II. LA RÉNOVATION DU CAS, UN BESOIN IDENTIFIÉ POUR RÉPONDRE À DES DÉFIS RENOUVELÉS
A. UN OUTIL AU SERVICE D'UNE MEILLEURE APPRÉHENSION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE
1. Si le CAS a favorisé l'émergence d'une politique immobilière de l'État...
La création du CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » par la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 participait de la définition nouvelle d'une politique immobilière de l'État .
Ce mouvement s'inscrivait notamment dans la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances 79 ( * ) et de ses traductions comptables, en améliorant la connaissance du patrimoine de l'État . Retracé chaque année depuis 2006 dans le compte général de l'État, le patrimoine constitué des constructions dont l'État est propriétaire a progressé , sous l'effet conjugué d'un meilleur recensement et d'une évaluation affinée.
Évaluation des constructions
comptabilisées
au bilan de l'État depuis 2006 (en base
100)
(en milliards d'euros)
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
47,5 |
54,7 |
58,9 |
56,5 |
56,7 |
60,3 |
60,7 |
60,8 |
61,4 |
63,7 |
Source : commission des finances, à partir des comptes généraux de l'État successifs
Au 31 décembre 2015, l' évaluation du patrimoine immobilier de l'État est de 66 milliards d'euros au 31 décembre 2015 , les principaux ministères occupants étant le ministère de la défense (25 % de la valeur brute), le ministère de la justice (22,3 %) et le ministère de l'intérieur (18,2 %) 80 ( * ) .
Au total, l'État est propriétaire de 75,4 millions de mètres carrés , soit 53,6 millions de mètres carrés occupés et 21,8 millions de mètres carrés mis à disposition d'autres personnes à titre onéreux ou gratuit. Par ailleurs, l'État est locataire de 11,8 millions de mètres carrés.
Évolution du parc immobilier de l'État de 2013 à 2015
(Surface utile brute -SUB- exprimée en mètres carrés)
31/12/2013 |
31/12/2014 |
31/12/2015 |
||||||
Périmètre |
Usage |
SUB |
SUB |
SUB |
||||
L'État possède
|
Bureaux |
12 750 121 |
13 226 054 |
13 198 183 |
||||
Autres locaux |
42 130 162 |
41 813 967 |
40 427 361 |
|||||
Sous-total |
54 880 283 |
55 040 021 |
53 625 544 |
|||||
L'État possède
|
Bureaux |
1 340 030 |
1 235 436 |
1 182 290 |
||||
Autres locaux |
21 089 252 |
20 915 013 |
20 579 548 |
|||||
Sous-total |
22 429 282 |
22 150 449 |
21 761 838 |
|||||
L'État ne possède pas
|
Bureaux |
5 456 787 |
5 458 633 |
5 438 414 |
||||
Autres locaux |
6 905 218 |
6 539 032 |
6 389 687 |
|||||
Sous-total |
12 362 006 |
11 997 665 |
11 828 101 |
|||||
TOTAL |
89 671 570 |
89 188 135 |
87 215 483 |
Source : questionnaire budgétaire
En outre, le CAS a permis de dynamiser la gestion du patrimoine immobilier de l'État en organisant un retour financier pour les ministères. Depuis la définition d'une politique immobilière, plusieurs opérations structurantes ont été menées, notamment à Paris, conduisant à redéployer l'implantation de certains ministères 81 ( * ) . Près de 6,47 milliards d'euros de produits de cessions ont été dégagés depuis sa création, pour une contribution cumulée au désendettement de l'État jusqu'en 2016 de plus de 733 millions d'euros .
Évolution du parc immobilier de l'État de 2010 à 2015, tous usages confondus
(en mètres carrés)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des données du questionnaire budgétaire
2. ... il est arrivé au bout de sa logique initiale
Pendant de la politique de cessions dans une perspective de responsabilité et de crédibilité , la contribution obligatoire au désendettement de l'État symbolise l'essoufflement progressif de la première logique du CAS . Tant les différents dispositifs dérogatoires prévus 82 ( * ) , conduisant à un taux effectif de contribution de 13 % environ, loin du taux nominal fixé à 30 % depuis l'exercice 2014 83 ( * ) , que la soutenabilité d'une contribution principalement assise sur quelques ventes exceptionnelles, ont conduit vos rapporteurs spéciaux à s'interroger sur l'opportunité de son maintien. En particulier, ils soulignaient la tentation de court terme qui pouvait naître de ce cadre , en cédant des biens de prestige facilement vendables afin de respecter le montant prévu de contribution au désendettement de l'État. Or un tel écueil contrevient à la logique bilancielle ayant présidé à l'introduction de cette disposition.
De plus, le contexte de stagnation des dépenses immobilières interministérielles et de diminution tendancielle du produit des cessions explique la suppression du caractère obligatoire de cette contribution in fine symbolique.
Comparaison des produits de cessions et de la contribution
au désendettement de l'État
(en millions d'euros)
Source : Cour des comptes et projets annuels de
performances et rapports annuels de performances successifs
Les
réalisations portent sur les montants effectivement encaissés
à la fin de l'exercice
Toutefois, cet exemple traduit un besoin plus profond de réactualisation de la logique initiale de la politique immobilière de l'État, assise sur le produit des cessions d'actifs pour financer la modernisation du parc immobilier. En effet, cette source de revenus ne peut que se tarir , dès lors que les cessions les plus faciles et valorisables ont pour l'essentiel déjà été réalisées. De fait, les produits de cessions sont de plus en plus dépendants de quelques ventes exceptionnelles : entre 2013 et 2015, si le nombre de ventes a diminué de 21 %, le montant réalisé augmentait de 47,6 %.
De surcroît, les efforts de recensement du parc comme les critères d'optimisation , principalement centrés sur l'immobilier de l'État non spécifique, à savoir les bureaux, n'ont concerné qu'à la marge l'immobilier spécifique , à l'instar des logements, et le patrimoine immobilier des opérateurs. Dix ans après sa mise en oeuvre initiale, la définition d'une politique immobilière publique renouvelée est nécessaire .
* 79 Loi organique n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances.
* 80 Source : questionnaire budgétaire.
* 81 Par exemple, l'opération Balard pour le ministère de la défense, entraînant le regroupement sur un seul site des quatre états-majors, de la direction générale de l'armement et des services centraux du ministère.
* 82 Selon le cadre en vigueur pour l'exercice 2016, la contribution au désendettement ne s'applique pas aux immeubles domaniaux occupés par le ministère de la défense, jusqu'au 31 décembre 2019, aux immeubles domaniaux situés à l'étranger et occupés par le ministère des affaires étrangères, jusqu'au 31 décembre 2017, sous réserve d'une contribution minimale forfaitaire de 25 millions d'euros par an (sous réserve d'une contribution exceptionnelle supplémentaire de 75 millions d'euros en 2016), aux biens des établissements d'enseignement supérieur ayant demandé à bénéficier de la dévolution de leur patrimoine, aux biens situés dans le périmètre de l'opération d'intérêt national (OIN) d'aménagement du plateau de Saclay, ainsi qu'aux immeubles occupés par la direction générale de l'aviation civile (DGAC), lesquels sont affectés au désendettement du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
* 83 Ce taux était fixé à 20 % pour l'année 2012, 25 % pour l'année 2013, et 30 % à partir de l'année 2014.