N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 29a

SÉCURITÉS

(Programmes 152 « Gendarmerie nationale », 176 « Police nationale », et Programme 207 « Sécurité et éducation routières »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS

Rapporteur spécial : M. Philippe DOMINATI

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean Bizet, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Pour les crédits des programmes « Gendarmerie nationale »
et « Police nationale »

1. Pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », à périmètre courant, les crédits de paiement (CP) demandés pour 2021 sont en hausse de 1,07 %, par rapport à 2020 tandis que les demandes d'autorisations d'engagement (AE) sont en baisse de 0,29 %, l'année 2020 ayant été marquée par le niveau particulièrement élevé des AE liées à la passation de marchés immobiliers.

2. Le présent projet de loi de finances poursuit la trajectoire de hausse des dépenses de personnel constatée sur les précédents budgets, de 1,8 % pour la police nationale et de 0,5 % pour la gendarmerie nationale . Cette hausse s'explique principalement par le niveau important des recrutements et l'ampleur des mesures indemnitaires.

3. Les forces de sécurité intérieure bénéficieront de près de 1 500 créations de postes (317 ETP pour la gendarmerie nationale et 1 145 ETP pour la police nationale), conformément au projet d'augmenter leurs effectifs de 10 000 ETP sur le quinquennat.

4. Les mesures catégorielles prévues pour 2021 sont supérieures de 23,14 millions d'euros hors CAS « Pensions » pour le programme 176 « Police nationale » à ce qui est prévu par le triennal , confirmant l'absence de maîtrise des dépenses de personnel de la police nationale observée depuis plusieurs années. Ce dépassement s'explique par les protocoles de revalorisation du 11 avril 2016, dont la mise en oeuvre se poursuit, et des mesures nouvelles, comme la création d'une indemnité forfaitaire de nuit (15 millions d'euros). Le gouvernement évoque en outre des propositions coûteuses, comme la gratuité dans les transports pour les policiers (environ 60 millions d'euros par an), susceptibles de diminuer les marges de manoeuvre disponibles en matière de dépenses d'investissement et de fonctionnement.

5. En ne prenant en compte que les dépenses inscrites dans la mission « Sécurités », les dépenses de fonctionnement et d'investissement de la police et de la gendarmerie nationales sont en baisse de 8,8 % en AE et de 0,3 % en CP. La part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes devrait poursuivre en 2021 la hausse entamée en 2018 et dépasser les 90 % pour la police nationale et les 85 % pour la gendarmerie nationale.

6. En prenant en compte le plan de relance, ces déséquilibres apparaissent toutefois fortement limités . En retenant une hypothèse faible, le rapporteur spécial estime ainsi que l'évolution des dépenses de fonctionnement et d'investissement de la gendarmerie nationale dépasserait très largement les 20 %.

Cette évolution devrait permettre d'importantes avancées en matière d'équipements (armes, caméras-piétons, gilets tactiques) . Le plan de relance souffre toutefois d'une grande opacité , empêchant le Parlement de disposer d'une vision pleinement consolidée de l'ensemble des crédits destinés aux deux responsables de programme en 2021 .

7. Pour 2021, le programme 176 « Police nationale » comporte 133 millions d'euros pour le renouvellement du parc automobile de la police , auxquels s'ajoutent les 37 millions d'euros (en AE) ouverts en cours de gestion par la troisième loi de finances rectificative pour 2020. De même, plus de 4 500 véhicules pourront être commandés sur les crédits du programme 152 « Gendarmerie nationale » et sur les crédits du plan de relance en 2021. Au total, le rapporteur spécial approuve l'objectif du gouvernement de remplacer un véhicule opérationnel sur quatre pour les deux forces d'ici à fin 2022.

8. Le plan de relance comporte également un effort inédit en matière d'immobilier, puisque les crédits dont pourront bénéficier les deux forces en la matière pourrait dépasser 1 milliard d'euros sur la période 2021-2022. La police nationale participe à l'appel à projets du plan de relance à hauteur de 740 millions d'euros, ce qui apparaît comme une évolution importante permettant d'amorcer l'effort de réhabilitation de son patrimoine. Ce montant s'élève à 444 millions d'euros pour la gendarmerie nationale.

9. L'effort immobilier et en matière de moyens mobiles apporte une réponse à une préoccupation récurrente du Sénat . Le présent plan de relance doit toutefois impérativement s'inscrire dans la durée et être à l'origine d'une nouvelle dynamique, entraînant une hausse structurelle de la part des dépenses d'investissement et de fonctionnement dans l'ensemble des crédits pour assurer pleinement le maintien des capacités opérationnelles des deux forces.

10. Les précédents plans d'équipement dont ont bénéficié la police et la gendarmerie nationales ont été marqués par l'effet « stop and go », qui pourrait également caractériser le plan de relance . Par ailleurs, ce plan s'inscrit dans un contexte d'augmentation des dépenses de personnel , sous le double effet des recrutements et des mesures indemnitaires. Ces dernières, qui sont difficilement pilotables devraient poursuivre leur tendance à la hausse et créer à nouveau un effet d'éviction des dépenses d'investissement et de fonctionnement une fois le plan de relance passé, ce qui appelle donc à une prudence particulière.

Pour les crédits du programme « Sécurité et éducation routières »
et du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation
et du stationnement routiers »

1. L'année 2019 s'inscrit dans la continuité des chiffres historiquement bas de l'année 2018 (3 488 décès) avec 3 498 décès en France. Dans l' Hexagone , le nombre de tués 1 ( * ) en 2019 a ainsi fortement baissé par rapport au point haut atteint en 2016 (233 décès de moins) et se situe à un niveau équivalent à celui de 2018, puisqu'il est de 3 244 décès (4 décès de moins par rapport à 2018). Tandis que dans les Outre-mer , le nombre de tués connaît une légère hausse (+ 5,8 % par rapport à 2018) avec 162 décès dans les départements d'outre-mer et 92 dans les collectivités et pays d'outre-mer.

