III. LES RETRAITES À L'AUBE DE LA CONCERTATION DE 2013

Les modalités de retour à l'équilibre des régimes de retraite définies lors de la réforme de 2010 sont loin d'avoir écarté les incertitudes pesant sur l'avenir de l'assurance vieillesse. Les mesures d'âge ne semblent pas permettre de résorber pleinement les déficits alors que l'objectif annoncé était celui du retour à l'équilibre en 2018.

La prise en compte de la pénibilité, qui constituait l'un des volets de la réforme de 2010, ne donne pas davantage satisfaction au regard des mesures d'application qui ont été décidées.

Enfin, la situation des retraités demeure particulièrement contrastée en ce qui concerne le niveau de vie, ce qui pose la question de la redistribution et du rôle de la solidarité dans notre système de retraites.

L'ensemble de ces éléments sont intégrés aux réflexions menées à l'aube de la concertation de 2013. Dans le prolongement de la grande conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012, le Gouvernement a défini un calendrier en trois étapes qui devrait déboucher sur une réforme globale du système de retraites en 2013 :

- entre septembre 2012 et janvier 2013, le Conseil d'orientation des retraites (COR) établira de nouvelles projections financières et réalisera un état des lieux des retraites au regard de la pérennité financière, de l'équité et de la lisibilité du système de retraite, du niveau des pensions, du rôle qui doit revenir aux mécanismes de solidarité, de la transition entre l'emploi et la retraite, de l'information des assurés et de la situation des polypensionnés ;

- à partir des travaux du COR et en tenant compte des consultations qui auront été menées auprès de l'ensemble des acteurs concernés, une commission ad hoc formulera différentes propositions de réforme ;

- les conclusions de cette commission ouvriront la voie à une phase de concertation entre le Gouvernement et les partenaires sociaux au printemps prochain dans la perspective de l'adoption d'une réforme dans les mois suivants.

A. LES MESURES D'ÂGE DE LA RÉFORME DE 2010

Au 1 er juillet 2012, la France hexagonale comptait environ 13 millions de retraités au régime général pour 18 millions de cotisants, soit un rapport démographique de 1,40 cotisant pour un retraité. Ce ratio a fortement baissé au cours des dernières décennies, l'effectif de retraités progressant plus rapidement que le nombre de cotisants. Cette évolution s'explique bien entendu par arrivée à l'âge de la retraite des générations nombreuses du baby-boom et par l'allongement de l'espérance de vie qui ont pour conséquence d'augmenter la durée de versement des pensions.

Au régime général, le ratio démographique est ainsi passé de 4,14   en 1960 à 2,68 en 1980 puis 1,88 en 1990 et 1,41 en 2010. L'accélération du report de l'âge légal intervenue en 2012 ne permet pas d'enrayer ce déclin.

1. L'accélération du report de l'âge légal intervenue en 2012

Conformément à la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, qui prévoit le recul progressif de deux ans des bornes d'âges de soixante et soixante-cinq ans, le relèvement de quatre mois de l'âge légal de départ à la retraite est entré en vigueur le 1 er juillet 2011 pour la génération née en 1951.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 a prévu une accélération du rythme de recul de l'âge légal de départ en retraite pour atteindre soixante-deux ans dès la génération 1955 (et non plus 1956).

Le 25 septembre 2012, le COR a recommandé de maintenir inchangée pour la génération née en 1956 la durée d'assurance pour une retraite à taux plein par rapport à la génération née en 1955, soit 166 trimestres (41,5 ans).

Les bornes d'âge et la durée d'assurance requise évolueront selon l'échéancier retracé dans le tableau ci-après.

Évolution des bornes d'âge et de la durée d'assurance requise
pour une pension à taux plein

Date de naissance

Age légal de départ en retraite

Durée d'assurance pour le taux plein

Age minimal
pour le taux plein

Avant 1949

60 ans

160 trimestres

65 ans

1949

161 trimestres

1950

162 trimestres

Entre le 1 er janvier et le 30 juin 1951

163 trimestres

Entre le 1 er juillet et le 31 décembre 1951

60 ans et 4 mois

163 trimestres

65 ans et 4 mois

1952

60 ans et 9 mois

164 trimestres

65 ans et 9 mois

1953

61 ans et 2 mois

165 trimestres

66 ans et 2 mois

1954

61 ans et 7 mois

66 ans et 7 mois

1955

62 ans

166

67 ans

1956

1957

Déterminée l'année du 56 e anniversaire

En conséquence, sur la période 2012-2017, l'évolution annuelle du nombre de retraités serait en moyenne de 1,7 % selon la Cnav, un niveau de croissance plus faible que le niveau moyen constaté avant l'entrée en vigueur de la réforme de 2010 (+ 3,2 % au cours de la période 2007-2011). L'évolution du nombre de départs en retraite suivra cependant un profil assez heurté, avec un point bas en 2012 et un rebond important en 2013 .

Le ralentissement des effectifs de retraités observé au régime général en 2011 se confirme en 2012 (+ 1,4 % contre + 2,9 % l'an dernier). Le nombre de départs en retraite s'est ainsi élevé à 609 000 en 2011 contre 722 000 en 2010 (- 16 %). La baisse devrait se poursuivre en 2012 quoique à un rythme légèrement inférieur (578 000 départs, soit une contraction de 5 % par rapport à 2011).

En revanche, le nombre de départs en retraite devrait atteindre son point haut en 2013 sous l'effet conjoint de l'accélération de la montée en charge de la réforme des retraites et de l'élargissement de la retraite anticipée (718 000 départs, soit une progression de 24 % par rapport à 2011). L'accélération de la réforme de 2010 entraîne le report en 2012 de près de 200 000 départs en retraite, ce qui explique la hausse massive de départs en 2013. L'entrée en vigueur le 1 er novembre 2012 du décret du 2 juillet 2012 se traduit par le départ en retraite de 17 800 personnes aux mois de novembre et décembre 2012.

Tous régimes confondus, les économies résultant des mesures d'âge de la loi du 9 novembre 2010 seraient de 20,2 milliards d'euros en 2020 (en euros 2008), dont 9 milliards d'euros pour le régime général. Ce dernier a vu les masses de pensions se réduire d'un peu plus de 250 millions d'euros en 2011 puis de 1,5 milliard d'euros en 2012. Les économies sur les masses de prestations versées seraient de 6,2 milliards d'euros en 2017.

Pour l'ensemble des régimes de retraite (y compris complémentaires), le surcroît d'économies lié à la seule accélération du recul des bornes d'âge définie en loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 serait de 100 millions d'euros en 2012, 500 millions d'euros en 2013, 1,3 milliard d'euros en 2014, 1,2 milliard d'euros en 2015, 1,3 milliard d'euros en 2016 et 2,6 milliards d'euros en 2016. Le gain financier devient nul en 2018 car l'âge légal aurait atteint soixante-deux ans en tout état de cause.

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