |
Ecole centrale 1* |
Indexation unitaire des salaires sur les prix à la consommation et répercussion intégrale de la baisse du coût dans les prix |
Ecole centrale 2* |
Indexation unitaire des salaires et report de 75 % de la baisse du coût dans les prix |
Ecole centrale 3* |
Indexation unitaire des salaires et report de 50 % de la baisse du coût dans les prix |
Ecole centrale 4* |
Indexation à 0,8 des salaires et report intégral de la baisse du coût dans les prix |
DGTPE 2010 |
DGTPE, modèle économétrique Mésange (Trésor-Eco 2010/02, mars 2010) |
Le nombre d'emplois créés à moyen terme est celui de la 5 e année, sauf pour l'Ecole centrale (nombre d'années non spécifié).
Un astérisque (*) indique que l'étude se trouve dans le « rapport Besson » de 2007.
NB. Une modélisation à moyen-long terme de la DGTPE présentée dans le « rapport Besson » évalue le nombre d'emplois créés à 35 000 (sans préciser l'impact sur l'inflation).
Sources : rapport Besson (2007) ; rapport du groupe de travail sur l'élargissement de l'assiette des cotisations employeurs de sécurité sociale (2006) ; présentation du modèle Mésange par la DGTPE (Trésor-Eco 2010/02, mars 2010)
Contrairement à ce qui est le cas pour les simulations à court terme, on n'observe pas de corrélation entre le supplément d'inflation la première année et le nombre d'emplois créés à moyen terme.
Cependant, dans le cas particulier des simulations de l'école centrale , le nombre d'emplois créés dépend fortement du comportement de prix des entreprises. En effet, selon ces simulations, si les entreprises répercutent intégralement la baisse des cotisations patronales dans les prix, le nombre d'emplois créés peut être de 80 000, mais si elles n'en répercutent que 50 %, la TVA sociale détruit 10 000 emplois .
c) Un impact sur l'emploi modeste par rapport à celui des fluctuations du taux de change de l'euro
A titre de comparaison, selon le Gouvernement, une appréciation de 10 % du taux de change de l'euro face aux autres devises détruit 149 000 emplois au bout de 3 ans 143 ( * ) .
L'impact sur l'emploi de la TVA sociale « classique » est donc modeste, et « noyé » dans les fluctuations habituelles de l'activité économique.
* 142 De manière conventionnelle, on suppose que l'impact de la mesure est linéaire, c'est-à-dire proportionnel aux sommes en jeu.
* 143 Source : programme de stabilité 2011-2014.