B. DES CRÉDITS EN DIMINUTION DE 7 % À PÉRIMÈTRE CONSTANT...
Si vos rapporteurs spéciaux saluent l'intégration du programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État », au sein du CAS, qu'ils appelaient de leurs voeux (cf. infra ), ils relèvent que cette modification s'accompagne d'une réduction des crédits immobiliers interministériels . Ainsi, à périmètre constant 76 ( * ) , les crédits demandés pour financer les dépenses immobilières de l'État propriétaire sont en diminution de 6,2 % en autorisations d'engagement et de 7 % en crédits de paiement par rapport aux crédits ouverts en 2016 , comme l'illustre le graphique ci-dessous. Ce mouvement s'ajoute de plus à la baisse de 10 % des crédits demandés pour 2016 sur le programme 309.
Comparaison à périmètre constant des crédits immobiliers interministériels (CP)
- 7 %
525 000 000
563 655 844
573 354 077
Source : commission des finances du Sénat
Cette diminution des crédits immobiliers interministériels ne correspond pas aux engagements du secrétaire d'État chargé du budget et des comptes publics lors du discours d'ouverture de la première conférence nationale de l'immobilier public 77 ( * ) : « la réforme est porteuse d'économies, donc, et d'un pilotage de la dépense plus exigeant. Mais je le dis tout aussi clairement : la refonte des vecteurs budgétaires interministériels, et notamment la suppression du programme 309, ne vise pas à réduire la volumétrie globale des crédits correspondants - chacun mesure, dans le contexte budgétaire actuel, l'effort que représente cette préservation des moyens mutualisés de la politique immobilière ».
De surcroît, elle réduit la portée de la mise en oeuvre d'instances de pilotage renforcées depuis le début de l'année 2016 , dans le cadre d'une évolution de la politique immobilière de l'État.
C. ... CONTRASTANT AVEC LA VOLONTÉ DE METTRE EN oeUVRE UNE NOUVELLE ÉTAPE DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L'ÉTAT
1. L'annonce d'une politique immobilière de l'État renouvelée...
Une communication en Conseil des ministres le 20 janvier 2016 a ouvert la voie à une évolution de la politique immobilière de l'État , dont le compte rendu précise les contours : « le Gouvernement entend donner un nouveau souffle à sa politique immobilière : si des progrès incontestables ont été enregistrés au cours des dix dernières années, il est nécessaire d'ouvrir une seconde étape, pour contribuer à la maîtrise de la dépense publique tout en améliorant le fonctionnement des administrations dans un contexte de réorganisation des services déconcentrés, en intégrant davantage les objectifs de performance énergétique et d'accessibilité du parc, et en libérant du foncier mobilisable pour la construction de logements, notamment sociaux. Les exigences de la politique immobilière doivent être respectées par tous, administrations de l'État comme opérateurs : ce sont la performance immobilière et économique et la concordance avec les besoins qui doivent guider les choix d'implantation. »
Trois axes structurent ce renouvellement :
- la rénovation de la gouvernance et du pilotage ;
- l'approfondissement des outils , au travers de la généralisation des schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) ;
- la réforme du financement , intégrant notamment une nouvelle maquette budgétaire .
2. ... s'est d'abord traduite par une gouvernance rénovée
a) La direction de l'immobilier de l'État
Vos rapporteurs spéciaux faisaient le constat récurrent de la faiblesse du service France Domaine , ainsi que de sa difficulté à incarner l'État propriétaire et à diffuser la logique interministérielle et régionalisée de la politique immobilière de l'État. Dressant le même état des lieux, la Cour des comptes proposait ainsi, dans son référé du 30 décembre 2014 sur la politique immobilière de l'État, le rattachement direct de France Domaine au ministre chargé du budget, et non plus à la direction générale des finances publiques (DGFiP).
Dans le sillage de ces réflexions, il a été décidé de renforcer la fonction de l'État propriétaire, en créant en septembre 2016 une direction de l'immobilier de l'État (DIE), au sein de la direction générale des finances publiques . Cette nouvelle direction rejoint les autres directions de fonction support nouvellement instituées , à l'instar de la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État ( DINSIC ) depuis juin 2015, et de la direction des achats de l'État , depuis mars 2016. Au plan déconcentré , la création de la DIE se décline avec un renforcement des équipes des responsables régionaux de la politique immobilière de l'État (RRPIE) et une réorganisation en cours des services locaux.
