B. D'IMPORTANTES OPÉRATIONS INTERVENUES EN 2021 ET ATTENDUES D'ICI À LA FIN DE L'EXERCICE
1. Des dépenses qui porteraient la trésorerie du compte à un niveau exceptionnellement bas à la fin 2021
À la fin octobre, le solde du compte s'établit à près de 1 346,4 millions d'euros , soit un montant particulièrement faible par rapport aux niveaux habituellement constatés.
Ce solde résulte de la conjugaison de trois éléments :
- le report du solde arrêté à la fin 2020 , à hauteur de 2,46 milliards d'euros ;
- les dépenses effectuées depuis le compte, pour un montant de 5,1 milliards d'euros , essentiellement au titre l'achat d'actions Orano pour près de 1,8 milliard d'euros (cf. infra ) et de la dotation en capital de l'Agence française de développement pour 1,4 milliard d'euros ;
- les recettes enregistrées sur le compte , pour un montant de 4 milliards d'euros , constituées à près de 90 % de versements depuis le budget général.
Le tableau ci-après détaille l'exécution du compte depuis le 1 er janvier.
Exécution du compte d'affectation
spéciale
du 1
er
janvier 2021 au 31 octobre
2021
(en millions d'euros)
Solde au 31 décembre 2020 |
+ 2 455,1 |
|
Dépenses totales |
- 5 136,9 |
|
Détail |
Dotation en capital à l'Agence française de développement |
- 1 420 |
Achat d'actions Orano SA - auprès d'Areva et de la Caisse des dépôts et consignations |
- 1 781,9 |
|
Augmentation de capital d'Air France-KLM |
- 593,2 |
|
PIA 3 |
- 450 |
|
Autres dépenses |
- 891,8 |
|
Recettes totales |
+ 4 028,2 |
|
Détail |
Abondement du budget général en provenance du programme 365 pour la dotation en capital de l'Agence française de développement |
+ 1 420 |
Abondement du budget général en provenance du programme 367 pour « le financement d'opérations patrimoniales envisagées en 2021 » (sans détail supplémentaire) |
+ 1 000 |
|
Abondement du budget général en provenance du programme 358 pour la souscription à l'augmentation de capital d'Air France-KLM et l'abondement du fonds nucléaire |
+ 566,8 |
|
Abondement du budget général en provenance des programmes 422 et 423 au titre du PIA 3 |
+ 450 |
|
Retours PIA |
+ 248,4 |
|
Autres abondements du budget général |
+ 130 |
|
Autres recettes |
+ 213 |
|
Solde prévisionnel au 31 octobre 2021 |
+ 1 346,4 |
Source : commission des finances du Sénat, à partir des données transmises par l'APE
D'ici à la fin de l'exercice, l'Agence des participations de l'État anticipe plusieurs dépenses :
- de façon certaine, 400 millions d'euros seront décaissés pour financer deux opérations , à savoir une nouvelle tranche de souscription à l'augmentation de capital du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) à hauteur de 100 millions d'euros et un premier versement de 300 millions d'euros pour le fonds de transition 12 ( * ) ;
- de façon complémentaire, d'autres opérations pourraient intervenir sur le périmètre de l'État actionnaire, pour plusieurs milliards d'euros.
S'il n'est pas possible, pour des raisons de confidentialité, de préciser la nature ni les montants de ces opérations, deux éléments publics peuvent être indiqués :
- d'abord, en complément de l'augmentation de capital déjà réalisée, Air France-KLM a annoncé au marché le 6 avril dernier que « d'autres mesures visant à renforcer le capital du groupe sont actuellement à l'étude , plusieurs mesures devant être prises avant l'Assemblée générale annuelle de 2022 » 13 ( * ) ;
- ensuite, la prévision actualisée du compte résultant du second projet de loi de finances rectificative pour 2021, en cours d'examen par le Parlement, fait état d'un solde du compte négatif, à hauteur de 3,3 milliards d'euros , ce que détaille le tableau ci-après.
En l'état, ces dépenses ne seraient donc pas possibles, faute de trésorerie disponible . Des versements complémentaires du budget général seront nécessaires , avec deux enveloppes disponibles :
- 1 milliard d'euros au titre des opérations patrimoniales non liées aux conséquences économiques de la crise sanitaire, à partir du programme 367 ;
- 3,4 milliards d'euros au titre des opérations patrimoniales en lien avec les conséquences économiques de la crise sanitaire.
Évolution du compte de l'exécution
2020
à la prévision actualisée pour 2021
(en millions d'euros)
Exécution 2020 |
LFI 2021 |
LFR 2021 |
||||
Programme |
Recettes |
Crédits |
Recettes |
Crédits |
Recettes |
Crédits |
731 - Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
- |
14 005,7 |
14 421,2 |
14 005,7 |
5 917,7 |
9 221,2 |
732 - Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
- |
- |
100 |
- |
- |
0 |
Total au niveau du compte |
10 919,6 |
14 005,7 |
14 521,2 |
14 005,7 |
5 917,7 |
9 221,2 |
Solde du compte |
- 781,5 |
- 515,5 |
- 3 303,5 |
NB : la colonne « LFR 2021 » renseigne la prévision du compte au terme des modifications intervenues à la suite de la première loi de finances rectificative pour 2021 et du projet de loi de finances rectificative pour 2021 en cours d'examen par le Parlement.