2. Le nouveau sous-indicateur 1.1.3 « nombre de tués hors agglomération hors autoroutes » (HAHA), créé au sein du programme 207, fait apparaître que ce réseau a enregistré 72 tués de moins entre 2018 (2 016 tués) et 2019 (1 944 tués).

3. Alors que le nombre d'accidents est stable par rapport à 2018 (- 0,1 %), le nombre de blessés hospitalisés enregistre une nouvelle baisse en 2019 (- 7,5 % par rapport à 2018). Un indicateur « blessés graves » ou « blessés hospitalisés » pourrait être utilement introduit dans le prochain projet annuel de performance.

4. Parmi les différentes catégories d'usagers les cyclistes représentent la seule catégorie dont la mortalité augmente tendanciellement et la seule où le nombre de décès en 2019 (187) est nettement supérieur à celui de 2010 (140).

Sur le programme 207 « Sécurité et éducation routières »

5. Les crédits inscrits sur le programme 207 « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » sont de 41,18 millions d'euros (soit une légère baisse de 4,1 % en AE et 3,3 % en CP par rapport à 2020).

6. Relancée en 2019, la réforme du permis de conduire vise une réduction du coût et des délais d'attente grâce notamment à la mise en oeuvre des 10 mesures présentées le 2 mai 2019 (augmentation de la durée d'apprentissage sur simulateur, conversion plus rapide du permis « boîte automatique » en permis classique, développement de la conduite supervisée etc).

7. Le délai d'attente médian impacté en 2020 par la crise sanitaire, retrouverait en 2021 son niveau cible de 42 jours. Quant à son coût moyen pour l'administration, parvenu à un point d'équilibre, il devrait se stabiliser à environ 65 euros.

8. Surbudgétées pendant plusieurs années, les dépenses d'intervention liées au « permis à un euro par jour » sont mieux ajustées en 2021. La prévision tient en effet mieux compte de la réalité des prêts financés et fixe l'enveloppe consacrée à ce dispositif à 2,8 millions d'euros (contre 6,55 millions d'euros en 2020).

Sur le compte d'affectation spéciale
« Contrôle de la circulation et du stationnement routiers »

Les recettes

9. Le produit total des amendes de la circulation et du stationnement est évalué à un montant inédit de 1,96 milliard d'euros (soit +6,7 % par rapport à la LFI 2020).

Les recettes des radars automatiques sont estimées à 809 millions d'euros (contre 729 millions d'euros en LFI 2020), elles se situeraient alors à un niveau proche de celui de 2017 (824,5 millions d'euros) avant le mouvement des « gilets jaunes ». Il convient cependant de noter que cette estimation repose sur des hypothèses qui à ce jour sont loin d'être réalisées : retour à un taux de disponibilité de 93 %, déploiement de 4 700 radars (dont 1 200 radars tourelles) et absence d'évènements extérieurs tels que la crise sanitaire et la période de confinement en 2020.

De leur côté, les prévisions des recettes d'amendes forfaitaires majorées et d'amendes forfaitaires hors radars augmentent à nouveau pour s'établir à 1 151 millions d'euros dans le PLF 2021.

10. Comme en 2020, le montant prévisionnel de recettes affectées au CAS se situe à un haut niveau. En effet, sur les 1 960 millions d'euros de prévision de recettes, 1 611 millions d'euros (soit 82 %) lui reviennent. Le reste des recettes (18 %) est consacré au financement de l'AFITF (278 millions d'euros), du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics ou privés (26 millions d'euros) et du budget général (45 millions d'euros).

11 . L'architecture du CAS est toujours aussi complexe . C'est pourquoi afin d'améliorer sa lisibilité le rapporteur propose de le réformer en simplifiant le circuit budgétaire : fusion des programmes 752 et 753 suppression des enchevêtrements croisés, réflexion à mener sur l'intérêt de conserver deux sections, ainsi que l'abondement au budget général, etc.

Le programme 751

12. Les crédits du programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière », les seuls pilotables, sont stables (- 1,2%) et couvrent les coûts relatifs au développement et au maintien en condition opérationnelle des radars et une partie de la subvention à l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI).

Le PLF 2021 s'inscrit dans la stratégie définie lors du comité interministériel de sécurité routière (CISR) du 2 octobre 2015 et réaffirmée par le CISR du 9 janvier 2018 réuni par le Premier ministre puisqu'il prévoit notamment un retour à l'objectif de 4 700 appareils .

13. Ainsi, l'action n°1 « Dispositif de contrôle » est dotée de 186,9 millions d'euros dont 57,55 millions d'euros en crédits d'investissement destinés notamment à l'acquisition de 500 nouveaux radars urbains et tourelles.

14. Conformément à l'objectif de la mesure n°2 du CISR du 2 octobre 2015, il est aussi prévu de poursuivre l'externalisation de la conduite des voitures radars pilotées par des prestataires privés avec un parc de 223 voitures radars externalisées au 31 décembre 2021.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 84 % des réponses étaient parvenues au rapporteur spécial pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » et 100 % pour le programme « Sécurité et éducation routières ».


* 1 Le nombre annuel de tués est le premier indicateur de performances (1.1) de l'objectif n° 1 « Mobiliser l'ensemble de la société sur la sécurité routière pour réduire le nombre d'accidents et de tués sur la route » du programme 207 « Sécurité et éducation routières » du projet de loi de finances 2021.

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