Selon les informations communiquées par la DIE à vos rapporteurs spéciaux, cette modification administrative s'est accompagnée d'un renforcement des compétences , en particulier s'agissant de l'analyse économique et technique en matière immobilière. De plus, un programme de formation a été lancé ; vos rapporteurs spéciaux seront attentifs aux apports que ces évolutions entraîneront , en particulier dans l'accompagnement concret des projets immobiliers.
En tant que direction de l'immobilier de l'État, elle ne revêt pas les compétences d'une réelle direction immobilière de l'État : la DIE opère en articulation avec d'autres acteurs immobiliers, traduisant l'éclatement persistant de la politique immobilière et un pilotage interministériel très limité. De ce point de vue, si l'unification des vecteurs budgétaires au sein du CAS constitue une simplification bienvenue des moyens à disposition de la DIE, elle ne modifie pas la prépondérance des gestionnaires ministériels dans l'utilisation des crédits immobiliers . De fait, seulement 10 % des dépenses immobilières relèvent de la DIE.
Intervenant en complémentarité de l'action des directions immobilières de chaque ministère, la DIE assure le pilotage, ainsi que la gestion administrative du parc immobilier . De fait, parmi les quatre grandes fonctions immobilières, la DIE intervient seulement sur les deux premiers champs : le pilotage stratégique du parc et la gestion administrative et juridique des bâtiments, par le biais des services locaux du domaine. Les autres métiers relèvent :
- pour la gestion technique et budgétaire des bâtiments, des directions immobilières des ministères pour les administrations centrales, du secrétaire général aux affaires régionales pour les services en région, ainsi que des directions immobilières des opérateurs ;
- pour la gestion des services généraux et la conduite des projets immobiliers, de l'occupant.
Le positionnement de la direction de l'immobilier de l'État
parmi les différents métiers de l'immobilier
DIE
Source : commission des finances du Sénat
b) Les instances de gouvernance
La kyrielle d'acteurs rend d'autant plus nécessaire la mise en place d'une gouvernance adaptée. La DIE est désormais investie du pilotage de la gouvernance de la politique immobilière de l'État . À cette fin, une circulaire du Premier ministre du 27 avril 2016 crée une instance unique , la conférence nationale de l'immobilier public (CNIP) , en remplacement des cinq instances préexistantes 78 ( * ) , que l'État propriétaire ne présidait pas. Instance de concertation interministérielle, la CNIP se décline en deux formats, stratégique et opérationnel , pour formuler des avis sur les schémas stratégiques immobiliers et sur les projets immobiliers des services de l'État et des opérateurs. La DIE préside la CNIP dans son format opérationnel.
Parallèlement, en vue de compenser la dispersion des crédits immobiliers, depuis 2014, les ministères doivent présenter par briques immobilières l'ensemble des ressources liées à l'immobilier , imputés sur les différents programmes supports, interministériels et ministériels. Dans ce cadre, des conférences immobilières ont été mises en place depuis le début de l'année 2016, en vue de favoriser une appréhension globale de la dépense immobilière et de mieux la piloter. Selon les informations transmises à vos rapporteurs spéciaux, il s'agit à terme de planifier en amont les besoins de financement des opérations immobilières structurantes et de procéder à une analyse économique de leur impact.
Il en est prévu une déclinaison au niveau régional afin que le préfet de région dispose d'une vision d'ensemble des crédits concourant à l'immobilier régional, quel que soit le vecteur budgétaire. Vos rapporteurs spéciaux seront attentifs aux apports effectifs de cette gouvernance renouvelée.
* 76 La comparaison porte, pour les exercices 2015 et 2016, sur les crédits du programme 309 de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » du budget général et de l'ancien programme 723 « Contribution aux dépenses immobilières » du CAS, et pour l'exercice 2017, sur les crédits demandés pour le programme 723 « Opérations immobilières nationales et des administrations centrales » et le programme 724 « Opérations immobilières déconcentrées » avant la refonte proposée par le présent projet de loi de finances.
* 77 Conférence nationale de l'immobilier public, le 6 juin 2016.
* 78 Il s'agit du comité d'organisation de la politique immobilière de l'État (COMO), des comités de la politique immobilière ministériels (CPI), de l'instance nationale d'examen des projets immobiliers (INEI), de la cellule nationale de suivi de l'immobilier de l'État (CNSIE) et de l'instance nationale de suivi des schémas directeurs immobiliers en région (INESDIR).