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Selon les prévisions de l'APE, le solde du compte pourrait s'établir à 502 millions d'euros fin 2021, ce qui en ferait le niveau le plus faible de ces dernières années .
Le seuil prudentiel serait touché : le compte n'aurait pas les marges de manoeuvre nécessaires pour financer la moindre opération en capital au moyen de sa seule trésorerie.
Évolution du solde cumulé du compte depuis 2013
(en millions d'euros)
NB : solde prévisionnel en 2021 selon les projections transmises par l'APE.
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
2. Des dividendes au plus bas, résultat de facteurs structurels et conjoncturels
Les engagements pris par les entreprises du portefeuille en 2020 14 ( * ) se sont traduits par une chute des dividendes perçus par l'État au titre de son portefeuille de participations.
Après avoir atteint 331 millions d'euros en 2020 , en recul de 80 % par rapport à 2019, les dividendes devraient atteindre 1,9 milliard d'euros en 2021 , dont près de la moitié en titres.
Au-delà des conséquences de la crise sanitaire, comme le souligne le graphique ci-après, il faut bien y voir une tendance de fond, associée à l'attrition du portefeuille de l'État actionnaire.
Évolution des dividendes perçus
par
l'État depuis 2008
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
3. Deux interventions majeures de l'État actionnaire en 2021
En 2021, les dépenses du compte sur le périmètre de l'État actionnaire correspondent essentiellement à deux interventions majeures .
La première concerne directement la réponse à la crise sanitaire, puisqu'elle correspond à la recapitalisation d'Air France-KLM , décidée au printemps dernier par l'assemblée générale des actionnaires.
Dans ce cadre, l'État a décidé d'accompagner l'entreprise en transformant son prêt d'actionnaire en titres de dette subordonnée assimilée à des quasi fonds propres, pour 3 milliards d'euros, et en souscrivant à une augmentation de capital à hauteur de près de 600 millions d'euros.
À l'issue de cette opération, l'État français a conforté sa position d'actionnaire majoritaire du groupe aérien, détenant désormais 28,6 % du capital, pour 28,5 % des droits de vote.
Ce premier soutien, conjugué aux bons résultats du troisième trimestre, ne suffiront toutefois pas à restaurer le bilan du groupe : en l'état, les fonds propres restent négatifs à la fin de l'année 2021. Une seconde étape sera donc nécessaire dans les prochains mois , rendez-vous auquel l'État français devrait de nouveau être présent lorsque les conditions seront réunies.
La seconde opération s'inscrit quant à elle dans le sillage de la réorganisation de la filière nucléaire française initiée en 2015 et conduite entre 2016 et 2017. Dans ce cadre, une séparation des activités amont et aval avait été décidée, conduisant à distinguer trois entités :
- Framatome, cédé par Areva à EDF ;
- Orano, la nouvelle entité créée et recentrée sur le cycle du combustible nucléaire ;
- Areva SA, structure de défaisance chargée de gérer la mise en service de la centrale nucléaire d'Olkiluoto 3 en Finlande.
Pour cela, Areva SA avait été dotée de 40 % du capital d'Orano.
Depuis le début de l'année, l'État actionnaire a procédé à l'acquisition, auprès d'Areva SA, de titres Orano pour un montant cumulé de près de 1,8 milliard d'euros afin de lui permettre de disposer des ressources nécessaires pour apurer un litige avec EDF sur les conditions de cession de Framatome et mener à bien le chantier finlandais. Selon les informations transmises par l'APE, une mise en service du réacteur serait espérée pour la fin de l'année ou le début de l'année prochaine.
* 12 Le fonds de transition constitue un nouvel outil de réponse aux conséquences économiques de la crise sanitaire. Selon le projet annuel de performances du compte, le fonds de transition a pour objet d'investir au moyen d'instruments de dette, de fonds propres et d'instruments hybrides dans des entreprises touchées par la crise sanitaire afin de combler les besoins de financement persistants ou renforcer le haut de bilan des entreprises de taille significative particulièrement touchées par la crise mais qui n'ont pas, jusqu'à présent, pu être accompagnées par les aides d'urgence de manière adéquate. Pour cela, il pourra mobiliser jusqu'à 3 milliards d'euros, dont 1,2 milliard d'euros du fonds de développement économique et social (FDES) et 1,8 milliards d'euros du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
* 13 Voir le communiqué de presse du groupe Air France-KM du 6 avril 2021.
* 14 À l'exception de trois entreprises - la Française des jeux, Orange et Thalès - les entreprises du portefeuille coté de l'État actionnaire ont renoncé au versement de dividendes en 2020.